Chapitre 4
Ecrit par Lilly Rose AGNOURET
Un an plus
tard.
J'ai eu 13 ans aujourd'hui. Nous sommes le 26
septembre. Tantine a fait livrer un gâteau de princesse pour moi. C'est une
pièce-montée avec 4 gâteaux à la crème qui forment le château de la Balle au
bois dormant.
Il est 14h quand tout commence. Pour la fête,
on a invité tout le monde. Il y a les nièces de tonton qui sont là avec leurs
enfants. Il y a ma tante Angélique qui est là avec ses enfants. Il y a beaucoup
de musique. Ma nouvelle copine s'appelle Marysa. Elle est au Collège avec moi.
Je ne l'ai pas invitée et elle est fâchée contre moi. Elle m'a dit hier quand
je l'ai rencontré au Géant CkDo : « Pourquoi tu ne veux jamais
m'inviter chez toi, alors que je vais souvent chez mes autres
copines ? »
J'ai baissé la tête et je lui ai dit :
« Mon tonton est méchant. »
Elle s'est quand même fâchée et elle a dit
qu'elle me remettra mon cadeau à la rentrée des classes, dans 4 jours. Nous
serons encore dans la même classe cette année elle et moi. On sera en 3ème. On
parle de tout, Marysa et moi. On se prête des livres. Et je partage avec elle
l'argent de poche que tantine me donne et elle aussi elle m'offre des cadeaux
tout le temps parce qu'elle dit que je suis sa sœur. J'aime beaucoup Marysa
mais je ne lui ai pas dit pourquoi tonton est méchant.
Ces grandes vacances, Maxime et Alexandre les
deux enfants de tantine, ne sont pas venus. Ils sont partis en vacances pendant
tout le mois de juillet avec tantine. En août, ils sont partis en voyages
linguistique en Espagne. Alexandre a eu 19 ans et a décroché son bac. Maxime a
18 ans et il va en première.
J'étais déjà habillée pour la fête. J'avais
mis mon jean noir et un tee-shirt bleu. Tantine m'a demandé d'aller dans la
chambre pour me changer. Elle dit que c'est mon anniversaire et donc, je dois
mettre une jolie robe. Je n'aime pas les robes. Je n'aime pas les jupes. Mais
je vais quand même me changer. Quand j'arrive dans le couloir des chambres, je
passe devant la chambre d'ami dans laquelle dort Liselle depuis qu'elle est
rentrée définitivement du Maroc, en mai, après avoir décroché son diplôme.
J'entends des bruits. Il y a tout le temps des bruits dans cette chambre. Ils
font plein de choses tonton et elle. Et tantine continue de dire qu'ils
rigolent simplement ; je sais qu'on n'a pas besoin d'aller dans la chambre
pour rigoler. Je sais qu'on peut aussi rigoler dans le salon ; alors,
pourquoi se cachent-ils dans la chambre pour rigoler tous les deux ?
Je me dépêche de m'habiller puis retourne
retrouver les autres dans le jardin. Pendant toute l'année scolaire précédente,
il a recommencé à venir m'embêter dans ma chambre en disant qu'il voulait être
gentil et m'apprendre l'amour. Il l'a fait plusieurs fois ; et il y a eu
ce jour où l'infirmière du collège a appelé pour dire que j'ai attrapé une maladie
grave. Ils ont dit que si j'attrape encore cette maladie, ils vont m'exclure du
collège, parce que le collège est dirigé par des sœurs et des prêtes et qu'ils
ne veulent pas de jeunes filles dévergondées dans leur établissement ;
j'ai cherché le mot DEVERGONDEE dans le dictionnaire. J'ai pas aimé. J'ai
appelé Liselle en cachette en volant le téléphone de tonton et je lui ai tout
raconté ; elle a crié :
« Mais Jean est devenu fou ? Une te
transmet la gonococcie comme ça alors que je lui ai bien dit de te laisser
tranquille ? Attend, je vais le gronder tout de suite. Et ne t'inquiète
pas. Je vais trouver une solution pour qu'il ne te touche plus. »
Elle était fâchée. Elle est venue exprès du
Maroc, pour deux semaines. Tous les jours, elle emmenait une fille différente à
la maison. Tous les jours. Et c'est comme ça, que cinq de ses copines venaient
maintenant dormir à la maison à tour de rôle pour « calmer » tonton.
Et il a arrêté de venir m'embêter. Tous les jours il y avait une fille et
tantine disait que les filles viennent pour rigoler avec tonton.
Pendant tout le temps que dure la fête tonton
et Liselle ne sont pas là. Quand ils arrivent enfin, il est déjà 17h. C'est à
ce moment-là que tantine me demande de venir car je vais souffler mes 13
bougies. Tout le monde chante Happy Birthday. Je souffle mes bougies et tonton
applaudi et dit : « Viens me faire un bisou, Princesse. »
Je fais comme si je n'ai pas entendu. Ma tante
Angélique met son visage de côté comme si elle était intéressée par autre
chose. Larissa, la nièce de tonton, me lance :
- Mais embrasse ton tonton ?
- C'est la star du jour. Elle a le droit de
faire des caprices, dit-il avec le sourire. Nelly est toujours gentille.
J'approche et je lui fais un bisou sur la
joue. Il me dit alors :
- Viens t’asseoir à côté de tonton et regarde
le gros cadeau que j'ai pour toi. Au lieu de la chaise à côté de lui, c'est sur
ses cuisses qu'il me fait asseoir pour m'offrir ce petit cadeau enveloppé dans
un écrin en satin. Il s'agit d'une chaîne fine en or tressé. Il me la passe
autour du cou avant de me faire un bisou sur la joue en me disant :
- Joyeux anniversaire ma princesse. Tu es la
reine du jour.
Liselle arrive avec une grosse part de gâteau
qu'elle a servi dans une assiette. Elle me dit alors :
- Tu me laisse la place, Nelly.
Je me lève et elle s'assoit sur les cuisses de
tonton. Et lui donne à manger le gâteau comme si c'était un bébé. Maman Rita la
meilleure amie de tantine qui est aussi la mère de Liselle est là. Elle fait
semblant de regarder ailleurs et s’intéresse à un hibiscus planté à l’extrémité
du jardin.
C'est pour ça que je n'ai pas invitée ma
copine Marysa. Elle allait voir tout ça et le cadeau que tonton m'a
offert ; et ensuite, elle allait me dire que tonton n'est pas méchant.
Jamais personne ne me croit quand je dis qu'il est méchant. Tout ça parce qu'il
donne toujours beaucoup d'argent à tout le monde avec le sourire.
La nuit est tombée ; je suis dans la
chambre en train de ranger tous mes cadeaux dans les placards. Tantine est
sortie avec maman Rita. Liselle a dit qu'elle va faire la fête avec ses
copines. Tonton l'a accompagnée. Tout le monde est parti. Je suis seule, donc
je me sens en sécurité.
Dix minutes plus tard, j'entends la voiture de
tonton qui arrive. Alors, je file me cacher dans la douche. Je verrouille la
porte derrière moi et je mets le robinet à fond. Je fais une prière et je
supplie le ciel pour qu'il n'entre pas dans ma chambre ; pourtant,
j'entends qu'on utilise quelque chose pour déverrouiller la porte de l'autre côté.
Tonton ouvre la porte et il est tout nu. Il me lance :
- Je viens t'offrir ton cadeau.
Je me mets à pleurer ; mes jambes tremblent
et je supplie :
- Non, laisse-moi. Non, je ne veux pas ;
Il avance en souriant et en me disant :
- Tu es toutes belles ma princesse ; tes
mamelles ressemblent à deux belle clémentines. Tu vas voir quand je vais les
sucer. Tu vas ressentir beaucoup de plaisir. Sois gentille ma princesse. Et
puis, tu peux crier autant que tu veux, il n'y aura personne d'autre que nous
dans la maison cette nuit.
J’appelle Liselle en criant de toutes mes
forces. J'appelle tantine de la même façon ; je crie le nom de Moussa, le
gardien. Je crie le nom de Mémé Lina. Personne ne répond. Il me tire de la
cabine de douche pour m’entraîner dans la chambre ; et il commence à jouer
avec mon corps ; et puis je pleure et je crie :
- Je vais me tuer... Je vais me tuer. Je vais
e tuer avec le couteau.... Ne me touche pas. Je vais me tuer. Je te dis que je
vais m'enfoncer le couteau dans la gorge.
Il ne m'écoute pas. Se yeux ont changé de
couleur. C'est comme s'ils étaient tout rouge avec plein de sang à l’intérieur.
Il fait rentrer brutalement son sale truc à l’intérieur de moi et je l'entends
qui prononce des paroles que je ne comprends pas. C'est comme s'il parlait une
autre langue. Je griffe son dos, je tape sur son visage. Je tape, tape, tape,
de toutes mes forces. RIEN ! Il continue de me faire très mal en me disant
que c'est doux.
Je veux mourir. Je veux mourir. Je ne peux
plus rester ici.
Quand il finit de faire ses saletés, i se lève
et il me dit :
- N'est-ce pas que tu es ma petite princesse.
Je ne pleure plus parce que je n'ai plus de
larmes ; il me serre dans ses bras ; ensuite, il me dit :
- Tu es mon trésor.
Et puis, il m'embrasse sur la bouche.
Je n'ai plus de larme. Je n'ai plus la force
de pleurer ni même de le taper. Quand il me laisse sur le lit, je marche vers
la cuisine et je vais dans les tiroirs où sont rangés les couverts ; je
sors un couteau bien tranchant et je l'enfonce dans mon ventre. Et là, ça ne
fait même pas mal, puisque j'ai déjà eu mal. Je tombe seulement sur le sol. En
silence.
Trois jours plus tard.
Tantine est morte. Il paraît que c'est elle
qui m'a trouvée dans une mare de sang dans la cuisine quand elle est revenue de
boite de nuit à 2h du matin ; il paraît qu'elle a eu une crise cardiaque nette,
quand elle m'a cru morte.
- On l'enterre demain, m'annonce Liselle qui
est venue me rendre visite à l’hôpital. Tu as eu beaucoup de chance, Nelly. Tu
as perdu des litres de sang mais aucun organe vital n'a été touché.
Je la regarde et lui dis :
- Je veux être morte.
- Tu vivras, Nelly. Maintenant que tantine est
morte, je vais épouser tonton et prendre soin de toi.
- Pourquoi tu n'as pas pris soin de moi le
soir de mon anniversaire ?
- Parce que Jean est juste repasser à la
maison pour prendre de l'argent pour qu'on puisse s'amuser au restaurant et en
boite avec mes copines. Il devait juste faire un aller/retour.
- Il m'a fait mal, Liselle.
- Je te dis que c'est le démon qu'il a en lui
qui agit comme ça.
- Je veux aller vivre ailleurs puisque tantine
est morte ; je veux aller chez ma tante Angélique à Port-Gentil.
Elle me prend la main et la caresse en me
disant :
- Ma chérie, on ne t'a pas tout dit.
- Dire quoi ?
Elle s'assoit sur mon lit et me dit avec
tendresse :
- Jean est ton père, ma chérie. Donc demain
après l'enterrement, c'est lui qui aura ta garde.
Comme je n'ai pas la force de crier car j'ai
mal à la tête et que le bandage autour de mon ventre m'empêche de me tenir
correctement assise, je reste couchée et étonnée. Je lui demande :
- Qu'est-ce que tu dis ?
- Jean est ton père. Tu es son enfant.
- Tu mens, dis-je, très déçue et craintive à
la fois ;
Elle me caresse la main et me dit :
- Je ne connaissais pas l'histoire. C'est
maman qui me l'a dit hier. Tu sais pourquoi tonton à une grosse cicatrice dans
le ventre ?
Cette vilaine cicatrice.... Je ne réponds pas.
Je préfère ne pas répondre.
- Tu veux que je te raconte ?
Je fais non de la tête. Je veux qu'elle parte.
Je veux que tout le monde me laisse tranquille. Elle me caresse les cheveux et
elle me dit :
- Tu veux aller à Port-Gentil chez ta tante Angélique ?
- D'accord. Je t'ai dit que je vais épouser
tonton, non.
- Je m'en fous.
- Il ne faut pas t'en foutre parce que c'est
très important. Je vais dire à Jean que je ne veux plus te voir chez
nous ; et c'est tout. Je te mettrai moi-même dans l'avion pour
Port-Gentil.
Je n'ai pas envie de la croire alors, je ne
lui réponds pas. Elle sourit et me dit :
- Tout l'argent de Jean sera à moi, alors, il
faut qu'on soit copine ; tu veux aller faire tes études en France et avoir
la liberté, non ? Alors, aie confiance en moi.
Une semaine plus tard.
Je suis sortie de l’hôpital. Le médecin m'a
dit que tout va bien et que la vie est trop belle pour avoir envie de se
suicider à 13 ans. C'est Liselle qui vient me chercher à l’hôpital. Elle
m'emmène à la maison ; arrivé là, elle m'installe dans ma chambre. Elle me
dit :
- Ta tante Angélique sera là plus tard. Je lui
ai dit de passer pour discuter avec elle.
Je lui ai dit que tu veux aller à Port-Gentil avec elle. J'ai obtenu ton
transfert pour le collège français Victor Hugo.
Une semaine plus tard, je prends toute seule
l'avion pour Port-Gentil. C'est Liselle qui m'accompagne à l'aéroport. Avant de
partir de la maison, Tonton me dit :
- Au revoir ma princesse. Tu vas me manquer
très fort. Tiens, prends cette enveloppe. Il y a ton argent de poche. Je
t'enverrai ton argent de poche à Port-Gentil tous les mois.
Il arrive vers moi et m'embrasse sur la bouche.
On dirait pas que sa femme est morte. On dirait pas que ses deux fils Maxime et
Alexandre ont refusé de venir à l'enterrement. On dirait pas que tout le monde
sait qu'il a demandé la main de Liselle hier soir pendant le dîner, devant tous
ses amis.
Je m'en fous. Je m'en vais. Et puis, s'il
essaie de me toucher encore une fois, je vais le tuer avec un grand couteau
bien tranchant. Il verra.