Chapitre IV
Ecrit par Tiya_Mfoukama
.Chapitre 4.
« —
Alors ce diner ? me demande Rachel.
— Tu peux me laisser le temps de m’installer s’il te plait ? »
Je
viens d’arriver chez elle pour passer une soirée entre filles.
Je
sais, on est dimanche et ça peut paraitre bizarre de me voir sortir, mais il y
a un match de foot « important » et c’est au tour de Jean-François de recevoir.
Ne supportant pas les cris de ses chers amis supporters, j’ai pris mon
ordinateur, et mon sac, puis je suis venue chez Rachel.
La
veille, je lui avais rapidement parlé au téléphone du dîner qu’on organisait,
d’où sa question.
« —
Te voilà installée. Maintenant raconte. »
Je la regarde en
arborant un air triste alors qu’au fond de moi je jubile. J’vais enfin pouvoir
lui clouer le bec. Elle est persuadée que la soirée d’hier s’est mal passé et
que j’ai découvert la face cachée de ma belle-mère. Je la laisse donc croire
pendant encore quelques minutes que c’est le cas…
« —
Ah mais parle co ! tu fais même la fière pourquoi ?
— Alors c’était…… SUPER BIEN ! je déclare avec un sourire narquois. Tout c’est
très bien passé, elle ne m’a pas fait le coup du "double face" comme
tu le pensais ça a été tout le contraire. Elle est restée elle-même
c'est-à-dire, charmante et chaleureuse. Elle m’a même donnée quelques astuces
culinaires pour contenter son fils.
—
Humm, c’est un leurre.
—
Non, c’n’en est pas un et va falloir t’y faire. Les belles-mères aigries qui
passent leur temps à gérer ton couple ou te faire la misère, c’est qu’en
Afrique.
—
Je ne préfère même pas discuter avec toi. On est là, non ? On va donc voir
ensemble jusqu'à quand ça va durer. »
Non
mais elle est vraiment grave, je viens de lui prouver qu’elle avait tort mais
elle persiste dans son délire, c’est dingue ça mais ça ne m’étonne pas. Depuis
qu’elle fréquente Bertin, elle agit comme lui, c’est vraiment désolant. Qui est
Bertin ? C’est un congolais comme on en fait là-bas ; de taille moyenne,
cheveux coupés à ras avec la petite virgule sur le côté, le buste toujours
bombé - surement pour cacher son petit ventre naissant qui est le fruit de son
amour pour la bière - grande gueule aussi bien au sens propre qu’au sens figuré
et un peu trop sûr de lui. Jamais il ne reconnait ses torts, il cherche
toujours à se justifier ou pire à retourner la situation.
« —
C’est fou à quel point Bertin déteint sur toi, c’en est effrayant. Toujours à
vouloir se justifier même en étant en tort ! C'est dingue !
—
Alors primo, Bertin ne déteint pas sur moi, secundo, je suis fatiguée de
chercher à t’ouvrir les yeux alors je préférais ne plus en parler, donc de
grâce changeons de sujet.
—
Tu vois, tu arrives même à retourner la situation comme il l’aurait fait !
Enfin bon, je t’emprunte ta chambre pendant une heure voire deux ! je dis en me
dirigeant vers la chambre.
—
Je pensais qu’on devait passer la soirée ensemble ?
—
Ouais mais là, je suis inspirée et je voudrais écrire toutes les idées avant
que ça ne disparaisse !
—
Ppffff… bah tu sais où aller. elle soupire en récupérant son verre de vin. »
Ici,
je me sens chez moi et je n’ai aucun mal à écrire alors j’en profite, même si
ce n’est que pour écrire une page. Ça me fait du bien d’écrire. Ça me permet de
m’évader et d’atterrir dans un autre monde, un monde que j’ai créé et que je
contrôle et encore, il m’arrive de me laisser submerger mais j’aime ça.
Bien
évidemment, je ne suis pas une pro, je ne suis qu’à mes débuts, raison pour
laquelle je ne montre pas ce que je fais. Je n’ai reçu aucune formation, et je
le fais au feeling, j’ai peur d’être jugée et de recevoir des critiques acerbes
sur mon travail. Je sais, qu’il en faut pour pouvoir évoluer mais il faut avant
tout avoir le cœur bien solide pour recevoir la critique, ce que je n’ai pas.
Je sais que je m’effondrai à la première critique négative.
Enfin bon, c’est pas comme si j’avais l’intention de me faire publier ou de
faire lire mes écrits demain.
Je
m’installe dans le lit et allume mon pc, qui met beaucoup de temps à s’allumer.
Roh il me boude parce que je ne l’ai pas touché depuis un bout de temps
« —
Allez, me fais pas ton jaloux, je caresserai sensuellement tes touches pendant
une bonne heure. je murmure en effleurant légèrement les touches du clavier.
—
Tu as parlé à ton psy de ta relation avec ton pc ? me demande Rachel avec un
sourire en coin.
—
Laisse-nous, tu peux pas comprendre. »
Mon
ordi et moi vivons une grande histoire d’amour, malheureusement, nous sommes
des incompris.
Je
parviens enfin à l’allumer mais moins de cinq minutes plus tard, un écran bleu
apparaît, accompagné d’un message : DPC WATCHDOG VIOLATION !
« —
Putain mais qu’est-ce que tu me fais ?
J’essaie
de taper sur la touche entrée mais rien n’y fait.
« — Non, m’fais pas ça ! Non !
—
Qu’est-ce qui se passe ?
—
Mon PC déconne…. Mince… J’ai peur qu’en le rallumant, je ne retrouve plus les
derniers chapitres que j’ai écrits ! Tu sais que j’enregistre jamais mes chap’
!
—
Outch, effectivement, ça doit être emmerdant. »
Je
le laisse un instant pour voir ce qu’il va se passer et il finit par
s’éteindre.
« —
Et merde, il va falloir que je trouve un informaticien qui va à coup sûr me
pomper mon fric et effacer tout mon travail.
—
Peut-être pas…. Jedden m’a dit qu’il était informaticien, et qu’il était plutôt
bon dans son métier. Il pourrait te réparer ton ordi tout en concernant tes
documents si tu lui en parles avant.
—
Qui est Jedden ?
—
C’est Mister Crudités, tu sais celui que tu as rembarré à la soirée alors qu’il
ne voulait que la sauce. elle me rappelle en riant.
—
Ah-ah. Merci mais non merci.
—
Tu préfères payer un mec qui ne prendra pas en considération tes demandes
plutôt qu’un ami qui peut essayer de sauver ton travail ? Et tu parles de
réactions congolaises ?
—
Ce n’est pas mon ami et je n’ai pas son numéro.
—
Comme si c’était un problème !
Ah!
Je n’aime pas demander de l’aide à des personnes que je ne connais pas, à plus
forte raison lorsque je suis passée pour une gourde à leurs yeux.
Pendant
plus de deux heures, je me répète qu’il n’est peut-être pas aussi compétent
qu’il le prétend et qu’il serait préférable de le ramener chez un vrai pro,
mais je finis toujours par me rappeler la dernière expérience que j’ai vécue
avec un informaticien soi-disant « pro » qui avait empiré l’état de mon
ordinateur.
Je
me résous donc à appeler Patrick afin qu’il me communique le numéro de Musclor,
en promettant à Rachel de le tuer s’il efface mon roman, et d’en faire autant
avec elle puisque c’est elle qui me l’a proposée.
Je
demande à Patrick de le contacter afin de l’informer de mon appel, puis une
fois qu’il me donne son feu vert, j’appelle à mon tour le bon monsieur qui
tarde à répondre à son téléphone.
« —
Allô ?»
C’est
quoi cette voix de velours ? Je ne me souvenais pas qu’elle était si chaude et
profonde ? Je me suis peux être trompée de numéro.
« —
Allô, bonsoir, je souhaiterai parler à Jedden, s’il vous plaît.
—
C’est moi, à qui ai-je l’honneur ?
—
Oh, je suis Abigail, Patrick à surement du vous prévenir de mon appel ?
—
Ah oui, effectivement. Il m’a brièvement parlé de votre souci.
—
Et pensez-vous être en mesure de le réparer?
—
Il me faudrait votre ordinateur pour l’analyser et voir si je peux
effectivement intervenir. Il faudrait que l’on se fixe un rendez-vous.
—
D’accord, proposez-moi une date qui vous convient. Le plus tôt serait
le mieux.
—
Samedi prochain en soirée ou dimanche dans la journée, c’est le mieux que je
puisse faire. »
Ça
ne m’arrange pas forcément mais je vais me contenter de ça.
« —
Bien, si c’est le plus tôt alors prenons rendez-vous samedi en soirée. je dis
un peu dépitée.
—
Si vous en avez vraiment besoin, nous pouvons nous retrouver aujourd’hui. Dans
environ une heure trente, je serai à l'Équateur, c’est un restaurant qui se
trouve dans le 11e. Vous le connaissez ?
—
Oui, oui. »
Je
ne vais là-bas que pour leur entrée composée d’avocat et de crevettes et
encore, c’est de façon occasionnelle.
« —
Très bien dans ce cas, retrouvons-nous là-bas pour disons 21h.
—
L’Equateur, à 21h, c’est parfait. »
Enfin,
je vais pouvoir faire réparer mon ordinateur.
*****
«
Bizz, bizz, bizz »
Et
merde, c’est vrai que j’aurais dû l’appeler ! je pense en regardant le numéro
qui s’affiche sur l’écran.
« —
Bonsoir.
—
Na ta rana mboté ? Ngué nsubidi unités ? ( tu dis bonsoir à qui ? c’est toi
qui a acheté les unités?)»
Et
tout de suite elle attaque...
« —
Victoire ...
—
Victoire nchi ? Donc, façon yaku yo ya mboté ta mona hein ?
ngué tcha mpila mutu wé ? (Victoire quoi ? tu trouves ton
comportement normal ? hein ? Toi tu es quel genre de personne ?)»
—
Je suis dé….
—
Ah bika luaza !Si ta zololo mu zoza na méno, nga boguélé téléphone
nga ku ntélé mbila… ngonda ya nkaka ! nchi na ku sa ? (ahh laisse-moi ton
bruit là ! Si tu voulais me parler, tu allais prendre ton téléphone pour
m’appeler… 1 mois ! Je t’ai fait quoi ?) »
Cette
femme ne va jamais changer. Mais je l’aime comme ça. J’aime encore plus la
faire sortir de ses gonds alors je me risque à sortir la phrase qui va la
mettre hors d’elle-même :
« —
J’étais occupé, j’avais pas une minute à moi.
—
N** ku ! Minutes mikoi léni mbonga mu sa composer numéro ? 30 minutes
? hein ? Fionton occupé ( Ta m**** ! ça va te prendre combien de minutes
pour composer un numéro ? 30 minutes ? hein ? fionton occupé). »
Elle
est tellement prévisible, je me dis en riant !
Il
ne faut pas se laisser berner par ses airs de pitbull, car derrière se cache
une femme douce au grand cœur.
« —
Dis seulement que je te manque au lieu de sortir des jurons !
—
Ich, tu manques à qui ? Reste pour toi là où tu es sans donner signe de vie
pendant encore dix ans, ça va pas me déranger.
Quelle
menteuse !
« —
Pas besoin d’attendre aussi longtemps, je rentre dans trois semaines. Commence
déjà à préparer mon arrivée, j’n’ai pas bien mangé depuis un mois.
—
Tu vas venir trouver les casseroles vides ! Bon, c’est pas toi qui paie mes
unités donc, il faut pas me les finir. Au revoir !
—
Okay, mais Victoire oublie pas que… je t’aime. »
Malgré
tous les kilomètres qui nous séparent, je peux sentir son sourire s’élargir.
D’ailleurs, j’arrive même à le voir. C’est un magnifique sourire, entouré de
petites rides d’expression, qui arrive à illuminer mes journées surtout
lorsqu’elles sont rudes.
« —
Moi je ne t’aime pas, j’ai un autre fils que je préfère, et qui sait m’appeler.
—
Ça ne change rien pour moi.
—
….. donne-moi la date de ton retour. elle dit après un claquement de langue.
Peut-être que j’aurai pitié de toi et que je ferai cramer un poisson. »
Par
cramer un poisson, faut entendre par la préparer un festin de roi.
« —
Ok, ok, je le ferai dès que j’aurais mon billet en main.
—
Humm c’est pour encore m’oublier après, bon, à dans trois semaines.