1ere Partie
Ecrit par delali
LE DOUTE
Enfin le moment tant attendu arrive… je suis sélectionnée pour la résidence d’écriture. C'est à Abidjan en Côte D'ivoire. On nous donne un lieu de rassemblement pour nous rendre à notre hôtel sis à Marcory. La résidence, n’est pas un hôtel 5 étoiles, mais le confort y est ; chacun à sa chambre, c’est spacieux, coquet et ça va…
Le jour de la première séance de travail, je me prépare, je me fais toute jolie, je suis très contente de pouvoir publier mon roman, il était temps ! Quand j’y repense, à toutes ces fois où je me suis longtemps dérobée ; à ces fois où, assise sur mon petit bureau, j’ai été atteint par le syndrome de la page blanche ; bref ! J’en ai bavé, mais jamais je ne me suis découragée ; et le résultat, le voilà, le fruit d’un dur labeur...
En sortant de ma chambre, je sens que le déroulement des événements de la journée se passera bien ; tout le monde se réunit dans la grande salle prévu à cet effet ; les séances de discussions, les pauses déjeuner, etc.... Tout est nickel ! J’ai le sourire aux lèvres, je me sens revalorisée en quelque sorte. En soirée c’est chacun qui regagne sa chambre. Arrivée devant la mienne, et au moment de sortir ma clef, elle tombe… en me baissant pour la ramasser, j’entends des pas, je me relève clef en main et je regarde la personne qui vient vers moi ; je suis comme électrocutée sur place, même si je ne le laisse pas paraître… un bel homme, aux allures d’un apollon fait son apparition ; sportif, 1m80 ou 75, teint bronzé, les cheveux noirs, mais alors ses yeux… de beaux yeux d'un marron vitreux si j’ai bien remarqué.
Je me reprends rapidement, pour pas qu’il remarque mon trouble et mon attitude. Il passe à côté de moi et me frôle presque ; je l’entends dire d’une voix douce…
-Bonsoir !
Surprise, je lui réponds alors de la même façon…
-Bonsoir !
Il sort également sa clef, il la fait tourner ; sa chambre est juste à côté de la mienne ! « Waouh » Me dis-je intérieurement. Je fais vite d’ouvrir la mienne et de m’enfermer vite fait. J’ai encore le souffle coupé, je me fais de drôle d’idées dans la tête et je prie de tout mon cœur qu’il soit célibataire…
-En voilà un cœur à prendre ! Dis-je l’air complètement bébête.
N’allez par le croire, je ne suis pas une fille facile, loin de là ; des rêves plein la tête j’en ai ! Des fantasmes j’en ai ! Mais je ne suis ni une fonceuse, ni une allumeuse !
Je suis tout simplement Blanche Kpessou. Je suis béninoise, et je viens de boucler mes 26 ans. J'ai juste quittée mon Cotonou natal pour vivre mes rêves, celui de l'écriture. Et si un autre comme celui de mon chevalier servant peut s'y ajouter, je n'y verrai franchement pas d'inconvénient.
Je finis par prendre une bonne douche et je me mets vite fait au lit ; je traînasse un peu devant la TV ; il faut bien profiter de tous ces petits avantages que nous offre cet hôtel… quand je vais appeler les miens, ils seront bouche bée ; je commence à tomber de fatigue et je me promets de les appeler demain…
Le matin au réveil, je suis de bonne humeur. J’enfile une belle tenue comme toutes celles que j’ai réservées. Je me suis offert ce petit privilège là, celui de me constituer une belle garde-robe, rien que pour cet événement…
-On ne vit pas deux fois comme on dit ! La vie c’est devant ! Dis-je en m’exclamant en haute voix, et tout en me regardant devant la glace.
J’admire mes formes ; elles sont assez plantureuses ; j’ai très souvent du succès auprès de la gente masculine, mais je n’ai pas un si grand palmarès. Ma dernière relation date d’il y a 3 ans et j’avoue que je n’avais pas tort sur tous les plans ; j’ai toujours tout fait pour être correcte et me comporter dignement avec mon ex ! Mais ce dernier avait les gros yeux ! En gros, ce n’était qu’un chasseur de prime, un collectionneur, un tombeur ! Je ne voyais rien ; j’ai toujours fermé les yeux jusqu’à ce que je me rendre compte que le salaud se tapait ma meilleure amie… depuis lors je me suis jurée de ne plus me faire prendre, quoi que… ça fait 3 ans que je subis ce genre de sevrage ; 3 ans que je ne me laisse pas draguer, 3 ans que je ne regarde plus aucun mec…alors aujourd’hui, j’ai quand même le privilège de me laisser aller un tout petit peu…
-3 ans de jachère, j’ai géré et digéré ! Il est temps de passer à l’action ! Je me laisse juste aller et divertir un peu ! Ya quoi ?
Je suis en retard ce matin ; à force d’avoir trop cogité devant cette glace et à m’interroger sur le pourquoi du moment et le pourquoi à propos de ces hommes, je me presse, je hâte le pas et je tombe sur qui ? L’homme aux yeux couleur noisette ! On se croise une fois de plus dans ce même couloir ; il veut lui aussi hâter le pas, mais il se ravise aussitôt lorsqu’il me voit. Il me dit encore…
-Bonjour !
Je lui réponds par un petit sourire en coin de la même façon tout en continuant mon chemin. Je rejoins les autres pour le petit déjeuner. On s’attable, et toute à ma grande surprise, je vois le bel homme assis à une table voisine ; il est avec un autre groupe de personne. Il est presqu’assit en face de moi et jamais il ne manque une occasion de me dévorer du regard. Je souris discrètement, parfois je parviens à soutenir son regard avant de détourner timidement mon visage. Nous jouons à ce jeu aussi longtemps que possible, tout en se focalisant sur l’essentiel des travaux. Ce n’est qu’en fin d’après-midi que moi et mon groupe on se sépare. Je constate que lui aussi et son groupe font de même… on se lance un dernier regard et je le vois disparaître avec ses pairs. Après ce jour, nous ne nous sommes plus revus tout le reste de la semaine…
Le samedi soir, c’est quartier libre ; allongée sur mon lit, je viens de terminer ma conversation avec les miens au téléphone; on a papoté pendant plus de 45 minutes ; après avoir raccroché, j’entends frapper à la porte ; j’ouvre et, surprise ! Le bel homme aux yeux noisette !
-Bonjour… lance-t-il. Euh…désolé ! J’ai eu une belle apparition en début de semaine et après plus rien, je me suis inquiété !
-Une apparition ? Je lui demande.
-Oui, vous !
Je souris timidement…
-Vous êtes une belle apparition ! Vous ne le saviez pas ? En plus vous êtes divine quand vous souriez !
-Vous êtes un charmeur dis donc ! Lui ai-je répondu.
-Non en fait vous ne me laissez pas le choix ! Que diriez-vous de prendre un verre avec moi ?
J’hésite un peu, je roule des yeux, je fais celle qui est très affairée et qui se donne des airs, mais à la fin j’accepte !
-Ok ! C’est d’accord !
Assis donc à la terrasse de ce bar restau, on échange…
-Comment tu t’appelles ? Me demande-t-il.
-Blanche ! Et toi ?
Je lui renvoie la question, il me répond…
- Junias !
On pousse la causette plus loin, et quelques minutes plus tard on se découvre en profondeur…
-Je suis là pour le travail ! Me dit-il. J’en ai pour environ six mois ici, avant de retourner dans mon pays ! Je suis célibataire !
-Moi je suis là pour la résidence d’écriture ! J’en ai pas pour longtemps ! Et je suis également célibataire !
- Oh ! S’exclame-t-il. Je parie que tu es très courtisée pas vrai ?
Je ne lui réponds pas directement, mais mon sourire en dit long sur toute la ligne.
Deux ou trois jours plus tard on finit par devenir bons voisins, puis bon amis. Les invitations fusent, à tous les niveaux. Un soir, il m’a invitée danser, et pendant ce slow, j’ai compris et j’ai vite interprété ce que voulait dire le langage corporel ; alors que nos corps se touchent, il se met à m’embrasser… huuum !!! Franchement j’aime ! J’aime ! Je ferme les yeux et je savoure le moment… sur le retour, il me raccompagne devant ma chambre ; il s’attarde un peu ; je me domine pour ne pas céder tout de suite ; je lui demande alors ce qu’il attend…
-Toi ma belle !
- En toute franchise, c’est juste pour un soir ? Qu’est-ce que tu as en tête ?
-Je recherche la perle rare qui voudrait m’accompagner partout où j’irai !
-Un bon parleur toi !
Consciente du baratin, alors qu’il a une main adossée juste au-dessus de ma tête, il ne me laisse pas trop réfléchir ; en même temps je ferme les yeux, il en profite encore pour me lancer un bécot… nous le savourons bien tous les deux. Je résiste un peu, puis j’interromps brutalement cette effusion si brusque et je le renvoie dans sa chambre… il se laisse faire en douceur et marche à reculons… il me rend son sourire enjôleur ; les mains dans les poches, il me dit tendrement…
-Tu dors bien ! Si jamais tu changes d’avis, ma porte est ouverte !
Je ne lui réponds pas, je me contente de lui lancer un regard méfiant et plein de défi. La nuit je ne dors presque pas ; il est 1h du matin quand je me lève d’un bond…
-Putain ! Qu’est-ce que je fais ? Qu’est-ce qui m’anime comme ça ! Bof ! Tant pis je fonce, je ne perds rien, mais à une heure pareille ? C’est quand même dément !
Je sors de ma chambre à pas de loup ; le couloir est bien désert et silencieux ; normal il se fait bien tard ; je me donne un certain faux courage qui m’amène à me retrouver devant sa porte ; je prends une forte inspiration… non … je compte jusqu’à 5 avant de frapper…
-Un, deux, trois, qua…
Mais non ! Le gugusse me prend de court ; il avait déjà bien ouvert avant que je ne finisse de compter, ma main formée en poing et sur le poing de frapper tout en étant restée immobile…
-Ah ! Tu es là ?
-Euh… non… je…
Trop tard ; il m’avait déjà attirée vers lui ; prise dans ses filets, je me laisse prendre en bonne et due forme ; on se tortille tous les deux sur place ; il resserre son étreinte tout en écrasant violemment sa bouche contre la mienne…
-Moi aussi je sortais justement pour te dire que … je … n’arrivais pas à te chasser de mes pensées ! Me dit-il.
-Tu… tu crois que je corresponds à la perle rare que tu cherches ?
-Oui ! me répond-t-il avec assurance.
Il m’embrasse, m’enlace très fort. Je fais vite d’écourter ça une seconde fois de plus et je lui dis…
-Dans ce cas dois-je prendre un tel risque ? Je lui demande.
-Pardon ?
-Si je suis ta perle rare comme tu le prétends, j’aimerai savoir que je ne fais pas fausse route !
-Laisse-moi faire, et observes ! Laisse-toi aller tout simplement !
Je l’ai finalement écouté…
Le lendemain, j’ai l’esprit un peu troublé par tout ça, mais je me sens encore plus revivre…oui je sais, c’est un peu trop tôt, mais rassurez-vous, on n’est pas allés plus loin ; on a papoté, on s’est bécoté et on s’est séparés aux environs de 3h 30 du matin…j’ai pu fermer l’œil, enfin ! Je n’avais que son visage dans mes pensées, la sensation si douce de ses lèvres dans mon esprit ; j’ai pu quand même fermer l’œil, mais pas assez.
Le rythme est bon et il bat son plein pendant cet atelier de travail ; tout se passe bien en journée, et le soir c’est rebelote ; notre idylle continue ! Mais je m’arrange toujours à ne jamais passer la nuit dans sa chambre ; et puis, on n’est pas encore mariés. Mais tout semble aller si vite, je commence à flipper un peu…il me rassure dans ce sens…
-Qu’est-ce que je dois faire pour t’avoir avec moi tout le temps ?
-Tu es sérieux ? On ne se connait que depuis 1 mois ici et…
-C’est ce que nous ressentons l’un pour l’autre qui compte ! Ne tiens pas compte du temps !
-Es-tu prêt à rencontrer ma famille ? Mes parents ?
-Bien sûr ! Ensuite on fera quelque chose de symbolique, on va sceller notre union et après on s’achète une maison et ensuite on fait des bébés !
-Tu es drôle ! C’est inouï tout ça !
Ca l’était vraiment ! puisqu’au bout de six mois on a fait l’essentiel ; il a demandé ma main et quatre mois après, nous célébrons notre mariage en grande pompe au bled, avec toute ma famille et la sienne, sans oublier ma siamoise de soeur d'enfance, Blandine. Nous n’étions pas au bout de nos surprises lorsque je découvre que je suis enceinte !
Je ne suis plus retournée chez mes parents après ça ! Lui non plus ! On a jeté notre dévolu dans cette ville magnifique ; on a conclu qu’elle nous a portés chance à tous les deux…notre plus grand rêve est celui d’acheter la maison de nos rêves, une maison qui respirera le bonheur, la joie de vivre et surtout beaucoup d’amour…
Ma mère fait le déplacement et reste à côté de nous. Le contrat de mon chéri arrive à son terme bientôt et il veut que j’accouche chez lui, dans son pays. Comme mon roman est enfin paru, j’ai maintenant le statut d’artiste et j’ai pu facilement obtenir le visa. On prend l’avion ensemble. Une fois là-bas chez lui, à Pretoria en Afrique du Sud, on apprend que j’attends des jumeaux. Je suis folle de joie, mon chéri me câline tellement, sa famille m’adore, surtout que je vais agrandir la famille. Je viens à terme et j’accouche d’un garçon et d’une fille. Je les prénomme Karel et Kristen. Je ne sais quel autre prénom, leur papa voudra ajouter. C’est le bonheur presque parfait…
Mes enfants ont déjà six mois, et les voir grandir me donne une très grande satisfaction. Je trouve un bon éditeur et je commence à publier mes écrits. A en croire qu’ils me portent chance. Grâce à mes économies, je fais venir, ma mère et mon père pour le mariage civil. Un an après le mariage, je mets mon troisième enfant au monde, Liam. Cette fois ci, c'est Blandine qui reste avec moi tout ce temps. Blandine et moi, sommes amies inséparables depuis l'enfance, si bien qu'on nous surnommait les siamoises. Même mon époux est persuadé que nous sommes soeurs de sang. On se disait tout et rien, nous sommes toujours restées proches. Mais elle se décide de rentrer en toute vitesse, je ne comprends pas pourquoi…
-Je dois m’en aller ! J’ai trop de choses à régler à la maison ! Tu sais que je dois retourner à la boutique.
-Oui ! Mais ta gérante est là et tu m'as dit que tu lui fais confiance. Tu peux encore rester pour un ou deux mois !
-Ecoute ! J’ai…
Nous sommes interrompues par l’arrivée brusque de mon chéri. Il est constamment en voyage, mais son amour et sa tendresse m’aident à ne pas me rendre compte de son absence…
-Ah belle soeur chérie ! Tu veux déjà partir ? lui demande-t-il tout en s’approchant de moi et en me câlinant tendrement.
-Euh… oui ! Je dois …
-Non Blandine …reste ! Reste encore ! implorai-je.
-Laisse ta soeur partir ! Les enfants sont déjà un peu grands maintenant ! Liam a presque un an !
J’ai fini par céder ; je ne voulais pas qu’elle s’en aille au fond, mais je n’avais pas le choix…le soir de son départ, elle est restée muette ; elle paraissait en même temps craintive ; elle n’a pas cessé de prier tous ces derniers jours ; alors je saute le grand pas en lui posant la question de savoir pourquoi elle a changé depuis tous ces dernier jours avant de la laisser partir ; mon chéri s’est proposé de l’accompagner à l’aéroport…
-Blandine ! Tu es toute silencieuse. Ces deniers temps tu m’as parue si lointaine, et craintive !
-Tout va bien ma Blanche !
Pendant qu’elle m’embrasse, elle fait vite de me murmurer à l’oreille…
-Fais attention, je vais t’appeler et te dire quoi faire…en attendant joue le jeu !
-Quoi ? Lui demandai-je interloquée.
-Non ! Ca va ! Je te fais signe à mon arrivée !
J’ai juste secoué la tête, mais en fait je n’ai rien compris. Un coup j’ai vite fait de banaliser ses propos, pensant qu’elle se faisait une fixation à propos d’un détail qui l’aurait marqué sur je ne sais quoi précisément. Il est près de 20h et je mets tous les gosses au lit avant de m’affaler sur le mien ; je prends quand même la peine de envoyer un message à ma mère, question de lui faire savoir que Blandine est partie. J'écris aussi à Blandine, pour savoir si elle a déjà embarqué ou non…
« Bon voyage ! Tu liras certainement ce message à ton arrivée, et tiens moi au courant ».
Une heure de temps après je me suis assoupie ; à mon réveil, je constate que mon téléphone clignote ; je regarde aux alentours, mon chéri n’est pas encore rentré…je lis le message ; il s’agit de celui de Blandine …
« Ma soeur! J’ai vu des choses, mais j’avais la bouche fermée, chez toi là-bas je ne pouvais pas m’exprimer ; il m’a fermé la bouche ! Fais attention je t’en supplie ! Quitte cette maison et va te refugier avec les enfants ailleurs ! Ce type est très dangereux ! J’ai découvert des choses horribles ! En gros, ton mari, c’est le diable en personne ! »