35. Le dénouement

Ecrit par SSS

******* Un mois après les événements********

…….. Yani Balka……..

Hum la vie…

La vie est une succession de hauts fulgurants et lumineux et de bas profonds, sombres et douloureux.

Les vents de la mer vont et viennent, le ciel est souvent lumineux mais parfois il s'assombrit.

 Quand nous vivions dans la rue il y a environ 2


ans, ma mère nous disait à mon frère et moi : «  La vie n'est pas un fleuve tranquille » . Cette affirmation était vraie pour moi à l'époque mais aujourd’hui elle prend tout son sens. Je pensais déjà avoir tout vu, avoir ressenti le maximum de chagrin mais c’est maintenant que je connais la signification du mot « douleur ». Un sentiment de déchirement profond, si profond que le monde autour de soi n'a plus aucune valeur, que la vie perd tout son goût. C'est un cauchemar éveillé que je vis. Je ne mange plus, je ne dors plus, j'ai relégué mon travail au dernier rang. Ma mère est revenue au pays pour nous soutenir mais hélas, le mal est tenace.

On est un samedi. Un samedi noir, aussi noir que les trois autres qui l'ont précédé. Je suis au cimetière laïc du centre ville. Il y a plein de gens vêtus de noir autour de moi qui pleurent, qui gémissent, qui se lamentent. Je suis au milieu d'eux mais j’ai déjà tellement pleuré de toutes les façons que le robinet de mes yeux a tari. Mon cœur est vide, ma tête pèse des tonnes.

Je regarde le tombeau. Il est marbré, magnifiquement décoré, bien entretenu. Mais à quoi bon ? Cela efface t-il la douleur ? Cela remplit-il le vide ? Ces décorations ne sont que des apparats, des camouflets. C'était juste pour contenter les uns et les autres. 

Je m’agenouille devant le tombeau et y dépose une énième gerbe de fleurs. Est-ce qu’il sait même que je dépose des fleurs sur sa tombe ? 

Je sais que les morts sont morts. Je sais que tu ne m'entend pas. Mais je tiens quand même à te parler. Je tiens d’abord à te remercier. Merci pour le soleil que tu as été dans ma vie, pour la chaleur que tu m'a insufflé quand les vents de la vie me faisaient greloter , pour l'abri que tu as été en période d'orage. Sans toi je n’aurais pas pu m'en sortir. Tu as été mon pilier, mon second souffle de vie ; tu as été jusqu'à sacrifier ta vie pour que je sois là actuellement. Je t'en serai éternellement reconnaissante. Sache que celle qui t'a arraché à nous si brutalement est maintenant derrière les barreaux et attend d'être jugée. Dans quelques jours, son sort sera fixé par la justice. Elle aurait dû être là à ta place, à croupir sous une tonne de terre mais la vie est injuste et nous n'y pouvons rien, même si ça m'indigne.  Mon amour, tu seras dans mon cœur et dans mes pensées pour toujours. Je t'aime mon Maxime, et je t'aimerai éternellement. 

Les larmes reviennent inonder mon visage. Je pleure ainsi pendant une bonne dizaine de minutes. Je m'apprête à me lever quand je sens une main se poser sur mon épaule.

Yani. Ça va ?

Je me retourne.

Moi : Eugenio ? Je te croyais à l’hôpital. Je voulais venir te voir en soirée.

Lui : J’ai demandé à sortir plus tôt. Je voulais venir me recueillir sur sa tombe…

Il baisse la tête. Il a aussi pas mal pleuré vu l'aspect de ses yeux. 

Lui : Tu rentre déjà ? 

Moi : Je ne sais pas vraiment… je n'ai pas amené ma voiture et je ne veux pas prendre un taxi.

Lui : Je vais te déposer. Tu pourrais attendre quelques minutes le temps que je me recueille.

Moi : Ok.

Il s’agenouille près de la tombe :

Max, mon frère. Je ne mérite même pas de me tenir là après tout ce que j'ai fait. J'ai été capable d'envoyer mon meilleur pote en prison juste sur le coup de la colère, une colère injustifiée d'ailleurs. Encore une fois, je m’excuse profondément. Je m'en voudrais toute ma vie pour ma connerie… tout ça est en grande partie de ma faute..

Une larme s'échappe de ses yeux.

Tu as été un frère, un ami, un confident, un allié, un associé, un confident, tu as été tellement de choses. Tu ne méritais pas cette mort tragique. Tu aurais dû profiter de ta femme et de ton enfant pendant encore des années. J'aurais préféré mourir à ta place…. Mais ne t’inquiète pas. Cette sorcière est derrière les barreaux et elle va payer pour tout ce qu'elle a fait, je vais m'en assurer personnellement. Tu vas beaucoup nous manquer mon frère. Repose en paix. 

Il se lève. Le chagrin est tellement évident sur son visage. Je fond en larmes et il me prend dans ses bras. On reste ainsi pendant un bon bout de temps à pleurer, lui en silence. Une quinzaine de minute plus tard, on monte dans son véhicule en direction de chez moi. Sur le chemin, aucun mot ne sort pendant 5min environ. Il se résout à briser le silence.

Lui : Et ma fille ? Comment va t- elle ?

Moi : Bien. Elle est avec ma mère à la maison.

Lui : OK. Merci pour tout ce que tu fais pour elle.

Moi : C'est rien.

Silence radio pendant 5min encore.

Lui : Je veux savoir Yani.

Moi : Quoi ?

Lui : Ce qui s'est passé. J'avais perdu connaissance mais j'ai entendu… Comment ai-je survécu ? Qu’est-ce qui s’est passé avec Max ?


Je le regarde. Il était tombé dans les pommes et a passé plus de trois semaines dans un état second sur un lit d’hôpital. Alors il ne sait pas grand-chose…

Lui : Si tu ne veux pas parler, je comprendrai. D’ailleurs excuse moi de te demander ça en un moment pareil.

Moi : Non t’inquiète pas. ( petit instant de silence) Ce jour là, après que Leila t'ais tiré dessus, Max s’était jeté sur elle pour lui arracher son arme. Elle se débattait vigoureusement et malheureusement, dans tout ces mouvements, une balle est partie et Max a été gravement touché…

Les larmes veulent perler encore mais je les réprime rapidement.

Moi :…. Leila a laissé tomber l'arme par erreur à côté de Max, j’ai couru pour la prendre  et je lui ai tiré dessus ; elle est tombée. J'ai pris mon Max dans les bras mais il était déjà trop tard, le trou était assez près du cœur et il saignait beaucoup… Il a eu à peine le temps de me dire : «  chérie, je te confie ma fille. Prend soin d'elle comme si c'était la tienne s'il te plaît. Je te souhaite tout le bonheur du monde car tu le mérite, ne renonce pas à ta joie de vivre. Je t'aime princesse. » 

Je ne peux plus retenir mes larmes. Eugenio me prend dans ses bras et me calme un peu.

Moi : …. Je suis sortie au dehors chercher de l'aide. Il y avait des hommes de Leila qui attendaient à côté d'un véhicule. Je les ai supplié de m'aider… c’est eux qui vous ont mis Leila et toi dans le véhicule en direction de l’hôpital le plus proche. Dieu merci, Keyla était dans le véhicule comme sa mère l'avait dit. Elle était super contente de me revoir mais elle a sûrement dû été traumatisée par tout le sang que vous perdiez dans le véhicule. Après votre admission au soin, j’ai contacté le commissaire pour lui faire part de la situation. La police s'est rendue dans la forêt pour faire les constats ; le corps de Max a été transféré à la morgue. Une équipe a été dépêchée pour surveiller le lit de Leila 24h/24 jusqu'à son rétablissement et ensuite elle a été transférée directement en prison en l'attente de son procès. Elle ne sortira pas de si tôt avec les 6 chefs d'accusation qui pèsent contre elle. 

Lui : Tant pis pour elle. Dieu a même été généreux en la laissant vivre… Yani ?

Moi : Oui ?

Lui : Merci de m'avoir sauvé la vie. Je t'en serai éternellement reconnaissant.

Moi : T'inquiète. 

On arrive chez moi. Maman et Keyla sortent de la maison pour nous accueillir. Eugenio est tellement heureux de revoir sa fille ; ils se sautent dans les bras et se font pleins de petits bisous. C’est tellement touchant de les voir ainsi ; je pense à Max aurait pu serrer aussi Keyla dans ses bras en ce moment.

Nous entrons tous au salon et ma mère nous sert de l’eau à boire. Eugenio et Key sont inséparables comme deux tourtereaux. Il insiste même pour la ramener chez lui mais ma mère et moi ne sommes pas d’accord. Je me rend compte que j’ai un grand sentimental à la petite.

Moi : Tu va la laisser à qui quand tu iras bosser ? À tes domestiques ? Laisse la fille ici avec nous, elle sera mieux.

Maman : Ah oui, j'adore m'occuper d'elle. C’est un véritable petit ange. Et puis je suis vieille, je ne fais plus rien de mes journées.

Moi : Et puis tu pourras venir la voir ici quand tu voudras.

Il fait la grimace mais il finit par accepter, à contrecœur bien sûr. S'en suit alors un au-revoir triste entre père et fille.

Key : Papa pourquoi tu pars toujours et tu me laisse ?

Eugenio : Mon bébé, je ne pars pas. On se verra presque tout les jours. Juste que tu vas rester ici avec Tata Yani et Mémé pendant quelques temps. Je viendrai te voir tout les soirs à ton retour de l'école.

Key : Tu me le promet ? 

Eugenio : Promis chérie.

Ils s’embrassent tendrement. J’ai pitié de cette gamine qui doit subir toutes ces choses si jeune. J’espère vraiment qu'elle ne deviendra pas comme sa mère.

Je raccompagne Eugenio à son véhicule.

Lui : Prend soin de toi d’accord ? 

Moi : Je vais essayer. Fais de même.

Lui : J’essaierai. Je viendrai ici souvent pour voir Key mais aussi pour prendre de tes nouvelles, si tu me le permet.

Moi : Tu peux venir quand tu veux, il n'y a pas de soucis. Merci encore de m'avoir ramené.

Lui : C’est la moindre des choses. Au-revoir.

Il s'en va. Je reste là, l'esprit perdu dans les vapes pendant quelques minutes. 

Ma chérie, le repas est prêt.

Je me retourne, c’est ma mère qui viens de parler. Elle prend ma main pour m'amener à l’intérieur.

Maman je n’ai pas l’appétit. Mangez sans moi.

Ma fille, je te comprends parfaitement. Tu sais, quand ton père est mort, j’ai failli perdre la raison tellement j’avais mal. Je pensais que c’était fini pour moi, que la vie n'en valait plus la pleine. Je faisait comme toi : je m'affamais, je me négligeais, je me suis même rasé la tête avec un tesson de bouteille. Mais tu sais quoi ? Ça ne m'a rien rapporté du tout. J'ai réfléchi et je me suis rendue compte que ton père n'aurait certainement pas voulu me voir ainsi. Ce qu'il aurait voulu, c’est que je sois une femme battante, que je m'occupe bien de nos enfants et surtout que je sois heureuse. C’est ce que Max aurait voulu pour toi, j'en suis convaincue. C’est normal que tu ais du chagrin mais il faut que tu pense à toi aussi. Tu veux tomber malade et le rejoindre ? Ça aurait servi à quoi qu'il se sacrifie alors ? Rends-le fier, redeviens la Yani battante qu'il a connu. Alors tu vas venir avec moi et toutes les trois on va bien gérer le poulet braisé qui nous attend sur la table là bas, d’accord ?

Je fais oui de la tête. Ça me fend le cœur mais elle a raison. Max ne voudrait certainement que je me rende malade. Il a toujours voulu mon bonheur et a toujours œuvré dans ce sens. Je regarde vers le ciel et je me dis : « Max mon amour, je te promet de me battre, je vais rebondir. Je te rendrai fier de moi ». 

Et une larme dévala ma joue. Pas une larme de tristesse, mais une larme d'espoir.

Au delà de ce que tu...