CHAPITRE 19 : Le dévouement

Ecrit par delali



- Maman… non ! maman…
- Ça suffit maintenant Rowen, arrête de faire l’enfant gâté !
- Mais Kady arrête de lui crier dessus comme ça, ce n’est qu’un enfant, tu ne vois pas !
- Maman Claudine, vous le gâtez trop ! Il va prendre de mauvaise habitude.
- Mais non, essaye de parler avec lui, ça fait quand même un mois qu’il a commencé l’école et il n’a jamais réagi de la sorte. Alors je pense qu’il doit y avoir un souci.
Kady pousse un soupir. Elle s’assied et l’attire à elle, ce dernier est toujours en pleure. Rowen a maintenant trois ans et demi, il a commencé l’école, seulement que ce jour-ci, il fait une crise de pleurs et ne veut pas y aller. Kady commence à s’impatienter parce qu’elle doit se rendre au travail. Philippe s’impatiente certainement et Rowen est en train de la retarder :
- Qu’est que t’as mon chéri ? parle à maman tu veux bien ?
- Veux po parti à yécole !
- Mais pourquoi chéri ? Tu es un grand garçon et tu dois aller à l’école comme les grands.
- Veux po ! veux rester avè toi maman.
- C’est pas possible chéri, maman doit aller travailler.
Rowen se met à pleurer de plus bel et cette fois ci avec des cris. Kady perd patience, elle prend son sac et l’entraîne par le poignet pour le forcer à y aller. Maman Claudine la stoppe dans son élan. Elle attire l’enfant à elle et lui parle :
- Ne fait pas attention à maman, raconte plutôt à mamie ce qui se passe d’accord ?
- Snif … mes yamis… snif … mes yamies se sont moquées de moi !
- Moquer de toi ? Comment ça ?
- On me dit que ye ressemble à huile rouge, …snif … que ye suis pas comme eux. Finit-il par dire de sa toute petite voix.
A cette révélation, Kady a le cœur fendu, comment des enfants de cet âge-là peuvent avoir des pensées pareilles. Elle a l’impression d’entendre de grandes personnes discriminer leur semblable. Là par contre, elle décide d’aller à son école pour demander aux enseignants de veiller un peu plus sur les enfants. C’est vrai que Philippe s’impatiente, mais elle pense qu’il lui accordera bien quinze petites minutes pour Rowen, mieux encore, il les y accompagnera lui-même, puisqu’il adore l’enfant. Elle ne s’est effectivement pas trompée, dès qu’elle sort de la maison tenant la main du petit, il s’est tout de suite inquiété :
- Mais qu’est-ce qu’il a le champion ?
- Si vous me le permettez, j’aimerais faire escale à son école et toucher deux mots à sa maitresse.
Kady raconte alors les dires de l’enfant, et tout de suite Philippe s’est proposé de les y amener…
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Trois années se sont écoulées depuis sa première rencontre avec Philippe BENTON. Ce sexagénaire originaire à 100% de Bretagne, est un homme assez simple et jovial qui a tout de suite eu de l’empathie pour Kady et son fils quand il les a vus pour la première fois. C’est un homme très cultivé. Il doit cela aux nombreux voyages, que lui ont occasionnés les postes qu’il a occupés à travers le monde. Toutefois, il s’est lié d’affection pour les climats chauds et chaleureux des pays africains, ce qui a d’ailleurs beaucoup joué sur son couple. Il adore lui voyager de par le monde à la rencontre de culture différentes à la sienne, alors que son épouse, est tout le contraire. Leur mariage n’a donc pas tenu très longtemps. Etant divorcé et père de deux garçons, Kady a pu constater que Philippe BENTON est un homme qui profite de chaque instant pour croquer la vie à pleine dent, et que par-dessus tout il a un cœur en or. Il l’a d’abord orientée sur le genre d’étude qui conviendrait le mieux à ses aspirations :
- Tu as le choix entre la sociologie, le marketing social, les sciences de l’éducation, psychologie de l’éducation…. Lui avait-il dit
- Humm… je sais pas trop, vous avez fait quoi vous ?
- Moi, j’ai combiné la sociologie, le marketing social ma chère et je continue toujours.
- Alors j’opterais bien pour le marketing social pour commencer !
- Vendu ! Conclut-il de son accent breton.
Il est allé jusqu'à l’aider à faire son inscription en ligne afin de prendre ses cours par correspondance, parce qu’il a tenu à la garder assez proche histoire de suivre son évolution. Pour ce faire, elle a dû d’abord suivre des cours renforcés. Il s’agit entre autres de l’initiation à l’informatique, à l’internet, et des cours de mise à niveau sur place, étant donné qu’elle a laissé les bancs il y a plus d’un an. Ensuite il lui a donné l’opportunité d’apprendre à ses côtés en même temps qu’elle prenait les cours. Au tout début, il lui a confié des toutes petites tâches entre autres la saisie et relecture de certains documents, la gestion et le classement des courriers. Elle s’est d’abord acquittée de ces tâches toute une année durant pas sans fournir de grands efforts. Puis l’année qui a suivi, elle a vu ses efforts récompensés. D’abord elle a réussi avec brio à son évaluation de première année, puis Philippe a été affecté. Il a dû changer de lieu de travail pour la capitale, Abidjan. Il a donc proposé à Claudine et à Kady de le suivre :
- Cela me ferait vraiment plaisir que vous acceptiez mesdames ! Claudine, toi tu pourras continuer ton travail comme tu y tiens tant, je te paierais le salaire que tu voudras ! Et toi Kady, on pourra mener à bien ce que nous avons commencé quant à ta formation. Sans oublier aussi le fait que je resterais toujours en la compagnie de ce petit champion !
Maman Claudine a été beaucoup hésitante. Suite à son expérience avec le genre humain, elle a pris l’habitude de ne pas se fier entièrement à une personne au risque de ne pas être déçue profondément. Mais par la force des insistances de Kady, qui elle était très enthousiaste à l’idée non seulement de sortir de la ville de Man, mais aussi de visiter la capitale, maman Claudine a cédé et accepté.
La ville d’Abidjan a comblé jusqu’au-delà les attentes de Kady. Devant cette capitale de renommée internationale, elle a l’impression que sa ville natale n’est qu’un quartier comparativement à celle-là. Kady trouve que la ville est franchement à l’image de ce qu’on en dit belle et grande. Des communes aussi immenses qu’une ville toute entière, chacune de ces communes avec sa particularité, ses grandes autoroutes et même sa couleur de taxi propre à elle. Elle a été plus ébahie par le transport en commun qu’est le bus qui permet de relier toutes les communes de la ville entre elles. A Philippe aussi de lui faire la remarque selon laquelle : « La nuit, Abidjan, c’est la ville lumière de l’Afrique de l’ouest. » Kady est émerveillée, ce changement d’environnement lui réussit assez bien, elle est radieuse et épanouie. Ils ont élu domicile dans la commune de Cocody. Philippe, lui de facto est logé par son institution, il a d’ailleurs insisté pour qu’elles acceptent d’aménager avec lui. Mais là maman Claudine a gentiment décliné la proposition malgré les nombreuses protestations de Kady :
- Mais pourquoi refusez-vous ? Il est si bon et gentil avec nous.
- Tu es d’une naïveté à vraiment couper le souffle Kady ! Mais bon, sache juste que c’est non !
Ceci étant elles n’arrivaient plus vraiment à joindre les deux bouts, puisque les cours ont pris le reste de l’argent laissé par Christopher et même plus. Là encore, Philippe a dû payer la différence, avec le prétexte qu’elle le lui remboursera plus tard. Elles sont obligées donc de vivre du salaire que gagne maman Claudine. Et comparativement à la ville d’où elles viennent la vie est assez coûteuse à la capitale. Cependant, elles s’en sont pas mal sorties. Durant cette seconde année-là, Kady s’est vue confier des tâches un peu plus importantes que la première année. Des tâches comme celle de compte rendu de réunion, production de rapport d’activités, et là, Philippe l’a même déjà autorisée à être présente au bureau de temps à autre comme son assistante. Depuis ce fait, elle doit se battre presque tous les jours pour surpasser la jalousie et la mesquinerie de certains des collaborateurs de Philippe, qui ne sachant pas trop ce qu’il y a entre eux deux, se sentaient menacés. Elle n’en fait pas cas pourtant en la présence de Philippe. Ce dernier a encore profité de ces tâches qu’elle accomplies au bureau pour lui payer un salaire. Salaire que maman Claudine trouve assez exorbitant :
- Mais vous exagérez voyons, vous ne l’aider pas avec toutes ces faveurs que vous lui faites !
- Mais elle travaille Claudine, quoi de plus normale ?!
- Non mais c’est elle qui devrait plutôt vous payer pour la formation que vous lui donnez !
- Tu sais pourquoi je le fais Claudine.
Grâce au salaire que Kady ramène toutefois à la maison, leur niveau de vie s’est un peu amélioré. Elles n’ont plus trop à se plaindre quant aux dépenses de la maison. Cela a continué ainsi jusqu’à la fin de la troisième année. Kady a obtenu avec fierté sa Licence. Philippe la considère à présent comme son assistante particulière, et Rowen vient de boucler ses trois ans passés même de six mois. Il fallait maintenant penser à sa scolarité. Avec leurs deux salaires, elles se voyaient en difficulté pour solder la scolarité sur le long terme. Elles en discutaient entre elles lorsque Philippe leur rend visite comme il en avait l’habitude à ses heures perdues. Cette fois ci il impose presque le fait qu’il prendra en charge la scolarité de Rowen :
- Claudine, vous ne pouvez pas me refuser cela, vous savez que j’adore Rowen !
- Mais…
- Il n’y a pas de mais qui tienne ! C’est décidé ! D’ailleurs j’y vais de ce pas pour l’inscrire dans la meilleure école de la ville. Mon chauffeur se chargera d’aller le déposer et le chercher.
Kady n’a donc pas vraiment eu son mot à dire.
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Ce jour là où Rowen a fait sa crise, Kady a réalisé à quel point Philippe tient à lui. Il est devenu tout rouge de frustration pour l’enfant. D’habitude quand il est à bord du véhicule lorsqu’on dépose l’enfant, il ne décent pas. Mais ce jour ci, il n’a même pas écouté les suggestions de Kady quant à la laisser gérer la situation. Elle, elle se serait contentée de juste dire à la maitresse de son fils de faire un peu plus attention aux jeux que les enfants font entre eux, mais Philippe n’est pas de cet avis-là :
- Ils vont m’entendre ceux-là ! dit-il
- S’il vous plait ! ne vous ….
Kady n’a même pas eu le temps de terminer sa phrase qu’il est déjà à l’intérieur de l’établissement dès que le véhicule s’est immobilisé. Elle descend à son tour en tenant la main de Rowen. Elle se dirige vers la classe de l’enfant et se rend compte que la maitresse n’y est pas, Philippe non plus. Elle s’est dit qu’il doit être à la direction, elle demande à Rowen de s’installer et se dirige vers le bureau du directeur. A quelques pas déjà de la pièce, elle entend les haussements de voix, Philippe est hors de lui, ce qui ne manque pas de faire ressortir de plus bel son accent breton :
- Non mais dites-moi ! Vous faites quoi de tout cet argent qu’on vous paye ?!
- Calmez-vous monsieur ! Je vous explique que ce sont des jeux d’enfants.
- Ah bon ?! Vous pensez ! Eh bien non !!! Ces propos-là sont des propos discriminatoires !
- Mais que pouvons-nous y faire monsieur ?! Ce sont des enfants ! On ne peut pas les condamnés …
- Non mais je rêve là !!! Kady dit moi que je rêve !!! C’est ça une école de référence ?! ça veut donc dire qu’il n’y a même pas de psychologue qui suit les enfants ?!
- Calmez-vous Philippe. N’a de cesse de dire Kady
- Monsieur... A commencé le directeur
- Kady c’est décidé, je retire mon fils de cette école et je la fais fermer !


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