Chapitre 27

Ecrit par Les Chroniques de Naty

Chapitre 27

 

Bien sûr que ça ne pouvait pas être Sié puisque celui-ci a ses clés.

Je me suis laissé emporter par l’euphorie. Mais pire, j’ai pris le risque d’ouvrir sans demander l’identité de mon visiteur ; et en faisant cela, je me suis exposé à des dangers.

Mais ce n’est que ma mère…

Je la regardais. Du moins je l’examinais, la scrutais pour me rendre compte qu’elle a beaucoup maigrir.  Ma mère, cette femme que j’ai toujours admirée et aimée, se trouve devant moi aujourd’hui et j’avoue avoir du mal à la reconnaitre. Je prends pitié d’elle et la seule envie que j’ai est de la prendre dans mes bras et lui dire que je l’aime ; mais je me retiens car j’ai toujours mal pour ce qu’elle a fait à Martine. Et puis je me dis aussi que si elle l’a fait à sa belle-fille, alors elle peut me le faire à moi également. Ne dit-on pas que l’on se doit de traiter nos bru et gendres comme s’ils sont notre propre sang ? Dans la mesure où ceux-ci partage la vie de notre pro géniture.

—Bonsoir maman. Fini je par dire.

Elle ne me répond pas et des larmes roulent sur ses joues. J’ai mal de la voir ainsi, affaibli et quasi malade.

—Maman qu’est ce qui ne va pas ? Pourquoi pleures-tu ?

Elle ne répond toujours pas et les sanglots se font de plus en plus forts. Ne voulant pas que nos voix ameutent les voisins, je la fais entrer et l’installe au salon. Je pars lui chercher un grand verre d’eau ainsi que d’autres collations pour qu’elle puisse se rafraichir.

Après avoir pleuré pendant ce qui me parut une éternité, elle se tait enfin et boit son verre d’eau,

—Tu ne prends pas de jus ?

Elle fait non de la tête et se mouche bruyamment. Son regard semble perdu et sa mine est encore plus triste que quand elle s’est présentée à ma porte.

—Ça va maintenant ?

—Oui ça va merci.

—Qu’est-ce que tu as maman ? Pourquoi pleures-tu de la sorte ? Tu ne te sens pas bien ?

—Comment me sentir bien quand je n’ai plus de nouvelles de mes enfants ?

Pourquoi dit-elle mes enfants ? Je sais qu’il Ya bien longtemps que je ne lui donne plus de nouvelles de moi, mais je sais aussi que Moctar et Sally sont être en contact permanent avec elle ; alors pourquoi elle pleure rien que moi cela ?

—Maman ne fait pas un drame pour si peu. Tu sais très bien ce que moi je te reproche, et à part cela tout doit aller pour le mieux ; tu as ton fils chéri non ?

Elle baisse la tête sans répondre.

—N’est-ce pas ?

—Ma chérie, tu sais que la vie de l’être humain est jonché d’épreuve et celles-ci sont plus difficile les unes que les autres.

—Qu’est-ce que tout ça veut dire maman ?

—J’en viens ma fille ; j’en viens.

Elle se racle la gorge pour se donner une contenance, comme si ce qu’elle s’apprête à me dire est une calamite ou même une information qui pourrait faire changer le cours de sa vie.

Elle n’a surement pas eu tort, car quand elle se met à m’expliquer tout ce qui s’est passée dans sa vie durant ces derniers mois, je ne peux m’empêcher de hurler de surprise. J’espère qu’elle n’est pas sérieuse.

—Comment Moctar a pu te mettre à la porte de chez lui maman ? Ce n’est possible qu’il ait fait ça ! Et surtout pas à sa mère.

—Il l’a pourtant fait ma chérie ! Je me demande ce qui l’a pris ; mon garçon n’est pas comme ça, mais depuis qu’il s’est mis avec cette femme, c’est un autre homme qu’il est devenu. Je crois… non je suis sure et certaine que cette fille l’a envouté.

—Hum !

—Bien sur ma fille. Confirma –t-elle. Je l’ai surprise en train de mettre je ne sais quoi dans le repas de ton frère ; et quand je lui en ai parlé, ce dernier ne m’a pas cru. Il m’a à la limite traitée de folle. Du genre à cause de la vieillesse je n’ai plus toute me tête et je vois ou dis des choses qui ne sont pas vrai.

J’ai envie de lui dire que tout c’est de sa faute, c’est elle qui l’a encouragé à se mettre avec Akabla. Donc maintenant que tout est devenu de la merde, elle doit pouvoir prendre ses responsabilités, mais surtout ne pas se jouer aux étonnées. C’est la suite logique de cette histoire et ça me surprend que ma mère ne l’ait pas deviné ! Car le mal revient toujours à celui qui le fait. Elle a semé le vent, alors qu’elle récolte la tempête sans rechigner.

—Maman tu n’es pourtant pas étrangère à cette situation. Tu as été la seule à soutenir Moctar dans cette histoire avec sa nounou ; c’est toi qui l’as encouragé.

—Non je ne l’ai pas encouragé Nouria.

—Tu ne l’as pas découragé non plus ! Tu es sa mère et si tu avais ne serait-ce que manifester ton mécontentement, Moctar n’aurai jamais eu le courage de se marier à cette fille. Et ça tu le sais mieux que quiconque.

Parmi tous ses enfants, ma mère est plus proche de Moctar que de ses deux filles que nous sommes, Sally et moi. Je me dis que c’est parce que c’est son unique fils qu’elle est autant proche de lui et le couve. Si elle ne l’avait pas soutenu, il n’y aurait pas eu de divorce, ni de mariage. Il a eu appui sur maman, raison pour laquelle il a poussé sa bêtise aussi loin. Le cas contraire, il aurait juste eu une liaison avec Akabla et l’aurait par la suite laissé, sans mettre son mariage en branle-bas.

Pour moi, ma mère est la seule responsable de tous ces désastres familiaux et j’espère du fond de mon cœur qu’elle le regrette.

—Tu ne peux pas comprendre…

—Comprendre quoi maman ? Que tu as brisé la vie de ton fils ?

—Je …

—Tu … rien maman ! Écoute ce n’est pas le moment de tergiverser. Le mal est déjà fait et je ne sais pas comment le rattraper. A moins que tu ne veuilles présenter tes excuses à Martine pour tout le mal que tu lui as fait.

Comme si j’avais dit une grosse connerie, ma mère me regarde interloquée. Je sens qu’elle n’est pas encore prête pour cela ; et pourtant il le faut bien. Il faut qu’elle puisse réparer le tort qu’elle a fait afin d’être en paix avec elle-même.

—Je ne peux pas m’humilier devant cette… cette femme ; cracha-t-elle avec rage.

—Mais …

—Non c’est impossible que je puisse faire cela !

—Et pourtant c’est la seule solution selon moi.

—c’est facile à dire pour toi ; et très difficile à faire pour moi. C’est comme si elle avait gagné contre moi.

Je reste bouchée bée devant autant de rage et de colère contenue. Pourquoi réagit-elle de la sorte ?

—Gagner quoi maman ? Étais-tu donc en guerre avec ta belle fille ?

—Ce n’est plus ma belle-fille. Rectifia-t-elle.

—Mais celle que tu considères comme telle t’a jeté à la porte de la maison de ton fils, de ton propre fils. Celui que tu as porté neuf mois en ton sein. Pourquoi détestes-tu autant Martine ? Qu’est ce qu’elle a bien pu te faire pour que tu puisses la haïr autant ?

Je viens de me rendre compte malgré moi-même que ma mère n’a jamais aimé Martine. Je le savais, ou du moins je le pressentais ; mais là je viens d’en avoir le cœur net. Sinon pourquoi refuse-t-elle de demander pardon à cette dernière ?

—Je n’ai pas d’explication s à te donner ; mais retiens juste qu’il m’est quasi impossible de faire ce que tu me demandes ma fille. Tu ne peux pas me comprendre et ça je ne t’en veux pas pour cela.

—Ah maman. Arrête de dire que je ne peux pas te comprendre ; il ne s’agit pas de moi ou d’une autre personne, mais plutôt de toi-même. De la paix intérieure que tu as perdue depuis que tu as laissé ton fils épouser cette sorcière. Tu n’aimes pas Martine, mais reconnait qu’elle est carrément et largement mieux que l’autre prostituée. Martine c’est la femme au foyer, celle qui a rendu ton fils père et par ricochet qui t’a fait grande mère. En outre elle ne t’a jamais rien fait pour que tu puisses lui en vouloir autant. S’il te plait maman, essaie de voir ce que tu peux faire pour arranger cette situation avec elle. Je sais que tu le veux vraiment, mais c’est ton orgueil de femme Attifé qui t’en empêche. Mets tout ça de côté et fais un petit effort.

—J’ai toujours pensé que cette femme n’est pas la femme qui allait avec ton frère. Elle est bien plus âgée que lui, qu’avait-elle à lui apporter ? Je me demande encore ce qui l’a poussé vers elle.

—Ce n’est pas à nous de chercher le pourquoi de leur mariage. Ils se sont aimés, et ils se sont mariés. Le plus important c’est qu’elle le rende heureux et vice versa.

—Elle à cet air de prétentieuse qui ne la quitte jamais.

—Arrête un instant s’il te plait et soit rationnel.

—Mais je suis rationnelle Nouria.

—Non tu ne l’es pas. Ecoute un peu tout ce que tu dis ; jusqu’à présent tu n’as pas trouvé de défaut grave qui est susceptible de la rendre « nauséabonde » à tes yeux. Tu cherches plutôt des excuses, et celles-ci ne tiennent même pas la route. Au fond tu n’es pas une mauvaise personne.

—Mais pourquoi la défends-tu autant ? répliqua-t-elle irritée.

—Je ne la défends pas ! J’essaie juste d’être objective, et je crois que tu gagneras à l’être aussi.

—Hum tu ne sais pas de quoi tu parles. Je ne suis pas venue pour parler de Martine, mais plutôt pour savoir comment tu vas toi ; et ton mari.

—Je vais bien, Sié aussi se porte à merveille. Nous essayons de nous maintenir dans de bonnes relations conjugales. Mais moi je n’ai pas fini de te parler de Martine. J’aimerai que tu puisses rattraper le coup avec elle ; fais un tout petit effort. Tu verras que ça ne vas pas te tuer.

Je suis têtue ! Ça elle le sait déjà. Alors tant qu’elle ne m’aura pas dit oui, je ne la lâcherai pas.

—Dis-moi s’il te plait, que lui reproche tu au juste ?

Maman ne m’a pas répondu sur le champ. Je me suis dit qu’elle réfléchir surement à tout ce qu’elle reproche à sa belle-fille. Je m’attends donc à ce qu’elle me parle de ça, ou même qu’elle se mette en colère. Je m’attendais à tout, sauf à ce que j’allais voir et entendre.

Contre toute attente, elle se met à sangloter. Je crois que ce soir c’est une soirée pleures et larmes, et crises de colères à outrance. Sinon comment comprendre qu’elle se mette à pleurer pour rien. J’avoue que je suis perplexe, car je ne veux pas faire de peine à ma mère en dépit du fait que je ne partage pas toujours ses points de vue. Mais la voir pleurer ainsi me fend le cœur. Une mère reste une mère, et ces quelles que soit ses dérives et ses erreurs.

—Maman pourquoi pleures-tu ? Ais je dis quelque chose que tu n’aimes pas ?

—Non ! Réponds-t-elle en sanglotant toujours.

Je quitte ma place, et me mets à ses côtés. Je la prends dans mes bras, et comme un besoin impératif, je me mets à pleurer moi aussi. Nous restons ainsi, pleurant comme deux madeleines. Je ne sais même pas la raison de tous ces pleurs, mais je dois reconnaitre que ça fait un peu de bien quand même. Ça permet de se libérer de ce qu’on a sur le cœur. Et puis ça rapproche aussi de pouvoir pleurer ensemble.

Je retourne à la cuisine pour revenir avec un autre verre d’eau et d’autres rafraichissements. Cette fois, elle boit tout ce qu’il Ya dans les verres. Elle s’essuie ensuite le visage et se cale bien dans son fauteuil, comme si le moment des grandes révélations était arrivé.

—Je ne sais pas par où commencer.

—Prends ton temps maman. Dis-je pour l’encourager.

Je sais que ce n’est pas facile pour elle de s’ouvrir ainsi aux autres, et surtout pas à sa fille. Elle se demande surement si je ne vais pas la juger, ou même ne pas la comprendre et lui en vouloir pour ce qu’elle me dira.

Elle inspire profondément et je vois qu’elle veut se lancer mais se retient.

—Ce n’est pas que je n’aime pas Martine ou même que je la déteste. Disons qu’elle ne m’a jamais rien fait, au contraire, elle m’a toujours respectée et s’est comportée envers moi plus comme une mère qu’une belle mère. Le seul problème vient de moi… c'est-à-dire que je suis … comment dire… je suis jalouse d’elle.

—Quoi !!!

J’ai criée même sans m’en rendre compte.

—Tu es quoi ?

—Je ne sais pas d’où vient ce sentiment. Ou mieux je le sais. Reprend-t-elle en ignorant ma question. Je ne la supporte pas parce que je suis jalouse de ce qu’elle a, de ce qu’elle est. Je ne sais comment cela est arrivée, mais depuis le premier jour où j’ai posé mes yeux sur elle, un sentiment d’infériorité s’est imposé à moi. Elle est tout ce que j’ai toujours rêvé d’être et d’avoir. Elle est belle, intelligente, elle est douce en même temps rebelle. Elle sait s’imposer et sait ce qu’elle veut. Elle a par ailleurs eu un homme bon, car oui ton frère est un homme bien et il a toujours aimé sa femme en dépit de toutes mes manigances pour le monter contre elle. Par ailleurs, elle ne m’a jamais manqué de respect lorsque je me comportais comme une vipère envers elle ; et crois moi j’ai été très méchante envers elle. Je me demande comment elle a supporté tout ça, car moi, à sa place, j’aurai réagir à tout ça. Et pourtant ça n’a jamais été le cas.

—Maman… commençais je.

—Non laisse-moi terminer. Car ça me coute beaucoup de te dire tout ça, alors si tu m’interromps, ce n’est pas évident que j’ai encore le courage de te parler.

—Je t’écoute alors. Dis-je encore sous le choc de ce qu’elle venait de dire.

—Martine est une femme bien. Et tu as raison quand tu dis que c’est une femme de foyer, car oui elle l’est et ce contrairement à cette… autre fille. Je l’ai toujours su qu’elle n’arrive pas à la cheville de Martine, mais ma rage et jalousie envers cette dernière m’a aveuglée au point de commettre l’irréparable. J’ai fait la bêtise monumentale de soutenir mon fils dans sa folie. Parce que c’est une folie de laisser une femme telle que Martine pour un torchon comme Akabla. Je crois que Dieu m’a puni en me retournant ma faute contre moi. Aujourd’hui mon fils ne veut plus me voir, mais pire, il me traite de sorcière. Comme quoi j’en veux à sa vie et je ne suis pas une bonne mère. Que je veux le tuer pour prendre tout son argent. Tu t’imagines un peu. Moi Justine sorcière, au point de vouloir tuer son propre enfant. Seul Dieu sait à quel point j’aime mes enfants. Je ne veux même pas qu’il leur arrive quelque chose de mal ; a fortiori que ce soit moi, de mon propre fait, je puisse faire du mal à ma progéniture.

—Mais pourquoi es-tu jalouse d’elle maman ? Tu es la mère de son mari. Tu n’es pas sa rivale ; bien au contraire tu es son guide et son repère. Puisque tu connais ton fils mieux qu’elle dans la mesure où tu l’as porté pendant neuf mois en ton sein.

Elle sourit doucement en remuant la tête.

—C’est pour cette raison que je ne cesse de répéter depuis le début que tu ne peux pas me comprendre. Et je crois que tu ne pourras pas me comprendre tant que tu n’auras pas des enfants toi-même. Tu sauras ce que je ressens quand tu seras mère ma chérie. Mais pour l’instant, tu me verras juste comme une vieille déraisonnée. Et pourtant ma peur et ma jalousie sont justifiées. J’avais peur que ton frère ne l’aime plus que moi et qu’il la fasse passer avant moi ; j’avais peur qu’elle ne vienne me prendre mon fils et que ce dernier m’oublie. Mais surtout quand j’ai su qu’elle venait d’une famille très riche, j’ai eu encore plus peur. Je me suis dit qu’elle se croira supérieure à nous, et nous verra comme des sous-hommes. Alors ma peur s’est transformée en une rage et une jalousie sans nom. C’est vrai que Martine ne m’a jamais donnée de raison de douter de son amour pour mon fils, au contraire, elle a maintes fois prouvé qu’elle aime Moctar et sa famille. Sauf que j’étais trop aveuglée pour l’admettre.

Aussi, elle semblait être née avec une cuillère en or dans la bouche. Cela a décuplée ma jalousie. Elle n’a jamais eu à souffrir pour avoir quelque chose ; il y avait juste qu’à voir sa manière de se comporter pour le savoir. Or moi ça n’a jamais été le cas. Je viens d’une famille modeste. J’ai dû travailler pour en arriver là ; et je ne suis pas tomber non plus sur le meilleur des hommes. Ne me regarde pas comme ça Nouria ! dit-elle. Ton père n’était pas l’homme parfait que tu as toujours cru. Il avait ses défauts et crois-moi ils étaient légions. Mais j’ai supporté tout ça et bien plus encore. J’ai souffert dans ce mariage, ma belle-mère m’en a fait voir de toutes les couleurs. Alors pourquoi Martine serait-elle heureuse si moi je n’avais pas eu la chance de l’être ?

Tout ce que disait ma mère me rendait malade. Oui je sens que je vais tomber malade dans les jours à venir. Ça en fait trop en même temps ; découvrir qu’elle est juste jalouse de sa belle-fille est déjà un coup dur, mais savoir que mon père n’était pas un « homme bien » envers elle est comme un coup de massue que je viens de recevoir. Sans compter sur le fait que grand-mère aussi n’était pas étrangère à tout cela ; elle a dû souffrir comme pas possible. Mais nous en avons jamais rien su de tout ça, car maman à toujours garder son sourire et sa bonne humeur. Je ne l’ai jamais vu pleurer.

Elle parla longuement. Elle m’expliqua des situations qui sont survenues bien avant ma naissance ; et je sens une montée de colère en moi. Je suis révoltée et outrée par tout ce qu’elle a subi du fait de papa et de sa mère. J’en arrive même à les détester d’avoir fait souffrir ma mère de la sorte. Je voyais en mon père un homme au grand cœur, juste et qui aimait sa femme. Alors découvrir que rien de tout ça n’est vrai, me fait perdre mes repères. Un homme se doit de protéger sa famille envers et contre tout, et ce au détriment de sa vie. Mais je viens de me rendre compte que ce n’était pas le cas de mon père qui ne prenait pas soin de la sienne. C’est aujourd’hui que je découvre que durant toute cette année c’est maman qui s’occupait de nous et de nos différents besoins. Il ne faisait que payer les factures ; mais la nourriture et notre scolarisation c’est elle qui s’en occupait. Son argent à lui était pour sa grande famille et ses maitresses.

Heureusement qu’ils ne sont plus de ce monde, sinon je crois que je leur aurais fait payé toutes ces souffrances infligées à maman.

—N’en veux pas à ton père ma chérie. Tout ça c’est du passé et aujourd’hui je vous ais vous. Vous faites mon bonheur et mon honneur. J’ai pardonné à ton père depuis belle lurette ainsi qu’à sa mère. J’essaie de la comprendre.

—Alors tu sais aussi que Martine a dû souffrir de par ta faute.

—Oui je le sais. Et je suis disposée à lui demander pardon. Je sais qu’on ne sera peut-être jamais amies, mais je veux quand même lui demander pardon et faire de mon mieux pour qu’elle se sente bien.

—Elle te pardonnera. C’est une bonne personne et je sais qu’elle te comprendra.

—Je l’espère du fond du cœur. Parce que je suis consciente que c’est de ma faute si Moctar a divorcé d’elle pour se marier avec l’autre. Par ailleurs, j’ai su depuis le début qu’il y avait un truc entre eux. Mais je n’ai pas eu la sagesse d’esprit d’en parler, ou même de contrecarrer cette histoire.

—C’est vrai que tu auras pu faire quelque chose. Mais comme on le dit, il n’est jamais tard pour bien faire. Alors nous irons la voir pour que tu puisses lui parler.

—C’est compris. Merci d’être ma fille ; et d’être aussi mature et consciencieuse.

—Je le tiens de toi maman.

—J’ai une idée. Je vais demander à tonton Kouadio de nous y accompagner. Il a été le témoin de ton frère lors de leur mariage. Et je crois qu’il serait mieux qu’on ait un parti neutre ; lui, il servira de régulateur et de médiateur entre nous.

—Ce n’est pas mal comme idée. Je suis d’accord ; en plus Martine l’aime beaucoup et le respecte. Donc s’il est là, elle ne sera pas trop sur la défensive.

—Oui je me dis ça aussi. J’avoue que j’ai peur. Dit-elle en se tournant le pouce.

—Moi aussi maman. Mais c’est pour la bonne cause. Au moins tu seras tranquille avec ta conscience et tu n’auras pas à t’en vouloir toute ta vie pour cette erreur.

—Je vais demander à rentrer ma chérie. J’ai assez durée ici et je ne veux pas abuser de ton hospitalité.

—Ne dis pas ça maman. Tu es ici chez toi et tu viens quand tu veux. Dis-moi déjà, qui t’a montré ici ?

—Ça c’est un secret. Dit-elle en me faisant un clin d’œil.

J’éclate de rire. Je la trouve plus gaie qu’à son arrivée. Je vais la déposer chez elle à la maison, et m’assure qu’elle est bien rentrée avant de revenir chez moi. Je suis heureuse qu’elle soit passée ; ça m’a fait un bien fou de lui avoir parlé, mais surtout de l’avoir convaincu de demander pardon à Martine. Je prie intérieurement pour que tout se passe bien.

Même si au fond je sais que ça ne sera pas une partie de plaisir d’avoir ces deux femmes dans une même pièce.

La nounou de mon fil...