Chapitre 20 : C'est fini

Ecrit par Alexa KEAS

Flora

Sélom s’empresse de me demander si tout va bien pendant que Bertrand tout aussi gêné que moi, fait de son mieux pour ne pas laisser paraitre son trouble pourtant déjà si visible. Sa femme fait appel à une jeune fille qui devrait être leur domestique, lui demandant d’apporter de quoi nettoyer le sol.

Elle me demande de là suivre à l’intérieur sans que je ne dise rien afin de me changer. Toute honteuse et anxieuse au fond de moi, je suis ses pas jusqu’à une chambre que je pense être celui de leurs enfants. Elle me dit que je peux utiliser la salle de bain incorporée à la pièce le temps qu’elle aille me chercher quelque chose d’autre à mettre.

Une fois seule je me laisse choir sur l’un des petits lits et manque de faire couler mes larmes. Je ne pense pas qu’il y ait un autre enfer sur terre à part celui que je sois en train de vivre actuellement. Pour une fois que je vis une réelle histoire d’amour, il a fallu que le karma cette salope me joue un de ces sales tours. Pourquoi a-t-il fallu que mon Sélom soit le neveu de Bertrand ?

J’ai une envie, celle de tout casser que je retiens parce que n’étant pas chez moi. J’inspire et expire calmement pour empêcher ma bouche de s’ouvrir et d’hurler comme un animal sauvage.

La voix douce de Madame ASSOGBA me tire de mes pensées et je réalise que depuis qu’elle avait quitté la chambre, je n’avais pas pris la peine d’enlever ma robe tâchée.

-Tout va bien… ?

-Flore dis-je pour l’aider avec mon prénom qu’elle semblait chercher. Je n’ai pas envie de dire Flora car on ne sait jamais, elle pourrait peut-être faire le rapprochement même si de tout le temps qu’a duré ma relation avec Bertrand, je ne crois pas qu’elle ait su. La vie m’a toutefois apprise à faire preuve de malice en toute circonstance.

-Tout va bien ?

-Oui Tanti, j’ai juste le vertige dû à la fatigue.

-Ok, prends cette robe, elle devrait t’aller. Je te laisse seule afin que tu te changes en toute intimité, je serais sur la terrasse avec les hommes.
A tout à l’heure.

-C’est gentil, merci beaucoup.

-Ah une chose, appelles moi Béa !

-C’est compris. Dis-je en forçant un sourire.

Elle sort et referme la porte derrière elle quand je me glisse au sol laissant cette fois sortir ces larmes longtemps retenues. Comme quoi, tout se paie sur cette terre. Après avoir failli détruire le foyer de cette magnifique femme à cause de mon ambition, me voilà dans sa maison aujourd’hui, bénéficiant de sa gentillesse et de son hospitalité.

Après avoir pleuré quelques minutes, j’entends la voix de Sélom crier mon nom depuis le couloir et je me ressaisie en essuyant mes larmes. Je me précipite dans la salle de bain pour m’asperger le visage d’eau et faire disparaitre ainsi toute trace de larmes.

Comme je m’y attendais, il me rejoint avec un visage exprimant de l’inquiétude.

-Bébé, ça va ?

-Oui mon chéri, tout va bien. Je te manque déjà ?

-Non, en fait oui, tu me manques toujours mais j’ai voulu voir si tu allais bien vu que tu mets du temps à sortir.

-Tu es trop chou mon ange, juste un besoin urgent, j’ai fini maintenant. Le temps d’enfiler la robe que ta tatie m’a prêté et je vous rejoins.

-Ok, mais je préfère attendre que tu finisses de te changer et on y va ensemble. N’eut été la présence de mon oncle et sa femme à côté, je t’aurais fait des choses là debout dans cette salle de bain.

-Sélom ! Tu es insatiable. Dis-je en rigolant.
Pardon, avant que ta folie ne te prenne pour de vrai retourne à la terrasse et ramènes moi mon sac. Je veux me refaire un petit maquillage.

-Ah les femmes, ce n’est juste pas possible avec vous. Tu es belle comme ça !

-Allez bouges.

Il s’en va en riant et je me déshabille cette fois pour de vrai en mettant la robe de mon ex-rivale non sans m’empêcher d’émettre un soupire en là passant sur le corps. Sélom revient assez vite avec mon sac et je me refais une petite beauté, rangeant ensuite ma robe tâchée dans mon sac avant que nous ne rejoignions le couple ASSOGBA.
Je me refais une apparence des plus neutres pour n’éveiller aucun soupçon.

*

-La robe te va si bien ma chérie. S’empresse de dire Béatrice à ma vue

-Merci beaucoup. Lui réponds-je en souriant, un peu trop d’ailleurs.

-Je te l’offre, de toutes les façons elle fait partie des affaires que je ne mets plus depuis longtemps.

-Et si on passait à table à présent ? Propose Bertrand. Sélom et Béa approuvent tandis que moi je garde le silence toujours troublé par la présence de mon ex amant dans cette maison.

-Mais où sont les enfants Tonton ? Questionne Sélom

-Chez leur grand-mère. Il répond

La table était déjà mise dans leur jardin et malgré mon angoisse, mon appétit s’est ouvert à la vue de toutes ces bonnes choses qui y sont disposées. Des brochettes d’agneau, du porc braisé, deux différentes entrées joliment présentées et bien disposées avec art sur des plateaux, du riz, des bananes plantains et pommes de terre frites et d’autres petits mets… Tout était en quantité raisonnable mais assez pour que chacun de nous puisse bien remplir son ventre.

J’admire intérieurement le talent de cette femme rien que face à cette manière si spéciale dont elle a mis la table. C’est un  service libre  alors chacun prend son plat et se sert ce qu’il peut manger.

Je me suis régalée, même si je sentais le regard de Bertrand sur moi de temps à temps. Je ne participais à la conversation que pour dire deux ou trois mots, le reste étant de rire aux blagues de Sélom et son oncle.

A la fin du repas, Béa a affectueusement demandé à son mari d’aller chercher le dessert dans le frigo et comme s’il attendait cette occasion, il a lancé :

-Sélom, tu me prêtes ta chérie pour m’aider avec le dessert ?

-Evidemment Tonton. S’empresse-t-il de dire innocemment.

Je le suis malgré moi et une fois hors de la vue des deux autres, il me saisit fermement le bras et me tire vers l’intérieur où il me lâche en me balançant presque contre les meubles.

-Tu fais quoi avec mon neveu ? dit-il en me lançant un regard très mauvais. N’ayant jamais vu Bertrand dans un état pareil, je prends peur mais me ressaisi à la seconde qui suit en me rappelant qu’avec sa femme et son neveu à côté, il ne pouvait me faire aucun mal.

-Je fais avec lui ce que je faisais avec toi, tu t’en rappelles ou tu veux que je te fasse un dessin ?
Lui réponds-je en le défiant du regard.

Je voulais me là jouer profil bas mais Bertrand vient de m’énerver à un très haut point. De quel droit se permet-il de me brutaliser ?

-Flora, ne t’amuses pas avec moi. Tu es venu pour détruire la paix dans mon foyer c’est ça ? Tout ce que je t’ai offert ne t’a pas suffi pour que tu me fiches la paix?

-Bertrand… Et sans me laisser le temps d’en placer une il poursuit.

-Non, tais-toi. Je ne te savais pas si machiavélique, après tous ces mois Il a fallu que tu me suives jusque chez moi en mettant le grappin sur mon neveu ? Crois moi je suis un homme heureux et comblé et je ne te laisserais pas venir troubler ma quiétude de ces derniers mois.

-Tu vas te taire à la fin ? Je me fiche de toi comme de ma première serviette hygiénique Bertrand ASSOGBA. Sélom je l’aime et crois le ou pas, je ne me serais jamais laisser le temps de l’aimer si j’avais pu savoir que tu es cet oncle dont il parlait. Lui dis-je d’une voix pas forte mais ferme qui semble le déséquilibrer.

Je m’attendais à une autre réplique sanglante de sa part mais il s’est contenté de me dire.

-Allons chercher ce dessert, changeant de mine comme si de rien n’était. Je l’ai suivi en silence jusqu’à la cuisine où il a sorti du frigo du gâteau flanc préalablement coupé en morceaux et servi dans de très jolies tasses en verre. Je me suis adossée contre le bac à laver, bras croisés contre la poitrine en le regardant faire, voyageant loin dans mes pensées à cette situation. Il a disposé le tout sur un plateau avec les petites cuillères à côté et m’a demandé de le prendre pendant qu’il sortait d’autres pots contenant de la salade de fruits du frigo. Je suis sortie avec mon plateau en main suivi quelques instants après de lui avec le sien et nous avons rejoints Sélom qui faisait se tordre de rire sa tante avec ses blagues.

Nous avons dégusté les deux desserts l’un aussi bon que l’autre dans une bonne ambiance et encore une petite heure de conversation avant de demander la route. Bertrand s’est proposé de nous déposer vu que nous n’étions pas véhiculés et Sélom a accepté alors que je rêvais qu’il décline.
Nous avons tous pris place à bord du véhicule de Bertrand avec Sélom devant à côté de lui et Béatrice et moi derrière. Durant le trajet, mes souvenirs se sont portés vers les scènes qui ont pu se produire dans cette voiture et je les ai très vite chassées de mon esprit.

Sous les directives de Sélom, nous sommes très vite arrivés à destination et j’ai failli exploser de colère quand ce dernier leur a proposé d’entrer pour un dernier verre. C’est pas vrai, pourquoi ne les invite-t-il pas à dormir pendant qu’on y est ? Me dis-je.

Ils ont accepté l’invitation pour mon grand désarroi et nous avons pénétré l’intérieur.
Apparemment Sélom n’a pas manqué de leur dire que j’étais le propriétaire des lieux parce que Béa s’est mise à me féliciter pendant que son mari a gardé le silence.

*

Enfin ils sont partis et j’ai tout de suite pris le chemin de la douche, épuisée aussi bien physiquement qu’émotionnellement. Je savourais la sensation de bien-être du contact de l’eau froide sur ma peau les yeux fermés quand j’ai senti des mains m’enlacer. Sélom s’est mis à me faire des bisous dans le cou et je l’ai laissé faire pour ne pas le frustrer. Ce soir, le sexe est de loin ce dont j’ai envie. D’ailleurs, je compte inventer une excuse tout à l’heure pour rentrer chez moi car j’ai besoin d’être seule. J’ai esquivé autant que je peux ses tentatives d’aller plus loin dans ses caresses et suis sortie de la salle de bain.

Il m’a retrouvé dans la chambre cinq minutes plus tard, habillée et prête à lever le voile. Sans un mot, je l’ai vu aller sortir de l’armoire un short qu’il a enfilé avant de se coucher sur le lit téléphone en main. Je me suis levée en lui disant qu’il fallait que je rentre chez moi sans qu’il ne réagisse. Il a plutôt porté son attention sur son téléphone qu’il manipulait à présent.

-Chéri ? Toujours pas de réponse.

Donc il s’est vraiment fâché ? Et pour quelle raison je me demande. Ne voulant surtout pas partir dans ces conditions, je me suis approchée de lui en reprenant place sur lit.

-Amour ? Dis-je en lui caressant le visage

-Quoi Flora ? Tu as besoin de ma permission pour rentrer ?

-Euh, j’ai raté un épisode ? Pourquoi réagis-tu ainsi ?

-Je crois que c’est à moi de te poser cette question. Tu crois peut-être que je ne t’ai pas observé de toute la journée ? D’abord, tu laisses tomber ton verre quand mon oncle a fait son apparition, ensuite tu évitais de croiser son regard. Quand ils nous ont déposés, tu semblais bien agacé que je les invite pour un dernier verre.

Tout à l’heure, tu me refoules dans la douche et je te retrouve habillée me disant que tu rentrais chez toi alors que ce n’était prévu que pour demain. Si tu as quelque chose à me dire, fais le maintenant Flora. Tu connaissais mon oncle ?
J’avoue que ses questions m’ont perturbé mais je me suis empressée de dire un gros non.

-Bien sûr que non chéri, je n’ai jamais vu ton oncle auparavant. Et tu te trompes sur toute la ligne, quoi que tu ais pu remarquer, c’était tout simplement dû à la timidité face à ta famille que je rencontrais pour la première fois. Ecoutes, je m’excuse pour tout à l’heure. C’est juste que tout va si vite que j’ai trop peur d’être en train de rêver et que le réveil soit brutal. Je t’aime tellement Sélom.

-Et moi pas ?

-Je n’ai jamais dit ça.

-Je t’aime aussi Flora, comme je n’ai plus jamais aimé depuis très longtemps. Te présenter à ma famille d’ici était pour te prouver que je veux du sérieux avec toi. Alors tes doutes et tes peurs, supprimes les de ta petite tête.

-C’est compris chéri mais je dois…

- Tais-toi, tu parles trop. Dit-il en capturant mes lèvres pour un baiser sensuel. Je me suis laisser emporter par cette vague de plaisir m’emmenant bien loin de toutes mes préoccupations.

-Tu veux toujours rentrer ? demande-t-il les mains bien enfoui dans mon entrejambe.

-hum, non !

*
*

Deux semaines après

Je fais les derniers rangements dans la maison qui est toujours imprégnée de son parfum le cœur rempli de tristesse. Comme il me manque et me manquera encore plus après ce que je m’apprête à faire.

Sélom est rentré en France il y a deux jours et Bertrand n’a pas perdu le temps en me donnant rendez-vous dans un café le lendemain du départ de son neveu. Je m’y attendais un peu car son attitude ce jour-là m’avait mis la puce à l’oreille quant à ce qu’il pense de ma relation avec Sélom. Les derniers jours ont été magiques, les meilleurs de ma vie et nous nous sommes séparés difficilement à l’aéroport, moi pleurant comme une madeleine.

Je me rappelle de ces mots que Bertrand m’a dits hier et je préfère m’en aller tranquillement que causer la perte de celui que j’aime. Je m’allonge sur le lit et caresse les draps en fermant les yeux me remémorant les moments de plaisir intense qui nous y avons vécu. Quelques larmes s’échappent de mes yeux sans que je ne juge nécessaire de les effacer.

Je me saisi de mon téléphone et rédige le message de la mort.

‘’Bonsoir Sélom, je suis désolée mais j’ai un autre gars avec qui je sors depuis deux ans. Nous étions en froid ces derniers mois, la raison pour laquelle j’ai voulu essayer avec toi. Il est revenu à de meilleurs sentiments à présent alors je me suis remise avec lui. Par conséquent, toi et moi c’est fini. Je suis désolée.’’

J’appuie sur ‘’envoyer’’ et une fois l’accusé de réception reçu, je fonds en larmes avec l’impression que mon cœur allait s’arrêter.

Le coeur ce traître