chapitre 26
Ecrit par Meritamon
Diarri, Fouta Djallon.
- Inna? Grand-mère, tu es debout? Demanda Serena, inquiète.
Il y eut un silence dans la chambre qui se
trouvait plongée dans la pénombre du matin. Serena distingua la forme frêle de
la vieille femme allongée dans le lit qui se retourna péniblement.
-
Mes rhumatismes
me fatiguent aujourd’hui à cause de l’humidité dans l’air. Aide-moi à me lever
mon enfant, répondit Inna en swahili, la langue dans laquelle les deux femmes
aimaient à échanger.
Inna était de plus en plus fatiguée ces
derniers temps. Le grand âge pesait sur elle malgré sa vivacité.
-
Je t’ai préparé
un plateau repas…. Du thé, la bouillie de mil, une omelette aux légumes. Tout
ce que tu aimes.
Inna sourit dans la pénombre de la chambre.
-
Tu n’avais pas à
te lever de bonne heure pour moi.
-
J’aime à m’occuper
de toi, Inna. Quand je m’en irais d’ici, je garderais précieusement ces moments
au fond de moi, répondit Serena émue.
-
Si jamais tu t’en
vas d’ici, précisa Inna en souriant mystérieusement. Ton cœur est déjà ancré
sur ces terres que tu aimes. Je vois de belles choses dans ton avenir et ça
réjouit mon vieux cœur.
Puis un voile assombrit le regard d’Inna,
-
Il y aura de
nombreux défis également… Tu te rappelles
tout ce que je t’ai enseigné sur l’acceptation des choses de la vie comme elles
sont? N’oublie jamais ces leçons. Tu en auras besoin un jour.
Inna regarda Serena dans les yeux et lui
dit :
-
Il y a un grand
vide dans ta vie. Le vide d’une personne chère. Et c’est la première chose qui
m’a sauté aux yeux quand je t’ai rencontrée.
-
Ce doit être ma
mère. Elle est partie et je n’aime pas l’évoquer…
-
Pourtant, tu ne
peux pas être complète sans elle, Serena. Tu ne peux pas avancer dans la vie
sans ce morceau… Approche, plus près.
Serena s’assit sur le lit alors qu’Inna, les
yeux fermés, lui palpait le visage, les bras, la poitrine. Elle lui prit
finalement la tête entre les mains. Une sensation de légèreté s’empara de la
jeune femme, qu’elle posa sa tête sur l’épaule d’Inna.
-
Il y a tant de
souffrances enfouies en toi, de la colère et des questions sans réponse.
Comment as-tu réussi à vivre aussi longtemps avec cette énergie négative ?
Des souvenirs brûlants enfouis dans son
subconscient submergèrent la jeune femme au point qu’elle voulut les refouler
mais Inna l’en empêcha et l’exhorta à se rappeler.
Ses souvenirs l’emmenèrent dans le penthouse
de Manhattan. L’odeur de la cuisine créole de sa mère, Maria, quand elle
préparait son ragoût de poisson à la noix de coco dont l’odeur embaumait l’appartement.
Que son père au contraire avait en horreur, qu’il trouvait trop
« ghetto », trop exotique, pas assez raffinée.
Il y avait la musique salsa lorsque Maria
était d’humeur joyeuse, le rhum quand elle était d’humeur chagrine, ce qui
arrivait souvent, qu’elle dormait toute la journée, oubliant de chercher sa
fille parfois à l’école…
Il y avait surtout les colères de son père
quand il revenait à la maison, que l’école lui téléphonait au travail, puis suivaient
les bagarres, la vaisselle jetée à terre… mais aussi les réconciliations du
couple, des instants lumineux mais trop brefs. Fragile traité de paix.
Mrs Robinson qui avait dû être embauchée pour
aider Maria à s’occuper de Serena quand les phases de dépression duraient trop
longtemps. Mrs Robinson et l’Oncle Charles qui avaient fait de leur mieux pour
apporter de la douceur dans sa vie d’enfant.
Jusqu’au jour fatidique où Maria déserta définitivement
l’appartement, déserta leur vie, Malick Hann et elle.
Puis à
l’adolescence, Serena s’était rebellée.
La
classique rébellion de jeune fille gâtée en quête d’attention : de la musique
gangsta rap à fond la baraque au look rebelle et aux piercings, des provocations
et fugues à répétition du pensionnat aux vols de milliers de données au compte de Nubia qu’elle créait
dans sa chambre d’adolescente avec Jay Patel.
Un jour, elle
devait avoir 15 ans, Serena avait exigé de son père de revoir Maria Cruz. Elle
avait menacé de s’enfuir à nouveau de son pensionnat et disparaître pour de bon
cette fois.
Bien entendu, Malick
n’avait pas réagi, indifférent à ses caprices, comme il les appelait. Il se
contenta de laisser traîner des documents bien visibles sur son bureau, s’arrangea
pour que sa fille les vit.
Serena était déjà capable à 15 ans de
déchiffrer des documents légaux. Il s’agissait d’un contrat entre Maria Cruz et
Malick Hann, d’une pension alimentaire de plusieurs centaines de milliers de
dollars à payer. En retour, Maria cédait ses droits parentaux. Pour exactement
250 000$, la Dominicaine renonçait à sa fille.
Cette découverte
avait bouleversé Serena qui, incrédule, anéantie, avait confronté son père. Ce
dernier, naturellement, s’y était préparé et avait des arguments prêts.
-
Ce n’est pas à moi
que tu dois t’en prendre, Serena. Tu as désormais la preuve que ta mère était
prête à renoncer à toi. Elle t’a cédée pour 250 000 malheureux dollars. Elle
considérait que c’était cela ton prix. Si tu veux savoir, je n’ai même pas eu à
négocier longtemps…
-
Je ne te crois pas!
s’était écriée la jeune fille au bord des larmes.
Et Malick de la regarder froidement dans les yeux. Il détestait la
faiblesse et ne supportait pas de voir sa fille s’effondrer ainsi.
-
Bien sûr que tu me
crois. Tu as lu le contrat. Il est parfaitement légal. Si tu veux plus de
sûreté, pourquoi tu ne le lui demandes pas à Maria?
Un battement de cœur lui avait échappé. En avait-elle la permission? Jusque-là
les contacts avec Maria étaient ses lettres, ses cartes de vœux transmises clandestinement
par l’oncle Charles.
-
Qu’est-ce que tu
veux dire, papa ?
-
Appelle ta mère. Je
te donne la permission de le faire. Tu trouveras son numéro à la dernière page
des documents. J’espère qu’il fonctionne encore.
Face à l’hésitation
mêlée de méfiance de sa fille, Malick avait repris de façon magnanime.
-
Je suis de bonne
foi. Tu as besoin de connaître la vérité
et je vais t’aider dans cette quête. Cependant….
Sa voix s’était
durcie :
-
Cependant, une fois
que tu auras su de sa bouche ce qu’elle a réellement fait, je voudrais que tu
arrêtes de faire l’enfant et grandir un peu. Tu vas me promettre de cesser tes
fugues et tes bouderies qui commencent à m’agacer. Compris?
Elle avait hoché la
tête, tétanisée face au choix.
Malick s’était
ensuite prélassé dans le transat près de sa piscine, lui qui d’habitude ne se
reposait presque jamais. Il avait mis ses lunettes de soleil, un verre de son
meilleur cognac dans les mains. Il surveilla la mine renfrognée de sa fille et
ajouta encore :
-
Qu’est-ce que tu
attends, Serena? Appelle ta mère! Tu verras qui est véritablement Maria. Un
être à la moralité douteuse qui t’a abandonnée, a abandonné son mari et sa
famille, son foyer… pourquoi d’ailleurs? Pour un autre homme. Pour des
chimères.
Et Malick Hann si
secret d’habitude devint bavard, prêt à enfoncer définitivement le couteau dans
la plaie.
-
Si tu veux savoir,
puisqu’on est dans les révélations, quand elle est tombée enceinte de toi,
Maria était en pleine ascension dans l’industrie de la mode. Tout le monde se
l’arrachait, les designers, les magazines de mode…
Pourtant, je n’ai jamais vu de femme aussi malheureuse et pitoyable
pendant sa grossesse comme l’était ta mère parce qu’un enfant gâchait son
superbe corps, qu’elle perdait des contrats… Voilà le genre de mère que tu as
eue… vas-y, appelle-la.
Et Serena n’avait
pas tardé de téléphoner sur le numéro du New Jersey.
-
Buenos dias…
avait-elle salué de façon hésitante quand un homme qui parlait espagnol avait
décroché. Puede hablar con Maria Cruz ? (puis-je parler à Maria?)
Il se trouvait être le nouveau compagnon de sa mère, le professeur d’école. L’homme avait une voix chaleureuse au téléphone. Dans le background, jouait la même musique latine qu’elle avait l’habitude d’écouter avec sa mère dans le penthouse de Mahnattan des années plutôt, des rythmes endiablés de salsa, de bachata et de rumba. Un torrent de souvenirs l’avait envahie à tel point qu’elle eut du mal à respirer et ne put entendre ce que l’homme lui disait.
Serena répéta encore sa question,
elle voulait parler à Maria Cruz.
-
Un momento… Maria!
Maria! Telefono
Serena écouta des
pas qui dévalèrent un escalier comme l’homme portait le téléphone auprès de
Maria, des bruits d’enfants, des bruits familiers d’un foyer rempli de rires,
de joies, des petites filles qui se chamaillaient. Elle entendit sa mère
disputer un peu ses sœurs.
Puis, la voix
rieuse de Maria répondit au téléphone, en espagnol.
-
Hola!
-
…….
-
Qui parle?
-
Hola Mamà. C’est
Serena.
Un silence
consterné l’avait accueilli, suivi tout de suite par une exclamation de Maria.
-
Dios Mio!… Serena…
ma fille, je suis si heureuse! Mi hija…
Maria qui pleurait
de joie dans le combiné, qui l’assaillaient de mille questions décousues.
-
J’ai tellement
espéré d’avoir de tes nouvelles… Je veux te revoir ma puce. Où es-tu? As-tu lu
mes lettres?... Comment vas-tu ma chérie?
Tu dois être une grande fille à présent… As-tu eu tes règles? Quelle question! Bien
sûr, tu as 15 ans à présent… ta maman est si heureuse…
Milles et une
questions alors que des larmes chaudes coulaient sur les joues de Serena.
-
Je vais bien… je
t’appelais pour te demander quelque chose. Je ne peux pas rester longtemps au
téléphone...
-
Tu peux me demander
tout ce que tu veux. Mais avant, il faut que tu saches que je t’aime, je n’ai
jamais cessé de t’aimer et le jour que j’arrêterais de t’aimer, je serais alors
morte!
Serena avait
inspiré fort, pour ne pas flancher.
-
Mamà…
-
Ton père a tout
fait pour nous éloigner l’une de l’autre… Il a gâché ma vie!
-
Justement, j’ai
trouvé des papiers, une sorte de contrat entre mon père et toi… tu t’en
souviens?... Je voulais savoir si tu as accepté l’argent qu’il te proposait
pour que tu te tiennes loin de moi?
-
Mi Hija! De quoi tu parles? Je…, avait demandé
précipitamment sa mère.
-
Madre… as-tu reçu
de l’argent en compensation pour que tu renonces à tes droits parentaux? Pour
que tu ne réclames jamais ma garde? J’ai vu ta signature sur ces papiers. Je veux l’entendre à présent de ta bouche.
Un silence suivi. Un silence aussi long que la nuit. Maria sanglotait de
l’autre côté de l’océan, en Amérique.
-
J’ai besoin de le
savoir… c’est important pour moi, parce que ça fait des années que je
culpabilise d’avoir choisi mon père… sans savoir que tu avais déjà renoncé à
moi…
-
Serena… j’ai été piégée...
Malick m’a piégée! s’exclama désespérément Maria. Tu es suffisamment grande à
présent pour comprendre que tout ce qu’il fait n’est pas bien et tu dois te
méfier de lui. Ton père est la personne la plus horrible qu’il existe! La
preuve, il t’a amené loin de moi!
-
Mais il ne s’agit
pas de lui en ce moment, mère! Réponds à mes questions! interrompit froidement Serena.
Maria Cruz sanglota dans le combiné.
-
À l’époque, c’était
difficile de reprendre à zéro… j’avais besoin d’argent pour rembourser les
frais des avocats après le procès. J’étais endettée! Les portes de la mode s’étaient
refermées sur moi, personne ne voulait plus me donner du travail parce que ton
père a fait courir la rumeur que j’avais des problèmes mentaux, que j’étais
instable…
-
Ce qui était vrai…
Tu étais instable, fit durement Serena.
Sa voix s’étouffa
dans un sanglot.
-
Cet argent, c’est
ton père qui me l’a proposé… et j’ai accepté naïvement parce que j’espérais
qu’en retournant aux études, je pouvais me créer un avenir pour t’offrir une
vie que tu méritais … Je refusais de t’élever dans un quartier miteux comme j’y
ai été élevée... Ton père, Malick, m’a convaincu qu’il t’offrirait une
meilleure vie en attendant que je me remette sur mes pieds…
C’était ce qu’on s’est entendu… Ensuite quand j’ai voulu changer d’avis et te
ravoir dans ma vie, il était trop tard… ton père m’a dit qu’il était trop tard!
Maria ne pouvait
plus se retenir de pleurer à présent au téléphone alors qu’une douleur sourdait
en Serena.
-
Tu as quand même accepté
l’argent de Malick…. C’est vrai que son argent achète tout, même la dignité… 250
000$, est-ce là mon prix?
Sa mère, désespérée
de voir l’incompréhension se dresser entre elles, s’écria par la suite :
-
Serena, je suis
consciente que je vivrais avec cette erreur toute ma vie et je te demande
pardon. Je l’ai écrit dans les lettres que Charles devait te donner… j’explique
la situation dans ces lettres.
« Si tu savais
combien ton père est rusé, j’ai signé sans savoir que je ne pouvais pas faire
demi-tour, que je ne pouvais même pas le poursuivre… il y avait une clause qui
stipulait cela dans ce maudit contrat et je n’avais même plus de quoi
payer des avocats pour le poursuivre… ».
À ce moment-là, les
petites filles, ses sœurs, appelèrent Maria Cruz pour aller jouer, confrontant
Serena à la réalité que sa mère s’était quand même refait une vie, qu’elle
avait désormais d’autres filles.
-
Je ne vais pas te
déranger plus longtemps… tu as ta famille qui t’attend.
-
Non, ne raccroche
pas s’il te plaît! Tu es ma famille aussi Serena! Je veux te revoir… J’ai
tellement pleuré de t’avoir perdue…
-
Pas suffisamment
pour que tu puisses tourner la page et fonder une nouvelle famille. Adios Madre.
-
Serena!!!
Et Serena avait
coupé la ligne. Elle s’était effondrée en sanglots sur le sol, le cœur brisé.
Elle avait eu la preuve de la vérité si douloureuse. Malick avait une nouvelle
fois de plus raison. Il ne servait rien à attendre de l’amour de Maria. Et elle
se jura de ne plus rien attendre d’elle.
***********
-
C’est de là que
vient tout ton mal être, avait conclu Inna, après un long silence où Serena
essayait de reprendre ses esprits, bouleversée de replonger dans ses souvenirs.
-
Tu viens de faire
la plus grande partie du travail. Tu as parlé Serena. Parler aide à aller
mieux.
-
Mais ça n’empêche
pas de souffrir. Pourquoi ai-je mal encore?
-
Parce que c’est
ta mère. Et on en a qu’une seule. Parce que tu l’aimes toujours. Et je ne doute
pas qu’elle t’aime aussi. C’est ce que font les mères, aimer leurs enfants.
- À présent, sèches tes larmes, regarde dans mon armoire. J’ai un cadeau pour toi. Une robe de coton teinte en indigo comme le portent les femmes de notre région, avec des broderies de fils d’argent.
-
C’est magnifique,
Inna. Je n’ai jamais reçu quelque chose de si beau.
-
Cette robe
appartenait à ma belle-fille partie trop tôt dans l’Autre monde. Il s’agit de la
mère de Tahaa. Son départ a créé un vide dans nos vies, dans celui de mes
petits-fils, et Tahaa qui était assez grand pour comprendre, est celui qui en a
le plus souffert… il n’est pas doué parfois pour exprimer ses sentiments à
cause de l’orgueil qu’il a hérité de ses ancêtres. Mais Tahaa et toi, possédez
bien plus de choses en commun que vous ne le croyez…
****************
Tahaa.
-
Avez-vous choisi
Monsieur?
-
Encore quelques
minutes, fit Tahaa au serveur en regardant vaguement la carte,
Il se tourna vers la timide jeune femme qui
l’accompagnait au restaurant.
-
Que veux-tu
prendre?
Sans grand entrain, il avait recommencé à
rencontrer des femmes pour en choisir une à épouser. La naissance de l’enfant
d’Amara avait eu pour effet de mettre une pression sur lui l’aîné. Amara avait
désormais une famille. Il était un homme complet. Ce que lui Tahaa malgré son
statut de fils aîné lui manquait encore.
Pourquoi, diable, il lui tardait encore à se décider?
-
Qu’est-ce que tu
attends du mariage? Lui avait demandé la fille, dont il ne se rappelait plus du
nom, lorsque les rafraichissements furent servis.
L'homme avait soupiré en évitant de lever les yeux au ciel pour ne pas froisser la fille. Enfin, Il se jura que c’était bien la dernière fois qu’il allait à ces rendez-vous.
Ces rendez-vous devenaient des occasions de
torture où il cochait et décochait sans relâche des cases. La fille avait-elle
de bonnes valeurs, venait-elle d’une bonne famille? Une bonne moralité? De la
pudeur? Et le nombre d’enfants qu’elle voulait? Ses perspectives d’avenir ? son
intelligence, mais aussi – bien sûr - le
physique, l’attirance.
La marieuse officielle de la famille avait
fait un travail de tri impeccable en croyant connaître les goûts difficiles à
combler de l’aîné des Badr. Elle était allée chercher dans sa liste la crème de
la crème, des filles plus belles les unes que les autres; des filles qui
avaient la particularité d’être toutes issues du même moule. Elles étaient
extrêmement douces et polies. Ce qui démontrait leur éducation traditionnelle.
Aucune qui n’osa le regarder directement dans les yeux, aucune qui le défia, qui
le contredisait. Des futures épouses parfaites, effacées, obéissantes et soumises.
Avec elles, les choses risquaient d’être prévisibles, il n’y aurait pas
d’élément de surprise.
-
Elles manquent toutes
de caractère, avait-il reproché à la marieuse, comme il venait de rejeter une
énième jeune femme au grand dam de celle-ci.
-
Vous n’avez
absolument pas besoin que votre femme ait un fort caractère, Tahaa. Vous possédez
déjà un tempérament de feu. Votre femme doit être comme l’eau qui vous rafraîchit,
stable comme la terre qui vous porte. Mais une femme avec un tempérament tel
que le vôtre, ce n’est pas bon. Le feu ne va pas avec le feu.
Serena est le feu, pensa-t-il. Mieux, elle était
comme l’air. Fonceuse, imprévisible, insaisissable.
Tahaa se convainquit qu’ils devaient
s’expliquer une bonne fois pour toute de leur différent, surtout de Nubia, de
ce que Tahaa devait savoir sur le fonds d’investissement, s’il devait
s’inquiéter.
Les occasions de se parler avaient manqué en
partie à cause de l’effervescence qui avait entouré la naissance d’un enfant
sous le toit des Badr, le fils d’Amara, et parce qu’Idy Badr était parti au
bout de quelques jours à son festival à Durban.
Tahaa ressentit durement le départ de son
frère un peu comme un vide bien qu’il se garda de dévoiler ouvertement ses
sentiments. Il osait de moins en moins se demander ce qu’il ressentirait le
jour très imminent, où Serena s’en irait pour de bon. Du vide que son départ
risquait de créer dans la vie des habitants du domaine qu’elle côtoyait, surtout
dans sa vie à lui…
Il se rappela de l’échange qu’il avait eu avec son
frère à l’aéroport, lorsqu’Idy s’embarquait pour Durban.
-
C’est un gâchis
que tu la laisses retourner de cette façon à Nairobi, auprès de son père. Sa
place est à Diarri, avait plaidé son frère.
-
Serena n’est pas
faite pour moi, avait avoué Tahaa. Je n’ai rien à lui offrir. Je n’ai pas de
millions en banque, ni de vie de rêve, tout ce qu’elle a jamais connu ....
- Dans ce cas, que faut-il offrir à quelqu’un qui a déjà tout? Que faut-il offrir à quelqu’un comme Serena? Fut la dernière phrase de son frère. Cette phrase lui tournait désormais dans la tête.
Pour chasser ses pensées sombres, Tahaa fit
comme à son habitude. Il se jeta corps et âme dans le travail dans ses
plantations pour éviter de
croiser Serena.
-
Tu devrais cesser
de rentrer tard, lui reprocha également Inna comme il s’absentait beaucoup et
qu’elle s’aperçut du tourment de Serena qui n’en pouvait plus d’attendre la
décision de Tahaa, s’il acceptait ou non la collaboration avec le fonds
d’investissement.
-
J’ai beaucoup de
travail dans la vallée.
-
Il ne sert à rien
de l’éviter. Serena attend que tu lui parles. As-tu pris ta décision?
-
Oui. Ses avocats ont
été contactés. Mes conditions sont simples. Je veux demeurer le propriétaire de
ce domaine, pouvoir décider de tout ce qui touche aux orientations à venir. Je
veux m’assurer que le domaine ne perde jamais son identité même si des intérêts
étrangers s’en mêlent.
-
C’est tout?
Demanda Inna. Est-ce là tes conditions?
Tahaa esquissa un sourire mystérieux. Il avait
réfléchi à la dernière condition. D’ailleurs, il n’avait fait que ça depuis des
jours.
- Presque tout. Il y a une dernière chose que je voudrais et qui dépend à présent de Serena. Si tout cela doit marcher, mon association avec Nubia, le succès de cette entreprise, elle devra s’impliquer beaucoup plus que ça. Elle est un mystère pour moi. Riche héritière capricieuse, oui je m’étais fait à cette idée en l’accueillant ici. La vérité est que je l’ai sous-estimée.
-
Tous ces
rendez-vous avec ces filles à marier, alors? Personne ne t’y oblige, tu le sais?
Tahaa avait hoché la tête d’un air entendu:
-
En effet,
personne ne m’y oblige. J’avais besoin de valider mon intuition première.
Inna comprit tout de suite et fut
satisfaite de l’issue. Elle sourit à son petit fils.
-
Alors, accroche-toi
à cette intuition. Je t’appuierai de façon inconditionnelle.
************************************
Coucou, j'espère que vous allez bien. long chapitre. Je n'arrive pas à synthétiser mes idées. Et désolée de l'attente. Ils ne me lâchent pas à mon travail en ce moment, c'est pas possible d'avoir un moment tranquille pour écrire.
Est-il trop tard pour vous souhaiter une belle année? bisous.