Chapitre 16

Ecrit par Annabelle Sara

#UNS

   

Chapitre 16

   

Victoire écoutait d’une oreille distraite les bavardages de Julia et de Cassie qui essayait de lui faire penser à autre chose qu’à la confrontation de demain avec les journalistes. Ce qui en se moment l’inquiétait le plus n’était rien d’autre que l’expédition des hommes, qui prenait trop de temps. Elle ne voulait pas que quelqu’un soit blessé à cause d’elle, pire qu’il arrive quelque chose à Stéphane par sa faute, elle n’y survivrait pas. On sonna à la porte et les regards se figèrent, Chase le garde du corps leur fit signe de ne pas bouger, et s’en alla ouvrir.

Pendant une minute, le cœur de Victoire battu à se rompre.

  « Victoire ! », cria-t-on.

C’était Stéphane, elle se leva et courut dans sa direction, elle s’arrêta en le voyant venir vers elle accompagné de Pierre, de son frère et du chauffeur de Pierre, Billy.

Ils lui sourirent tous comme s’ils s’étaient entendus.

  « Tu es blanchie ma belle… »

Elle ne s’en rendit compte qu’au moment où elle sentit ses bras autour de ses hanches et qu’il la fit tourner dans les airs. Elle lui avait sauté dans les bras en criant de joie. Tandis que les spectateurs de cette scène se regardaient avec un air entendu quoique surpris par la rapidité de leur rapprochement. Victoire se réjouissait dans les bras de l’homme qu’elle aimait.

Parce que quoiqu’elle en dise, elle aimait cet homme c’était la seule explication qu’elle pouvait donner à cette joie profonde qu’elle ressentait dans ses bras.

Seigneur, comment était-elle tombée amoureuse de lui ? Il venait de lui donner une autre raison de l’aimer, même si ce sentiment n’était pas partagé elle le chérissait déjà.

  « Nous avons réussi, Victoire ! », dit-il en la posant au sol.

Ne voulant pas être de trop, les autres se retirèrent pour les laisser parler sans être dérangés. Stéphane en profita et emmena Vicky dans le salon dans lequel ils avaient parlé des heures plus tôt. Il prit place dans un fauteuil et installa le mannequin sur ses genoux.

Cette position mettait un peu Victoire mal à l’aise, elle essaya de s’éloigner.

  « Arrêtes de gigoter comme cela, ou alors je t’embrasse et tu ne sauras pas ce qui s’est passé. »

Elle se figea et lui fit face.

  « Mes baisers te répugnent autant ? »

  « Stéphane soit sérieux une minute…. »

  « D’accord, je vais essayer, ce n’est pas très évident… nous sommes allés voir le directeur de la division Tech de l’entreprise…, commença-t-il en lui caressant furtivement le dos. Qui nous a montré que les photos étaient truquées… »

  « Ah bon ?… » 

  « Oui rien ne concorde sur ses photos, les décors, les morceaux de photos superposés les uns aux autres pour monter tout ça, du boulot de pro bref on peut prouver que les images sont fausses… ensuite nous avons fait une escale au siège de L’Expression du web… » 

  « Pourquoi ? »

  « Si tu arrêtais une minute de m’interrompre tu le saurais ! », s’exclama-t-il en lui tirant gentiment le lobe de l’oreille. « En fait c’est à un de leur blog anonyme que nous devons ce scandale ! Peux-tu deviner qui en est le reporter ? »

  « Je ne peux pas … »

  « Dickson ! »

  « John ? »

  « Son frère, Phil et John est sa source sure. » 

   « Mais… il n’aurait pas pu aller aussi loin ! »

Stéphane approuva d’un signe de tête.

  « Il n’est pas assez intelligent pour monter cette histoire… les fausses photos lui ont été fourni autant que l’histoire, ceux qui ont monté cette histoire comptaient sur le fait que personne ne perdrait son temps à essayer de prouver que tu es innocente… mauvais calcul ! »

  « Pourquoi… si tu réfléchis bien le plan a fonctionné à merveille, j’ai été condamnée avant d’être jugée… Et même avec le démenti mon image est à jamais terni ! »

En parlant elle s’était levée et s’éloignait de lui.

  « Personne n’a pensé une seconde que j’étais victime d’un coup monté, tout le monde m’a tourné le dos comme si je ne méritais pas le bénéfice du doute… »

  « Victoire… »

  « D’une certaine façon cette histoire me servira de leçon ! Moi qui ai tant foi en ceux qui m’entourent… »

  « Je suis désolé… j’ai été idiot de croire ce chiffon… »

  « Et pour Angèle ? Et Nigel ? », s’écria-t-elle les larmes aux yeux.

  « Nigel, tu dois l’oublier tu ne peux pas lui refaire confiance, il s’est engraissé sur ton dos, mais ta sœur sera surement désolée et elle trouvera un moyen de se faire pardonner ! » 

Elle sembla réfléchir.

  « Et comment me ferais-je pardonner, moi ? »

  « De quoi tu parles ? », demanda Stéphane qui se tenait derrière elle.

  « Ne joues pas à ce jeu… tu sais très bien que l’éloignement entre elle et moi est en partie de ta faute. »

  « Et pourquoi ? Je ne me souviens pas vous avoir monté l’une contre l’autre ! »

  « Tu le fait inconsciemment chaque fois que tu me couves de ce regard devant elle… », répondit-elle en se retournant vers lui.

Saisissant le fond de sa pensée, il lui prit les mains et lui sourit.

  « J’ai été le plus clair possible avec ta sœur et elle va devoir se faire à l’idée que c’est avec toi que je veux être, et je suis sûr qu’elle y arrivera ! »

  « Pourquoi… pourquoi moi ? », demanda-t-elle un pincement au cœur dans l’attente d’une réponse. « Elle est cent fois mieux que moi et… je ne crois pas avoir quoique soit à t’offrir à part des problèmes...  Cette histoire devrait te servir de mise en garde !»

Une lueur traversa les yeux de Stéphane et sans prévenir il l’attira dans ses bras et pris sa bouche, dans un baiser langoureux. Victoire se laissa aller, elle avait un besoin impérieux de cet homme.

Il était d’une douceur blessante, ses lèvres sublimaient celles de sa compagne, comme s’il tenait dans ses bras un pétale de  rose et qu’il ne voulait pas le froisser. Répondant avec une soudaine fougue, elle se pressa contre lui en passant ses doigts dans ses cheveux ébène lourds et souples, lui livrant ainsi les secrets des douceurs de sa bouche. Il se fit plus impérieux, plus demandant. Victoire sentit son cœur faire un raté sous sa main, lorsqu’il l’entendit gémir en s’accrochant à sa chemise, qu’elle froissa dans ses doigts. Elle ne voulait pas être séparée de cette chaleur qui l’enveloppait chaque  fois qu’il  la tenait dans ses bras.

En traçant une ligne de feu avec sa langue sur la bouche de Victoire il lui arracha un gémissement qui fit tressaillir la jeune femme. Parce qu’elle ne s’était jamais sentit plus femme que dans les bras de Stéphane. Et cela ne faisait qu’accentuer ses sentiments à son égard.

  « Voilà pourquoi… », murmura-t-il contre son oreille en lui mordillant le lobe.

Leurs cœurs battaient à l’unisson et cette  douce musique berça tendrement Victoire qui savait que rien ne serait plus pareil…

  « Voilà pourquoi c’est toi et personne d’autre… car toi seule peux me faire ressentir toutes ces émotions… »

La voix de Stéphane était rauque, et portait une note qui fit frissonner la femme qu’il tenait dans ses bras.

On gratta à la porte et instinctivement Victoire s’écarta de ce lot d’émotions, elle se détourna vivement pour cacher au monde le bonheur qu’elle venait de vivre dans cette pièce.

  « Oui ! », répondit Stéphane apparemment amusé par la réaction du mannequin.

Cassie apparut mais n’entra pas dans le salon.

  « Nous avons pensé qu’il serait peut être mieux que tu restes cette nuit avec Vicky… »

Victoire se retourna effrayée par cette idée, comment pouvaient-ils envisager de la laisser seule avec lui, lui qui éveillait autant ses instincts les plus primaires, non c’était hors de question !

  « Ce sera parfait ne vous inquiétez pas je vais prendre soins d’elle ! », déclara le concerné anticipant ainsi son refus et l’empêchant de protester. « C’est parfait hein ! »

Profiteur, pensa Victoire en laissant tomber, d’ailleurs cela n’aurait servi à rien parce que de toute façon Cassie ne demandait pas son avis.

 

Après le départ de ses compagnons, Victoire prétexta une migraine et décida d’aller se coucher. Elle allait avoir besoin de repos, se dit Stéphane tandis que lui s’installait dans une chambre d’amis qu’elle avait préparé pour lui, quand il accompagnait Pierre et donnait les directives quant à la conférence de presse qui devait avoir lieu le lendemain. Avec Julia ils avaient décidé de prévenir les Djoumessi quant au changement de programme. Il fallait que les entreprises EDANG BROS soutiennent leur future égérie, maintenant qu’ils connaissaient tous la vérité.

Stéphane s’était sentit un peu gêné face à sa sœur quand il lui avait fait des excuses par rapport à son comportement.

  « Je sais que tu es toujours aussi pragmatique et parfois c’est à notre profit, si tu n’avais pas douté tu ne serais pas allé chercher ces preuves », lui avait-elle répondu en lui caressant sa joue rugueuse, visiblement heureuse de savoir que son frère était complètement sous le charme de son amie. « Prends soin d’elle c’est tout ce que je te demande ! »

Il ne convergeait que vers ce but, il voulait voir quitter des yeux de Victoire cette sourde douleur, dont lui et ses milliards de fans étaient la cause, ils ne lui avaient pas accordé une occasion pour se justifier ou pour s’expliquer.

Il eut un pincement au cœur en pensant que s’il n’avait pas parlé avec Johanne il serait surement en train de boire et d’essayer d’oublier la femme qui lui donnait envie à présent de défier le monde.

Il serait capable de tout donner pour vivre le peu de bonheur qu’elle voudra bien lui donner, gouter à sa douceur, son immense générosité et sa joie de vivre. Il fallait qu’elle reprenne le gout de la vie et il allait tout faire pour être celui qui le lui apporte. Pour effacer toutes les peines et les blessures dont il est l’auteur.

Un bruit attira son attention, et il se leva brusquement du lit aux draps bleus nuit que Victoire avait disposé. Il se leva et pieds nus se dirigea à pas de loup vers le salon principal.

Rien ! Il aperçu tout de même une lueur traversée une porte juste à coté de celle de Victoire. Un sentiment d’effroi le traversa une minute. Encore un de ces imbéciles qui l’attaque à longueur de journée ! Toute cette violence l’avait contrainte à se cloitrer dans sa villa, mais ils ne pouvaient pas lui en vouloir au point de pénétrer chez elle. En s’approchant de la porte il entendit des bruits qui ressemblaient à des sanglots.

Victoire était en larmes, le cœur de  Stéphane se fendit en milles morceaux. Ronald avait raison, la seul chose qui comptait pour lui en ce moment c’était de faire taire chacune de ses douleurs, s’il le pouvait il irait les lui arracher des entrailles et les grefferaient à son propre cœur pour être celui qui en  souffre.

Il poussa doucement la porte, pour ne pas la brusquer et manquer ainsi l’effrayer.

Il fut surprit de se rendre compte de la décoration de la pièce.

Elle était toute rose avec du papier peint aux motifs de fleurs roses et blanches. Dans un coin de la pièce on apercevait des armoires, des jouets d’enfant, une immense maison de poupée posée sur un tabouret, un berceau que des avions, des nounours et des personnages de dessins animés surplombaient tout en tournant autour d’un soleil.

Une chambre de bébé ! Mais Stéphane ne se souvenait pas avoir entendu parler d’un enfant que le mannequin a eu !

Elle était accrochée au pied en bois du berceau comme s’il s’agissait d’une bouée… il sentait qu’elle allait se noyer dans ses larmes attirée dans les profondeurs par son chagrin.

Cette vision émoustilla Stéphane, il commençait à peine à découvrir les grands secrets de Victoire Esso’o !

Doucement, il s’approcha et posa une main rassurante sur le dos de la femme en larmes, elle sursauta comme brulée par une flamme.

  « Victoire…, » murmura-t-il en s’accroupissant près d’elle.

  « Vas-t-en ! », fit-elle en s’écartant vivement ennuyée qu’il la voit dans cette état. « Vas-t-en … je t’en prie. »

  « Je ne peux pas et tu le sais très bien ! »

Elle ne répondit pas se contenta de se nettoyer le visage tout en le détournant de lui.

  « Je veux que tu m’expliques… à qui appartient cette chambre Victoire ? »

Elle ne lui donna aucune réponse gardant la tête tournée vers le mur. Stéphane s’assit en tailleur et la força à lui faire face. Elle avait les yeux rouges, mais surtout elle avait une expression que Stéphane n’arrivait pas à déchiffrer correctement, on aurait dit qu’elle se haïssait elle-même, pourquoi ?

  « Racontes moi Victoire … je veux savoir ! »

  « Non ! », fit-elle en secouant tout son corps tandis quelle essayait de refouler une nouvelle vague de douleur et de larmes.

  « Il le faut pourtant si tu veux que cette douleur s’atténue, tu dois en parler… » 

  « Pourquoi ma douleur  t’intéresse autant ? », demanda-t-elle le défiant le regard larmoyant.

En la voyant se braquer ainsi, il pensa qu’il devait s’en prendre à lui-même et à sa sacro sainte raison, si elle ne lui faisait pas assez confiance pour s’en remettre à lui.

  « Parce que j’ai horreur de te voir dans cette état quelque soit ce que tu peux penser de moi, Victoire ! »

Elle semblait convaincue, car elle se détendit, il pouvait voir ses épaules s’affaisser et son regard s’adoucir, sans se départir de toute la souffrance qui l’habitait. Et quelque chose souffla à Stéphane qu’une vieille plaie s’était ouverte.

  « C’est… cette pièce était destinée… à mon bébé ! », souffla-t-elle entre deux sanglots.

  « Etait ? Un bébé ? Tu as eu un bébé ? »

Elle hocha vivement la tête, tandis que les larmes coulaient sur ses joues, sur sa peau devenue toute rouge. Stéphane ne put rester là sans la toucher, il l’attira un peu plus dans ses bras.

  « Elle … je n’ai même pas pu la voir… Stéphane j’ai accouché d’une petite fille mort-née, je n’ai même pas pu la tenir dans mes bras et Ange avait dû provoquer son accouchement pour être auprès de moi… »

  « C’est arrivé il y’a cinq ans ? »

  « Oui ! Nous étions parties à l’Est pour rencontrer… notre père qui avait eu des problèmes avec un homme et il avait besoin de nous…, » elle s’interrompu pour se nettoyer les yeux et elle eu un geste qui enthousiasma Stéphane.

Elle s’accrocha instinctivement à lui en passant les bras autour de son cou, elle venait de changer de bouée de sauvetage, et il était fier qu’elle le choisisse lui ! Le contact de ses paumes sur sa peau l’enivra…

  « Nous avons payé ses dettes mais… surement à cause de ma tension j’ai eu un malaise et ma sœur m’a ramené ici dans une clinique privée… j’étais sensée accoucher deux semaines plus tard mais j’ai perdu mon bébé ce soir là… et j’ai repris connaissance cinq jours après… ils l’avaient déjà enterré ! »

Il  lui sécha chacune de ses larmes du bout des ses doigts.

  « J’ai perdu mon mari… Lucas ne m’a jamais pardonné mon voyage, il ne voulait pas que je quitte Les Etats-Unis dans mon état… il avait raison ! »

  « Non, ma chérie ce n’est pas ta faute, tu venais pour aider ton père qui était dans de sales draps… c’est la fatalité… »

Elle posa son front sur l’épaule de Stéphane.

  « Depuis, je suis toute seule… la vie ne m’a pas fait de cadeau, Stéphane ! Et je crois que je n’ai pas encore fini de payer mes dettes ! »

  « Non ! Tu n’es pas toute seule, tu as Cassie, Ronald, Patricia… et moi aussi je suis ici, Victoire ! »

Elle leva la tête, et leur regard se croisèrent, Stéphane pria pour qu’elle lise dans son regard l’intensité de ce qu’il ressentait pour elle, il ne serait pas capable de le lui dire lui-même. Doucement il lui passa les doigts sur le visage, maintenant il comprenait sa sollicitude envers Ingrid et la crise de nerf qu’elle avait fait à sa sœur en quittant l’hôpital le jour où elle avait découvert l’accident de Cassie, elle avait vécu le même drame.

Il chercha ses lèvres et les enveloppa avec une force qu’il ne se connaissait pas. En sentant le gout de l’amertume sur la bouche de sa compagne il sut que jamais il ne connaitra une femme comme Victoire et surtout il n’avait aucune envie d’en trouver une autre.

Il lui insuffla toute la force qu’il pouvait, caressant son dos il la porta dans ses bras et l’arracha à ses douloureux souvenirs pour l’emmener dans la chambre qu’il occupait quelques minutes plutôt. Il voulait qu’elle s’éloigne de tous les souvenirs de son dernier mariage, il fallait qu’il lui montre un nouvel univers sans blessures, sans larmes.

Il défit les draps en la gardant dans ses bras, puis la fit glisser dans le lit, elle frissonna mais ne se détourna pas de lui et gardait les yeux fixés sur lui tandis qu’il s’installait près d’elle, l’attrapait par les hanches pour la garder dans ses bras.

  « Ce soir je suis ton ange gardien ! », murmura-t-il à son oreille avant de lui donner un baiser sur le front. Dors en paix, je suis là !

Elle lui sourit et se détendit, puis soupirant d’aise elle se pelotonna contre lui et ferma aussitôt les yeux. Elle s’endormit le cœur apaisé dans l’étau de ses bras.

       

 

 


Un Nouveau Souffle