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Ecrit par Annabelle Sara

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Claire avait décidé de me faire confiance pour l’aider à se débarrasser de son oncle. Et j’avais un plan, sauf qu’il m’avait fallu ruser pour que ça marche. Etant donné le fait que je suis l’avocat de son oncle et de sa boite je ne pouvais pas agir contre lui alors il m’a fallu employer la meilleure arme d’un juriste.

Le réseau !

Mon réseau était l’une des choses que j’activais très rarement, pour faire négocier, j’allais direct comme un soldat en guerre. Mais dans ce cas, je ne voulais pas agir dans l’intérêt de mon client et cela ne devait en aucun cas se faire savoir. Ni par mon client et en aucun cas par mon employeur, sinon je risquais de finir à la rue blacklisté à vie.

Quand on est un bon juriste il faut savoir garder un poker-face, on ne doit jamais lire, ni la rage ni le dédain, ni le dégoût dans votre regard.

Cela pourrait annoncer votre jeu et vous faire perdre une négociation ou alors vous faire rater une opération de force contre un client. 

Je regardais Pierre Anaba sans rien laisser paraitre ! De ce que je savais de cet énergumène, je me félicitais de ne pas lui encore avoir arraché la tête à coup de poing dans la gueule.

Il est d’une telle arrogance qu’il ne s’imagine même pas que je suis en ce moment, pendant que nous parcourons le contrat de fusion de son entreprise ou plutôt celle de son frère, le père de sa nièce qu’il viole depuis des années.

- Alors là je suis impressionné, Me Tsafack vous avez fait une belle proposition, me lança le PDG de US SARL. Pierre tu t’es déniché un bon négociateur.

Il avait le regard froid même s’il me faisait ce compliment. Voilà déjà 3 heures que nous sommes ici, 4 hommes installés dans le bureau de Pierre Anaba.

- C’est le meilleur dans son domaine, répondit Pierre en me faisant une tape à l’épaule.

- Je vois ça ! Je dois dire que ce contrat est en béton mais… J’ai une question avant de poursuivre, un éclaircissement quant à certaines transactions assez particulières que j’ai vu dans les comptes…

- Oui, oui si tu as une question !

- Il y a des versements hors compte d’exploitation qui ne ressortent pas tes comptes mais que l’on retrouve dans les frais généraux, j’aimerais savoir… tu paies des pots de vin ?

De but en blanc la question avait fusé. La tension dans la pièce fut instantanée.

Ce que j’avais fait c’était quitte ou double soit je réussissais à sortir Claire et sa famille des griffes de ce malade soit je sortais d’ici sans contrat de fusion et il me faudrait expliquer à mon patron ce que j’avais fabriqué sans parler de Claire qui risquait pire. 

- Je ne comprends pas !, fit Pierre en se tournant vers moi alors que je faisais mine de ne pas comprendre.

- C’est une transaction tout ce qu’il ya de plus normal…

- Eric s’il te plait ! Il n’y a rien de normal dans de l’argent qui sort sans destination claire, intervint mon compère avocat.

- Je ne veux pas être mêlé à une affaire qui a ce genre de compte obscure, alors je voudrais une réponse, déclara son client.

- Ecoutez ce ne sont pas des pots de vin. Tous nos contrat sont règlementaires…

- Alors expliques moi !, insista Le PDG de US SARL.

Pierre marqua un moment de pause évaluant la réponse qu’il allait donner.

- C’est une rente…

- Tu paies ta femme avec les fonds de ta boite ?, s’exclama l’homme face à nous visiblement choquée.

- Non ! Je ne suis pas fou… C’est pour mon frère qui est malade je m’occupe de son traitement donc tous les mois je lui verse une rente !

Mon cœur s’allégea en l’entendant avouer cela. Plus que ce que j’imaginais cet homme avait besoin à tout prix de l’argent issu de cette fusion…

- Comment ?, demanda mon compère avocat. En tant que qui ? Il a pourtant perdu ses droits en vendant ses parts… Ou alors il y a quelque chose que vous voulez nous expliquer ?

Ah les avocats, quand vous en avez un au fesses, je vous assure vous êtes mal barré. J’observais la scène et je voulais mettre mon grain de sel.

- Pierre on leur explique ?

Il me regarda sans répondre, on voyait les rides autour de son nez se durcir.

- Ecoutez ! Je n’ai pas… cette rente représente les parts de mon frère…

- Il sait que vous avez acheté sa boite avec son argent ?, demanda Le PDG en face de nous.

- Ecoutes que je t’explique Alfred…

- Nous n’avons pas besoin d’en savoir plus !, le coupa mon confrère. Mr Belinga nous ferions mieux de nous en aller…

- Non ! Attendez, on peut juste dire que c’est sa rémunération en tant qu’associé de la boite !

- Associé principal, précisa mon confrère. Parce qu’il a encore 70% de cette boite et si c’est sa rémunération nous le voulons à cette table pour négocier avec nous…

- Il est malade il ne peut pas !, répondit Pierre paniqué.

- Il doit avoir quelqu’un pour le représenter ! Si vous n’emmener pas votre frère ici pour que cette négociation se fasse légalement nous arrêtons tout nous n’avons plus d’entente et vous pouvez tirer un trait sur cette fusion.

L’air fut suspendu dans la pièce tout le monde attendait la décision de Pierre.

- Mr Anaba, Nous ne traiterons qu’avec votre frère ! Il est le propriétaire légale de cette boite, en procédant à la fusion vous aurez toujours vos 30% de la transaction correspondant à votre part de la boite.

- C’est à toi de voir je ne vais pas sortir de l’argent aujourd’hui et risquer de voir un des fils de ton frère débarquer pour me créer des problèmes…

J’espérais en les écoutant que le besoin d’argent de Pierre Anaba était plus important que son besoin d’avoir de l’emprise sur la famille de son frère ainé.

- Je ne vois pas comment résoudre…

- Bon je crois qu’on s’est tout dit, commença Alfred Belinga en se levant de la table de négociation.

- Attends ! Alfred, attends, sa fille travail pour moi, son père… Elle peut représenter les intérêts de son père !, intervint Pierre en posant une main sur le bras de son partenaire. Donne-nous juste le temps de lui faire signer des documents pour qu’elle puisse le représenter dans cette transaction.

Le PDG de US SARL, se tourna vers son avocat et ils hochèrent la tête d’un air entendu.

- Tu as jusqu’à vendredi pour que cette fille soit assise à cette table pour représenter son père, passé ce délai je ne m’installerais plus ici pour que tu te foutes de ma gueule.

Il avait besoin de cet argent, me lança la petite voix dans ma tête.

La seconde partie à la table sortie du bureau laissant un Pierre Anaba furieux. 

- Comment c’est arrivé Eric ? Comment ils ont eu mes comptes ?

- C’et une fusion Mr Anaba, ce n’est pas comme si ils n’allaient pas exiger vos comptes et je vous conseillerais de négocier rapidement avec votre frère pour trouver un point d’entente en priant qu’il ne vous fasse pas un procès. disais-je calmement.

Il s’installa derrière son bureau et appela Claire, elle entra sans tarder, en levant les yeux sur elle je me disais qu’elle devait rester calme et surtout savourer cette victoire qui se dessinait.

- Prends place Claire, il faut que je te parle !, fit-il.

- D’accord !, répondit-elle.

- Voilà ! Il faut que tu fasses signer une procuration à ton père, nous sommes dans une transaction importante avec ce type et sa boite et j’ai besoin de l’accord de ton père pour la vente comme il ne peut pas le faire tu vas devoir le faire à sa place…

- Attends Tonton, je croyais que papa n’avait plus de droit sur la boite alors pourquoi avez-vous besoin de son accord ?, demanda-t-elle calmement.

- Non mais tu me vois la sorcellerie ? s’écria-t-il avec rage. Donc maintenant tu me questionne ? J’ai dis tu vas donner un document que notre avocat va te donner et tu vas faire signer par ton père !

Il criait tellement fort que Claire sursauta sur son siège, j’ai serré les poings pour ne pas réagir. Je la savais forte je l’avais coaché en lui disant ce qu’elle devait faire et comment elle devait le faire. Et elle savait qu’elle pouvait me faire confiance. Je lui ai lancé un regard pour lui dire de ne pas lâcher.

- Je ne donnerais rien à mon père ! Tant que tu ne m’expliques pas comment tu as encore besoin de lui alors qu’il t’a vendu ses parts… Et que tu nous fais payer l’air que nous respirons pour cela, dit-elle calmement.

J’étais fier d’elle.

- Claire ne me pousse pas à bout !, la menaça-t-il. Tu sais de quoi je suis capable.

- Oui… Oui je serais exactement de quoi tu es capable, mais je me répète je ne ferais rien signer à mon père si tu ne t’explique pas !

- Votre père est toujours propriétaire de la boite !, ai-je coupé cours en me dressant devant Pierre.

- Eric qu’est-ce que vous faites ? Vous êtes mon avocat !

Il comprenait que je n’étais pas de son coté et que je n’allais pas laisser passer cela.

- C’est la boite de votre frère qui est notre client pas vous, Mr Anaba ! Donc je vous conseillerais d’expliquer clairement la situation à sa fille si vous voulez que cette transaction se déroule bien.

Il m’observa un moment, puis se tourna vers sa nièce. Je ne sais pas pourquoi il avait autant besoin d’argent mais je sentais qu’il n’avait pas d’autre choix que de s’exposer.

Il lui expliqua que son père était toujours propriétaire de la boite et qu’il n’avait pas le droit de vendre la boite sans son accord.

- Attends la rente que tu lui versais c’était quoi ?, demanda Claire.

- Je…

- Ça ne venait pas de ta poche ?

- Non… c’était la rémunération en tant que propriétaire, déclara son oncle calmement. Ecoutes, j’ai besoin de l’argent de la transaction…

- Tu n’auras rien !

La fermeté dans la voix de sa nièce le fit tressaillir.

- Tu crois que parce que je t’ai avoué que je suis en position de faiblesse face à ton père j’ai besoin de ton avis ?

- Tu n’es pas en position de faiblesse face à mon père tu es en position de faiblesse face à moi !, dit-elle en se levant. 

La lionne qui couvait sous cette tendre chaire se libérait enfin de ses chaines. Claire regardait son oncle droit dans les yeux. La tête haute, portant avec fierté sa couronne de reine.

- Papa m’a déjà donné les pleins droits sur ses parts de l’entreprise ! Il n’y croyait pas quand je lui ai dit ce que tu as fait ! Tout ce que  tu as fait… Après toutes les horreurs que tu nous as fait vivre ma famille, mon père et moi tu crois que je vais faire comme si je n’ai pas compris que je tiens ta vie dans ma main ?

- Claire…

- Non ! Tu vas signer ta démission, je l’ai posé ce matin sur ton bureau et partir d’ici, si j’ai envie de te donner l’argent sur tes parts je le ferais, si je décide de ne pas te porter plainte ça reste ma décision ! Mais ce que je veux tout de suite c’est que tu signe cette lettre et dégage de l’entreprise que mon père a bâtie à la sueur de son front !

Regarder une femme prendre le pouvoir est autant jouissif que de voir une amante qui prend le dessus sur vous et vous chevauche avec élégance et assurance. 


Journal intime d'un...