Chapitre 10
Ecrit par WumiRa
Impuissante, la rage au coeur et un sourire des plus hypocrites sur les lèvres, Maya évoluait de tables en tables, pour saluer les personnes venues assister à son mariage.
Elle avait l'impression de rêver, d'évoluer dans un milieu qui n'était pas le sien, mais quoi qu'elle fasse, désormais elle était bel et bien la femme de l'homme qu'elle détestait. Finalement, c'était arrivé... Madame Sylla. Ce nom résonna longtemps dans sa tête. Au moment d'apposer sa signature en bas du document qu'on lui avait tendu un moment plus tôt, elle avait été sur le point de se rétracter et de tous les envoyer au diable, mais ensuite elle avait croisé le regard à la fois soulagé et fier de son père ; elle n'avait pas eu d'autre choix.
Tendue à l'extrême, elle passa nerveusement une main sur sa robe blanche. Un cadeau de son époux, qu'elle aurait sans doute apprécié si les choses n'étaient pas telles qu'elles étaient actuellement. Tout était allé si vite. Une heure avant la cérémonie, sa mère l'avait prise à part pour lui demander si elle était vraiment sûre que Malik était l'homme qu'il lui fallait. Maya avait acquiescé, en la rassurant qu'en effet il était celui qu'elle avait tant attendu. Et visiblement ses parents étaient ravis qu'elle ait soit disant oublié Djibril ! Elle ne l'avait plus revu et c'était tant mieux. Comment avait-elle envisagé un seul instant de passer le restant de ses jours avec un homme qui osait lever la main sur elle ?
Soupirant, elle baissa les yeux sur l'alliance qui brillait à son doigt. Pathétique. Heureusement, se rappela-t-elle, il s'était contenté de l'embrasser sur la joue au terme de cette courte cérémonie. Elle avait sentit ses lèvres chaudes effleurer les siennes, mais ce contact n'avait duré qu'une fraction de seconde. Aux yeux de tous, Malik était l'homme parfait, elle avait même surpris les regards envieux et pleins de convoitise de certaines femmes. Ce qu'ils ignoraient c'était que si la cérémonie était réussie, le mariage en lui même n'avait rien à avoir avec de réels sentiments, tout jusqu'au marié lui-même était hypocrite.
- Vous êtes sexy, madame Sylla, dit une voix derrière elle.
Elle se retourna pour découvrir son cher époux posté près d'elle ; il la fixait d'un air satisfait. Oh, elle n'ignorait pas qu'il l'était en effet. Il avait obtenu ce qu'il voulait.
Lui-même était plus séduisant que jamais dans son costume noir qui mettait en valeur son corps d'Appollon et qui attirait tous les regards féminins. Elle leva vers lui un regard indifférent.
- Je ne veux pas que tu m'appelles comme ça.
- C'est pourtant ce que tu es, repondit-il en s'avançant vers elle.
Il lui effleura la joue du doigt.
- Tu as l'air toute crispée. J'aurais dû te donner un véritable baiser, mais nous allons rattraper tout ça.
Instinctivement, elle recula.
- Je te prie de cesser ta comédie quand nous sommes seuls. Rien ne t'y oblige.
- Tu as l'impression que tout ça c'est de la comédie ? demanda t-il.
- Je me sens dans la peau d'un imposteur, alors que c'est t...
- Nous sommes observés, garde tes remarques pour plus tard et viens. Le repas de noces va bientôt commencer.
Il ne lui laissa pas le temps de répondre et la prit par la taille.
- Tu n'es pas obligé d'être aussi proche, tu sais ? se plaignit-elle tandis qu'ils se dirigeaient vers les autres invités.
- J'aime beaucoup ton parfum.
- Je...je le changerai.
- Libre à toi.
Elle le suivit jusque dans le jardin, où trônaient plusieurs tables fleuries et décorées.
Tout ça était "beau", reconnu Maya, mais elle n'était pas et ne serait pas heureuse dans ce mariage. Elle en avait un peu plus la certitude à chaque minute qui passait. Elle n'y gagnerait rien, bien au contraire, elle risquait d'y laisser des plumes.
- Tiens, voici Rachel.
Elle se figea et regarda devant elle. Une jeune femme s'avançait vers eux.
- Oh mon Dieu, Mal j'arrive toujours pas à y croire ! fit celle ci, une fois parvenue à leur hauteur.
Elle déposa une bise résonnante sur chacune de leurs joues, à tous les deux. Sérieux ?
- Vous êtes très beaux et je vous envie tellement !
- Demande Samir en mariage, plaisanta Malik.
- Oui c'est ça, répondit la jeune femme en riant.
Puis son regard croisa celui de Maya.
- Et bien... Puisque je ne vous reverrai pas pendant un bon moment, j'en profite pour m'excuser auprès de ta femme Mal. Je n'aurais pas dû faire ce que j'ai fait.
- Moi aussi je suis désolée, dit Maya. Je ne pensais pas un mot de ce que j'ai dit.
- Oh ne t'inquiète pas, la jalousie ça me connait.
- Sérieusement.
Elle vit Rachel tendre les bras vers elle.
- C'est oublié, alors... Bienvenue dans la famille ! J'espère que vous serez très heureux et que tu parviendras à dompter l'indomptable.
Embarrassée et honteuse de la manière dont elle s'était comportée, Maya accepta de la serrer dans ses bras.
- Merci.
- Et je veux une ribambelle de neveux et nièces. Mal, fit-elle en regardant le marié, tu vas t'y mettre j'espère ?
- Pas avant d'avoir suffisamment profité de ma femme, moi aussi je suis très jaloux.
Il accompagna ses paroles d'un baiser sur la tempe de Maya.
- Samir n'a pas pu venir mais de toute façon après votre retour des îles...
- Hey, shut ! OK, aurevoir.
Elle s'éloigna en riant, les laissant à nouveau seul.
- Qu'a t-elle voulu dire ? s'enquit Maya.
- Rien.
- Je n'ai pas l'intention d'aller en l'une de miel Malik. Ne poussons pas la comédie aussi loin.
- Je ne joue aucune comédie. J'ai été clair sur ce point.
- Je ne peux pas. Non, je ne pourrai pas...
- Très bien.
- Quoi ?
- Allons-y. Ne faisons pas trop attendre les invités.
***
- L'amour fou au premier regard, quand je pense que bon nombre n'y croient plus ! commenta la mère de Maya alors qu'ils étaient à table. Mon mari et moi avons connu la même chose.
Malik abserva sa belle mère avec sourire. Elle non plus ne l'avait pas reconnu. Mais de toute façon, il n'aimait pas sa fille. Maya lui plaisait, lui donnait envie de coucher avec elle, mais ça s'arrêtait là malheureusement. Ce mariage serait terminé en même temps qu'il détruirait Fall. Elle n'en souffrirait pas puisqu'elle non plus ne l'aimait pas, à moins bien sûr, qu'elle s'amourache bêtement de lui. Elle tout comme son père, ne saurait jamais qui il était et une fois sa soif de vengeance assouvie, il s'en irait. Il irait refaire sa vie ailleurs, loin de cette famille qui lui avait volée la sienne. Il se pencha vers Maya et lui murmura dans l'oreille :
- Ton père est très satisfait de toi. Il doit être tellement occupé à rêver de son entreprise qu'il n'a pas remarqué que durant toute la soirée tu n'as pas placé un mot.
Il la vit se raidir, puis son regard se posa sur le visage de son père. Ce dernier était en pleine conversation avec l'un des invités. Elle s'excusa, prétextant qu'elle allait se refaire une beauté, pour s'éclipser. Après un sourire charmeur à l'adresse des autres invités, il se leva pour la suivre.
- Si c'est me voir perdre mon sang froid que tu souhaites, et bien... et bien, tu es encore plus sadique que ce que je pensais, lâcha Maya lorsqu'il la rejoignit dans une chambre à l'étage.
- Tu es censée être auprès de "nos" invités.
- Tu es cinglé. Après que tu aies réussi à me couper l'appétit ? Tu peux y retourner toi, je ne retournerai pas là bas.
D'un mouvement du pied, Malik referma la porte.
- Tu as honte de ton père.
Elle demeura bouche bée durant quelques secondes, puis un rire nerveux s'échappa de sa gorge.
- Si c'est ce que tu crois, alors...
- Avant que je ne lui dise que nous nous connaissions, tu as accepté de m'épouser non pas parce que tu n'avais pas le choix, mais parce que tu devais le faire. Qui est-ce qui t'a obligé ?
Cette fois elle le regarda comme si il était fou.
- Tu crois que mes parents me sacrifieraient pour une simple entreprise ? Mais...
- L'HFL vaut des millions, tu ne l'ignores pas.
Elle porta une main à sa tempe.
- Tu peux me dire pourquoi ma famille t'intéresse t-elle autant ?
- Tu es ma femme, repondit-il en appuyant sur chaque mot. J'ai le droit de connaître tout...
- Tout ce que je te permettai de connaître. Et je t'interdit d'enquêter sur l'un de nous trois, parce que je sais que tu vas le faire Malik. Laisse ma famille en paix !
- Vraiment ?
- Je veux dire, réglez ce problème avec la gestion de l'entreprise mais limite toi à cela et à ce mariage de pacotille.
Malik observa plus attentivement la jeune femme. À présent, il était certain que les Fall cachait quelque chose qu'il se ferait un plaisir de découvrir. Ce serait un bonus lorsqu'il en aurait fini avec Henri Fall. Son intuition lui faisait penser que cette chose était en rapport avec la naissance mystérieuse de la jeune femme. Cela expliquerait pourquoi ses parents et lui n'avaient jamais connu l'existence de la petite Maya.
Il lui tendit la main.
- Retournons en bas.
- Vas-y seul.
- Je ne voulais pas te faire de la peine, désolé.
- C'est plutôt toi qui me fait de la peine, rétorqua t-elle.
- Je suis curieux de savoir pourquoi.
- Tu vas devoir vivre avec quelqu'un qui te déteste plus que ne l'imagineras jamais.
Ensuite elle le dépassa et sortit de la pièce.