Chapitre 66

Ecrit par WumiRa

Une fois Henri partit, Malik se rassit et attendit patiemment le retour de sa femme. D'une part, il était ravi et immensement soulagé que toute cette histoire d'adoption se soit enfin réglé, mais à côté, il était toujours préoccupé par son échange avec l'homme qui il y a encore quelques jours était son ennemi juré. Pourquoi ne ressentait-il plus aucune forme de haine vis-à-vis de lui, maintenant ? Qu'est-ce qui avait changé ? Le fait d'apprendre que son père était toujours en vie y était probablement pour quelque chose, oui, mais le plus étonnant encore était qu'il n'était pas pressé de voir ce dernier. Lui qui durant toutes ces années croyait venger la mort de quelqu'un n'était même pas mort... Décidément, la vie pouvait être très ironique. 


Mais quoiqu'il en soit, il restait cette chose que ne lui avait pas encore dit Henri par rapport à sa mère. Il avait du mal à imaginer celle ci tromper son père avec son meilleur ami, quand ce dernier même était marié. Une histoire de dingue.


- Je suis rentrée.


La voix de sa femme depuis le seuil de la porte, le ramena sur terre.


- Papa est toujours là ? J'ai déposé maman à la maison, parce qu'elle était un peu fatiguée.


Il se leva, pour la libérer des paquets qu'elle tenait.


- Tu as bien fait, il est rentré. Vous avez dévalisé tout un magasin ou quoi ? 


- L'utilité d'avoir un mari riche.


Il haussa les sourcils.


- Avec quel argent t'es-tu offerte toutes ces choses, s'il te plaît ?


Au lieu de lui répondre, elle se laissa tomber dans un fauteuil, s'éventant de ses deux mains.


- Il fait tellement chaud au marché, je te jure.


Elle sourit, devant la mine interrogative de son mari.


- Ohh c'est maman qui a tout payé, t'inquiètes ! Je n'ai pas touché à l'argent que tu m'as donné, c'est pour remeubler les chambres d'amis je sais.


- Tu me vois soulagé.


- Et puis si je ne dépense pas de ton argent, qui le fera ?


Elle roula des yeux, puis claqua de la langue.


- Oui ruine moi tant que tu y es. Quand je pense que la moitié de tes vêtements n'ont jamais été porté. Tu devrais penser à les donner à ta mère pour qu'elle les mette en vitrine.


- Radin va.


- Croqueuse de diamants.


- Macho.


Il allait partir vers les escaliers, mais sa remarque le fit se retourner.


- Macho, moi ? s'enquit-il, feignant d'avoir l'air menaçant.


Consciente qu'elle avait touché là où ça pique, elle se redressa en riant, prête à courir jusqu'à l'épuisement.


- Viens là, ordonna-t-il, alors qu'elle contournait le fauteuil pour lui échapper.


- Déedéet (Non).


- Je t'attraperai de toutes façons.


- Si tu m'approches, je te mords.


- Ah bon ? 


Il posa tout ce qu'il avait en main sur la moquette. Maya en profita pour s'élancer vers les escaliers, mais il n'eût qu'à faire quelques grands pas, pour la rattraper. Dans leurs mouvements désordonnés, tous les deux se retrouvèrent au sol.


- Chéri je plaisantais, tu n'es pas... Aïe Malik ! Non, non... Non, pas ça, je vais avoir des crampes s'il te plaît arrête... !


Incapable de se libérer de son emprise et des chatouillement qu'il lui faisait dans le ventre, elle se plia en deux, riant par moment, feignant ensuite de suffoquer.


- Étouffe toi avec ton insolence, déclara t-il.


N'en pouvant plus, elle se mit à demander grâce. 


- Pardon, pardon... Je te présente mes excuses !


Il fit une pause, mais avant qu'elle ne reprenne son souffle, il se leva et la hissa par dessus son épaule.


- Je déteste quand tu me soulèves comme un vulgaire sac de riz, articula t-elle, malgré son souffle court.


Cette fois, c'est lui qui éclata de rire.


- Où est-ce que tu m'emènes ?


- Dans les étoiles.


- Ahh...


- Si tu penses que je suis en train de t'emmener au lit, tu te trompes demoiselle. 


- Je n'y ai même pas songé.


- La menteuse.


- Même si tu es en train de déteindre sur moi, sur ce coup je ne serai jamais comme toi, mon cher.


Amusé, il secoua la tête, continuant à monter.


- Je sais que je te rends folle.


-  Ah oui ? Parce que je te l'ai dit ou maintenant tu as des visions ?


Il lui assena une claque sur les mollets.


- Quand j'irai à la piscine l'un de ces quatre et que les gens verront les traces de tes ongles dans mon dos.


- Hummmmmm !


- Tu as fini de faire la maligne ?


- Vivement que tu ne te dégonfles pas une fois devant monsieur Bop. 


- Qui ça, le psy ? 


Il pouffa de rire.


- C'est toi que les termes de sexologie embarrasse, pas moi.


Elle se mit à lui marteler le dos de coups de poings, tandis qu'il entrait dans leur chambre à coucher.


- Repose moi maintenant.


Ce qu'il fit ; il la déposa sur le lit.


- Gneugneugneu si tu crois que je t'emmène au lit, fit Maya en imitant ses propos d'un peu plus tôt.


- Je ne t'ai pas encore déshabillée, c'est déjà ça. 


Elle mima à nouveau ses propos, lui arrachant un sourire.


- Non, sérieusement tu sais que je n'aurais pas attendu qu'on regagne la chambre si je l'avais voulu. 


Il croisa les bras.


- Je veux conclure un marché avec toi.


- Un marché ? Quel genre de marché ?


- Attends.


Il ouvrit un tiroir et en sortit les clés d'un véhicule, maintenues par un porte-clés bleu ciel. Il les agita devant ses yeux.


- Qu'est-ce que c'est ?


- Il y'a quelques jours je t'ai demandé ce qui te ferait plaisir pour ton anniversaire, entre une nouvelle voiture et un voyage. Tu te souviens de ce que tu m'as répondu ?


- Oui, j'ai choisi le voyage.


- Au lieu de la voiture, pourquoi, tu n'aimerais pas avoir une autre caisse toute neuve  ?


- L'ancienne ne pose pas de problèmes...


- Sûre ?


Il sourit.


- Dans ce cas, dis moi à qui tu comptais offrir une voiture avec les économies que j'ai découvert dans l'une de tes valises, avant-hier.


Elle haussa les sourcils, étonnée.


- Tu as fouillé dans mes affaires ?


- Je cherchais un t-shirt. Tu t'es accaparé les miens, je te rappelle. Bon, c'est pour qui la voiture pour laquelle tu t'es mise à faire des économies ? Tu as bien écrit "voiture" dessus.


Elle détourna le regard.


- Tu n'as pas à toujours tout m'offrir, je te l'avais déjà dit.


- C'est à dire ?


- Je prévois acheter une nouvelle voiture, c'est vrai.


Elle lui refit face et ajouta, déterminée :


- Avec mon propre argent. 


- Hum, c'est bien toi qui disais qu'il y avait multiples avantages à épouser un homme riche.


- Pas faux. Mais des fois, j'aimerais pouvoir me faire plaisir moi même. Tu veux avoir une femme dépendante et soumise dans tous les sens du terme ?


- Dieu merci, tu es tout sauf soumise dans tous les sens du terme. Et je te respecte beaucoup pour ça, mon cœur, mais... Il faudra aussi me comprendre des fois et faire avec les débordements d'un homme amoureux. 


- Pourquoi ai-je l'impression que tu es en train de vouloir me retourner le cerveau ? demanda t-elle tout à coup, suspicieuse. Tu as achetée une nouvelle voiture et tu ne sais pas comment me pousser à l'accepter c'est ça ?


- Pas du tout, ce serait trop facile. J'étais seulement en train de t'expliquer qu'il arrivera des jours où j'aurai envie de tout t'offrir en même temps, simplement parce que je t'aime et que pour moi c'est normal. Tu l'as dit toi-même, si tu ne dépenses pas mon argent, qui le fera ? 


- Nos enfants, un jour Insha'Allah. Maintenant viens au fait s'il te plaît. Ce n'est que quand tu as un plan tordu en tête que tu me sors toutes ces belles choses.


- Ah donc, tu doutes du fait que je t'aime ?


- Je sais que tu m'aimes tonton, tu es fait pour n'aimer que moi, merci. Maintenant parle, parce que je commence à avoir faim. Tu voulais conclure un marché ?


- Pour commencer, la voiture est à toi.


- Marque ?


- Toyota Yaris. Couleur cendre, mais on peut changer de couleur si tu...


- Ohh non, ne te dérange pas. Comment as-tu su que c'était précisément le genre de voiture que je voulais ? 


- J'ai un don divinatoire. Mais plus sérieusement, il est évident que tu adorerais avoir un tel engin ; belle carosserie, confort moderne, et les modèles qu'il y avait étaient tout simplement magnifiques.


- Vraiment ?


Malgré elle, elle ne réussit pas à masquer son contentement.


- Vraiment.


- Mais avant que je ne me réjouisse trop, tu veux quoi ? Et au passage, qu'en est-il de mon vrai cadeau d'anniversaire ? Puisque celui ci a pour but de me corrompre.


- Le voyage n'est pas annulé. Vas-tu quand même accepter mon cadeau corrompu ?


Elle fit la moue.


- Est-ce que j'ai même le choix hein ?


Elle tendit la main et il y déposa les clés de la voiture.


- Merci. 


- Si je te remets les clés à l'avance c'est parce que je sais déjà que le marché que je vais te proposer n'a rien de sorcier.


- Avec toi on ne sait jamais, vas-y je t'écoute. Par contre sois raisonnable, parce que je me vois mal en train de te retourner les clés.


- De toute façon qu'est-ce que je vais faire avec une voiture de femme ?


Maya s'allongea sur le dos, les yeux rivés au plafond, tandis qu'il lui exposait son plan et ce qu'il attendait d'elle. Tout en l'écoutant, par moment elle secouait la tête ou fronçait les sourcils, mais elle ne l'interrompit pas jusqu'à ce qu'il ait fini. Puis...


- Voilà un peu ce que je veux que tu fasses.


Elle se redressa, prenant appui sur ses coudes.


- Tu crois que ça va marcher ?


- Il n'y a que toi qui puisse le faire.


- Il aura des soupçons.


- Je t'assure que pour lui, tu es l'incarnation d'un ange.


- Parce que toi tu ne partages pas cet avis ?


Il roula des yeux.


- Mais bien sûr que si, mon bébé.


- Ok, marché conclus.


Elle tendit sa main droite, qu'il serra.


- Je savais que je pouvais compter sur toi, dit-il ensuite, en se penchant sur elle.


- Tant qu'il y avait une Toyota Yaris à côté, n'est-ce pas ?


Tous les deux éclatèrent de rires comme deux enfants insouciants.


***


- Mais comment peux-tu m'appeler pour des choses pareilles ? Ça fait la deuxième fois. Tu sais très bien que je suis à Dakar... Mais c'est ta fille aussi, je ne l'ai pas eu toute seule, tu avais... Non, je ne me parle pas de tes problèmes de couple, tu as intérêt à bien prendre soin d'elle ou... Allô... Allô ?


Son téléphone toujours vissé à l'oreille, Oumou se laissa tomber sur son lit d'hôtel, la gorge serrée.


- Quel pauvre type !


Le téléphone de la chambre se mit à sonner ; elle le décrocha, c'était la réception.


- Oui, laissez-le monter, répondit-elle au bout de quelques secondes.


Ensuite, à la hâte, elle remit de l'ordre dans ses cheveux, rangea le peu de désordre qui régnait et mit un peu de parfum dans le creux de ses oreilles. Elle venait à peine de se rasseoir quand on toqua à la porte. Après un dernier coup d'œil au miroir, elle alla ouvrir.


Devant la porte, le visiteur attendait patiemment. Lorsqu'elle le fit entrer, il enleva la casquette qu'il avait sur la tête, et lui fit face.


- Merci d'être venu, dit-elle, l'air sincère. Je ne savais pas qui appeler.


- Et ton père ?


Elle soupira.


- Je ne veux pas exagérer, je le connais à peine et il doit avoir ses propres problèmes.


- Soit. Quel était l'urgence ?


Elle fixa la casquette qu'il avait enlevée.


- Tu ne voulais pas être reconnu ?


- Oui, ma petite amie travaille dans cet hôtel. 


Si le cœur d'Oumou reçut un coup à cette déclaration, elle n'en montra rien.


- Alors tu as dû vraiment prendre sur toi pour te résoudre à venir me voir. Après t'avoir parlé au téléphone, je me suis traitée d'idiote parce que j'étais certaine que tu ne viendrais jamais. Encore moins dans un hôtel.


- C'est moi l'idiot, rectifia t-il. Sinon je ne serai pas accouru comme avant, au moindre de tes appels.


- Ne dis pas ça.


- Mais que les choses soient claires une bonne fois pour toute. Je sais que tu ne me ficheras pas la paix, je le sais et je profite de cet instant pour te prier de rester le plus loin possible de moi. Un peu comme ces trois dernières années où je n'ai eu aucune de tes nouvelles. 


- Umar...


- Tu compteras toujours pour moi, d'une certaine façon, tu sais.


Elle retint son souffle.


- Mais il n'y aura plus jamais rien entre nous, c'est mort. 


- Ce n'est pas ce que tu as dit la fois dernière.


Il se massa l'arrête du nez.


- Je n'aurais pas dû te dire toutes ces atrocités, nous sommes assez adultes pour admettre que ce qui s'est passé fait partie de la vie. Ce que je veux que tu comprennes par contre, c'est que quoi que tu fasses, ce sera peine perdue ; accepte-le et va de l'avant. Maintenant si tu veux bien, parlons du pourquoi tu avais l'air si paniquée au téléphone, qu'est-ce qu'il y'a ?


Elle dû faire beaucoup d'efforts, pour ne pas laisser l'émotion paraître dans sa voix. Elle releva fièrement la tête, se promettant que chaque chose avait son temps et que le chapitre "eux deux" n'était que partie remise.


- Je t'écoute, Amanda.


- Assieds-toi d'abord.


Elle lui désigna le fauteuil à côté du lit, mais il le refusa.


- Je n'en ai pas pour toute la journée.


- Je veux que tu m'aides à récupérer ma fille.







Sensuelle Ennemie