CHAPITRE XXII

Ecrit par Bicht

Cela fait une semaine qu’avec Ahmed, les choses vont de mieux en mieux. On n’a pas parlé des choses importantes concernant notre couple mais il pose des actes comme pour essayer de me reconquérir : j’ai eu droit à du chocolat et des fleurs il y a deux jours, et un magnifique déjeuner la fois dernière ; j’ai également droit à des messages doux au réveil et au coucher. Même si Kay n’arrête pas de me dire d’être sur mes gardes, j’ai l’impression de retrouver mon mari, de retrouver celui qui voulait à tout prix qu’on construise quelque chose de beau et de véritable. Je suis trop heureuse, et je compte bien profiter de cette sensation de fraîche amoureuse qui ne m’a pas habité depuis des lustres. Et j’en reviens à me demander encore comment mettre un point final à mon mariage m’a effleuré l’esprit. Ce que j’ai vécu n’était qu’une simple aventure, un véritable moment d’égarement.

Ma mère ne veut pas véritablement s’ingérer dans mon couple, mais je sens à travers ces mous, qu’elle aussi n’apprécie pas trop Ahmed ; je pense que si elle le connaissait mieux, elle se rendrait compte que comme tout être humain, il a des défauts et des qualités, et que la perfection nous la recherchons tous, mais le seul être parfait, c’est Dieu, qui de par son amour, essaie de nous attirer à cette sanctification éternelle. J’organiserai un repas pour les présenter officiellement, ma mère et lui, mais seulement lorsque tout sera réellement clair entre nous.

Ce soir, j’organise un dîner, pour Ahmed et moi ; il a fait beaucoup d’effort, et je crois que je peux lui montrer que les efforts seront faits des deux parties. Pour se faire, je rentre plus tôt du travail. Ça n’a pas été facile, mais, heureusement que la livraison de repas à domicile est de plus en plus vulgarisé à ABIDJAN. Je n’aurai qu’à apporter un soin particulier à la décoration ; je tiens absolument à faire un dîner aux chandelles. Cadre intime et propice aux rapprochements assuré. On dînera sur la table basse du salon, sur des coussins disposés à même le sol. Pas de télé allumée : il s’agit d’un tue l’amour scabreux. Je mettrai juste des bougies artificielles un peu partout dans la maison pour l’éclairage ; je n’ai pas envie de me brûler. Un accident est si vite arrivé. J’ai hâte d’y être. J’ai prévu qu’on mange très épicer ce soir, mon mari me manque, et je veux ressentir sa présence, en moi. Le sentir se perdre en moi et passer les portes du septième ciel avec lui. Et je sais comment le faire démarrer par la nourriture. On parlera de nous et ensuite, nos corps parleront pour nous.

-----20h-----

J’ai apporté un soin particulier à ma tenue : robe rouge moulante au décolleté plongeant cintré à la taille, escarpins noirs et bantu Knut sur ma tête. Au moins, mais cheveux sont relâchés sans être en vrac.

J’ai prévu un jus de gingembre relevé avec un peu de citron pour la boisson. Les coupes sont là, prêtes à être consommée. Comme plat de résistance, un filet mignon mariné au caramel et au gingembre, bien comme il faut, et en dessert, une mousse de cœur blanc (mousse au chocolat blanc). *

Tout était prêt. Et, il ne se fit point attendre. Il était rasé de près, un jean et un polo gris.

-          Salut toi, fit il en me faisant une centrale.

-          Coucou. Je minaudais ; ça faisait longtemps que je ne m’étais pas comportée ainsi.

-          Tu es superbe.

 

Avec un sourire, je le dirigeai vers le salon, qui pour l’occasion, s’était transformé en un bel endroit coquet. Nous étions bercés durant le repas par la douce voix de Nina Simone*. Ahmed me lançait ses doux sourires dont lui seul avait le secret, et je ne pouvais que fondre.

 

On dégustait le dessert, lorsqu’il se rapprocha, et plongea son regard dans le mien. Son visage n’était éclairé que par le bougie, rendant ce moment encore plus solennel.

-          Anelia, te demander de m’excuser serait d’une platitude futile, tout comme tenter de me justifier. Non, je veux juste t’exprimer mon ressenti depuis que j’ai bouleversé notre vie. Penser que je t’ai blessé m’est vraiment insoutenable, surtout qu’en cet instant, j’aurais pu me reposer sur toi mon épaule bienveillante, qui a toujours été là pour moi. Mais j’ai préféré me renfermer sur moi, et commettre l’irréparable. Mais aujourd’hui, Ismaël est là. Et on est obligé de faire avec. Je réalise la force de mon amour pour toi, et je m’en veux terriblement d’avoir gâché le bonheur qui était le nôtre. Je ne peux te demander d’effacer, ou d’oublier, mais je te demande de penser à tout ce qui nous a unit auparavant, à tous les moments merveilleux que nous avons passés ensemble, à tous les projets que nous avions, afin de trouver en toi la force de nous permettre d’aller de l’avant. Je t’aime tu sais, et le simple fait de ne plus avoir de tes nouvelles, de ne plus t’entendre parler des heures de ton travail et de me détailler le comportement de tes collaborateurs, de ne plus savoir ce que tu fais, ne plus t’entendre rire, ni sentir tes caresses le matin, ou de voir ta bouille endormie tout simplement… je t’aime Nini et je veux qu’on reprenne là où l’on s’est arrêté.

-          Il y a tellement de non dits entre nous….

-          Je sais, et c’est là, l’occasion d’en parler et d’enterrer la hache de guerre et de remettre notre couple à flot.

-          Je n’ai franchement pas apprécié comment j’ai découvert que tu m’avais fait cocu. Là encore, c’était gérable, on pouvait essayer d’avancer ; mais, découvrir que non seulement, tu m’avais trompé, mais que tu allais en plus l’épouser parce qu’elle était enceinte. Je… J’ai souffert là, dis-je en touchant ma poitrine, dans mon cœur. Tu étais mon monde, fis-je alors qu’une larme s’échappa et que je baissai la tête

-          Et je le suis toujours, regarde-moi. Je suis désolé. Je m’y suis mal pris avec toi concernant cette histoire, j’aurai dû t’en parler, sans te la balancer comme ça. J’ai pris le risque de te perdre ce soir-là par mon comportement, et j’en suis conscient aujourd’hui. Je… J’avais un mal être véritable tu sais, par rapport à notre foyer sans enfant. Et, je te voyais triste, tu sais. Même si tu essayais de le cacher. Et au lieu de te faire part de mon mal être, je me considérais comme le roc, celui qui devait en aucun cas faiblir, parce TU devais te reposer sur moi ; j’ai oublié qu’à mes débuts, tu m’as vu au plus bas. Je me suis dit que maintenant, je devais être là pour toi, et que la réciproque n’était pas nécessaire, parce que tu m’avais déjà prouvé que tu serais là pour moi. J’ai oublié qu’un couple, c’est deux personnes, et qu’un foyer ne fonctionne que lorsqu’on a la possibilité de se reposer sur l’autre. Je me suis trompé, car, lorsque tout était flou, je me suis retrouvé entre les bras d’une autre, à essayer d’oublier. Et une chose en entraînant une autre, Ismaël était déjà en route, et tout d’un coup, je regagnais la fierté de mes frères, de ma mère. Je ne pouvais plus faire machine arrière, j’étais coincé, et mon comportement…

-          Babe

-            Je suis désolé, désolé de ne pas t’avoir jugé digne d’être la personne devant partager ma souffrance. Si je m’étais comporter en véritable mari aimant sa femme, je…

Je l’ai coupé en l’embrassant, et ressentir la moiteur de ces lèvres, ces caresses qu’il effectuait dans mon dos, comment il me pressait contre lui, ont fini par me rassurer sur le fait qu’il était sincère. Il y a beaucoup de choses à régler, mais, pour le moment, il s’agira de faire comprendre à mon mari que je lui ai pardonné, et que je suis d’accord, pour reprendre, là où on s’est arrêté.

* Mousse de cœur blanc : c'est un très bon digestif; c'est très léger. Je n'ai pas la recette en tête et je continue de déballer mes affaires pour mon installation. Alors, dès que je trouve mon livre de cuisine, je vous le poste. 
*Nina Simone : Grande chanteuse, compositrice afro américaine de jazz dans les années 60. elle a également lutté pour la reconnaissance des droits civiques aux USA;

ANELIA