Chapitre 17 : Dérapage
Ecrit par Chrime Kouemo
Jim Édouard leva la tête et invita Sophie à entrer dans son bureau.
— Alors, tu viens boire un verre ? Demanda t’elle tout sourire.
C’était la fin de la journée et elle lui avait proposé lors de sa pause de sortir dans un bar. Il lui avait promis d’y réfléchir. Il n’avait pas trop la tête à s’amuser en ce moment. Avec Roxanne, c’était le froid complet. Il ne lui adressait plus la parole depuis la révélation de Clara, et dormait dans une autre chambre. Il ne parvenait toujours pas à digérer sa supercherie. Il se sentait floué, dupé. Il lui avait accordé sa pleine confiance pendant toutes ses années pour qu’elle, en retour, lui cache un pan aussi important de sa vie qui n’était pas sans conséquent sur leur vie de couple. L’excuse des médecins disant qu’elle n’avait aucun problème de conception ne le convainquait absolument pas. Deux avortements étaient rarement sans dommage.
Elle savait à quel point les enfants comptaient pour lui, et elle lui avait caché ça pendant dix ans ! Même s’il ne cautionnait pas les méthodes de sa petite sœur, il comprenait son geste. Il n’aurait pas non plus gardé ce genre de secret pour lui dans le même contexte.
Toute sa famille était bien évidemment au courant maintenant. Clara s’était fait un plaisir de divulguer la nouvelle avant même qu’il n’ait eu le temps de dire ouf. Couplé au fait que Roxanne l’eut mise dehors, le scandale était complet. Il n’avait pas aimé voir sa vie maritale affichée ainsi, mais il était trop déçu et trop bouleversé pour répondre correctement à sa mère qui lui mettait la pression pour trouver une femme qui lui ferait un enfant.
— Jim Édouard ?
Il revint brutalement à l’instant présent. Sophie, la tête légèrement inclinée, attendait sa réponse.
— Ok, c’est bon ! Je viens avec toi.
Il s’efforça de sourire. Peut-être qu’une soirée sans prise de tête et loin de son domicile lui ferait du bien. Il penserait enfin à autre chose. Sophie était très mature pour son âge malgré ses airs de midinette, il ne s’ennuierait pas. Ils déjeunaient quelques fois ensemble depuis un mois qu’elle effectuait son stage dans la banque et il avait eu l’occasion de se rendre compte qu’elle était ambitieuse et déterminée.
Il ferma son ordinateur et rangea rapidement son bureau avant de suivre la jeune femme.
***
Les amis de Sophie étaient sympas. Il se sentait un peu décalé dans cette ambiance de jeunes, mais la jeune femme et sa sœur faisaient tout pour le mettre à l’aise. Il jeta un coup d’œil amusé au petit morveux qui bavait devant Clara comme un chien devant un morceau de viande. Le pauvre, elle ne lui accordait même pas un regard, trop occupée à rigoler aux blagues de ses copines.
La soirée passa en flèche. Clara proposa de finir en boîte, mais il refusa. Cette petite sortie lui avait fait du bien, mais il aspirait à se poser au calme chez lui. De toutes les façons, il n’avait jamais été un gars friand de bringues.
Alors qu’il prenait congés, Sophie déclara elle aussi ne plus vouloir finalement rejoindre ses amis . Il se proposa donc de la déposer.
— Ca va ? Tu ne t’es pas trop ennuyé, j’espère ? Demanda t’elle alors qu’il démarrait la voiture.
Il s’inséra dans la circulation dense du vendredi soir en plein centre ville, avant de répondre.
— Non, pas du tout. Ça m’a changé de ma routine de me retrouver avec votre bande. C’était une véritable bouffée d’air frais.
— Tant mieux... Hum... Clara m’a un peu raconté ce que tu traversais en ce moment.
Il fit la grimace. Y’avait-il une personne proche de sa sœur qui ne fut pas au courant de cette histoire ? Il faudrait qu’il lui pense à lui toucher deux mots sur ses talents de commère.
— Elle n’aurait pas dû. C’est une affaire privée
— Ok... j’ai compris.
Ils étaient arrivés devant la résidence étudiante où vivait Sophie. Il coupa le moteur et se tourna vers elle.
— Merci de m’avoir invité. J’avais un peu oublié ce que ça faisait d’être jeune et insouciant.
Sophie sourit et lui donna une petite tape sur le bras.
— Tu n’es pas si vieux que ça hein ?
— Quand même hein ? Je n’ai pas loin du double de ton âge, répliqua t’il.
— En tout cas, moi je ne vois même pas ça.
Son sourire s’était élargi, dévoilant un peu plus ses dents d’une blancheur accentuée par la faible luminosité dans l’habitacle de la voiture. Il secoua la tête. Il était temps pour lui de rentrer.
— Bon, jeune fille, je te souhaite une bonne soirée et un bon week-end.
— Tu es si pressé que ça de rentrer ?
Elle s’était penchée vers lui, s’appuyant sur sa main qui n’avait pas quitté son bras. Son parfum entêtant envahissait progressivement ses narines.
— Ce n’est pas ça …
— C’est alors quoi ? On n’est pas bien là, tous les deux ?
Sa voix n’était plus qu’un murmure. Alors qu’’il ne s’y attendait pas, il sentit un léger frisson lui remonter le long de l’échine.
— Sophie…, commença t’il, ne sachant même pas exactement ce qu’il voulait dire.
— Quoi ? Tu ne vas pas nier ce qui se passe entre nous ?
— Il ne se passe rien entre nous. Je suis marié, et de toutes les façons, tu es beaucoup trop jeune et…
— Alors, pourquoi bandes-tu comme un cheval ? Demanda t’elle l’oeil coquin.
Et avant qu’il n’ait pu prévenir son geste, elle avait posé sa main sur son entrejambe qui honteusement pour lui était enflée. Sa respiration devint laborieuse tandis que le sang continuait d’affluer en vitesse vers cet endroit précis de son anatomie.
— Sophie… souffla t’il, luttant de toutes ses forces pour garder le contrôle sur les réactions de son corps.
Elle ne répondit pas, et se mit à le masser sans le quitter du regard. De seconde en seconde, il se vit glisser progressivement dans un puits profond de sensations. Il ferma les yeux et savoura la caresse des mains expertes de la jeune femme. Quand il sentit un bout de son ongle sur son prépuce, il sut qu’il était perdu. Il ne s’était même pas rendu compte qu’elle avait défait la boucle de son pantalon. Un gémissement lui échappa.
Sophie se rapprocha encore plus de lui. Ses seins se pressaient maintenant contre son torse et son tissage balayait son visage. Elle le baillonna d’un baiser et il n’eut plus d’autres choix que de l’embrasser aussi sauvagement qu’elle.
Dans la petite chambre d’étudiant, il se libéra de toutes ses frustrations et désillusions des dernières semaines, prenant Sophie dans plusieurs positions compliquées. Elle était une amante inventive et sans aucune inhibition. Ils jouirent plusieurs fois dans les bras l’un de l’autre. Ce n’est qu’au petit matin, qu’ils s’effondrèrent, épuisés, et qu’il s’abandonna dans un sommeil comateux.
**
*
Postée devant le bureau de Roxanne, Stella hésitait à toquer à la porte. Y avait-il vraiment une obligation à ce qu’elle lui annonce la nouvelle maintenant ? Ca pouvait peut être attendre, non ?
Mauviette ! Se réprimanda t’elle mentalement, avant de signaler sa présence.
Sa boss était assise derrière son ordinateur. La frange de son tissage barrait son front haut. Ses yeux étaient parfaitement maquillés, mais son regard demeurait triste. Elle n’était toujours pas parvenue à convaincre son mari d’entamer une procédure d’adoption, et ça la minait.
Ca lui fit de la peine de la voir ainsi.
Elle s’avança vers elle et se tint un peu gauchement devant son bureau. Les mots ne venaient pas aussi simplement qu’elle l’avait imaginé.
— Tu as une petite minute pour qu’on discute ?
— Oui, installe-toi.
Elle prit place en face d’elle sur le fauteuil rembourré. Son regard se perdit un instant sur la table parfaitement rangée. Sur le coin gauche, trônait un cadre photo doré, qui elle le savait, contenait une photo de Roxanne et son mari enlacés.
— Alors ? Fit Roxanne, les doigts croisés devant elle.
— Hum... euh...
Son amie haussa un sourcil à l’arc parfait.
— Qu’est ce qu’il y a ? je t’ai connue plus loquace.
— En fait... euh... je ne sais pas très bien comment te l’annoncer
— C’est à propos de quoi ? Tu as un souci avec un de nos clients ?
Elle détourna les yeux, de plus en plus embarrassée.
— Non, ce n’est pas vraiment un souci. C’est juste que ... hum... Kamsi et moi, nous sommes ensemble.
Ouf ! C’était enfin sorti. Elle avait pesé le pour et le contre pendant plusieurs jours, ne sachant pas trop comment aborder le sujet. Certes, Roxanne et elle étaient devenues amies, mais il n’en demeurait pas moins que la relation qu’elle entretenait avec Kamsi était délicate du point de vue professionnel.
Un sourire énigmatique se dessina sur les lèvres de Roxanne.
— Je me demandais quand tu te déciderais à me le dire ?
— Ah... Comment tu as su ?
— Quand je vous ai vus à la soirée caritative, j’ai senti que ce n’était plus qu’une question de temps. Et après la dernière réunion avec Tang Corp, j’ai compris que les carottes étaient cuites.
— Ah ! Fit-elle de nouveau, à la fois soulagée et un brin embarrassée.
— En tout cas, vous êtes des adultes tous les deux, et de ce que je connais vous deux, je peux vous faire confiance pour gérer correctement les choses en cas de problème.
— Ok...
Elle s’apprêtait à se lever pour s’en aller quand elle se souvint du tourment qu’elle avait lu dans ses yeux quelques minutes plus tôt.
— Et toi ça va ?
Son regard se voila imperceptiblement avant qu’elle lui réponde.
— Non... pas vraiment. Ça fait un mois que Jim Édouard et moi faisons chambre au part.
— Comment ça ? Qu’est-ce qui s’est passé ?
Roxanne détourna les yeux un instant. Quand elle la regarda de nouveau, elle y lut une peine qui lui fit mal au cœur.
— Il a découvert malencontreusement un pan de mon passé que je lui avais soigneusement caché et... Je crois qu’il me trompe.
— Oh... Tu es sure ?
— Oui... Je ne l’ai pas pris sur le fait, mais je le sais.
Son amie se prit un instant la tête entre les mains, puis reprit :
— Tu es dispo pour déjeuner ce midi ? Je te raconterai tout.
Elle avait déjà rendez-vous avec Kamsi, mais elle annulerait. Elle pourrait toujours le voir le soir.
— Ok. Ça marche.
Stella posa sa main sur celle de Roxanne. Elles étaient attablées dans un restaurant pas loin des bureaux du cabinet. Son amie n’avait cessé de se flageller durant tout le repas pour son mensonge au sujet des deux avortements qu’elle avait subis dans sa jeunesse.
— Arrête de t’accabler pour ca, Roxanne. Rien ne dit que c’est la raison pour laquelle tu n’arrives pas à concevoir.
— Peut-être, mais maintenant Jim Édouard ne me croit plus. Il pense que je lui ai caché le vrai diagnostic des médecins, tout comme je l’ai fait pour mes avortements.
— Il est en colère. Ça lui passera.
— Hum... C’est peut-être pour ça qu’il me trompe : pour me faire payer mon mensonge.
— Comment peux-tu être aussi sûre qu’il te trompe ?
— Je le connais très bien. Il est du genre casanier, mais depuis quelques semaines, il rentre excessivement tard. Il a même carrément découché la dernière fois.
— Évite de tirer des conclusions aussi hâtives. Essaie de parler avec lui.
Roxanne poussa un soupir désabusé.
— Parce que tu crois que je n’ai pas essayé ? J’ai fait mon mea culpa, mais depuis, il ne me dit rien. Je suis même prête à lui pardonner son infidélité, mais encore faut-il qu’il m’en laisse l’occasion.
Stella réfléchit un instant.
— Surprends le ! Organise un week-end en amoureux pour que vous puissiez vous retrouver loin de chez vous et loin des tensions familiales.
Roxanne acquiesça finalement.
— Oui, je vais essayer ça. Je l’aime et je ne veux pas le perdre.
— C’est le plus important et c’est ce que tu dois garder en tête.
**
*
Kamsi écoutait Etienne lui dresser un rapport détaillé de la situation de Ralph Njitoyap. Ils étaient installés dans son bureau. Le frère de Stella avait contacté son homme de mains pour lui proposer en gage un deuxième titre de propriété d’un des immeubles de son père. Etienne était donc venu le trouver en urgence pour qu’il débloque les fonds. En principe, il aurait dû jubiler, car cela représentait déjà plus de la moitié du patrimoine de Njitoyap, et étant donné sa situation, ce moribond de Ralph ne serait jamais en mesure de lui rembourser son argent, à moins de gagner un gros lot dans un marché publique.
Il soupira. La vie était bien étrange des fois. Alors qu’il avait attendu ce moment pendant années, il souhaitait maintenant ralentir la cadence des évènements, car l’accomplissement de sa vengeance sonnerait immanquablement la fin de son histoire avec Stella. Et il n’était pas prêt pour cela pour le moment. Son esprit faisait un blocage rien qu’à l’idée d’imaginer ne plus la voir, ne plus la toucher, ne plus entendre sa voix grave et son rire. Non, c’était décidément trop tôt pour songer à tout arrêter. Il avait encore beaucoup de choses à partager, à vivre avec elle. Pour quelqu’un qui avait minutieusement préparé son coup depuis des années, il s’était fait avoir. Dans tous les plans qu’il avait échafaudés pour se venger de Njitoyap, il n’avait jamais considéré un quelconque obstacle. Quand il avait découvert que Stella était sa fille, il y avait même vu une aubaine, une possibilité de frapper encore plus fort son adversaire, mais pas un frein. Maintenant, il en était autrement, il souhaitait l’épargner le plus possible de ses sombres desseins, mais il savait qu’elle serait invariablement touchée.
Bon… Chaque chose en son temps. Il n’en était pas encore là pour le moment. Il allait encore faire traîner les choses. Ça lui laisserait le temps d’aviser. Et puis, il finirait certainement par se lasser de Stella avec le temps.
— On va un peu temporiser, répondit-il finalement à Etienne. Ca prendra le temps que ça prendra, mais je veux avoir le reste de tous les titres de propriété de Njitoyap en une fois. Je n’ai pas envie de dépenser plus d’argent que ça alors que si on la joue fine, on peut entrer en possession de tout le patrimoine pour une bouchée de pain, mais pour cela ,il faut que Ralph soit acculé jusqu’au bout.
Etienne lui lança un regard intrigué. Avec raison. C’était contraire à ce qu’il lui avait dit quand il avait lancé sa vendetta. A l’origine, il voulait avancer le plus d’argent possible à Ralph pour se rendre très vite indispensable. Là, il prenait le risque que Ralph aille trouver une autre personne avec cette même proposition. Bof ! Au pire, il disposait déjà d’un titre de propriété de Njitoyap, et qui était l’un des plus importants. Il trouverait un moyen pour les autres plus tard.
— Tu es sûr ? Demanda Etienne, incrédule.
— Certain !
— Et pourquoi ce revirement de situation ?
Il haussa les épaules, prenant un air faussement désinvolte.
— Il faut savoir parfois prendre des risques comme au poker.
— Ok Mbom, c’est toi qui vois. Je vais le prévenir alors.
Etienne s’isola un instant pour passer un coup de fil à Ralph. Yvan entra dans le bureau quelques instants plus tard, un grand sourire barrant son visage.
— Les gars, vous avez fini ? On peut y aller ?
Ils avaient prévu de se retrouver pour passer la soirée à La Réserve pour y écouter du bon bikutsi.
— Oui, mais vous allez vous avancer sans moi. J’attends Stella ici pour qu’on y aille ensemble. Elle ne devrait plus tarder, Joe est allé la chercher.
Etienne et Yvan lui adressèrent des regards amusés qu’il ignora royalement. Nul besoin d’alimenter leur moulin. Il se surprenait suffisamment lui-même.
Ses amis partis, il en profita pour avancer sur quelques dossiers en souffrance sur son bureau, sans grande conviction. Il avait trop hâte de revoir Stella. Le déjeuner reporté de ce midi avait exacerbé son attente. Il ne se souvenait pas avoir été ainsi même lors de ses premiers émois d’adolescent.
— Kamsi ?
Stella se tenait devant la porte entrebâillée, un sourire aux lèvres. Il bondit tel un ressort de sa chaise pour aller à sa rencontre. Elle avait à peine fermé la porte derrière elle qu’il la bâillonnait d’un baiser vorace, la serrant contre lui.
Ses mains se faufilèrent sous la taille de son pantalon pour y faire sortir sa chemise. Il poussa un soupir de satisfaction quand elles se posèrent sur sa peau tiède. Fébrilement, il défit un à un les boutons de son vêtement.
— Chéri, haleta t’elle entre deux baisers. Joe nous… attend dans la… voiture.
— Je sais… mais j’ai besoin d’une petite gâterie pour tenir jusqu’à ce soir vu que tu m’as laissé en plan ce midi.
— Hum…
Il lécha sa lèvre inférieure avant de glisser à nouveau sa langue dans sa bouche. Elle avait un goût et un parfum uniques. Lentement, il l’entraina vers le canapé qui trônait dans un angle de son bureau. Il s’apprêtait à la faire basculer quand elle l’arrêta d’une main sur son torse.
— Je pense à un truc… commença t’elle une lueur indéfinissable dans le regard.
— A quoi ?
Elle se mordilla la lèvre inférieure, puis un sourire coquin se dessina sur ses lèvres pleines. Il sentit son membre se mettre au garde à vous.
— Eh bien…j’ai fait un rêve la dernière fois où… toi et moi nous étions ici dans ton bureau, et…
Elle s’interrompit.
— Et quoi ? Demanda t’il d’une voix rendue rauque par l’excitation
— Attends, je vais te montrer, souffla t’elle dans son oreille, de sa voix de velours.
Elle le repoussa doucement sur le canapé, se mit à genoux à ses pieds, puis s’attaqua à la ceinture de son pantalon. Il la regarda un instant s’affairer avant de tendre la main vers sa tête pour défaire son chignon. Ses cheveux lissés se répandirent sur ses épaules. Imperturbable, elle poursuivait sa tâche. Elle avait déjà abaissé la fermeture de son pantalon et ses doigts manucurés se glissaient sous l’élastique de son boxer pour s’emparer de son sexe. Il retint son souffle.
Il se sentit décoller du canapé au premier contact humide et chaud de sa langue sur son membre. L’instant d’après, elle l’engloutissait tout entier dans sa bouche, lui arrachant un son étranglé. Soigneusement, elle l’aspira, le pompa, le lécha. Il essayait de garder le contrôle en dirigeant sa tête de ses mains, mais elle ne l’entendait pas de cette oreille, se servant de ses doigts pour le mettre au supplice. Il eut juste le temps de se soustraire à sa bouche au dernier moment, avant d’exploser dans un râle.
Tandis qu’il se nettoyait dans la petite salle d’eau attenante à son bureau, il fixait le reflet de Stella dans le miroir. Le regard qu’elle posait sur lui était empreint d’une douceur qui fit vriller son coeur. Serait-il prêt un jour à mettre fin à leur histoire pour remplir sa mission ? Tout d’un coup, il n’était plus sûr de rien.
**
*
De rage impuissante, Ralph balança son téléphone contre le mur de son bureau; celui-ci se brisa avant de se répandre en plusieurs morceaux sur le sol. Il se prenait pour qui ce connard de prêteur sur gages ? Après lui avoir fait miroiter pendant des semaines qu’il pouvait lui verser de l’argent, il faisait maintenant marche arrière sous prétexte qu’il voulait tous les titres de propriété de son père ?!!! Quel fils de pute !
Il se laissa choir sur son fauteuil de cuir, la tête entre les mains. Plus les jours passaient, plus il s’enfonçait. Toutes ses prévisions tombaient à l’eau, et là il se retrouvait au pied du mur. Il avait réussi à calmer Tino avec l’argent qu’il avait reçu pour un marché de construction d’une école, mais il n’allait pas tarder à revenir à la charge. Sans compter qu’il n’avait quasiment plus rien en banque, ce que ne manquait pas de lui rappeler Armelle.
Il leva la pile de documents posée sur sa table et récupéra le relevé bancaire d’un des comptes de son père. Il s’était promis de ne plus y toucher après avoir frôlé la catastrophe l’année dernière quand ses parents avaient payé les premières mensualités de la thérapie de Victoria. Mais là, il s’agissait d’un cas de force majeure, et après le scandale du mariage de sa sœur, il n’y avait pas de risque que ses parents mettent encore la main à la poche pour l’entretenir.
Il prendrait juste ce qu’il lui fallait pour tenir un peu en attendant de trouver un autre deal avec le prêteur sur gages.
Sans plus réfléchir, il glissa le relevé dans sa poche et ouvrit le tiroir de son secrétaire où il rangeait soigneusement la procuration sur ses comptes signée de son père. Après ça, il pourrait se reprendre. Il avait juste besoin d’un coup de pouce.