Chapitre 38: Entre mère et fille
Ecrit par Auby88
Margareth IDOSSOU
Un nouveau jour s'est levé. Je suid pleine d'espoir, pleine d'énergie. Il ne peut en être autrement. Je suis avec la personne que j'aime le plus au monde : ma fille.
Nous longeons la plage, descendant parfois assez près des vagues pour laisser nos pieds être balayés par elles.
Je la regarde, courir, gambader très loin devant moi, puis revenir en arrière me narguer.
- Maman, tu es trop lente !
- Vraiment ! Tu crois cela !
- Oui ! affirme-t-elle avec véhémence.
Sans lui laisser le temps d'ajouter un mot de plus, je me mets à courir, gagnant quelques secondes d'avance. Loin derrière, elle est. Je souris et finis par m'arrêter. Elle finit par me rejoindre, haletant encore. Nous nous laissons tomber sur le sable.
- Alors...
- Tu as gagné, maman !
- La morale ?
- Il ne faut jamais sous-estimer les aînés. Mais tu as quand même triché !
- Si tu le veux, on s'y remet. Je suis encore en pleine condition physique. N'oublie pas que je vais à la salle de gym tous les weekends.
- Non, maman. Je déclare forfait, dit-elle encore essoufflée.
Je me moque d'elle puis je m'étends sur le sable, l'entraînant avec moi. Nous rions aux éclats.
- Je t'aime, maman !
- Je t'aime aussi ma puce. Tu ne peux savoir à quel point je me réjouis à chaque fois, quand je t'entends me dire ces mots si beaux. Au fait, il y a un sujet assez délicat dont je voudrais qu'on parle.
- Tu voudrais savoir si je suis amoureuse ou si j'ai un petit-ami ?
Étonnée, je suis.
- Non, je ne pensais pas à cela mais tu es encore trop jeune pour te lancer dans les histoires de coeur !
- Si cela peut te rassurer, je ne suis pas amoureuse et je n'ai pas de petit copain, du moins pas encore. Des garçons me l'ont proposé, mais j'ai refusé parce que seuls mes études me préoccupent actuellement.
Mon regard sur elle reste inquiet. Elle le remarque.
- Je te rappelle que j'aurai très bientôt 11 ans et je suis en 6ème.
Je secoue la tête.
- Promets-moi que tu viendras en parler à moi, ou maman Judith ou maman Larissa si ton coeur se met à battre pour un garçon et que tu ne feras rien en cachette.
- Maman !
- Promets-le moi ! J'insiste.
- Ce ne sont pas des choses dont les filles aiment parler avec leurs mamans !
- Promets-le moi !
- D'accord, maman mais tu n'as pas à t'inquiéter. Je sais que tu m'as eue jeune, mais ce n'est pas pour cela que moi aussi j'aurai un enfant, jeune.
Elle est encore petite et pourtant elle pense et veut agir comme une grande. J'ai peur que son statut d'enfant quelque peu précoce, qui paraît plus "vieille" pour son âge, lui fasse croire qu'elle peut tout se permettre. Et puis, des hommes, des adolescents "prédateurs", "menteurs", il y en a partout.
- Je sais mon petit cœur. Mais fais attention, d'accord ?
- Oui, chef !
Je me surprends à sourire.
- De quoi voulais-tu me parler tout à l'heure ?
Je ne sais plus si c'est le moment idéal pour cela.
- On en reparlera une autre fois.
- Je suis bien curieuse, moi ! dit-elle en m'affichant une triste mine.
Je me décide à lui parler.
- C'est à propos de David.
- Le Docteur David ?
- Oui. Eh bien lui et …
- Vous êtes ensemble, me lance-t-elle d'un trait.
- Comment l'as-tu su ? m'enquiers-je.
- Je ne suis pas si petite que cela, maman ! J'ai des yeux observateurs comme les tiens et j'ai remarqué que tu l'aimais bien et lui aussi.
- Petite curieuse ! dis-je en lui tapant la tête.
- Aïe, maman !
- J'espère que cela ne te dérange pas.
- Non, même si j'aurais voulu que tu sois avec mon papa Charles.
- Je sais, mais ton père et moi, nous ne nous aimons plus. Il a épousé maman Larissa et moi je veux être avec David. Mais cela ne nous empêchera pas de toujours t'aimer. Parce que tu es notre bien le plus précieux. Tu comprends ?
- Oui, je comprends. Et puis, j'aime bien le docteur David. Il est très gentil avec moi. Mais j'espère que tu ne me délaisseras pas pour lui.
- Comment peux-tu penser cela ?
En parlant, je lui pince doucement le nez.
- Sache, Sibelle, que tu es ce qu'il y a de plus important pour moi. Personne ne passe avant toi dans mon coeur, dans mes pensées, et dans ma vie. Tu es mon rayon de soleil, mon don du ciel, ma lumière au bout du tunnel, mon tout... N'en doute jamais !
Je la vois sourire et je me sens rassurée.
- Alors, dis à tonton David que j'accepte qu'il passe du temps avec "ma" maman, mais à condition qu'il m'achète une tonne de glaces.
- C'est du chantage, petite ! dis-je en pouffant de rire.
- D'accord, juste une glace.
- C'est bon. Je lui transmettrai ton message. En attendant, je compte t'offrir une glace. Mais, il te faudra la mériter.
- Super ! J'adore les défis. Que dois-je faire ?
- Me dépasser à la course.
En parlant, je me lève prestement. Elle me suit. Sur la plage, nous courons, laissant dans le sable nos empreintes et gratifiant la nature des éclats de rire joyeux d'une mère et de sa fille...
******
Margareth IDOSSOU
Quelques jours plus tard. Je viens d'entrer dans un restaurant très chic. Je suis seule évidemment. Je m'assois à une table et commande à manger. J'espère que quelqu'un viendra s'asseoir à ma table. D'ailleurs, c'est le but de ma présence là.
Mon attente n'est pas longue, ce qui m'enchante. Un bel homme au teint clair, net, "sans produit ghanéen" s'approche de moi.
- Puis-je vous tenir compagnie ?
- Bien sûr, dis-je en affichant mon plus beau sourire.
Il enlève sa veste grise, la met sur le dossier de la chaise et s'assoit avec grande classe.
- Je me présente. Je suis Edmond ALITANOU, homme d'affaires.
" Homme d'affaires" ! Ma foi ! Ce mot cache souvent plein de vices. Je m'efforce quand même de ne pas me laisser distraire par ce détail, de ne pas laisser mon esprit devenir le lieu de mille et une analyses sur cet homme. Je me dois de rester concentrée sur ce qu'il me dit et rien de plus.
- Avez-vous déjà commandé ? me demande-t-il.
- Oui. D'ailleurs, le serveur vient vers nous.
J'ai opté pour une salade niçoise avec des frites de pomme de terre. Il choisit la même chose que moi. J'attends qu'il soit servi avant d'attaquer mon repas. Tout en mangeant, nous discutons de tout et de rien : de l'actualité du pays, de ce que je fais et bien évidemment, il en profite pour me faire la cour. Je réponds toujours, le sourire aux lèvres. Je donne l'air d'être flattée par tout ce qu'il me dit.
Malheureusement, l'ancienne Margareth commence par refaire surface. Je ne peux m'empêcher de scruter son doigt qui porte bien une trace de bague ôtée. Ses compliments commencent par sonner faux dans ma tête et son flots de paroles m'agacent. Il est bavard et je ne supporte plus de rester là à l'écouter. Je me dépêche de finir mon repas.
- Je m'excuse, Edmond, mais je dois partir.
- Déjà !
- Oui, c'est la dure réalité de la vie d'avocate.
- Vous pouvez me laisser un contact ou votre carte de visite ?
- Oups. Je n'ai aucune carte de visite sur moi actuellement. Il vaut mieux que nous en restions là, car mon compagnon est très jaloux et votre épouse aussi, je parie.
Il manque de s'étouffer, avec les frites qu'il vient d'introduire dans sa bouche. J'en profite pour m'éclipser.
La morale de l'histoire : on ne rompt pas du jour au lendemain avec ses anciennes habitudes.
Je pensais que la nouvelle Margareth, plus naturelle, plus souriante, amoureuse et heureuse en couple verrait le commun des mâles différemment. C'est d'ailleurs pour cela que je suis venue dîner seule dans ce restaurant. Mais, je me suis trompée. Il me faudra encore du temps pour apprécier la gent masculine à sa juste valeur.
J'espère vraiment que je ne finirai pas par avoir des doutes concernant ma relation avec David, d'autant plus que je continue de ressentir une grande peur, rien qu'à l'idée de devoir coucher avec lui.
Je secoue vivement la tête, en m'imaginant cela. En tout cas, cela fait deux semaines que nous sommes ensemble, mais il n'a pas encore abordé le sujet et j'espère qu'il ne le fera pas de si tôt. Certes, je sais qu'il y pense, qu'il se montre très passionné avec moi, mais je m'emploie à faire comme si je ne vois rien. Et pour le moment, cela marche bien. Quelle vie que la mienne ! Tellement compliquée !