Chapitre 11
Ecrit par Annabelle Sara
Victoire courut aussi vite qu’elle put, deux semaines, deux semaines et personne ne lui passe un coup de fil pour lui dire ce qui était arrivé à son amie. Si elle n’avait pas rencontré Patricia dans les rues à sa sortie de cour elle n’aurait jamais été au courant. Au départ l’adolescente pensait que le mannequin savait et qu’elle avait délibérément refusé de rendre visite à son amie. Comment serait-elle arrivée à défiler sachant que Cassie était dans un hôpital. Patricia la suivait au pas de course et lui tenait la main comme pour la réconforter. Elle prit peur était-ce grave ou alors… avait-elle perdu son bébé ?
Elles y étaient, Victoire aperçut Ronald au chevet de sa sœur accompagné de Stéphane et de … Angèle !
Elle ne comprenait pas, mais en voyant la distance qui séparait sa sœur de Medou, tout fut clair dans sa tête, il avait quitté Ingrid Djoumessi pour la remplacer avec Angèle Esso’o’o. Victoire faillit s’évanouir, cette découverte lui faisait un mal de chien, elle n’aurait jamais imaginé avoir autant envie de disparaitre que là, maintenant.
Mais elle n’était pas là pour ça, elle était là pour voir son amie.
« Victoire ! », murmura Cassie en l’apercevant entrer avec Patricia aussitôt elle lui tendit les mains.
Ignorant les regards froids des frères Edang, Victoire se précipita vers la jeune femme couverte de bleues et sparadrap qui était allongée le visage convulsé par la douleur et le bonheur de voir son amie. Elle s’agenouilla devant elle en pleurant, Cassie prit son visage dans ses mains, Victoire l’embrassa.
« Pardonne moi, je ne l’ai appris qu’aujourd’hui, je n’aurais pas dû aller à ces fichus défilés ! »
« Je sais… ce n’est pas de ta faute… »
« J’aurais dû être là pour toi ! », dit-elle levant la tête vers sa sœur. « Pourquoi personne ne m’a rien dit ? »
« Je croyais… te l’avoir dit en te parlant du partenariat avec La Crête ! »
« Je sais que si tu l’avais su tu serais venu immédiatement ! », murmura Cassie qui lui tirait le bras pour qu’elle reporte son attention sur elle.
« Comment …qu’est-ce qui s’est passé ? », s’enquit-elle tandis que les autres quittaient la pièce.
Victoire fut expulsée de la chambre de Cassie par une infirmière, elle sortie en promettant d’être là dans la matinée, puis elle alla voir le petit garçon, Victor ! Elle était heureuse de savoir que son amie avait donné le nom de son fils en son honneur et l’avait choisi comme marraine.
Elle observa son filleul qu’on avait accouché par césarienne, ce mot lui rappelait de mauvais souvenir qu’elle refoula en voyant le petit être qui semblait dormir dans sa couveuse. Elle sourit heureuse de voir ses petits pieds bouger.
Victoire ne comprenait pas ce qui avait poussé Ingrid Djoumessi à commettre un acte aussi funeste, elle l’a peut-être payé en perdant son fiancé, mais cela a failli couter la vie de deux êtres qui lui étaient chers. Il fallait qu’elle lui rende une petite visite pour essayer de comprendre pourquoi elle avait agit sans réfléchir.
Elle se dirigea vers la chambre de cette dernière et la vit le regard vitreux, elle paraissait sans vie. Elle frappa à la porte. Sa rivale de toujours tourna la tête dans sa direction et en la voyant se détourna et ne lui fit aucun signe. Victoire entra même sans y être invitée.
« Si tu es là pour me frapper à terre… ce n’est pas la peine les réseaux sociaux vous serviront mieux ! », lança-t-elle en un murmure.
« Ingrid je n’ai jamais eu recours au lynchage publique, je préfère régler mes problèmes moi-même et avec les concernés en face de moi. », lui rétorqua Victoire en prenant place près du mannequin en convalescence.
« Alors pourquoi est tu là ? Tu viens cracher sur mes restes ? »
« Tu n’as jamais été un obstacle pour moi et moi encore moins un pour toi, en fait nous aurions été de bonnes amies si tu n’étais pas autant orgueilleuse et arrogante ! Et si je suis ici c’est pour te poser une question… pourquoi t’obstiner à te faire ainsi détester ?»
« Je ne comprends pas… »
« Vous étiez enceintes toutes les deux, Mais tu as quand même pris le risque de la pousser dans le vide… Pourquoi ? »
Ingrid ne répondit pas, Victoire pouvait voir ses yeux briller, mouillés par les tonnes de larmes qu’elle avait déjà versées.
« Si je te pose cette question c’est pour que tu prennes conscience, de la noirceur qui t’entoures et qui va te suivre si tu ne changes pas ! Si tu n’apprends pas à offrir ce que tu voudrais recevoir ! Si tu veux de l’amour donnes en plus que ce que tu en a pas juste pour les caméras et les photos mais d’abord avec ton entourage… Tu te rends compte de ce que tu as eu comme accident et tu es là toute seule ? Ingrid… Tu es belle ! Ta beauté ne souffrira de rien si tu te rends compte que ceux qui t’entourent eux aussi le sont ! »
L’ex-fiancée de Stéphane Medou se mit à pleurer, et Victoire la prit dans ses bras pour la consoler.
« Là tout ira bien ! », susurra-t-elle en lui nettoyant ses yeux.
Elle vit soudain une silhouette se déplacer dans son dos et comprit qu’une personne avait écouté leur conversation. Elle sut par l’odeur qui resta au seuil de la porte de qui il s’agissait.
Stéphane, depuis quand était il là à les regarder.
Angèle restait muette, la scène devant ses yeux la rendait quelque peu anxieuse. Pendant, près d’un mois elle avait réussi à construire une sorte de relation avec, la famille Edang et surtout avec Stéphane. Mais aujourd’hui elle avait l’impression que la situation lui échappait complètement, et ce à cause de la présence d’une seule personne qui avait été enrôlé dans ce projet par sa propre initiative.
Ce qui était le plus étonnant dans cette histoire c’est que Victoire semblait ne pas comprendre l’intérêt que les patrons de EDANG BROS lui portaient ; d’abord ils restaient tous là accrocher à ses lèvres à écouter ce qu’elle pensait de la proposition qu’on lui faisait, s’exprimant sans ce rendre compte qu’ils avaient déjà décidé de prendre tout ce qu’elle voudra bien leur donner de son image.
Angèle voulait hurler ! Ce qui l’écœurait le plus, c’était l’attitude de Stéphane. Il n’avait pas voulut d’elle, il avait même refusé qu’elle l’aide à oublier sa peine après l’accident de sa sœur et la perte de son enfant, il voulait juste savoir si Victoire était au courant de ce qui était arrivé à son amie. Elle se souvient de la scène comme si c’était hier.
Elle avait préparé un diner quand elle avait appris qu’il allait venir chez elle se soir là pour revoir certain détail du contrat qu’ils avaient préparé. Elle avait sortie le grand jeu, s’imaginant que ce soir serait le bon pour remplacer cette Djoumessi qui l’avait brisé comme il le disait lui-même. Et contrairement à ce qu’elle croyait, il ne la voulait pas en prétextant :
« Je ne suis pas un homme pour vous Ange, vous méritez quelqu’un qui saura prendre soin de vous et moi je ne suis pas cet homme ! »
L’envie de lui briser un des vases que David affectionnait tant sur le crane la démangea pendant des jours, jamais elle n’avait été humilié de cette manière. Mais elle ne lâcherait pas prise de si tôt.
Et aujourd’hui elle se disait que les regards que Stéphane posait sur sa sœur avaient une explication encore plus profonde. Chaque fois qu’un homme avait posé ces yeux sur sa sœur, elle en avait fait une bouchée. Mais pas cette fois, non cette fois Victoire ne s’interposera pas sur son chemin, même s’il fallait qu’elle lui déclare la guerre.
« Je crois que le projet est tout à fait acceptable, et cela me fera très plaisir de travailler avec des personnes de votre qualité tout en créant une nouvelle relation encore plus forte avec le publique, qui je crois n’a pas forcément une très bonne image de moi ! », déclara Victoire en riant faisant ainsi allusion à ses déboires amoureux.
Toute l’assistance se mit à rire avec elle. Sauf Stéphane que la question ne semblait pas amuser.
« J’aimerais juste faire profiter un peu l’association de femme et de fille dont je suis la marraine… », poursuivit-elle en se tournant les hauts responsables de la société qui demandait ses services.
« Nous aussi nous y avions pensé ! », intervint Stéphane Medou en se redressant sur son siège, pour mieux regarder le mannequin.
Tout au long de l’entrevue, elle avait tout fait pour éviter son regard et elle devait avouer qu’en fait elle avait juste évité de poser les yeux sur lui car elle ne voulait pas avoir sur ses lèvres le goût de celles de cet homme, qui envahissait son esprit chaque jour que le bon Dieu voulait bien lui accorder. Aujourd’hui, encore elle pouvait constater avec beaucoup de plaisir et d’appréhension, la subtile virilité qu’il dégageait. On ne le nomme pas Mister Chocolate pour rien, il est aussi appétissant qu’une barre de chocolat noire dans son costume sombre qu’il portait avec grande élégance, qui ne sied pas à bon nombre de membres de la gent masculine.
« Elles ont créer il y a quelques mois une confection… Je me disais que pourriez vous adresser à elle pour la main d’œuvre ?»
« Vicky c’est tout de même un grand risque ! », lança Ange en regardant sa sœur droit dans les yeux.
Pourquoi avait elle un regard aussi noir, Victoire avait trouvé sa sœur très froide depuis son arrivé dans les locaux de EDANG BROS, elle avait l’air d’une lionne qui préserve son territoire des envahisseurs. Non, Ange et elle s’entendent trop bien pour ça.
« Ne t’inquiète pas Ange, les œuvres des filles seront exposées à la prochaine foire, vous pourrez ainsi vous-même vérifier la qualité de leur travail ! »
« Ça, c’est une très bonne idée, nous n’y manquerons pas, et c’est bien d’allier le nom de La Crête à une action sociale c’est très avantageux pour la société », déclara Etienne Edang qui semblait visiblement content de cette entrevue.
L’oncle de Stéphane n’était pas l’homme qu’elle s’attendait à rencontrer, elle s’imaginait un homme imposant de part sa carrure et son caractère et surtout d’un certain âge. Forte à été sa surprise quand on lui a présenté un homme plutôt jeune et c’était d’autant plus extraordinaire qu’il dirige une aussi grande firme que celle-ci, et bizarrement elle avait une impression de déjà vu.
« Vous devrez donc nous faire communiquer une date pour vous rendre visite à votre exposition. », lui dit Stéphane en la tirant de ses réflexions.
« Bien-sûr ! », répondit-elle en souriant à l’homme qui il y’a quelques temps l’a embrassé de la manière la plus sensuelle qu’elle ait connu.
Elle avait longtemps pensé à cette expérience, et depuis toutes les fibres de son corps ne voulaient rien d’autre que le corps de cette homme contre le sien.
Victoire avait des nuits blanches, elle s’était retournée pendant des heures entières et se réveillait parfois après avoir fait un rêve dont elle n’était pas fière, mais qui l’excitait au plus haut point. Mais elle ne pouvait pas se laisser à espérer qu’un de ses souhaits se réalise, d’abord à cause de l’attirance de sa sœur pour cet homme, et donc du fait qu’elle ne voulait pas laisser un homme briser les liens entre sa sœur cadette et elle, mais aussi à cause du fait qu’avec Stéphane Medou ils étaient comme l’eau et le feu. Ils auraient une relation bien trop tumultueuse pour qu’elle survive à leurs environnements respectifs.
Elle avait donc décidé d’enfouir ce désir au plus profond d’elle-même.
Contrairement à Victoire, Stéphane sentait ses barrières se perforer sous l’action du sourire ravageur que cette femme arborait au fil de leurs rencontres. Il avait été très désappointé en se rendant compte qu’il l’avait mal jugé du moins par rapport à son amitié avec Cassie.
Lui pensait qu’elle avait refusé de rendre visite à son amie, il s’était surpris en étant heureux de l’avoir mal jugé. Pire, il avait adoré les visites qu’elle rendait à Ingrid, qui avait perdu leur enfant, il avait parfois l’impression qu’elle comprenait la situation de la jeune femme comme si elle avait déjà vécu cette horreur. Il avait de la peine à s’imaginer ce corps sublime arrondi par une grossesse.
Mince ! Elle ne pourrait être plus sexy !
Depuis le baiser, Stéphane savait que d’une certaine manière son destin était lié à celui de Victoire Esso’o. Il n’avait jamais eu un tel frisson en pensant à un baiser qu’en ce moment tandis que la réunion s’achevait et que la future égérie de La Crête quittait la pièce sans lui accorder un seul regard. Il avait tant espérer croiser son regard, plonger une fois de plus dans ce grand océan noir, qui lui donnait des insomnies. Toutes fois il existait une ombre sur le tableau dont il fallait qu’ils discutent tous les deux au plus vite !
En se levant pour la suivre, Stéphane croisa le regard d’Ange, elle ne semblait pas dans son assiette depuis l’arrivé de sa sœur à la réunion, elle semblait ne pas beaucoup apprécier la présence du mannequin et encore moins l’attention toute particulière qu’il lui accordait.
Elle ne pouvait pas être jalouse !
Stéphane n’avait aucune envie de créer une tension entre les deux sœurs, mais la force qui le poussait en ce moment vers la sœur ainée était juste irrésistible.
Il rattrapa la sœur Esso’o devant les portes de l’ascenseur où elle attendait en compagnie de son agent un petit homme trapu qui devait approcher les cinquante ans.
« Mr Medou, nous avons été très heureux par cette proposition, nous sommes déjà et je parle au nom Victoire en disant cela… », commença le petit homme en se tournant vers son interlocuteur avec un sourire qui illustrait parfaitement ses propos.
Mais Stéphane ne voulait rien savoir de tout ce que cet individu pouvait bien lui dire, la seule raison de sa présence devant cet ascenseur était à quelque pas et ne lui accordait aucune attention, même si Stéphane pouvait percevoir chaque fibres de son corps tendues dans l’attente de… il ne savait pas trop de quoi.
« Je pourrais parler une minute à votre cliente en privé ? J’ai des choses à régler avec elle ! », coupa-t-il sans quitter des yeux le mannequin qui se retourna intriguée et visiblement curieuse de connaitre la raison de cette discussion.
Sans attendre la réponse de l’homme Stéphane attrapa Victoire par le bras et l’emmena avec lui dans un des bureaux les plus proches de l’étage. La jeune femme se dégagea avec force au moment où ils n’étaient plus dans le champ de vision de son agent, apparemment elle n’avait aucune envie qu’il soupçonne quoique ce soit entre eux.
« Je peux savoir à quoi rime cette démonstration de force ? », s’enquit-elle en le foudroyant du regard, comme elle était belle quand elle était en colère… mais ce n’était pas pour cela qu’il l’avait emmené ici.
Il avait quelques comptes à régler avec elle !
« Je voudrais une explication tout de suite… simple et rationnelle ! », commença-t-il en la regardant droit dans les yeux.
« Je ne comprends pas de quelles explications vous voulez parler ! »
« Ah ! Oui vous me prenez pour le dernier des imbéciles ou quoi ? Je voudrais savoir ce qu’il se passe entre vous et Pierre ? », lança-t-il espérant que sa voix ne trahissait pas le sentiment qui traversait son corps chaque fois qu’il s’imaginait son meilleur ami en compagnie de cette femme.
Elle semblait amusée par cette situation pendant une minute mais son visage changea aussitôt d’expression
« En quoi ce qui se passe entre lui et moi peut-il bien vous regarder ? », demanda-t-elle sans ciller.
« Ne vous imaginez pas que je vais vous laisser briser la vie de mon ami… Pierre mérite bien plus que quoique ce soit vous ayez à offrir… »
Stéphane regretta aussitôt ses dernières paroles, un instant il pensa que la jeune femme allait s’étouffer tant elle rougit.
Elle se retourna pour ne pas lui faire face, il avait envie de la prendre dans ses bras mais il ne pouvait pas.
« Pierre a besoin de stabilité et vous êtes loin d’être le genre de femme qui correspond à ce terme… je vous demande donc de rester loin de lui… le plus loin possible ! J’espère ne plus avoir cette conversation avec vous Victoire ! »
Elle se retourna vers lui les yeux plissées, il ne pouvait pas lire à travers ceux-ci ils étaient trop brumeux.
« Moi non plus Mr Medou ! Cependant je suis heureuse de savoir que Pierre fait passer une femme avant vous, parce que vous ne méritez pas l’amitié qu’il vous porte, vous avez déjà oubliez que vous faisiez pareil il y a quelque temps ? », déclara-t-elle le laissant sans voix. « Autre chose c’est pas parce que vous me détestez que les autres sont obligés de faire pareil ! Et oui nous sommes d’accord sur une chose… Je ne veux plus JAMAIS avoir cette conversation avec vous… »
Elle se dirigea vers la sortie non sans le toiser en passant mais au moment d’ouvrir fit une pose.
« Dieu sait que je serais encore plus comblée si j’étais celle qui retient ainsi l’attention de votre ami, mais je ne le suis pas, comme vous l’avez si bien dit je n’ai rien à offrir et rassurez vous je le sais pertinemment ! Il ne vous reste plus qu’a poser la question à Pierre lui-même, il pourra vous éclairer ! »
Sur ceci elle le laissa seul avec la douleur qui le lançait, il se retourna en jetant le contenu d’une table de travail choir sur le sol.
Jamais il n’avait agit avec autant de maladresse, jamais dans toute sa vie il n‘avait été aussi rude avec une personne et encore moins avec une femme. La jalousie l’avait aveuglé, il n’aurait jamais réagit de la sorte si cette femme ne faisait pas naitre en lui ce sentiment tellement primitif, le pire c’est qu’il n’avait aucune idée de ce qu’il allait faire pour qu’elle lui pardonne son comportement.