-Lalala Lalala PalmPalm ..

Du coin de l'œil je regarde mon amie Binta se dandiner en s'imaginant à son mariage avec Madou le jeune pêcheur du village ayant fais fortune dans une ville minière.

Elle est tellement heureuse qu'elle n'arrête pas de nous raconter les moindres détails de la cérémonie. 
Je suis heureuse pour elle car elle connaîtra la joie du foyer si jeune et en plus avec son amour de jeunesse tandis que moi je semble vouer à un mariage forcé.

-Oh Malaïka j'ai hâte de vivre la nuit de noce! Tu t'imagines avec mon premier amour !

J'hoche simplement la tête.

-Malaïka je suis si heureuse. En plus Madou a promis de m'ouvrir un petit commerce de pagnes en ville.

Waouh quelle chanceuse ! Décidément ma vie est si merdique.

Je m'abaisse à nouveau pour recueillir l'eau du marigot avec une petite calebasse.

-Oh Mal! Je sais que t'es toute triste et tout mais t'inquiète pas toi aussi ton jour arrivera. 
Regarde comment t'es belle ! Taille mannequin avec une belle poitrine. 
Oh là puis tes traits fins on dirait une sénégalaise!

Il y'a très longtemps que j'ai fini de croire en ces belles paroles.
Moi je ne suis pas le genre de filles qui puissent compter sur sa beauté pour réussir .

Je dépose la calebasse à terre et avec l'aide d'un petit pagne noué en cercle je  place le canari sur ma tête.

-Mal ! Pourquoi tu ne réponds pas?

Comment dire à ma copine que je suis jalouse de son bonheur ? Non je ne le ferai jamais alors je préfère mentir.

-Rien.

-Ah bon ? Je te sens un peu distraite.
Quoi c'est encore ta mère ? Demande t-elle à nouveau.

-Non rien.
Je me porte à merveille.

Je me met à marcher pour échapper à ses questions mais c'est mal connaître Binta qui se met à me rattraper pour me questionner.

-Eh où vas-tu ? T'es bizarre toi.

Las de ses remarques, je me retourne pour lui faire face.

-Binta j'en ai marre de tout ça. Pourquoi moi aussi je ne réalise pas mes rêves ? Pourquoi ma vie stagne?

Elle fronce ses sourcils avant de s'exclamer.

-T'as pas de rêves !

Sa réponse provoque en moi une colère que je ne retiens pas.

-Je veux voyager! Je ne sais pas moi ! Aller en France peut-être!

-Oh ma belle t'es sérieuse là? Bon et même si..comment t'iras là-bas chez les toubib? T'as que le niveau troisième comme moi d'ailleurs. Or ceux qui y vont ont des diplômes universitaires.

-Je ne sais pas! Je veux aller en ville me chercher aussi.

-Bon je vais négocier avec Madou,peut-être qu'il pourra t'aider à trouver un emploi là-bas.

J'écarquille grandement les yeux.

-Ah bon ? Tu le feras ?

-Oui t'es ma pineco ! Puis si tu te retrouves en ville tu pourras venir discuter avec moi.
Que veux-tu y faire ?

Heureuse, je saute de joie avant de me précipiter dans ses bras.

-Ah Malaïka t'es une vraie gamine toi!

Elle fait semblant de me repousser.

-Merci merci ! Je t'aime !

-Moi aussi mais tu sais mon cœur appartient à Madou!

Je lève les yeux au ciel.

- Toi aussi!

Elle me donne une légère tape au dos.

-Bon que veux-tu faire en ville?

-Euh travailler dans une demeure de riches. Je ne veux pas vendre les fruits ni les légumes,à ce qu'il paraît ça paye mal. Ne parlons pas non plus de serveuse de bars! 
Je vois déjà les effets depuis que j'assiste  ma mère.

Elle hoche la tête.

-Ah je lui en parlerai .

Nous reprenons ainsi notre chemin.

J'ignore pourquoi mais je ressens une joie immense. 
Comme si j'avais ce pressentiment que dorénavant tout allait prendre un nouveau  départ dans ma vie.
Il ne restait plus qu'à convaincre mes parents et surtout ma mère. 
Il faut d'ailleurs que je trouve les arguments pour la convaincre.
Pour mon père ce ne sera pas difficile car lui il a toujours été peu sévère avec moi mais ma mère ! 
Je me rappelle encore lorsque j'avais douze ans et que tous les soirs ma mère vérifiait ma virginité avec la vieille technique de l'oeuf.
Oh Pauvre de moi !C'était si traumatisant et ça l'est toujours sauf qu'elle le fait maintenant chaque fin d'année.

Quand je pense que ma petite sœur vivra bientôt ce traumatisme.

Je suis brusquement ramenée à la réalité  par les cris de Binta.

-Eh eh regardes!

De l'index elle indique une longue suite de véhicules de type 4x4 blindées qui circulent sur la route non bitumée soulevant au passage la poussière.

-Ils viennent sûrement de la ville. Dit Binta.

Étrange.
Ce village étant reculé il n'est pas habituel de voir des personnes venant de la ville.
Alors que font-ils ici?

-Hum ça va alimenter les conversations des cabarets et marchés ça!

Nous sommes à peine remise de cet nouvelle que j'entends la voix de ma petite sœur m'interpeller.

-Malaïka !Malaïka!

Elle accourt vers moi telle une fusée.
Inquiète,je m'empresse de lui poser une  question.

-Oui Mina. Pourquoi cries-tu?

Elle s'accroupit le temps de retrouver la respiration.

-Maman te demande au cabaret. Elle dit que tu as trop traîné au marigot.

-Oh non.

Je m'imagine déjà les remontrances que je subirai.

《Malaïka tu es une bonne à rien ! Simple eau que je te demande regarde tout le temps que tu prends pour me l'apporter! Fille inutile 》

-Mina aide ta soeur s'il te plaît. Continue avec le canari à la case familiale.

Mon cœur se met à battre la chamade. Espérons qu'elle accepte me sauver.

-Mina s'il te plaît.

Je joins mes mains pour la supplier.
Finalement Mina hoche la tête,signe qu'elle est  d'accord.

-Merci mon bébé.

Je m'abaisse alors et Mina se dépêche de récupérer le canari sur sa petite tête.
Je suis consciente que ce n'est pas  favorable pour elle mais que puis-je faire?
C'est à cause de tout ceci que je veux aller me battre en ville et la récupérer avec moi pour la sauver de ma sévère mère.

-Allez sois forte ! L'encourage Binta.

Nous restons un moment à la regarder tituber,prions intérieurement pour qu'elle ne se fasse pas mal.

-Toi dépêches toi ! Crit Binta.

-Oui j'y vais.

Je cours rapidement vers le cabaret de ma mère situé au marché du village.