Chapitre 19

Write by Josephine54

Beverly


Je rentrai dans une maison silencieuse. Tout le monde dormait apparemment. Je me rendis aux toilettes pour me débarbouiller rapidement et me glissai sous mes draps.

Je me sentais épuisée, pourtant, j’avais de la peine à trouver du sommeil. La situation avec Virginie me désolait énormément. Elle semblait tellement à l’aise dans sa nouvelle vie et j'avais l'impression que notre complicité n'avait jamais existé.

Et maintenant, Arnaud... Je jetai un regard sur son lit. Il semblait si serein dans son sommeil.

Mon Dieu, comment aborder le sujet ? Et si tout se retournait contre moi une fois de plus, comme avec Virginie... Déjà qu'Arnaud était devenu un peu distant avec moi, et j'imaginais que quelques petits billets de temps en temps en était la raison. Il n'était pas particulièrement froid, mais il était distant. Évitant de manifester une certaine complicité avec moi.

Je m’efforçai de trouver le sommeil. La nuit porte conseil, dit-on.

Je me rendis à la fac le lendemain matin. Je voulais en parler avec Arthur. J'étais finalement heureuse d'être en couple avec lui. À ses côtés, je me sentais tellement bien. Il était toujours présent et me témoignait son amour au quotidien. En plus, j'avais enfin quelqu'un à qui parler, quelqu'un qui me comprenait, puisque je n'avais plus la même affinité avec Virginie, et avec Amanda, ce n'était plus trop ça.

- Ça va bébé, lança Arthur en se tournant vers moi.

Il fronça immédiatement les cils quand son regard se posa sur moi. Une autre particularité d'Arthur : il arrivait à deviner mes états d'âme sans que j'aie à ouvrir la bouche.

- Bonjour chéri, répondis-je en soupirant.

- Que se passe-t-il ? demanda Arthur d'une voix inquiète.

- On en parle à la pause, répondis-je.

Nous avions la pause à midi.

- On va manger quelque chose ? demandai-je à Arthur.

- Je n'ai pas particulièrement faim. Je préfère qu'on parle d'abord de ce qui te préoccupe.

- D'accord, acquiesçai-je.

On se rendit dans un coin assez retiré du jardin de l'université et on s’assit sur l'herbe.

- Comme tu le sais bien, hier, je me suis faite raccompagnée par Valéry. Il m'a raconté une histoire qui m'a particulièrement troublée. Mon frère Arnaud....

Je lui racontai dans les moindres détails ma conversation avec Valéry. Arthur m'écoutait religieusement. Après avoir fini mon récit, Arthur resta un long moment silencieux. Il semblait tout à coup perdu sans ses pensées. Était-il dégouté par ce que je lui racontais ?

- Tu sais, je pourrai lui parler, s'exprima enfin Arthur. Si cela ne te dérange pas, on pourrait se rencontrer et j'essayerai de le raisonner.

- Euh... c'est un peu compliqué, répondis-je d'un ton hésitant. Je ne sais pas s'il acceptera de venir avec moi.

- Et pourquoi donc ? s'exclama Arthur, la surprise dans la voix. Avez-vous des problèmes actuellement ?

J’hésitai un long moment avant de me décider à parler. Je lui expliquai donc que ma relation avec Virginie ne s'était pas améliorée depuis que son copain était venu à la maison. Je lui parlai ensuite de la pression que me mettait ma mère pour lui ramener un homme riche, comme notre voisine Déborah, comme Virginie maintenant...

- Pourquoi ne m'en as-tu pas parlé ? s'écria Arthur.

Des larmes se mirent à couler lentement de mes joues. La situation à la maison était devenue infernale pour moi. Maman me provoquait constamment avec la nouvelle vie de Virginie, me traitant d'incapable, d'idiote.

- Parce que j'en avais honte, chéri, dis-je pendant qu'Arthur prenait un mouchoir et essuyait mes larmes avec douceur. Le problème, c'est qu'Arnaud, même s'il n'a pas ouvertement choisi un parti, évite de se montrer avec moi.

- Je vois, répondit Arthur d'un air désolé.

- Comment fais-tu pour gérer toute cette tension ?

- Je ne sais pas bébé, je pense que l'amour des plus petits, Annaella, Kylian et James, m'aide à tenir la tête hors de l'eau. Et il y a aussi toi, continuai-je en lui faisant un faible sourire, merci d'être là pour moi.

- Tu n'as pas à me remercier, chérie, rétorqua Arthur. Je suis là pour toi.


Roman écrit par Justine Laure (page Facebook Plume de Justine Laure)


Il rapprocha ensuite nos visages et s'ensuivit un baiser plein de douceur et de tendresse.

- Je t'aime, murmurai-je contre ses lèvres.

- Je t'aime encore plus.

Il me serra ensuite très fort dans ses bras et posa ma tête sur sa poitrine.

- Essaie de le convaincre à me rencontrer. Tu n'as pas besoin de lui dire qu'il y aura une tierce personne. Vous n'êtes même déjà pas obligés de sortir ensemble de la maison.

- D'accord, chéri, répondis-je.

- On va y aller. Le prof doit avoir commencé le prochain cours.

Il se leva et m'aida à me relever. Il se saisit ensuite de ma main et m'entraina vers l'amphi où le cours avait effectivement débuté. Nous trouvâmes Amanda déjà installée. Elle est arrivée durant notre absence.


Arthur


J'étais installé dans ma chambre quand je reçus un appel de Beverly.

- Coucou bébé, décrochai-je en souriant.

- Salut chéri. J'ai pu parler avec Arnaud. On doit se retrouver ce soir à 18 heures.

- D'accord, je commence à 20 heures de toute façon.

Je me laissai choir sur mon lit après avoir raccroché. Quand Beverly m'avait parlé, il y a quelques jours, de la situation de son frère, cela avait résonné en moi tel un écho.

Beverly et moi nous étions énormément rapprochés ces derniers mois. Nous avions une relation quasi fusionnelle. Je l'aimais cette fille. Je l'avais dans la peau. Je savais qu'elle était celle avec qui je voulais passer le restant de mes jours.

J'étais certes très proche d'elle, mais j'avais tout de même des zones d'ombre, et je savais exactement le motif de mon silence. J'avais simplement peur de la décevoir, qu'elle ne me regarde plus du même œil, pire, qu'elle cesse de m'aimer. Virginie était une fille pure, honnête, intègre, et je craignais que mon passé l'éloigne de moi.

Mais je savais aussi qu'il était temps que je m'ouvre à elle, que je lui confie mes travers, pour qu'elle m'aime enfin pour ce que je suis, et non pour ce qu'elle pense que je pourrais être.

J'avais passé la journée dans un état d'anxiété extrême. 18 h était enfin arrivé. Je m'étais habillé et m'étais rendu au lieu de rendez-vous fixé par Beverly.

J'étais maintenant assis et les attendait. Je les vis traverser le seuil du local et mon cœur fit un bond. Ma petite femme était simplement une bombe et quand je pensais qu'elle était mienne, je ne pouvais empêcher mon cœur de crier sa joie. Je regardai attentivement le garçon qui l'accompagnait. Il devait être âgé de seize ans. Il était carrément la version masculine de sa sœur.

- Bonjour, dis-je d'un ton neutre à me levant.

- Bonsoir, répondit le garçon en me regardant avec attention.

- Bonsoir chéri, lança Beverly en me faisant une bise sur la joue.

Le garçon sursauta à la phrase de sa sœur. Il n'était apparemment pas au courant qu'il rencontrait le copain de sa sœur. Je changeai ensuite une franche poignée de mains avec lui.

- Arnaud, je te présente Arthur, mon copain. Arthur, Arnaud, mon frère.

- Enchanté Arnaud, lançai-je.

- Moi de même, répondit Arnaud en regardant ouvertement sa sœur d'un air interrogateur.

On se rassit tous les trois et un bref silence embarrassant s'installa entre nous. Une serveuse se rapprocha de nous et prit nos commandes. Quelques minutes plus tard, nous étions servis.

- Arnaud, j'ai voulu te rencontrer hors de la maison pour te parler d'un sujet délicat.

Son frère se mit immédiatement sur la défensive. Beverly prit une longue inspiration avant de poursuivre.

- Tu sais, j'ai appris certaines choses de sources sûres. J'ai appris qu'on te voit souvent trainer avec des personnes peu recommandables au quartier.

Arnaud sursauta à ces mots. Il avait certainement pensé que sa sœur le convoquait pour lui parler de leur situation familiale.

- On m'a fait comprendre que tu serais impliqué dans le vol qu'il y a eu il y a quelques semaines dans la maison des Mveng.

- Mais ce sont des mensonges, s'exclama Arnaud, d'un ton un peu trop vif, selon moi.

- Arnaud, je sais que c'est la vérité, insista Beverly.

- Qui t'a raconté ces balivernes ? lança Arnaud, en colère.


Roman écrit par Justine Laure (page Facebook Plume de Justine Laure)


- Je ne vais pas te citer de noms.

Elle ne voulait certainement pas créer des ennuis à Valéry, qui, lui, lui avait raconté tout cela avec de bonnes intentions. Qui sait ce que sa bande à lui était capable de faire à Valéry si son nom fuitait.

- Alors, c'est inutile d'en discuter, s'exclama Arnaud, en essayant de se lever.

Je lui saisis la main à cet instant. Il tourna un regard nerveux vers moi.

- Assieds-toi, s'il te plait. Nous ne nous connaissons certes pas, mais j'aimerais te raconter mon histoire.

Arnaud sembla hésiter un long moment avant de finalement retomber sur sa chaise. Il avait le visage fermé.

Je commençai mon récit, la voix mélancolique.

- Il y a un an de cela, j'avais à peine réussi au baccalauréat et je me demandais encore par quel miracle j'y étais arrivé. Je pense que le Très Haut m'avait doté d'une intelligence naturelle. J'avais certes du retard dans mon cursus scolaire, mais il avait toujours suffi de très peu d'application de ma part pour réussir mes examens.

Je pris un petit moment mon souffle, pour me donner une certaine contenance. La suite de mon discours n'est pas plaisante et j'avais peur de la réaction de Beverly.

- Tu sais, je proviens d'une famille pauvre, exactement comme la vôtre. Mon grand frère Gérard qui se trouve en France est celui qui nous prend en charge. Je passais mon temps à traîner avec des voyous. Il m'avait mis en garde à plusieurs reprises, mais j'avais décidé de n'en faire qu'à ma tête. Il m'avait alors demandé de me transférer à Yaoundé et de m'y inscrire en fac. Cela me permettrait non seulement de tout recommencer à zéro, mais cela me permettrait aussi de couper les ponts avec mes "amis". Je m'y étais opposé farouchement. Je me rappelle encore mes mots "Ce n'est pas parce que c'est lui qui paie tout qu'il va se permettre de diriger ma vie.". Pour lui prouver que j'étais capable de voler de mes propres ailes et que je n'avais absolument pas besoin de son argent, je m'étais encore plus lié à mes potes.

Je me perdis à nouveau dans mes pensées.

- Les résultats du baccalauréat étaient sortis il y avait peu et les vacances scolaires se déroulaient parfaitement pour moi. Je passais beaucoup de temps avec mes amis et nous passions une bonne partie de la soirée à boire, draguer les filles et à errer dans les rues. Mes potes étaient toujours vêtus de manière soignée et avaient des téléphones dernier cri. J’avais mon petit Motorola que m’avait envoyé mon frère de la France et je me rappelle encore à quel point j'avais été déçu et méprisant quand j'avais ouvert mon paquet. "C'est tout ? " avais-je demandé à ma mère. Maman avait manifesté de la colère, mais je n'en avais rien à cirer. " Je vais le garder, mais il n'avait pas à faire comme s'il m'envoyait quelque chose de valeur", avais-je insisté avec arrogance. Ma mère m'avait arraché le téléphone des mains et m'avait lancé un mauvais regard avant de rejoindre sa chambre.

Je sentis un frisson me parcourir quand mes pensées me portèrent à la soirée qui avait déclenché un déclic chez moi. J'étais assis au bar avec mes potes à siroter nos alcools.

- Mec, que comptes-tu faire de ton avenir ?m'avait demandé Achille.

Cette question m'était répétée sans cesse par mère, au point où j'avais commencé à l'éviter à la maison. Et voir mes potes me le demander, m'énervait au plus au point. J'étais sorti de la maison pour un peu de répit, mais là, les gars s'en mêlaient, et ce n'est pas comme s'ils avaient un brillant avenir pour me poser une telle question.

Je me perdis à nouveau dans mes pensées.

- Mec, sois réaliste, jusqu’à quand comptes-tu continuer ainsi ? Ton frère à un moment se mariera et penses-tu qu’il va toujours s’occuper de toi ainsi ? Il devra se consacrer à sa nouvelle famille. Il faut que tu prennes ton envol, mon ami Achille l'avait dit en me regardant droit dans les yeux, comme s'il essayait de jauger son effet. Il avait ensuite pris une petite pause avant de reprendre. "Nous avons un grand bizgo (business). Rejoins-nous et tu ne vas pas le regretter". J'avais insisté pour savoir de quoi il s'agissait. Il avait préféré rester vague, me faisant savoir qu'ils m'expliqueront tout sur place.

Manipulation sentime...