Chapitre 8

Ecrit par EdnaYamba

Chapitre 8

Quand je me réveille le lendemain, Mélanie a déjà quitté le lit. J’espère qu’on a été assez discrets et que ses parents n’ont rien soupçonnés de ce qui s’est passé dans cette pièce. Je vais prendre une douche et me changer. Je sors mon sac prêt, pour partir chez mon oncle quand le père de Mélanie m’appelle. Inquiet, je me demande s’il sait ce qui s’est passé entre sa fille et moi et va me réprimander. Encore que cette nuit, je ne sais pas ce qui s’est vraiment passé, je me sentais déconnecté bien que je la tenais dans mes bras. Je mets ça sur le compte de la fatigue.

-         Ma fille m’a dit que vous avez eu une des meilleures moyennes du département au baccalauréat

-         Oui monsieur, répondis-je soulagé qu’il ne s’agisse pas de ma nuit d’amour avec sa fille.

-         C’est une fierté pour notre coin, c’est à féliciter et à encourager alors je me suis dit pourquoi pas vous offrir une bourse pour la France ?

Hein ???

Une bourse, moi ? Pour la France en plus, c’est plus que tout ce à quoi j’ai pu espérer je venais juste pour m’inscrire en économie à l’UOB et me voilà avec une opportunité d’aller France. Quand on dit qu’il y a des rencontres qui changent vos vies, c’est certainement des rencontres comme celles-ci.

Mr BOMO me donne une liste de documents à fournir. Ce sont mes parents qui seront heureux quand je leur ferais parvenir par lettre la chance que j’aie.

-         Tu as vu mon père ? me demande Mélanie alors que je m’apprête à partir

-         Oui, merci de lui avoir parlé de moi.

-         C’est normal, dit-elle en me caressant la joue. On se voit bientôt ?

-         Bien sûr bébé, lui dis-je avant de partir.

Elle affiche un sourire radieux quand je la quitte.

 

 

Isabelle MOUKAMA

La famille BOUMI nous a jeté de chez eux comme des malpropres ils n’ont rien voulu entendre, leur fils n’est pas le père de cet enfant point.

Mes frères étaient tellement en colère qu’ils m’ont trainé jusque chez le chef du village, c’était son rôle à lui de régler les litiges. Ils ont été tellement menaçants qu’il a demandé à la famille BOUMI de contacter leur fils afin qu’il se prononce. Il ne me restait plus qu’à prier qu’il ait l’honnêteté de reconnaitre qu’on avait bel et bien une relation.

C’est mamie qui avait raison, quand elle me le disait :

Pas un garçon de ce village Isabelle !

J’aurais dû l’écouter.

J’ai tellement mal. Tellement mal.

Pourquoi suis-je aussi naïve ?

Je leur fais confiance et ils me détruisent.

Qu’ai-je fait à ce monde ?

Je me repasse en boucle les paroles de BOUMI, il me semblait pourtant sincère. Etait-ce vraiment un jeu pour lui ? Il s’est dit je vais gouter à l’interdit, m’en amuser un peu et la laisser tomber après de toutes les façons personne ne prendra sa part ! C’est ça !?

C’est difficile à supporter.

Mamie c’est toi qui avais raison.

 

Antoine BOUMI

Je sors du SEDOC où je suis allé me faire établir mon passeport accompagné de Mélanie, elle m’est d’une grande utilité avec les déplacements pour tous les papiers de la ville, moi qui suis un village qui n’est venu en ville que deux fois en vacances. Ça nous permet de passer aussi du temps ensemble, je l’apprécie beaucoup même si y a une part d’ombre dans mes sentiments pour elle, c’est un peu trouble , je lui en ai même fait part mais elle m’a répondu :

L’appétit vient en mangeant BOUMI. Un jour tu m’aimeras autant que moi pour l’instant ce que tu m’offres me suffit !

Je me demande si cette part d’ombre est  provoquée par le fait que depuis quelques jours mes nuits sont tourmentées par Isabelle. Cette fille était vraiment une sorcière. Je la vois accroupie pleurant et poussé par une certaine compassion je m’approche puis elle se transforme en serpent ce qui me fait inévitablement fuir.

Parfois je nous vois main dans la main heureux ensuite son visage devient effroyable, je lâche sa main et je m’en vais.

Tous ces signes me montrent vraiment quel genre de femme, elle était. Le pire c’est que je l’ai vu avec un gros ventre avec le docteur Jonathan et me regarder au loin en me riant au nez.

Quelle fille dangereuse.

Dieu merci je suis sorti de tout ceci.

C’est ce que je crois jusqu’à ce qu’on arrive chez mon oncle à Belle-vue II et qu’il me dise que j’ai reçu une lettre du village. Il a les sourcils froncés ce qui m’inquiète, automatiquement je prie qu’aucun évènement malheureux ne soit arrivé à l’un des membres de ma famille.

Mais quand je lis le contenu de la lettre de mon père qu’il s’est certainement fait écrire par un écolier du village lui qui est analphabète, je comprends que l’heure est grave

Isabelle prétend que je suis le père de son enfant.  On me demande si c’est le cas.

Je reste silencieux un moment. Il est vrai qu’on a eu une relation ça je ne peux le nier, mais aussitôt mes rêves me reviennent en mémoire. C’est une manipulatrice !

-         Qu’est-ce qu’il y a ? me demande Mélanie

-         Alors cher Neveu, tu es le père oui ou non !

Mélanie m’arrache le papier des mains et quand elle lit, elle s’écrie :

-         Bien sûr qu’il ne l’est pas, cette fille sortait avec le docteur tout le monde les voyait ensemble, n’est-ce pas BOUMI ?

 

Isabelle MOUKAMA

La lettre de BOUMI est arrivée, nous sommes convoqués chez le chef de village. Quand on arrive, je ne comprends pas ce que fait Jonathan là, mais, je m’assois tout simplement, ne sachant pas à  quoi m’attendre.

Il y a beaucoup de monde, je suppose que chacun veut connaitre le fin mot de cette histoire, moi-même la principale concernée je commence à douter de l’issue de cette affaire au fur et à mesure que j’écoute le chef du village nous faire la lecture de la lettre de BOUMI en face, il nie avoir eu une quelconque relation avec moi, et accuse Jonathan d’être l’auteur de cette grossesse.

-         Non mais c’est faux ! m’écrié-je ahurie après la lecture de la lettre de BOUMI

Comment a-t-il osé ?

-         Il dit qu’il n’a jamais eu de relation avec toi et on veut bien le croire parce qu’on ne vous a jamais vu ensemble, dit le chef du village, par contre avec ce médecin tout le monde s’accorde à le dire on vous voyait ensemble.

-         Jonathan, dis-leur que c’est faux ! pleuré-je

-         Bien sûr que c’est faux, je ne suis pas l’auteur de cette grossesse mais après tout, je ne peux pas vous dire le nombre de fois qu’elle m’a fait les avances et je l’ai repoussée, elle aurait donc pu le faire à n’importe qui !

Richard s’est jeté sur lui en lui assenant un coup de poing, et au cri strident qu’il a poussé ça a du faire mal, les gars du village sont venus le retirer des poings de mon grand frère. Il était tellement furieux !

-         Ma fille, a commencé le chef du village que Richard a très vite interrompu

-         Ne l’appelez pas ma fille, elle ne l’est pas. Lève-toi, on part ! m’a-t-il ordonné avant de se retourner vers la famille de BOUMI et de dire : nous nous retrouverons un jour !

Je me suis levée alors que les enfants du village ont commencé à crier sur nous, s’apprêtant même à nous lapider si le chef du village n’avait pas intervenu.

Le monde est méchant. J’ai posé ma main sur ce ventre.

Je suis restée longtemps le regard dans le vide toute la soirée, la main sur la joue,  les larmes ne sortaient plus. J’ai trop pleuré.

-         Le pétrole est où ? entends-je Léonie la femme de Xavier demander

-         Y a un bidon, ici ! lui crie l’autre. Isabelle mange un peu, tu ne peux pas rester comme ça, tu es enceinte !

Enfant d’un enfant dont le père nie toute responsabilité et dont je ne suis pas sure d’aimer, il ne vaut peut-être mieux pas que je lui donne la vie, il ne vaut peut-être pas que je vive moi non plus. Si les femmes de cette famille sont vraiment maudites, je ne peux pas perpétrer le cycle avec ce bébé vu que mamie a dit c’est une fille.

Quand tout le monde s’en va dormir. Je prends le pétrole, je vais me simplifier la vie. Finalement j’ai pris le même chemin que mes mères à cause d’un homme, je suis détruite, pardon mamie.

J’entends des voix au loin.

«  Heureusement que je suis sortie de la chambre »

« Il faut l’emmener à BONGOLO, espérons qu’elle n’ait rien, ni le bébé aussi »

« Il n’y a plus rien qui fasse qu’elle reste encore ici, après BONGOLO nous allons directement sur Libreville avec elle »

Quand je me réveille, je suis sur un lit de l’hôpital BONGOLO.

-         Vous avez eu de la chance mademoiselle ! me dit une infirmière en entrant. Votre bébé également ! c’est une grâce !

Une grâce ? Je l’écoute sans vraiment lui prêter attention.

                                   
L'orpheline