Chapitre 6 : Le mariage traditionnel
Ecrit par Fleurie
°°°Teany°°°
Je lui ai emboîté
le pas, jusqu’à sa voiture. Il a déverrouillé les portières, et nous nous
sommes installés. Ensuite, il a mis le contact. Je ne regarde que devant moi,
depuis qu’il roule. Ma bouche me démange, mais je m’abstiens de parler. Durant
tout le trajet, un silence de mort a régné dans l’habitacle. Il a fini par
garer, une demie heure plus tard, devant un petit restaurant dans le
centre-ville. Celui dans lequel, il aimait tant m’amener. C’est un lieu très
calme et chic. Il est souvent fréquenté par des personnes de marque.
Nous avons
choisi une table située au fond de la salle. J’ai choisi de m’asseoir près de
la fenêtre, pour mieux me détendre. Je n’ai pas envie de courir aux toilettes.
Le serveur est passé. Il nous a poliment salués, ensuite il a pris nos
commandes. Je n’ai pas du tout l’appétit, depuis l’incident de tout à l’heure.
-Teany, je
n’irai pas par quatre chemins pour te donner mon avis. Commença-t-il d’une voix
très posée.
J’ai laissé
mon portable que je pianotais à notre arivée, afin de l’écouter. Eddy fait
partie de ces hommes, qui vous donnent l’impression d’avoir un fort caractère.
Je peux vous dire qu’il est tout le contraire, de ce qu’il laisse paraître.
C’est la raison pour laquelle, je sais comment le manipuler. Il suffit que je
lui montre ma colère, et il se calmera. C’est aussi simple que cela.
-Je ne sais
pas de quoi tu me parles. Tu sais, tu peux appeler les choses par leur nom.
Murmurai-je doucement pour l’énerver.
-Je n’ai
jamais voulu d’un enfant dans cette relation. J’ai cru que tu allais respecter
notre accord. Pourquoi aimes-tu jouer à la gamine des fois ? je ne te
comprends pas.
-Tu as
fini ? Questionnai-je en voyant le serveur venir vers nous, avec son
plateau en main.
Il a posé
nos rafraîchissements sur la table. Après l’avoir remercié, Eddy a commandé un
plat de salade de chef.
-Que
désirez-vous ? Demanda le serveur en se tournant dans ma direction.
-Je me
contente de mon jus de fruit, ça pourra aller. Merci.
Il a noté
quelque chose dans son carnet, avant de disparaître de notre de vision.
-Ne veux-tu
vraiment rien prendre ?
-Je ne suis
pas venue ici pour manger. Tu nous perds le temps, viens en au fait.
-On doit
mettre un terme à la grossesse. Finit-il par dire en fuyant mon regard.
-Ne penses
pas que je vais avorter, pour ta tranquillité. Cet être qui grandit en moi, (
touchant mon ventre ) est une bénédiction. On ne refuse pas les cadeaux de
Dieu.
-Je ne
pourrai pas assumer mes responsabilités. Tu sais très bien que j’ai une
fiancée. Le simple fait que tu sois enceinte de moi, peut me compromettre.
Alors la seule solution à laquelle j’ai songé, est l’avortement. Il va falloir
que tu te décides.
-Il en est
hors de question, je ne le ferai jamais. Je ne te demande pas de rester avec
moi. J’aimerais simplement que tu reconnaisses la paternité, c’est tout Eddy.
Je veux un père pour mon enfant.
-Je déteste
quand tu veux qu’on se prenne la tête pour un simple fait. Fit-il en se passant
la main sur le visage.
-Pour toi,
c’est un simple fait, mais tu t’entends parler merde.
[ … ]
J’ai voulu
continuer de déverser ma colère, lorsque le clignotement de mon portable, m’a
alerté d’un message. Je l’ai frénétiquement saisi, avant de le déverrouiller.
« Ton
père vient de rentrer. Tu as intérêt à nous faire grâce de ta présence. Et
surtout, ne rentres pas sans lui. Tu as trente minutes. »
J’ai failli
m’évanouir en ayant lu le message de ma mère. J’ai immédiatement compris
qu’elle allait tout gâcher. Ma mère a un fort caractère. J’ai toujours été une
rebelle, depuis mon enfance. Tous les camarades de classe se plaignaient de
moi. Malgré, toutes les années qui s’écroulent, elle reste la même.J’ai
lentement glissé le portable dans la poche de mon jean slim.
°°°Eddy °°°
Je la
regarde depuis un moment, sans vraiment savoir quoi faire pour la faire changer
d’avis. Cette fille, est très bornée. Jeme demande de qui elle tient, ce
caractère.
-Je t’ai
pris un rendez-vous chez le docteur. Il est très compétent. Demain matin, je
passerai te chercher. Lançai-je d’un coup, sans la regarder.
Elle a
éclaté d’un rire moqueur. Ce qui a suscité le regard de quelques clients.
J’ai du mal
à le dire. Je suis chrétien catholique, et je suis conscient que ma religion
est contre l’avortement. Mais au stade, où les choses sont, je n’ai vraiment
pas le choix. Que Dieu me pardonne. Je suis très amoureux de Anissa pour lui
faire ce coup. Elle ne s’en remettra, si elle l’apprenait. Et je ne suis pas
prêt à la perdre.
-C’est
absurde Eddy. Pour qui te prends tu ? Dit-elle en tapant sur la table.
-Tu vas
attirer la foule sur nous Teany, contrôle-toi s’il plaît. Essayai-je de la
calmer.
-Je m’en bas
les ovaires, je n’en ai rien à foutre de qui que ce soit. Tu l’attires toi-même
la honte. Je ne suis pas ta fille. Tu ne décideras pas à ma place. Pour ton
information, je compte porter cette grossesse, jusqu’à terme. Et c’est ma
décision. Il n’y aura plus de marche arrière.
-Teany on
peut régler cette affaire à l’amiable, sans recourir à la force. Nous sommes de
adultes, et agissons en tant que tels. Je t’en conjure. On peut trouver un
terrain d’entente.
-Je n’ai
plus rien à te dire. Ma mère vient de m’envoyer un message. Mes parents
t’attendent à la maison.
-Mais que me
racontes-tu ? Comment as-tu fait ?
-On
n’apprend pas à un vieux singe à faire des grimaces. Je n’en dirai pas plus. Je
rentre chez moi.
Elle s’est
levée sans plus aucun regard pour moi. Après avoir effectué deux pas, elle
s’est arrêtée en se retournant.
-Un dernier
conseil, tu as intérêt à venir. Je connais mes parents, et crois-moi je sais de
quoi ils sont capables.
-Teany
attends.
Elle m’a
ignoré et a continué son chemin. J’ai repoussé le plat de salade devant moi.
Mon appétit a disparu. J’ai pris ma tête entre les mains. Dans quel pétrin me
suis-je encore fourré ?
[ … ]
J’ai payé
l’addition avant de quitter la salle. Je n’ai pas envie d’étaler ma vie à qui
que ce soit. Je ressens une forte envie de me confier à quelqu’un. Mais j’ai
peur des jugements. Anissa est une femme très compréhensible et mature. Elle
saura m’aider dans cette situation. J’ai pris mon portable, elle a décroché à
la première sonnerie.
-Anissa !
-Allo Eddy,
tu vas bien ? je te sens un peu tendu.
-Non tout va
bien, et les courses avec tes parents ?
-Boff, c’est
un peu fatiguant, mais on gère.
-C’était
juste pour entendre ta voix. Ciao ma belle.
-Merci mon
cœur, à ce soir.
Clic.
Je n’ai pas
eu le courage de lui parler. Je ne peux pas. J’ai fini par retrouver une quinzaine
de minutes après dans une église. J’ignore à quand remonte ma dernière visite
dans une paroisse. A genoux devant le sanctuaire, je prie intérieurement mon
Seigneur.
Seul le
créateur peut m’aider. J’implore son pardon sur ma petite personne. Je ne sais
pas vers qui me tourner à part lui. Après des minutes à prier, je me suis enfin
décider à sortir de cette salle de la paroisse St Michel de Cotonou. A pas de
loup, je me suis dirigé vers le parking. C’est difficilement, que j’ai pu démarrer.
J’ai dû mettre toute ma concentration sur la route, pour éviter de cogner les
gens. Mes pensées ne me lâchent pas.
Une demie
heure après
J’ai appuyé
sur la sonnette. Le temps que quelqu’un vienne m'ouvrir, j’ai jeté un regard
aux alentours. Elle vit dans une très belle demeure. Cela m’a rappelé la
première où je l’avais déposée un soir. J’ai arrêté de le faire, à cause des
propos qu’elle m’avait apportés concernant sa mère. Le gardien a ouvert le
portail, et je me suis faufilé à l’intérieur. C'est la première fois, que j'y
mets les pieds.
Une
charmante dame de taille courte m’a accueilli. Elle est de teint très clair, on
dirait une métisse. Elle m'a souri, et j'ai remarqué ses belles dents blanches.
Je l’ai suivie à l’intérieur. Elle m’a conduit dans leur séjour. Ses parents
sont assis, et discutent. J’ai nerveusement raclé la gorge, pour marquer ma
présence.
-Bonsoir
chers parents, dis-je en m’inclinant devant eux.
Son père a levé
la tête pour me regarder. L’expression du visage de la mère n’augure rien de
bon. J’ai pris mon courage à deux mains pour m'avancer vers eux.
-Bonjour
jeune homme, dit-il en désignant le fauteuil tout juste en face d’eux.
-Je parie
que tu t’es bien armé avant de venir, commença sa mère en affichant un sourire
jaune.
-Tu ne vas
pas commencer Nellie. Fit le père en lui lançant un regard assassin.
Je prévois
déjà ce qui m’attend. Il a appelé la dame de tout à l’heure, qui a été chargé
d’appeler Teany. Elle est sortie plus tard, dans une petite robe avec sa tête
nouée. Elle a l’air d’une fille très innocente. Je me suis mis à prier
intérieurement, afin que tout se passe bien.
°°° Georges
SESSOU °°°
Quand je dis
que ce sont nos enfants qui nous font parler, en voici les preuves. Teany, est
ma préférée, la prunelle de mes yeux. Mais elle est une petite rebelle. Je n’ai
jamais imaginé qu’elle se ferait engrosser par le mari d’autrui. J’ai été pris
d’un étourdissement quand sa mère m’a annoncé la nouvelle. J’ai cogité pendant
des minutes sur cette situation. Nous sommes une famille très respectable. Je
déteste lorsque les gens parlent mal de nous.
Une heure
plutôt
À mon arrivée, je l’ai convoquée dans mon
bureau. Il fallait qu’on ait une discussion, avant que ce jeune ne se pointe.
-Assieds
toi, fis-je en lui indiquant la seconde chaise, juste en face. Elle a un peu
hésitée avant de le faire. Je connais ma fille, et je sais qu'elle se doute
déjà que je ne suis pas du tout content d'elle.
-Je t’écoute
Teany. Ta mère m'a un peu briefé, mais je veux l'entendre de ta bouche.
Un petit
silence s'est régné, avant qu'elle ne se décide à faire sortir un mot. Elle
s’est mise à me raconter son discours. Je l’ai attentivement suivie, jusqu’à la
fin, sans l'interrompre.
-Comment
peux tu agir de la sorte. Tu devrais quand même respecter ta dignité. Et
pourquoi ne pas être venue me consulter. Tu sais combien je tiens à toi. Qu’est
ce qui n’a pas marché, hein ? Et nous
voilà sur le fait accompli. Je suis déçu ma puce.
-Je suis
désolée papa, snifff. J’ai été aveuglée par l’amour. J’en suis follement
amoureuse. Je ne vais pas supporter de le perdre. Pardonne moi.
Elle s’est
levée pour se jeter à mes genoux. J’ai senti ses larmes humidifier l’étoffe de
mon basin. Lentement je l’ai soulevée, en la prenant dans mes bras.
-Et que
comptes tu faire à présent ma fille ?
-Je vais le
garder. C’est ma décision. Le père veut que j’avorte, mais je m’y suis opposée. Notre religion nous
l'interdit. J’aimerais que tu calmes maman. Tu es la seule personne à lui faire
comprendre. Elle m’insulte depuis qu’elle est au courant de mon état. J’ai dû fuir
pour éviter une bastonnade ce matin.
-Tu dois la
comprendre, c’est ta mère après tout. Je ne peux pas t’encourager dans certaines
erreurs chérie.
-Je vois,
murmura-t-elle en baissant la tête.
-Très bien,
de toutes les façons tu es assez grande. Et tu peux distinguer le bon du
mauvais. Je ne peux que te guider et te soutenir. Mais j’aimerais voir ce
monsieur. J’ai deux mots à lui dire.
-Il ne
tardera pas à venir père.
-Tu peux disposer.
J’ai besoin d’être seul pendant un moment.
-Merci papa.
Je t’aime.
J’ai tout
simplement souri, malgré moi. Elle est sortie en prenant soin de fermer la
porte derrière elle. Je n’ai pas compris combien cet homme
est irresponsable. J'ai toujours rêvé d'un avenir meilleur pour mes
filles. J'ai fermé les yeux pour méditer.
Retour au
présent
Elle s’est
installée près de moi. Elle évite sûrement sa mère. J’ai ôté mes verres, que
j’ai mis sur le côté, avant de prendre la parole.
-Jeune
homme,que comptes tu faire à présent de ma fille ?
-Monsieur
SESSOU, je tiens tout d’abord à m’excuser pour ce qui se passe entre votre
fille et moi. Croyez-moi, je suis profondément navré.C’est vrai que nous n’entretenons
pas une relation connue de tous. Nous nous étions mis d’accord sur un point dès
le départ. Mais ce qui devait arriver, est arrivé.
-Tu vas
prendre tes responsabilités, sinon je vais te faire voir de toutes les
couleurs, tu penses que tu vas t’en sortir aussi facilement. Intervint Nellie,
toute furieuse.
-Tu vas le
laisser parler à la fin ?
-S’il sait
bander, qu’il assume aussi tsuiiip. Finit-elle par dire en se levant d'un bond,
pour aller je ne sais où.
-Je vais reconnaître
la paternité monsieur. Je suis prêt pour ce fait, mais cependant je ne pourrai
pas la prendre comme épouse. Je suis déjà fiancé à une autre.
-Et tu
penses que mon petit fils va vivre sans son père ?
-Tu vas te
marier avec elle, il n’y a pas à discuter, dit ma femmeen revenant dans la
salle.
J'ai regardé
ma fille, qui a l'air dépassé par la tournure que prend cette petite
discussion. Nellie risque de tout gâcher, si je n'interviens pas vite. J'ai
passer la main dans mes cheveux.
-Jeune
homme, suis moi. Nous devons discuter en tête en tête.
Nellie a
voulu s'y opposer, mais je l'ai arrêtée dans son élan. Je me suis levé, il m'a
suivi sans rien dire.
Un mois plus
tard
°°° Anissa °°°
Je suis sur
mon petit nuage depuis ce matin. Mes parents viennent de m'annoncer une
excellente nouvelle. J'avoue que je n'en revenais pas. Eddy a décidé de faire
le mariage traditionnel. J'ai compris la raison qui se cache derrière son
supposé voyage d'unmois. Pendant son absence, je suis restée chez mes parents.
Même mon père et ma mère sont au pays. pour une surprise, ça en est vraiment
une. Je lui en seraiséternellement reconnaissante pour cet acte envers moi. Au
moins, ce voyage a récolté un bon fruit. La maquilleuse vient de finir son
travail, je suis enfin prête. Dehors, je peux percevoir les voix des parents.
-Anissa,
c'est le moment de te faire sortir, dit ma cousine toute souriante.
-J'ai peur.
-Tu n'as
aucune raison de l'être, tout se passera bien. Il y a déjà nos oncles qui
s'occupent de tout.
J'ai soupiré,
elle m'a prise par la main et nous sommes sorties de la pièce. Ils sont au
moment où je dois faire part de ma présence. En sortant, la foule qui était
animée tout à l'heure s'est tue.
-Personne ne
va célébrer ce mariage, tant que je vis. Vous avez intérêt à tout arrêter si
vous ne voulez pas d'un scandale. Intervint une voix féminine qui ne m'est pas
du tout indifférente.
-Mais qui
est elle ? Demanda mon oncle.
-Quelqu'un
peut-il m'expliquer ce qui se passe ? Questionna ma mère ahurie.
Je me suis
retournée pour faire face à cette femme. Je la reconnais, je l'ai aperçue il y
a un mois. Que vient elle de dire ?