Chapitre 21
Ecrit par Auby88
Madame Suzanne ZANNOU
Dans cinq jours, je quitterai le Centre. Je me sens beaucoup mieux dans ma tête. Je suis tellement heureuse.
Dehors, je me sens prête pour affronter la vie, pour me reconstruire. J'ai compris que c'est cela que Bella veut pour moi.
Au fait, ici j'ai gagné une fille. Évidemment, c'est Fifa. Nous nous sommes beaucoup rapprochées grâce à Marie-Cécile. Alors à chaque fois qu'elle vient me visiter, je lui offre à manger et nous restons là à papoter comme une mère et une fille.
Malheureusement, malgré mes conseils et ceux de Marie-Cécile, elle est encore tombée enceinte. L'auteur, elle ne s'en souvient pas comme d'habitude. Fifa semble avoir un "boulon en moins dans sa tête" même si elle semble très lucide. Pour ne pas que l'enfant finisse encore dans un orphelinat, j'ai décidé de prendre la mère en charge. Elle vivra avec moi. L'administration a été un peu réticente au départ mais a fini par accepter. Et puis Fifa fait partie des abandonnés du Centre.
Fifa aussi est pressée de me suivre. Elle voit en moi la mère qu'elle a perdue à la naissance. En contrepartie, j'ai l'obligation de la ramener périodiquement pour les contrôles car Fifa peut rechuter à tout moment. C'est valable pour moi aussi.
En tout cas, je compte bien respecter les règles qui m'ont été imposées.
*******
Aurore AMOUSSOU
J'ai l'impression de vivre un rêve, tellement je suis heureuse. Je me demande pourquoi j'ai perdu autant de temps. Femi est un amour. Il me comble de bonheur jour après jour, semaine après semaine.
Notre histoire d'amour est comparable à celle de Luciana, tétraplégique, et Miguel dans la telenovela brésilienne " Viver a vida ( Sauvée par l'amour)".
J'ai toujours pensé que leur amour était de la pure fiction, que ça ne pouvait pas exister en vrai. A présent, je me rends compte que je me suis trompée.
Aujourd'hui, je passe la journée chez Femi. C'est la première fois d'ailleurs que je lui rends visite. Femi habite dans une modeste cour commune de Cotonou. Il m'a déjà précisé que sa demeure est minime comparée à ma maison, voire même ma chambre. Mais cela m'importe peu.
Il ouvre la porte et je découvre l'intérieur. Un studio avec une petite cour arrière qui comprend une cuisine et une douche. Je remarque un lit à une place assez grand pour deux, près duquel se trouve une petite table et une chaise en bois.
- Voilà, c'est chez moi. Je t'avais déjà soufflé que ce n'était pas un palace comme le tien. Mais c'est rempli d'amour. Et même si je ne peux pas pour le moment t'offrir la vie de rêve que tu as, je m'évertuerai jour après jour à ce que tu ne manques jamais de rien.
Je suis tellement émue. Il a une existence si minimaliste, et pourtant il est d'un optimisme que je ne saurais qualifier. Je le fixe longuement. Je ne peux m'empêcher de couler des larmes.
- Tu pleures ? Pourquoi ?
- Je suis extrêmement fier de toi, extrêmement honorée d'être ta moitié. Tu es un combattant Femi, un conquérant des temps modernes et j'ai pleinement confiance en toi.
Il me sourit.
- Pas de larmes aujourd'hui. Pas de larmes chez moi. Dis, princesse, que veux-tu pour ton petit-déjeuner ?
- Juste ce que tu peux m'offrir.
- Ici j'ai du pain, des oeufs pour une omelette et le nécessaire pour un café au lait.
- Alors cela me convient parfaitement, Femi.
Je le suis à l'arrière-cour. Le coin cuisine est petit certes mais bien rangé. Femi m'étonnera toujours. Je ne remarque aucun réfrigérateur. Il allume le petit réchaud à gaz posé sur le sol et met de l'eau à chauffer. Puis, il apprête les oeufs pour l'omelette.
- Je peux t'aider si tu veux.
- Non, pas cette fois-ci. Aujourd'hui, tu es mon invitée.
Je n'insiste pas. Je le laisse faire. Je remarque également un petit fourneau à charbon. Cela fait longtemps que je n'en ai pas vu un. (Sourire).
- C'est prêt ! Tu vas pouvoir régaler tes papilles.
- Je n'en attendais pas moins, dis-je en me frottant les mains.
Il avance mon fauteuil vers la table et m'aide à bien me positionner. Tandis qu'il me sert, je le regarde en souriant.
- Allez, goûte-moi cela.
Je ne me fais pas prier. J'adore me faire chouchouter ainsi. J'ouvre la bouche et il dépose sur ma langue un morceau d'omelette.
- Humm, c'est exquis Chef !
- Merci. Je suis contente que cela te plaise. Pour le déjeuner, j'ai décidé de te ramener en Côte d'Ivoire.
- Tu as prévu de l'attiéké, c'est ça ? m'extasie-je.
- Oui, comme tu l'aimes : bien frais avec du poisson frit, des tomates et oignons coupés.
- J'en ai déjà l'eau à la bouche.
Il se met à rire. J'en fais autant.
Nous passons ainsi notre temps à rire de tout et de rien. Au déjeuner, je me régale de son attiéké fait avec de la vraie semoule de manioc ivoirienne. En savourant mon repas, je me revois des années en arrière. Au dessert, j'ai droit à des oranges bien juteuses. Je n'ai jamais autant bien mangé de ma vie. Mon repas d'aujourd'hui était simple mais tellement riche en amour que rien avant ne l'égale.
Une demie-heure plus tard, nous atterrissons sur son lit pour...
UNE SIESTE BIEN MERITEE BIEN SÛR. RIEN DE PLUS (Sourire).
Il m'entoure de ses bras et je reste blottie tout contre lui. C'est si bon. Par moments, il me dépose des bisous dans le cou. Je les accueille avec enthousiasme.
- J'aime quand tu me cajoles autant, Femi. J'ai vraiment l'impression d'être une princesse, tu sais.
- Evidemment, tu es ma princesse !
Je souris.
- Au fait, j'espère que tu réfléchis toujours à ton projet de stylisme ? Je tiens à ce que tu entreprennes quelque chose qui te plaise vraiment.
- J'ai fait quelques recherches. Mais j'avoue que je n'ai aucune envie de me séparer de toi.
- Moi aussi, Aurore. Mais si c'est pour ton bien, je suis prêt à te laisser partir. Et puis ces genres de formation durent une année tout au plus. Ce n'est pas bien long au final.
- Une année loin de toi me semblera une éternité. Et je garde un mauvais souvenir des relations à distance. Je préfère qu'on laisse ce sujet pour le moment.
- D'accord, princesse. Pour l'heure, je n'insiste pas. Mais promets-moi que tu y penseras.
- C'est promis, dis-je. Serre moi encore plus contre toi. Tout ce que je veux à présent, c'est sentir ton corps près du mien, c'est sentir ton souffle chaud. Je suis si bien dans tes bras. Je suis si…
Avant que je finisse ma phrase, il me gratifie d'un baiser dont lui seul connaît le secret. Femi est et restera unique à mes yeux ! (Sourire)
***********
Steve ANIAMBOSSOU
On est samedi. En m'éveillant dans mon lit 3 places, je m'étire longuement. J'ai tellement bien dormi. Je me sens revigoré. Et cela, je le dois à une seule personne : ma fée. (Sourire)
Je me penche de son côté. Elle n'est pas là. C'est bizarre ! Où peut-elle bien être ? Peut-être dans la douche.
Je me lève et la cherche dans tous les coins de mon duplex, mais ne la trouve pas. Je reviens bredouille dans la chambre. Elle semble être partie.
Mon attention vient de tomber sur une enveloppe blanche, posée sur ma table de nuit. Je me dépêche de la prendre. Rita m'a sûrement laissé un mot avant de s'en aller.
Je ne me suis pas trompé. L'enveloppe porte ses mots :
POUR STEVE. DE LA PART DE RITA
Je l'ouvre avec empressement.
" Cher Steve, quand tu liras cette lettre, je serai déjà loin du Bénin. Mais avant de partir, je me devais de faire mon mea culpa.
Si je me suis rapprochée de toi, c'était juste pour me venger d'Aurore, pour lui faire du mal et non parce que je ressentais de l'amour pour toi. D'ailleurs, je ne pensais pas durer autant avec toi. Car j'ai toujours revendiqué mon indépendance et préféré les relations sans lendemain. Tu restes donc la seule exception à ma règle. Je me suis attachée progressivement à toi, même si je n'ai jamais réussi à t'aimer véritablement. Du moins, pas comme toi tu m'aimes. Sache que tu m'as rendue très heureuse et je t'en serai éternellement reconnaissante. Mais à présent, je continue ma route, je poursuis mes rêves professionnels. Car pour moi, rien au monde n'importe plus que ma carrière de mannequin. Je pars donc en Afrique du Sud où j'ai décroché un gros contrat, puis je continuerai probablement sur les États-Unis où je compte m'installer définitivement. Je ne pense pas revenir un jour au Bénin. Ne m'en veux surtout pas. C'est la vie qui est ainsi faite. On ne gagne pas à tous les coups. Et puis, il y a près de toi Aurore qui sûrement t'aime encore et saura te pardonner. Donc sonde ton cœur et si tu l'aimes, ne serait-ce qu'un peu, efforce-toi de la réconquérir. Je regrette sincèrement de vous avoir séparés. Pardonne-moi Steve. Pardon pour tout. Signé Rita. "
La garce ! hurle-je. La garce ! Aurore avait bien raison. Comment Rita a-t-elle pu me faire cela ? Briser ainsi ma vie, mon cœur et s'en aller comme une voleuse ! Comment ai-je pu tomber amoureux d'une fille pareille ! Comment ?
Je prends mon téléphone et compose son numéro en vain. Ça ne passe pas. Elle m'a bien eu, cette salope. Et moi qui l'aimais tellement ! Jamais on ne m'avait autant humilié ! Jamais !
Je jette le téléphone dans un coin de la pièce, me laisse choir sur le sol et baisse la tête. Pauvre idiot que je suis !
*********
Deux semaines plus tard
Aurore AMOUSSOU
Avec Femi, nous sommes dans mon endroit favori : le coin piscine. Quelques minutes plus tôt, nous étions dans l'eau.
Là, je suis étendue dans l'un des fauteuils tandis que lui est assis dans un autre. Il me raconte ses blagues et je ris allègrement. Nous ne remarquons pas la silhouette masculine qui vient vers nous.
- Bonjour, Aurore !
Mon cœur fait un bond dans ma poitrine. Je tourne la tête. Je n'en crois pas mes yeux. Lui ici ? Je reste sans voix. Femi ne semble pas apprécier le revoir.
- Steve ! m'exclame-je. Qu'est-ce que tu fais ici ?
- Aurore, il faut qu'on parle. C'est très important.
Femi se lève et s'insurge.
- Elle n'a rien à te dire.
- Monsieur le toutou, je ne t'ai pas sonné. C'est à Aurore que je m'adresse.
Femi me regarde.
- S'il te plaît Femi, laisse-nous seuls. Tu peux m'attendre à l'intérieur.
- Mais Aurore …
- Je t'en prie, fais ce que je dis.
- Allez, ouste petit chien !
Femi toise Steve qui le nargue ouvertement.
- Je préfère rentrer chez moi, Aurore. Tu sais comment me contacter.
- Allez, va-t'en ! ajoute Steve.
Je suis censée défendre et retenir Femi, mais je ne l'ai pas fait. J'ai laissé Steve se moquer de lui et le regarder de haut comme s'il était un simple employé de la maison. Pourtant, il est mon petit-ami. Qu'est-ce qui m'arrive ? Est-ce la présence de Steve qui me trouble autant ?
- Que me veux-tu, Steve ?
Près de moi, il s'agenouille et commence :
- Je viens te demander pardon Aurore, pardon pour toute la peine que je t'ai causée. Je me suis laissé embobiner par Rita. Tu avais bien raison. Elle voulait juste se venger de toi en me séduisant. Tu ne peux savoir combien je regrette. S'il te plaît, pardonne-moi Aurore.
Je ne sais quoi dire. Je ne peux m'empêcher de couler des larmes. Auparavant, j'avais tellement rêvé de ce moment où Steve reviendrait vers moi.
- Lève-toi. Tu risques de te salir.
- Je m'en fiche, Aurore. Je veux juste que tu me pardonnes et que tu m'offres une seconde chance.
- Je ... te ... pardonne, Steve, mais je ne peux me remettre avec toi.
- Mais tu m'aimes encore, Aurore et moi aussi même si je n'en étais plus conscient.
- Je … suis en couple actuellement.
Il se lève.
- Avec ce moins que rien ! Voyons Aurore. Tu vaux plus que cela. Ce crève-la-faim ne peut rien t'offrir !
Je le regarde sans savoir quoi dire.
- J'ai été le premier homme de ta vie et je resterai le seul qui pourra véritablement t'aimer et que tu aimerais toute ta vie. C'est ainsi Aurore. Rien ne pourra changer cela.
- Je … ne .. sais…
- Chut.
Il approche ses lèvres des miennes. Tout mon être tremble. Plutôt que de le repousser, je ferme les yeux et accueille ses lèvres. Cela fait tellement longtemps que je n'y ai pas goûté. Tous diront que je n'ai pas le droit de faire cela, que je trahis ainsi Femi, mais je ne peux m'en empêcher. Je perds mes moyens, je deviens faible devant Steve. Femi, pardonne-moi !