73 : proposition
Ecrit par Gioia
***Océane Ajavon***
Est-ce
qu’on peut être aussi cheap qu’Elikem ? Elle a tellement magasiné dans les
soldes depuis qu’on a quitté les parents qu’elle m’a dit guetter les soldes en
ligne d’abord, lorsque je lui ai demandé ses horaires afin de booker des
consultations en boutique. Son annonce remonte à une semaine et j’en ris encore
lorsque sa tête me revient parfois.
Comme
d’hab, elle est rentrée de l’hôpital avec son gros sac bandoulière sur
l’épaule.
— Tu
vas te décider à laisser ce gros sac une bonne fois pour toutes quelque part ?
— Et
je transporte mes effets comment ? Sur la tête ?
— Je
ne comprends pas comment vous n’avez pas de casiers dans cet hôpital, c’est la
moindre des choses pour des internes ou je me trompe. Même vos pyjamas là on ne
vous les donne pas. J’avais mal compris Dr House et Scrubs ou c’est comment ?
— Ma
chère, si on t’explique le fonctionnement interne d’un hôpital et tu arrives à
comprendre c’est qu’on ne t’a pas bien expliqué. On dit quoi sinon ? Les
affaires bougent ?
— Hum
les affaires sont là one two one two oh (caractère de quelque chose qui
n’avance pas trop). On m’avait prophétisé que j’allais faire le triple de mon
chiffre d’affaires avant trente ans mais le diable ne fait queeee, je dis et
elle pouffe de rire
— En
fait toi et Mally on ne peut pas vous montrer quelque chose et vous allez rire
puis oublier hein. Qui t’a prophétisé dans ce pays ? toi qui ne pars même pas à
l’église
— Est-ce qu’un puissant comme le prophète Konden a
besoin de me voir ?
— lol on dit le prophète Kamdem
— ah autant pour moi, le diable continue quand même
de faire
— ne regarde pas ce vilain diable, le temps qu’il
comprenne, c’est le quadruple même que tu feras à 30 ans
— ayyymeeennn Dieu entend la commande de ta fille,
ne vient pas me dire autre chose l’année prochaine
— N’oublie pas les offran…
— ils n’ont qu’à aller travailler, mon argent est
mien, je la coupe et elle se moque de moi
Nous évoluons vers sa chambre. Pendant qu’elle passe en
douche, je prends sa tablette pour ouvrir le site que j’ai trouvé pour elle. Dès
qu’elle sort avec sa serviette autour du buste, je la lui présente.
— Hum, fait-elle appréciative, c’est joli, oh et la
bonne longueur. Mais ils n’ont pas des sol…
— Ne fatigue pas les gens hein madame, la robe la
plus chère là-bas coûte au trop 2700 $. Tu veux que je te rappelle ce que
j’ai claqué pour celle qui ne m’a servi à rien au final ?
— maintenant que tu le mentionnes j’aurais pu te la
racheter si on n’avait su que, bref tu vois, comme ça l’argent reste dans la
famille
— ne dis pas de bêtises, primo mon style est à
l’opposé du tien, deuxio je l’ai vendu à 4000 $ et tertio ce n’est pas le
moment de ramasser les mauvaises ondes pour entrer dans ton mariage
— Bon dit comme ça…
— assieds-toi tu regardes, maman a dit que d’ici la
fin de cette semaine, on doit la situer sur la tenue sinon elle prendra les
choses en main
— Est-ce qu’on fait ça ? Mon propre mariage et je me
fais menacer, se plaint-elle, ce qui m’amuse 90 % du temps, les choses ne
sont jamais simples avec Elikem et sa mère. Et chacune aime rejeter la faute
sur l’autre. Ce sont les retombées d’être très attachée à sa maman j’imagine.
La mienne est présente et aimante mais on ne va pas se leurrer non plus ; notre
relation n’est pas si fusionnelle.
Quelques minutes plus tard, la mariée avait trouvé son
choix. Elle s’empressait carrément de rentrer les détails pour le paiement mais
je lui ai heureusement retiré son appareil
— on essaie d’abord jeune fille, les tenues ne sont pas
faites sur mesure
— je porte du medium
— Et alors ? Ton medium n’est pas mon medium. Tu as
plus de fesses que moi. Mon balcon est plus fourni que le tien. En plus avec
ton lourd sac que tu charges sur tes épaules, ça ne m’étonnerait pas qu’un côté
soit plus musclé que l’autre
— je t’emmerde sia, elle rigole
— Lol demain il faut encore porter. Bref, on va te
prendre un rendez-vous pour que tu essaies et s’il y’a altérations à faire,
peut-être ils pourront te faire un rabais s’ils le font en magasin. Ça
t’évitera des dépenses additionnelles
— non mais quand c’est ton rayon personne ne peut
hein, dit-elle amusée et impressionnée à la fois
— C’est ton histoire de soldes qui m’a fait
découvrir qu’effectivement certaines boutiques soldent robes de mariées comme
n’importe quelle autre tenue donc l’idée m’est venue d’ouvrir une boutique
nuptiale. Si tout se passe bien d’ici cette fin d’année je serais lancée
– En plus du spa et des deux distributeurs
automatiques tu as fait mettre à l’hôpital de papa ? on te dit bien madame
Entrepreneur et le e est grand
— on se défend oh même si le diable continue de ne
faire queee
Elle éclate de rire et me frappe la jambe avec un
coussin. On finit la soirée à faire et se raconter des conneries.
Comme je le suspectais, la taille M bien que bonne
n’épousait pas bien ses formes. Par contre ce que je trouvais plutôt simple à
mon goût sur les photos, s’avérait magnifique sur elle. La mariée était déjà
conquise rien qu’avec les photos. Ici elle est dans son petit monde, se mirant
sans cesse, ce qui est comique et mignon à voir. C’est rare de la voir ainsi
donc je prends autant de vidéos que possible pour sa mère.
Il y’avait des
altérations à faire et sur place, ils ne le faisaient pas. Par contre, la
vendeuse nous a informés qu’ils faisaient également leurs modèles sur mesure
depuis leur atelier en Australie pour une centaine de dollars additionnels.
— Quels sont vos délais ? je demande
— Euh laissez-moi écrire à notre atelier et
je vous reviens dessus par e-mail, est-ce que c’est bon ?
— d’accord, nous répondîmes en chœur
La réponse n’a pas tardé, soit le lendemain mais
elle ne nous arrangeait pas.
— six mois, y compris le temps qu’elle arrive
ici à Springs, je lui lis
— Tu vois la vie, je tombe enfin sur un coup
de cœur, mais…
— En plus tu oses parler, la menace sa mère
qui est en appel. Combien de fois je t’ai parlé de ta robe mais non ta mâchoire
restait musclée, oh tu la trouveras, oh qu’on arrête de te stresser. Nous voilà
à quatre mois de ta dot, pfff. Je ne sais pas quel enfant tu es toi, on ne peut
jamais te dire quelque chose et tu vas coopérer
Elikem plisse seulement les lèvres et secoue sa
tête.
— Je pense que les délais doivent être moins
longs si quelqu’un pouvait récupérer la tenue là-bas. Ou on en cherche une
autre ?
— Non, celle-là est parfaite, dit tata Belle.
Je vais demander à Ida si…
— Pas Ida maman. Elle est submergée avec
l’uni et en plus fait plein de choses à côté, je ne pense même pas qu’elle sera
à la dot
— Tu vois tes choses ? Maintenant on fait
comment ? sa mère rétorque avec hargne
— Mais pourquoi tu m’attaques ? Est-ce que
j’ai dit à la robe de ne pas me suffire ?
Sa mère pousse un long juron et nous dit au revoir
puis raccroche
— Tu aimes déranger ta mère hein. En tout cas
il faut que la robe arrive à l’avance, pour des essayages et si altérations
nécessaires encore qu’on ait le temps de les faire
— je vais demander à Deno, le frère de Ray,
s’ils peuvent la lui livrer et il viendra avec
C’est ce qu’elle fait donc et pendant qu’ils
s’écrivent, elle me dit qu’il était apparemment recalé du mariage mais qu’il
fera parvenir la robe sans faute
— Recalé pour quoi ?
— un différend avec Ray mais il ne me dit pas
de quoi il s’agit
— Et juste pour un différend il recale son
frère ? j’espère pour sa gueule qu’il ne va pas demander que tu choisisses une
autre dame de compagnie à cause de mon histoire avec son frère
— bien sûr que non, et même si je
n’accepterai pas, tu n’as pas à t’en faire
— je ne m’en fais pas, par contre tu ne
penses pas que tu devrais t’en faire un peu ? S’il recale son propre frère d’un
évènement aussi important pour on ne sait quelle raison, qu’est-ce qu’il fera
si Mally sort ses fameuses blagues qu’on lui connaît ? En plus ta famille est
majoritairement composée de casse-cous. Vous allez être à l’aise là-bas ?
— Il fait des efforts, je l’ai vu mais je ne
saurais te dire oui sans réfléchir Annie, dit-elle honnêtement
— bon peut-être je parle trop aussi, tu me
connais, plaisantai-je pour alléger l’atmosphère
***Hilda Tountian***
— comment socialisme est devenu français
là-bas ? me demande maman ce qui m’exaspère un peu
— je t’ai déjà expliqué un tas de fois maman,
arrivé à Nairobi j’ai décidé de changer
— je te dis qu’elle ment maman, elle est
partie là-bas pour vendre la drogue
— tu vas fermer ta bouche sur tes dents cassées
là Jérôme merci bien, je le préviens
— Tu as dit quoi ? Il se lève avec
l’intention de me frapper oh, je ne sais pas. J’ai déjà sauté de mon tabouret
pour me réfugier derrière maman, qui le rappelle à l’ordre
— Je ne calme pas maman ! ça veut dire quoi ?
Hilda pense que parce qu’elle a pris avion, elle va me parler n’importe comment ?
— J’allais te parler n’importe comment si tu
disais des choses intelligentes ?
— Hilda je vais moi-même te frapper si tu
n’arrêtes pas. Jérô il faut t’asseoir hein, tu es quand même un grand frère. Ça
ne te va pas de t’énerver comme ça, tu dois montrer l’exemple, l’amadoue maman
Avec sa tête comme les pirogues au repos là, il
gonfle ses narines et épaules, tout content du titre de grand frère qu’on lui
donne et se rassoit. Un grand frère qui ne sait rien faire sinon courir les
filles dans le village c’est quelqu’un qui doit parler dans les histoires des
gens ?
— remercie maman hein, remercie là, sinon
c’est que je t’avais déjà fragmenté la mâchoire, il dit pendant que je me
réinstalle
— bon faut mieux nous expliquer comment
socialisme est devenu français
— Premièrement, c’était la sociologie et non
le socialisme. Puis j’avais commencé en lettres et civilisations étrangères
avant de bifurquer en socio non, donc je ne fais qu’un retour aux sources
— Donc français que tu as appris depuis le
primaire jusqu’à avoir bac là c’est pas suffisant ? Tu dois encore apprendre à
l’université ? maman je te dis c’est louche
— si je te réponds comme il faut tu vas dire
que je t’ai insulté donc comprends juste qu’il y’a une distinction entre
français et langues
— mais c’est français tu m’as dit non,
intervient maman
— je t’ai dit langues maman, comme tu ne
comprenais pas j’ai résumé en te disant le français
— Hum ! continue à apprendre le français
là-bas hein, les serpents aussi cherchent les filles pour les sacrifices. Ne
crois pas que je vais laisser ma femme et mes enfants pour t’aider. Maman tu
étais témoin, j’ai fini, il dit puis s’en va.
— ce n’est pas la peine de faire cette tête
d’enterrement non plus, je suis en vie, je dis à maman qui me regarde avec
appréhension
— Hilda, je n’aime pas ça, on entend les
choses à la télé qu’on fait du mal aux gens, le monde est dangereux et c’est
toi ça qui non seulement vit loin mais en plus avec des gens qu’on ne connaît
pas
— Réfléchis une seconde maman, si on me
faisait du mal est-ce que j’aurais pu rentrer te voir ? En plus quand tu me
vois comme ça, j’ai l’air d’être mal en point ?
— Mais pourquoi tu es venue seule ? Les gens
qui t’aident ne veulent pas que je voie leurs visages pourquoi ? Qu’est-ce
qu’ils cachent ? Et ils trouvent l’argent où pour te donner cadeau comme ça ?
— Je suis rentrée seule maman je te l’ai déjà
expliqué. Ils préparent un mariage dans leur famille et quant à l’endroit où
ils trouvent l’argent, je t’ai dit qu’ils sont une vieille famille. Tu vois les
gens qui ont l’argent de génération en génération là. En plus une d’elles a été
miss Togo, Snam Maelys Wiyao c’est son nom, lui révélai-je. Même si elle entend
le nom, elle saura difficilement qui c’est. Maman ne s’intéresse pas à ce
monde. Allez, dis-je sur un ton plus gain tout en la secouant un peu, ton unique
fille est arrivée hier et tu n’as pas affiché ne serait-ce qu’un sourire
— tu me déranges, se plaint-elle, tout en
souriant quand même parce que j’essayais de la chatouiller
Quelques minutes plus tard, la conversation entre
nous était plus naturelle. Je lui donnais aussi les petits cadeaux que j’avais
ramenés pour elle. Bien sûr, son inquiétude sur la provenance de l’argent était
de retour. Je l’ai encore rassurée, lui précisant au passage qu’en plus de
l’aide qu’on me donne, je fais plein de petits boulots qui rapportent bien. Vu
qu’elle me sait débrouillarde, elle n’a pas argumenté. En réalité, les petits
boulots sont durs à trouver à Nairobi. En dehors des tresses que je fais à
domicile et un job passager de nettoyeuse dans un fast food que je n’ai d’ailleurs
plus, je n’ai rien trouvé d’autre. Probablement parce que je ne maîtrise pas
encore le swahili mais aussi les Kenyans ne sont pas très ouverts aux
étrangers. Ce que je dépense, vient de la compensation versée par madame Belle
et aussi la générosité de Godson mon copain. Nouvelle que je serais plus que
ravie de lui annoncer, mais fais-le et tu la verras tomber dans une psychose
sans nom, et bien te réciter les histoires farfelues que ses fils lui ont mis
en tête concernant l’étranger. Parlant de tresses, je la cherche du regard puis
demande à maman
— au fait Maria est où depuis là ? je ne l’ai
pas vu
— elle est à Lomé avec Fabien depuis deux
mois
— nonnnn, c’est arrivé comment ? fais-je
amusée et intriguée
— Tu sais qu’elle bricolait souvent les petits
bijoux ici donc Fabien est venu une fois et nous a dit qu’elle doit apprendre à
être présentable avant qu’Eben vienne la marier donc il l’a emmené mais elle ne
voulait pas oh. Je ne pensais même pas qu’elle pouvait se bagarrer. On a dû
beaucoup lui parler pour qu’elle comprenne que les gens ne mangent pas à Lomé,
elle me raconte et je ne cesse de rire, imaginant Fabien élancé mais mince
comme une tige, tirer une grosse comme Maria
— Tu cherches tes fils où ? C’est Eben qui a
dit qu’il veut se marier ?
— C’est Fabien, tu sais que quand il a décidé
quelque chose, il n’aime plus entendre. Je lui ai seulement dit de faire
doucement avec la fille des gens parce qu’on ne sait toujours pas d’où elle
vient. Mon amusement s’évapore sur cette phrase comme le fond d’eau dans une
marmite au feu depuis des lustres. J’imagine très bien pourquoi elle a peur de
Lomé.
— Tu lui as quand même dit de bien la
surveiller non ?
— Oui oui, il a dit
de ne pas s’inquiéter. Et puis j’étais là-bas le mois passé, c’est comme si
elle commence à aimer. Elle a commencé la formation pour les bijoux de perle et
Fabien me dit qu’elle va aussi vendre la salade au petit marché non loin de la
maison
— Ah c’est bien ça.
Et Fabien ? Son travail avance ?
— il faut l’appeler
pour lui demander non, il dit que tu n’appelles pas
— pardon ton fils
avec son comportement de phacochère là, il ne sait que crier sur les gens
— C’est quand même
ton frère. En plus tu lui as fait très peur quand tu es partie Hilda, tu ne
sais pas comment j’ai pleuré
— je suis désolée
maman, dis-je honteuse
— comme tu es là, il
faut profiter pour faire la paix avec lui avant de partir.
— hum d’accord,
murmurai-je
De tous mes frères,
Fabien c’est un vrai malade. Si je me pointe dans notre ancienne maison, il
peut facilement arracher une branche d’un arbre et me frapper avec avant
d’accepter mes excuses. Et franchement ce n’est pas à 21 ans que je vais
laisser un homme me toucher. Frère ou pas. On va se réconcilier à distance.
Heureusement pour ma gueule, Eben a pris le goût chez les blancs. Maman m’avait
déjà dit qu’il a trouvé un meilleur emploi donc le voyage qu’il avait prévu
pour cette année a été repoussé. C’est l’une des raisons pour lesquelles je me
suis démené pour rentrer. Comme ça je l’évite soigneusement, et Dieu aidant, il
va oublier cette histoire de rencontrer mes bienfaiteurs, le temps que je
finisse au moins mon bachelor.
La seconde raison du
retour, c’est qu’Elsie, une amie de mon copain Godson, voulait découvrir
l’Afrique de l’Ouest. Comme le frère de Godson lui a interdit de retourner au
pays sans son bachelor, ce dernier ne pouvait pas se déplacer. Il m’a donc
financé le billet pour que j’y aille à sa place. Entre nous, je me méfie de
l’Elsie en question. On connaît les histoires des mecs quand ils te disent « c’est
mon amie ». Mais Godson me jure qu’il ne la regarde pas du tout, n’aime pas les
blanches et la considère plutôt comme une partenaire d’affaires. Ils veulent ouvrir
une salle de crossfit à Nairobi et espèrent qu’elle sera la première d’une
ligne de plusieurs gym à travers l’Afrique. Par ils je parle de Godson bien
évidemment, qui fournit le capital, Elsie qui est coach fitness et Joshua un
bodybuilder. Le Joshua en question là se prend tellement. J’ignorais que le
gars était togolais jusqu’à ce qu’on rentre ensemble. Il ne m’adresse jamais la
parole ; même le français je ne l’ai jamais entendu de sa bouche.
Les trois se sont connus
à Omaha quand Godson y vivait encore avant de se faire ramener de force par son
père sous les conseils de leur aîné qui a une vraie dent contre mon mec. C’est par
cette histoire que j’ai confirmé qu’il faut bien choisir les noms des enfants,
parce que l’aîné, gros jaloux de mon chéri s’appelle Yafeu. On ne peut pas
faire plus prophétique vu comment il est dans le feu de son frère. Il faut
entendre Godson raconter leur histoire familiale, avec les rebondissements
dignes du soap-opéra « des jours et des vies ». Le voilà d’ailleurs qui
m’envoie un message.
Lui :
hey cutie, haven’t heard from u all day. Is everything ok? (hey ma jolie, je n’ai pas eu de nouvelles de la journée,
tout va bien ?)
Moi :
hey I was with the fam, that’s all, I miss u though, what’s up? (hey j’étais avec la famille, tu me manques en
revanche, on dit quoi ?)
Lui : so
vexed, Yafeu’s acting jaru jaru, can you believe he said I’ll be on a monthly
allowance instead of yearly? I mean how can one person be such a nuisance? (en colère, Yafeu fait encore des siennes, imagine
qu’il a dit que je recevrai mon argent par mois au lieu de l’année. Comment se
fait-il qu’une seule personne soit aussi nuisible ?)
Eh les Ghanéens et leur vernaculaire ;
je cours chercher ce que jaru jaru veut dire d’abord, parce que le connaissant
c’est sûr qu’il m’a expliqué et quand il est déjà sur les nerfs, puis tu viens
le questionner, le type a tendance a mal parler aux gens. J’y ai déjà goûté et
j’évite pour ma bonne santé.
***Fabien Tountian***
Les journées sont longues
pour moi en général, et doublement pénibles lorsqu’on travaille sur les gros
chantiers mais je n’ai pas à me plaindre. C’est mon gagne-pain. Vu qu’on est
mercredi, je passe récupérer Maria à son centre de formation avant qu’on ne
rentre. Après une douche bien reposante et un copieux repas, on s’assoit devant
la télé. Il y a un mois de ça, elle ne sortait même pas de la chambre une fois
rentrée, bien que je lui aie dit qu’il fallait s’habituer à suivre les nouvelles
parce que les avocats comme mon frère aiment parler de l’actualité généralement.
J’ai même précisé qu’elle n’était pas obligée de m’attendre pour se divertir. Que
ce soit regarder la télé ou sortir pour marcher dans le quartier mais rien de
tout ça ne l’intéressait hein. En dehors de sa formation, elle ne faisait rien
d’autre. À un moment j’avais simplement conclu qu’elle faisait partie de la
catégorie qui aimait plus l’intérieur que l’extérieur. Puis un jour, je suis rentré
et elle était dans la cour, en train de jouer avec ma vieille radio. Un début
timide qui s’est solidifié. Maintenant la go connaît même les heures de ses
émissions favorites. Une autre chose qu’on a débutée, c’est l’utilisation d’un téléphone.
Je lui ai trouvé un xiaomi raisonnable pour cinquante mille dans une brocante. Parlant
de brocante…
— Au marché là-bas
il n’y a pas quelqu’un qui vend les habits ?
— Oui y’a, tu veux acheter ?
— je parle de toi
madame, le pagne c’est beau mais faut varier un peu hein
— toi tu manges la
pâte tous les jours non, elle dit et me regarde de travers
— haaa c’est devenu
une affaire de moi comment ? je rigole
— lundi jusqu’à dimanche,
toujours la pâte, même quand on fait autre chose, tu manges, tu réveilles
encore pour chercher la pâte
— Mais c’est ça qui
me tient bien. En plus je varie, je mange pâte de maïs, ensuite mil et des fois
pâte d’igname. L’homme a encore besoin de quoi après ça ? je dis et elle rit
— il faut varier
Fabien
— ah moi je dis ça pour
toi, chez les blancs ma pâte va bien me tenir dans le froid, or le pagne ne va
pas t’aider, lui rappelai-je et son humeur amusante s’envole aussitôt
— je veux pas partir
chez les blancs, elle dit en faisant la moue
— Je t’ai déjà dit
que le blanc ce n’est pas bibitoh (un monstre). Si les gens vont et vivent bien
pourquoi tu ne veux pas y aller ?
Elle continue à faire la
moue et se met à triturer les bouts de son pagne, ce qui m’amuse. Si on m’avait
dit que la Maria qui nous fuyait Jérôme et moi dès qu’elle nous voyait pouvait aussi
bouder, je ne l’aurais pas cru.
— Pourquoi toi tu ne
pars pas chez les blancs alors ?
— Mais je vais aller
y faire quoi quand je travaille ici déjà ?
— moi aussi je
travaille
— tu djav (se débrouiller),
c’est différent
— Après la
formation, je vais trouver un bon travail, dit-elle déterminée. Je laisse donc
le sujet des blancs pour aujourd’hui. Ce n’est pas en forçant que ça va rentrer
avec elle. Petit à petit c’est mieux
— bon il faut quand
même porter autre chose, je vais te chercher un peu d’argent bientôt pour que
tu te trouves le nécessaire
C’est donc ce que j’ai
fait, en fin de semaine, et le mardi, jour où elle était censée faire ses emplettes,
la fille me redonne mes quinze milles.
— j’ai rien trouvé
— Hey tout un marché
et tu n’as rien trouvé Maria ? Rien c’est quoi ?
— y’avait rien pour
moi comme je suis grosse
— C’est quelle
grosseur on ne peut pas habiller ? Tu es plus grosse que la dame qui vit en
face ? Tu ne la vois pas dans ses collants malgré tout ?
Elle détourne seulement
la tête, signe qu’elle boude encore.
— samedi, tu te
prépares pour dix heures, je t’emmène au grand marché
— Tu ne travailles
pas ?
— Si je travaille, c’est
ton problème ? Ou tu veux faire le travail à ma place ?
— oh c’est seulement
une question
— comme tu n’as rien
trouvé au marché il ne faut pas me demander, moi aussi je suis gros, je ne peux
pas travailler
Je suis sérieux et elle
me dévisage avec un sourire moqueur. Ce n’est pas elle, koh je suis grosse. Samedi
est vite arrivé. Maintenant que j’y pense, j’aurais dû prendre les choses en
main depuis le début. Bruce l’ami d’Eben avec qui il a quitté le pays, vendait
les friperies dans le temps et je connais bien la personne à qui il a confié
son marché, vu c’est là-bas que j’y ai emmené Hilda plusieurs fois.
Sans tarder, on trouve
facilement du choix pour Maria. Elle paraît surprise comme si elle croyait réellement
qu’il n’y avait rien de disponible pour elle. La vendeuse lui propose aussi des
soutiens puis l’emmène dans un coin caché pour les essayages. Je me distrais
avec un yaourt glacé pour patienter mais j’oublie carrément ce dernier quand
elle revient dans la première tenue. OK, je la savais en pulpeuse mais pas à ce
point.
— pardon le frère le
yaourt va tomber de sa tige oh, se moque la vendeuse
Je le rattrape de
justesse, m’attirant davantage de moqueries des autres vendeurs ainsi que
clients.
— c’est joli ? me demande
la concernée avec une pointe d’hésitation dans la voix
— haaa madame,
est-ce que le patron a besoin de dire que c’est joli quand il avait la bouche ouverte
dès que tu es sortie ? il a déjà validé, plaisante la vendeuse. Elle sa bouche
ne se ferme jamais. C’est comme ça qu’elle bavardait les fois où j’ai emmené
Hilda ici
— Oui c’est joli, je
réponds néanmoins, très satisfait du résultat. Tu aimes toi ? Parce qu’on ne va
pas prendre et ça restera dans la chambre hein. Si on le prend c’est pour que
tu les portes
— c’est beau, je
vais porter
— Très bien, dis-je content
de la tournure des évènements. C’est toujours mieux quand je prends les choses
en main.
On finit sur une pointe
joyeuse et comme il n’est que quatorze heures, je lui propose que l’on continue
la promenade, vu qu’en dehors du petit marché ainsi que le centre de formation,
elle ne se promène pas vraiment. Je l’emmène donc dans un petit maquis où je me
permets d’aller quand je veux me faire plaisir.
— comme j’ai varié avec
le jean, toi aussi faut varier en mangeant autre chose
— tu ne vas pas me
laisser avec ça hein, ironisai-je
— la variation c’est
bon pour tout le monde, dit-elle, ce qui me fait rire
Je commande donc la même
chose que madame c’est-à-dire le riz, pour prouver que je sais varier. Pendant qu’on
mange, je la contemple à la dérobée. C’est fou ce qu’un changement aussi léger
que des vêtements peuvent donner une apparence totalement différente de quelqu’un.
Elle faisait plus mature dans ses tenues régulières, et ici dans ce simple t-shirt
et jean, qu’elle a décidé de garder après l’essayage, elle fait plus son âge. Maintenant
que j’y pense, je ne connais justement pas son âge.
– Tu as quel âge ?
je lui demande donc
— euh… 22 ans,
elle me répond et mes yeux s’arrondissent comme des pièces de monnaie
-22 ans ? répétai-je
abasourdi, genre juste un an de moins que moi ? Comment c’est possible avec
tout ton corps là ?
— je sais pas,
dit-elle en haussant les épaules
— purée, je t’imaginais
plus vieille
— c’est mauvais si
je suis pas vieille ? s’inquiète-t-elle
— pour moi non mais
j’ignore si mon frère y verra un inconvénient
— toute façon, s’il
veut pas c’est pas grave, comme je le connais pas, je vais en même temps rester
à Lomé
— Il faut me laisser
le défaitisme sur le côté hein. Il va vouloir et si tu me connais, c’est que tu
le connais déjà. Nous sommes pareils, il est beau comme moi par contre il aime beaucoup
plus l’école, je lui dis et elle rigole. C’est le beau qui l’amuse. Les deux ou
trois fois que je lui ai rappelé ma beauté, elle a trouvé ça marrant au lieu de
confirmer. Si j’avais un petit cœur, j’allais mal me fâcher. Mais Dieu merci, je
connais mes atouts. Et ta famille ? continuai-je avec les questions.
— je suis seule,
dit-elle l’air maussade d’un coup
— Oh désolé, dis-je
penaud. Plus maladroit que moi tu meurs. On rigolait bien et me voilà qui plombe
l’ambiance.
— Pas grave. Tu peux
m’appeler Bijou si tu veux, lance-t-elle de nulle part, ce qui lui vaut un regard
interrogateur de ma part. c’est comme ça que ma famille m’appelait
— Ah OK, Bijou c’est
plus joli que Maria d’ailleurs.
— mais tu dis à personne
hein
— Pourquoi ?
— parce que je préfère
Maria avec les autres
— Comme tu veux,
dis-je en haussant les épaules. Les chichis de femme, je ne vais pas me lancer
dans la compréhension de ça le ventre à moitié rempli en plus. Je n’ai pas l’énergie
pour.
Nous rentrons après le
maquis et je prends quelques clichés d’elle avec mon téléphone pour les transmettre
à Eben. Peut-être ça va le motiver à rentrer plus rapidement. Mon ventre comme
d’hab, se met à gronder environ une heure après le retour. Je me fais traiter
de gros gourmand, et elle va même suspecter que j’ai peut-être des vers parce
qu’elle ne comprend pas comment j’ai mangé le double de sa ration et j’ai déjà
faim. Pendant les moqueries, elle me prépare ma pâte pendant que je fais du
vent au foyer. Maintenant que j’y pense, quand elle rejoindra mon frère, je
vais me retrouver seul. Depuis son arrivée je n’ai pas touché à une seule
marmite dans cette maison. Il est peut-être temps que je me trouve une femme
aussi tiens.
***TH Ndouo***
J’ai mis storm is over de
R Kelly à fond depuis ce matin parce que définitivement, je peux déclarer enfin
la fin de la tempête dans ma vie. Je craignais au début que le retour de Vita à
Douai soit une source de tensions infinies mais finalement c’est plutôt une
source de bonheur. Non seulement je partage mon quotidien entre Douai et Lille,
c’est-à-dire que je passe au chaque deux jours pour voir ma fille, mais en plus
Garcelle a réussi à dépasser la peine que je lui ai causée. Et le clou du spectacle
c’est qu’elle manifeste de l’intérêt à Lulu. Bon je n’ai pas encore osé l’emmener
chez nous, mais lorsque je rentre des visites chez Vita, elle me demande des
nouvelles de ma fille.
Vita aussi se tient, je
dois le lui accorder. Bon elle continue de me provoquer mais je m’y suis
habitué en réalité et le lui retourne volontiers. Puis ce n’est rien de méchant.
Ce que je trouve un peu dommage, c’est qu’elle a dû mettre une pause à son master
pour revenir à Douai, primo pour sa santé qui continuait à faire des siennes
mais Dieu merci, elle va mieux, puis secundo pour Lulu, sur les conseils de son
père. Pourtant je me souviens qu’elle voulait passer les concours d’entrée à la
fonction publique européenne pour potentiellement intégrer le bureau européen d’appui
en matière d’asile. Au lieu de ça, elle se retrouve au chômage, une situation
qui ne lui plaît pas, je le sens quelques fois lorsqu’on aborde le sujet, et
aussi vu qu’elle est habituée à bouger régulièrement. Résultat, elle a recommencé
à fumer récemment. Un autre contentieux entre nous. J’ai conclu qu’elle ne fume
que lorsqu’elle est tendue. Ce n’est pas une justification mais si elle ne se
détend qu’ainsi, qu’est-ce que je peux faire en dehors de lui reprocher ? J’ai
déjà arraché la cigarette de sa bouche, et elle m’a foutu un coup bien solide
dans les côtes.
Bref, revenons au sujet du
jour, j’ai récupéré notre courrier, et parmi eux se trouvait une carte que je
montre à ma chérie.
— regarde-moi ça,
dis-je fièrement, le grand n’a pas fait les choses à moitié
— hum, les enfants
préférés de Dieu, réplique-t-elle en lisant la carte d’invitation au mariage de
Ray que nous avons reçu
— Lol Dieu ne te
préfère pas toi ?
— En tout cas s’il
me préfère, c’est qu’il ne le montre pas assez hein, parce que voilà Raymond
qui depuis Libreville envoie les invitations aux gens de par le monde. Et je suis
ici, sans emploi, et pas l’ombre d’un mariage en vue
— Ne parle pas comme
ça bébé, tu as des entrevues à faire bientôt, elles vont donner j’en suis convaincu.
Et pour notre mariage ce n’est qu’une histoire de planification, on le fera au
moment voulu, la rassurai-je, ce qui me valut un sourire
— En tout cas, pour tout
le bruit qu’il fait sur son mariage, il aurait pu faire une carte plus classe
quand même ; on dirait un modèle basique copié sur internet, les choses du pays
— il a fait faire en
France, répliquai-je amusé
— Comment tu sais ça
toi ?
— bah regarde l’adresse
de l’expéditeur non
— Oh OK, dit-elle. Bref
même les Français peuvent faire les choses bon marché
— c’est pas beau la
jalousie Garcelle, la taquinai-je
— Qui est jaloux ?
pardon reprend la carte, c’est comme ça que la société est sensible maintenant,
tu ne peux plus donner un point de vue sans qu’on te colle des étiquettes
— Lol laisse la société
miss, on est entre nous ici. Tu as déjà placé ta commande pour ta tenue de
demoiselle d’honneur ?
— mince tu es plus
affairé sur ce mariage que le couple lui-même
— c’est quand même
le mariage du grand donc quoi de plus normal
— En tout cas j’ai placé
ma commande monsieur le surveillant. Pendant que tu me stresses, j’espère que
tu as fait pareil
Je cours sortir la housse
contenant mon costume de garçon d’honneur et lui montre. Son expression d’étonnement
me fait éclater de rire.
— non si tu n’es pas
aussi prêt pour le nôtre Ndouo, les problèmes que je vais te faire
— t’inquiètes bébé, tu
verras le jour là. Il ne me reste plus qu’à trouver une tenue pour maman mais
elle me fatigue cette vieille à ne pas connaître sa taille quand je lui demande
— Et Lucille ?
— Quoi Lucille ?
— Elle n’aura pas
besoin d’une tenue ?
— Chérie, c’est un bébé
d’à peine six mois, elle va faire quoi à Libreville ?
— Toi aussi TH, c’est
ta fille ou pas ? j’ai des amis qui ont emmené leur bébé au pays à juste un
mois d’âge
— avec toutes les
turbulences dans les airs là ? fais-je effaré
— Et alors ? Ils
sont arrivés en un morceau ou pas ?
— Je ne suis pas sûr
Garcelle. Il faut voir comment Lulu sursaute quand on met le mixeur en route, son
petit cœur ne va pas tenir pendant tout un vol
— Si tu la couves tout
le temps, elle ne va pas s’ouvrir au reste du monde une fois grande hein. En plus
tu ne veux pas qu’elle soit proche de maman et Vieira ? Plus tôt, elle les
voit, mieux ça sera. Sinon elle finira comme Lilou et Rayan qui ne s’intéressent
même pas au reste de la famille en dehors de leur père. Rappelle-toi de combien
tu déplorais ça, elle dit et je m’en souviens que trop bien. Durant nos longues
conversations nocturnes, je lui ai même dit qu’il est hors de question que nos
enfants affichent le même désintérêt à leur culture que nos enfants. En plus, à
son âge, elle ne paiera pas un tarif plein, elle rajoute
— Bon je vais demander
à sa mère en premier, dis-je toujours hésitant. Est-ce que c’est réellement une
bonne idée ?
Quoiqu’il en soit, j’ai fait
la proposition à Vita, qui à ma grande surprise était pour. Quand je dis
grande, il faut comprendre que c’est monumental. Juste pour aller au parc à dix
minutes de leur maison, Vita me suit lorsque j’ai le bébé. On s’est même disputé
dessus parce que je lui ai dit qu’elle m’étouffait à jouer au faucon par-dessus
mon épaule. Elle m’a juste dit de fermer les yeux et je ne la remarquerai plus,
mais arrêter non. Donc qu’elle me laisse la petite pour un séjour de deux
semaines, dans un autre pays, c’était surprenant. Mais pourquoi questionner les
bonnes choses ? Je me suis dit que peut-être elle me faisait enfin confiance.
J’ai donc fait les courses
pour maman et Lulu, puis un soir, après avoir pilonné Garcie comme il faut, je
reçois un message de Vita me demandant si je compte passer demain
— Oui pourquoi ? je
lui réponds en appel
— je vais laisser
Lulu avec maman, je prends mon train pour Paris à 15 heures, il faudra
donc l’appeler avant ton arrivée
— oh pas de soucis, tu
y vas pour rencontrer ton médecin ? demandai-je curieux
— non sur le site de
votre consulat, il est dit qu’on doit se présenter pour le dépôt des demandes
personnelles
— ne t’occupe pas de
ça, je me charge de tout pour Lulu
— Faut bien que quelqu’un
fasse la mienne non, donc…
— euh pardon tu as
dit quoi ? fais-je perdu
— Que je vais à
Paris pour déposer mon visa, tu as la tête ailleurs ou quoi ?
— Entre nous deux
qui a la tête ailleurs ? la repris-je agacé. Tu pars avec qui ? Qui t’a invité
au Gabon ?
— Clairement tu es
tombé sur la tête si tu ne te souviens pas m’avoir demandé une semaine plutôt
si tu pouvais emmener Lulu…
— Ton nom c’est lulu ?
je gronde et Garcelle qui s’assoupissait, commence à gigoter
Je sors de la chambre
pour ne pas la réveiller. Vita ne va pas y arriver. Je jure elle ne va pas me
rendre fou. Je reprends la ligne mais elle a déjà raccroché. Je rappelle et
elle ne répond pas. C’est finalement pour me laisser un message condescendant.
Elle : quand tu auras
retrouvé tes esprits, tu pourras m’appeler.
Lui : c’est te
donner trop d’importance, si je t’insulte. Mais sache que tu n’es pas invitée au
Gabon. L’invitation n’était que pour Lucille
Elle : sache que
Lucille vient avec moi, je viens avec Lucille, on vient ensemble, vient-on ensemble,
ensemble on vient, et toutes les tournures que tu veux. Je te laisse deux jours
jusqu’à 11 h 30 pour me confirmer si tu veux toujours qu’elle fasse
partie de ton voyage ou pas
Lui : mais tu te
prends pour qui ? HEIN ! c’est à qui tu donnes des ultimatums ? je tape en
furie
Elle : night night, c’est
tout ce qu’elle trouve à me répondre
Mais comment elle est née ?
On a idée d’être aussi obtus ? Merde de chez merde. Elle m’a gâché la nuit. Je n’allais
pas non plus la laisser me saper la journée. Quinze heures, c’était son départ
de ce qu’elle m’a dit la veille donc j’ai pris deux heures au boulot pour
passer voir sa mère, accompagnée de ma tante. Les bêtises ont assez duré.
— Marcia c’est quoi
avec ta fille hein ? Pourquoi elle s’en prend à mon garçon ? c’est elle la
première mère célibataire dans ce pays pour qu’elle nous fatigue avec les
caprices à n’en plus finir ? se lance ma tante avant même que je ne l’ouvre
— Les caprices tu dis ?
Quand ton garçon donne des heures et arrive avec du retard ici, tu nous as
entendus nous plaindre ? Je suis venue faire un vacarme chez toi ? Thierry, n’est-ce
pas devant toi que reprit Vita sur certaines attitudes ? Je te croyais reconnaissant
mais je vois que j’ai fait erreur
— pas du tout madame,
essayai-je de me rattraper vu que ma tante à qui j’ai fait appel pour plutôt apaiser
les choses produisait le résultat inverse
— Être en retard c’est
quoi comparé à un voyage ? Depuis quand la maîtresse voyage avec un couple ?
– tu vas te méfier !
ma fille n’est la maîtresse de personne ! l’averti la mère de Vita, tandis que
j’essayais de calmer ma tante
La fameuse maîtresse nous
observait simplement, les bras croisés comme si on jouait une scène pour elle.
— Écoutez, l’histoire
n’est pas aussi compliquée que ça, j’explique à la grand-mère de ma fille. Je
voulais simplement emmener Lulu au pays pour rencontrer les miens. J’y vais
avec ma copine donc vous comprendrez que ce n’est pas acceptable pour Vita d’être
avec nous
— Comme tu as dit c’est
simple ! Si Vita n’est pas acceptable, Lulu ne l’est pas non plus, dit
également sa mère, ce qui accroît ma déception. Je m’attendais à plus de bon
sens d’une aînée.
La rencontre n’a
finalement rien donné. Ma tante aussi qui ne trouve pas qu’elle en a assez
fait, était chez moi à mon retour et vu la face de copine, elle avait tout
balancé.
— tout ça c’est long
Thierry, tu vas demander la garde exclusive de Lucille et on verra ce qu’elle
va faire, dit Garcie après la pluie d’insultes de ma tante
***Garcelle Ekim***
Il fixe son visage long
comme les chaussettes qui des joueurs de baseball pour me dire qu’il ne peut
pas.
— et pourquoi ? je
demande les lèvres brûlantes d’insultes
— on s’est déjà engueulé
une fois et sorti ça respectivement pour les menaces, depuis nous avons promis
de ne pas arriver là pour le bien de Lulu
— Tu me dis nous ? c’est
ce que je viens d’entendre ? m’écriai-je
— Comprends-moi bébé,
je dois penser à Lucille en premier. En plus je doute qu’on me donne cette
garde et probablement pas avant le voyage qui aura lieu dans un mois
— Alors fais quelque
chose ! la garde partagée par exemple, c’est quoi cet abus de pouvoir qu’elle a ?
Parce qu’elle est la mère tu n’as pas de droits en tant que père ?
— Eh affaire de
garde partagée là, Thierry tu vas payer la pension comme tu travailles et elle
non hein, dit sa tante. Faux cul comme ça. Elle était ici à insulter la fille
et maintenant qu’il s’agit d’argent elle retourne sa veste, vu que Thierry la dépanne
souvent
Je m’intime le calme, et me
répète la phrase comme un mantra jusqu’à ce que mon cœur cesse de s’affoler. Je
ne veux pas non plus que cette pouffe touche à un rond de plus de mon gars. Les
150 euros qu’il lui donne par mois me saoulent déjà mais comme j’accepte
sa fille, je ne peux pas m’en plaindre. Mais c’est sûr que s’il demande la
garde partagée, il risque de lui verser une pension plus élevée vu que l’autre
conne est au chômage. Une grosse paresseuse en plus, Thierry m’a dit qu’elle
vivait avec sa mère. Au lieu de se bouger, elle préfère rester dans son village
et bouffer 150 euros par mois. Pour m’humilier, il l’a vraiment fait. Incapable
de me tromper au moins avec une qui en vaut la peine. Bref je ne dis mot à Thierry
pendant la nuit entière mais le matin, mon humeur est différente. Je me laisse embrasser
et câliner.
— ce n’est pas l’idéal
mais je promets de faire mon max pour que les vacances ne soient pas gâchées,
il tente de me rassurer
— Tu ne lui donnes
rien pour son billet, je ne….
— elle ne m’a rien
demandé Garcelle, il me coupe
— Si elle au
chômage, d’où trouve-t-elle son argent ?
— je ne fouine pas
dans sa vie personnelle
— Tu devrais, on ne
sait…
— On peut parler d’autre
chose ?
Comme il demande, nous changeons
de sujet. Mais je n’ai pas encore dit mon dernier mot. Ce n’est pas avec moi qu’elle
va jouer. Si elle ne veut pas rester dans l’ombre d’elle-même je vais la traîner
de force. Je contacte donc un ami de papa qui travaille au consulat et lui
demande de faire ce qu’il peut pour que Vita Andres ne reçoive pas son visa. Lucille
peut même rester, on s’en fout. Ma proposition ne deviendra pas une occasion de
moqueries pour moi.
p.s : arrêtez d’accuser les gens cadeau hein, vous avez vu Garcelle tuer l’enfant des gens où ? C’est ce qu’on a vu qu’on dit, anhan