Chapitre 36

Ecrit par Auby88

Nadia Page AKLE


Je fredonne en continu la chanson "C'est bon la vie" de Nana Mouskouri.

Je suis si heureuse. Si heureuse ! Mon homme vient juste de s'en aller de ma chambre. J'ai dormi dans ses bras jusqu'au petit matin. Un pur bonheur ! Je ne pense pas avoir déjà si bien dormi auparavant.  (Rire)


Je me lave puis vais voir Milena. Elle dort encore. Je ne veux pas la réveiller. Il est juste 6h30. Je la laisserai dormir encore un peu avant de l'aider à s'apprêter pour l'école. En attendant, j'irai me faire du café.


Un quart d'heure plus tard.

- Bonjour Sarah, lancé-je gaiement en la voyant entrer dans la cuisine.


Je me lève de l'îlot central et me dirige vers la machine à café qui vient de finir de ronronner.


- Bonjour Nadia. Ça se voit que tu as très bien dormi.

- Oui, comme un gros bébé ! agréé-je en remplissant ma tasse.

 

Elle garde son regard inquisiteur sur moi.

- Moi, a contrario, je n'ai pas bien dormi cette nuit. D'ailleurs, mes yeux gardent encore les séquelles.


Je souffle doucement sur le liquide foncé trop chaud puis poursuis notre dialogue.

- Un souci ? m'enquiers-je en avalant une gorgée de café.

- Oh, non. Juste deux gros rats trop bruyants à l'étage supérieur.

Je manque m'étouffer avec mon café.

- Ça va ? Tu veux que je t'apporte de l'eau ?

- Non, merci Sarah !

- Tu sembles avoir bien peur des rongeurs pour réagir ainsi.

- Oui, c'est exact. Je n'aurais jamais imaginé qu'il y en aurait ici !

- Moi encore moins. Mais maintenant que j'y repense, il devait plutôt s'agir d'une souris et d'un rat.

- Je vois, dis-je.

Je tourne la tête et ris sous cape.

- En tout cas, il n'y a pas que moi que ce problème a préoccupé hier.

- Ah bon !

- Oui. Le patron aussi a eu du mal à dormir parce que je l'ai vu faire les cents pas dans le couloir hier, précisément du côté de ta chambre.

Je me dépêche de finir ma tasse.

- La discussion est bien intéressante, Sarah, mais je dois te laisser. Milena ira à l'école tout à l'heure, moi au centre d'appels. On se doit donc de se dépêcher. Bonne journée.

Une fois dehors, je l'entends dire :

- Oui, c'est ça. Défile-toi bien. Ça finira par se savoir.


 Tchié, la femme-là est grave quoi ! Hmm ! Donc Eliad et moi, on est des rongeurs. Le pire, c'est le qualificatif "trop bruyants". Là, elle a exagéré hein, même si je ne me souviens pas vraiment de l'étendue de nos gémissements, ni si le lit a beaucoup craqué hier. (Rire).


***************

Eliad MONTEIRO


Aujourd'hui, je suis le premier à quitter le boulot. J'ai bien hâte de revoir PAGE. Je souris rien qu'en pensant à la nuit mouvementée que nous avons la veille. Quelle femme !


- Bonsoir, dis-je joyeusement en voyant PAGE et Milena ensemble.

J'espère juste que ma fille ne finira pas par me voler la vedette auprès de PAGE ! (Rire)

- Bonsoir, me répondent-elles en choeur.


Milena vient se jeter contre moi. Je la soulève de terre et vais en direction de PAGE assise sur le lit de Milena. Nous prenons place près d'elle.


PAGE et moi, nous nous lançons des coups d'oeil discrets. Nous avions décidé que Milena serait la première personne informée de notre relation, avant de la rendre publique. Nous savons qu'elle est très compréhensive, qu'elle aime beaucoup PAGE, Mais nous craignons tous deux sa réaction.


- Milena, PAGE et moi avons quelque chose d'important à te dire.

- Vous êtes enfin ensemble ? C'est ça ?


PAGE et moi, nous nous regardons, interdits.

- Il y a longtemps que j'attendais ça.

Je pince doucement son nez.

- Depuis quand tu te mêles des affaires des grands, toi ?


- Papa ! Eh bien, depuis que tu t'entêtais à épouser tata Maëlly !

- Attends… Alors, tu faisais exprès de…

- Eh bien, un petit peu oui ! affirme-t-elle en riant. C'est la seule méthode que j'ai trouvée pour réunir à nouveau tata Nadia et toi. Et ça a marché ! Vous devez me remercier en m'offrant deux grosses glaces au chocolat.

- Petite diablesse !

- Espiègle en plus ! ajoute PAGE.


Nos éclats de rire s'élèvent dans la pièce.

- Dis papa, maintenant que PAGE est ta petite-amie, est-ce que je peux l'appeler maman ?


Je ne m'attendais pas à ce que ma fille me pose une question pareille. Toutes deux me fixent. Moi, je ne sais quoi répondre. PAGE s'en charge à ma place.

- Ce serait pour moi un privilège, parce que je t'aime comme ma fille. Cependant, tu as déjà une maman qui veille sur toi depuis là-haut. Ce ne serait donc pas commode que tu appelles une autre, maman. Tu comprends ?

- Pas vraiment.

- Ce n'est pas grave, ma chérie. Retiens juste que pour toi, je suis tata Nadia qui t'aime énormément. Entre toi et moi, il existe un lien puissant qui va au-delà du sang. En plus, tata Nadia, ça fait moins vieille que Maman. Tu ne trouves pas ?

- Oui, tu as raison.


Je ne me sens plus à mon aise avec elles. J'ai l'impression d'étouffer. J'invoque un prétexte farfelu pour vite quitter la pièce.


Une fois dans ma chambre.

Je cogne à plusieurs reprises contre le mur. Je viens de merder avec PAGE alors que nous venons à peine de nous mettre ensemble.

Mais comment aurais-je pu dire OUI à la requête de ma fille ?

Une chose est d'accepter PAGE dans ma vie, mais une autre bien distincte est d'accepter que ma fille appelle PAGE, maman !

Déjà, en me mettant en couple avec PAGE, j'ai quelque peu relégué mon épouse au second plan. Alors si je laissais sa fille appeler une autre maman, ce serait comme si je la rayais de la vie de sa fille et de la mienne. Ce que je ne veux pas.



Deux heures plus tard.

Depuis que je me suis isolé dans ma chambre, je n'en suis pas ressorti.


Là, je pense à PAGE. Elle n'a pas semblé contrariée par mon attitude, mais je tiens à en avoir le cœur net. Je ne voudrais pas qu'elle se mette à douter de moi, de nous. Je quitte ma chambre pour la sienne.


- PAGE, tu es là ?

- Oui, un instant, je viens.

Elle ouvre la porte et m'accueille avec ce beau sourire dont elle seule a le secret. Ouf !

- Entre.

- Qu'est-ce que tu faisais ?

- Rien. Je m'apprêtais à dormir. Tu semblais un peu soucieux quand je t'ai ouvert la porte. Qu'est-ce qui ne va pas ?

- Je l'avoue, je me sens mal vis-à-vis de toi.

- De moi ? Pourquoi !

- Parce que je n'ai pas accepté que Milena t'appelle Maman.

- T'inquiète, Eliad, je ne l'ai pas mal pris.

- Tu en es bien certaine ? Car je ne veux pas qu'il y ait un quelconque malentendu entre nous.

- Je te le répète, Eliad. Il n'en est rien.

- Merci PAGE, merci d'être toujours aussi compréhensive avec moi. Tu es un amour !


Elle me sourit. Je dépose un tendre baiser sur son front, puis la serre très fortement contre moi.






ÂMES SOLITAIRES