Chapitre 10: Le dîner de la réconciliation
Ecrit par MTB
Après avoir lu le message d’Eric, elle mit longtemps à réfléchir.
Qu’avait-il l’intention de faire avec elle en l’invitant à dîner ? Etait-ce
pour lui redemander la raison de sa colère ? Elle ne pouvait pas se permettre
de se faire traiter de la sorte. Et si elle acceptait mais lui faisait faux
bond en prétextant des douleurs au bas-ventre ? Ce serait sa revanche à elle et
ils seront quittes si elle calcule bien. Elle répondit donc au moment
d’éteindre son ordinateur par l’affirmative à l’invitation d’Eric qui sauta
presque dans son bureau. On aurait dit qu’il avait passé le reste du temps à
attendre que son message. Sans attendre trop longtemps, elle prit le combiné
posé sur sa tablette et composa le numéro en interne d’Eric. Le cœur de ce
dernier fit un bond quand il vit le nom affiché. Il décrocha en espérant
qu’elle ne soit pas revenue sur sa décision.
·
Allo, oui Odette…
·
20h.
Il n’avait même pas encore fini de parler quand elle coupa sèchement en
disant vingt heures et sans ajouter un commentaire de plus, elle raccrocha,
prit son sac à main griffé Dolce & Gabana puis se retrouva dans
l’ascenseur. Avait-elle souri en parlant aussi sèchement ? Finalement était-ce
une si bonne idée que cela de l’inviter ? Comment les choses se
passeraient-elles ? Ruminant ses pensées, Eric ne se rendit pas compte qu’il
était déjà dix-neuf heures et qu’il était encore au bureau. Il appuya juste sur
le bouton de mise en veille, et se retrouva à conduire sa voiture comme un
ivrogne. Il ne fallait surtout pas la faire attendre. Sinon son sort pourrait
s’aggraver. Il savait qu’il pouvait compter sur ses talents d’excellent
conducteur pour ne pas être en retard. Il gara la voiture au pied de l’immeuble
et demanda à son agent de sécurité de s’occuper de l’entretien car il devait
ressortir dans un quart d’heure. Ce dernier, espérant un geste de
reconnaissance de son patron, passa rapidement l’aspirateur à l’intérieur pour
se rassurer que c’était bien propre et arrosa la voiture avec des jets d’eau
qui coulait abondamment d’un tuyau raccordé à la pompe. Il fit si vite qu’on
aurait pensé à une station de lavage à sec de voiture express en quinze
minutes. Il est évident qu’avec la propreté de la voiture, même le constructeur
pense qu’elle venait de sortir de l’usine. Eric lui-même avait été
impressionné. S’il avait un si bon agent, alors pourquoi devrait-il encore
envoyer sa voiture à la station d’essence pour le lavage ? Il n’a pas longtemps
réfléchi et tendit un billet neuf de cinq mille francs à l’agent qui le
remercia en se courbant si bas qu’on dirait qu’il recevait de l’aumône.
Il était déjà habillé d’une jolie veste bleu cérémoniel et une chemise
blanche bien propre en dessous. Mais il ne savait pas comment elle
s’habillerait et donc décida de ne mettre la cravate qu’une fois arrivé chez
elle. Il sonnait presque vingt heures quand il appuya sur la sonnerie du
portail. Une petite voix lui parla à travers l’interphone et il déclina l’objet
de sa présence. Ensuite un monsieur, probablement le gardien de nuit, lui
ouvrit le portail et l’installa au salon principal. C’était un cadre cossu avec
des meubles qui ressemblaient à ceux utilisés par les rois de France. Il y
avait quelques œuvres d’art accrochées çà et là. Ce qui était frappant était
leur disposition à la fois contre le mur et sur les meubles. Ce travail n’a pu
être réalisé que par un expert et doit coûter une fortune. Le portrait du
Président de la République aussi était parmi le lot. Ce n’était pas une photo
comme on en trouve dans les bureaux mais plutôt une représentation peinte. Il
était impressionné par l’humeur que dégageait le personnage et que l’artiste
peintre avait réussie à capture sur sa toile. Tout était calme. On dirait que
personne ne vivait ici. Il était encore là à contempler cette fois-ci un
portrait d’Odette qu’il ne s’était pas rendu compte qu’elle se tenait juste
derrière lui. Ce fût l’odeur du parfum de Nina Ricci qui attira son attention.
Il se retourna et sursauta. Elle était là, devant lui. Son cœur se serra comme
ce jour de la proclamation des résultats du Baccalauréat et commença à battre
très rapidement. Pas besoin de stéthoscope pour s’en rendre compte puisque sa
respiration devint légèrement bruyante.
Il ne rêvait pas. Elle était là, juste légèrement maquillée mais encore
plus belle. Il avait eu raison de n’avoir pas mis de cravate car il se serait
senti sûrement étouffé. Elle avait juste souri quand il s’était retourné mais
là, le sourire était reparti et a laissé place à un visage qui ne laissait pas
deviner les émotions. En effet, elle avait été envahie de bonheur de le voir
debout devant le portrait qui lui avait été livré ce soir-là même. Il était le
premier à le voir à part elle bien sûr. Même ses parents, qui n’étaient pas
encore rentrés, n’ont pas encore eu cette chance. Elle était heureuse de savoir
qu’elle devait lui faire de l’effet mais s’inquiétait aussi déjà. Et si c’était
elle qui se faisait des films dans sa tête ? Et s’il regardait le tableau comme
on regarde une œuvre d’art quelconque ? Et puis, elle avait prévu se venger de
lui n’est-ce pas ? Alors pourquoi sourire ?
à suivre...