Chapitre3

Ecrit par Eli

Chapitre 3


Novembre 2007 


Un mois vient déjà de s’écouler depuis que j’ai mis les pieds dans cette école. Une fois l’euphorie du changement que j’ai ressenti le premier jour passée, s’est installé ce mélange de nostalgie et colère inexpliquée qui m'a quasiment poussé à une dépression. Ma famille me manquait. Ma mère me manquait. Sa présence me manquait. Sa voix, son odeur, ses bons petits plats, ses insultes et même ses quelques gifles bien méritées dont elle me faisait si gracieusement don quand je faisais une bêtise, tout cela me manquait. Cela contrastait avec cette colère que je ressentais envers elle, je n’arrivais pas à comprendre qu’elle ait pu me laisser partir loin d’elle, sans elle. Je lui en voulais de ne pas être là, de ne pas avoir réussi à me dissuader. Je m’étais décidé à l’appeler le 2ème jour à la cabine téléphonique du cybercafé de l’école. 


Elle : Oui Allo !


Moi : Bonsoir maman !! 


Elle : ooooh mon bébé. Comment vas-tu là-bas ? Tout se passe bien à l’internat ? Vous avez commencé les cours ? Huum j’espère que ceux avec qui t’es dans le dortoir ça va entre vous hein. Aflin ho dé oun dor nouwé lè bia ? oun ba gbè dido ah min. Yé ka non da nou djonou nou mi lo don a ? (Te rappelles-tu tout ce que je t’ai dit ? je ne veux pas que tu aies de mauvaises fréquentations. Est-ce qu’on vous prépare de bons mets même ? ) (En langue Fon, une des plus parlées au Bénin)


Cette rafale de questions avec laquelle elle m’avait assommé sans même me laisser le temps d’y répondre a vite fait de dessiner un sourire sur mon visage. Sa voix m’avait tant manqué


Moi : tout va bien maman, ne t’inquiètes pas je fais attention. J’avais presque réussi à prononcer ces phrases sans faire transparaître dans ma voix les larmes qui commençait à embuer mes yeux. Elle m’avait drôlement manquée cette femme pendant ces 2 jours sans la voir


Elle : Aotcho vi tché (Oh mon enfant) !! Sois fort, d’accord ? Je prie toujours pour toi. Tout se passera pour le mieux. Toi, aussi tu n’oublies pas de prier mon chéri. Asséa ? (tu as compris ?) Je viendrai te voir le samedi prochain


Moi (plus heureux, soulagé) : amen maman. Oui je n’oublie pas de prier t’inquiètes pas. 


Elle : t’inquiètes pas t’inquiètes pas djin mi min vi di ton lè yon dor (t’inquiètes pas t’inquiètes pas il n’y a que ça que vous les enfants d’aujourd’hui savez dire)


Moi : hahaha ho djor ho la maman !! man worry oo (Hahaha Mais c’est vrai maman !! t’en fais pas) anhan a dja houé or hin téléphone tché wa noumi (Ah avant que j’oublies, en venant amènes moi mon télépone)


Elle : man ba ho do kor nouwidéo min. Yé gbè téléphone noumi lo don a yé? (Ne te crées pas de problèmes inutilement. Les téléphones ne vous sont pas interdits ?) 


Moi : oui mais certains en ont aussi ici. Il suffit que je cache ça bien. 


Elle : D’accord fiston. Tu l’auras.


Moi : merci maman. Bon je retourne dans l’école. Au revoir maman.


Elle : bisous mon chéri. 


On est jeudi matin et je suis là debout sur le toit de mon école, essayant de profiter de la belle vue qui s’offre à moi. Je suis sur l’un des bâtiments les plus hauts du quartier donc j’ai cette vue d’ensemble juste magnifique sur toutes les personnes dans les rues qui me paraissent si loin, si insignifiantes


Je sors mon V3 de la poche pour me rassurer qu’il me reste encore assez de temps pour profiter de cette quiétude avant qu’il ne soit l’heure de la pause du matin, pause qui me signifiera l’imminence de me rendre en cours. J’ai cours aujourd’hui à 10h. Je sors mon téléphone et une fois l’écran vérifié je le range à nouveau dans la poche de mon pantalon. Je ne comprends toujours pas pourquoi je n’ai pas de réponse d’elle. Je lui ai écrit pourtant depuis hier dans l’après-midi. Je ne sais toujours pas où j’ai foiré avec elle. 


Elle c’est Orlane, ma sublime camarade de classe sur qui j’ai flashé le premier jour de la rentrée et pour qui j’ai développé chaque jour qui a suivi une attirance grandissante... que dis-je ? Des sentiments grandissants qui me font friser l’obsession. Cette fille est tout sauf simple. Elle m’obsède vraiment. C’est la plus belle qu’il m’ait été donnée de connaître. Soyons bien clairs. Je ne résume pas sa beauté à son regard si brûlant que je sens se poser sur moi et que je peine à soutenir, ses lèvres si pulpeuses délicieusement drapées d’un rose aux lèvres qui reste toujours égal à lui-même tout au long de la journée, la nastousité de sa poitrine, ni même son popotin si… miam miam. 


Non. Elle m’intrigue par sa beauté physique, intellectuelle et surtout relationnelle. C’est vrai que bien qu’elle soit sympa avec tout le monde, moi y compris, elle se montre beaucoup plus proche de son amie et voisine de table Rachelle avec qui le courant passe très bien aussi. 


Pourquoi j’attends un SMS de sa part ? Eh bien parce que j’ai fait l’erreur de lui déclarer ma flamme d’une manière si  pathétique et absurde qu’elle aurait une place de choix dans le scénario d’une production hollywoodienne dont l’histoire porterait sur l’existence amoureuse d’un ado boutonneux au fin fond du Kansas. Vous voulez savoir c’est quoi cette manière ? Et bien vous ne saurez pas. J’en ai assez honte comme ça. Et ce n’est pas plus facile  avec cette attente insensée à laquelle je suis en proie.


La sirène sonne et annonce la pause de 10h.


Je prends mon sac à dos et commence à descendre les marches pour me rendre en classe. Je croise sur mon chemin des amis qui sortent des cours pour la pause. On se salut et chacun de nous continue son chemin. J’arrive à l’entrée de ma salle où s’engouffrent tout comme moi mes condisciples. Je remarque à la table devant la mienne qu’elle est déjà assise, elle, l’objet de mon désir. Elle riait visiblement aux blagues de ce crétin de Ghislain qui étaient assis à ses côtés. Cette image ne manque pas de m’emplir de colère et d’une jalousie extrême que je réussis à dissimuler derrière ce faux sourire et ce bonjour tout ce qu’il y de conventionnel que je leur lance une fois arrivé à ma place. Vivement le début du cours qu’il retourne à sa place. Et c’est quoi ce retard qu’accuse Rachelle même ?? Pfffffff.


Le cours se déroule finalement assez vite. 


A la fin, je prends tout mon temps pour ranger mes affaires espérant que la salle se vide et que j’ai le moment de lui parler mais elle sort aussitôt. Je me sens vraiment mal mais rentre quand même à l’internat. Je suis tellement dégoûté de cette façon qu’elle a de m’éviter. Cela me coupe l’appétit, ce qui fait le bonheur de Steeven qui se donne à cœur joie de se délecter de mon repas de midi et du sien.  


Will : Cette semaine je me suis déjà fait une fille de ma salle


Alex : wooouuuhhh !!! Ne me dis pas que c’est la fille mal en forme de la dernière fois là, celle qui a un bodge (fessier) insolent là


Will : krkrkr !! c’est bien elle. Elle veut repasser ce soir mais j’avais déjà promis à Clarisse qu’on se verrait. Je ne sais même pas encore comment je vais gérer


Steeven : Djo, la go métèk (métisse) de la 1ère G3 là ? Ah toi aussi. Ralentis un peu


Andy : En tout cas moi je vous dis déjà que demain soir je réserve la chambre donc faites ce que vous voulez si vous finissez avant l’heure mais ne vous pointez pas ici avant 19h


Jo : Mais les enfants là vous êtes impolis hein !! Je me démerde pour trouver le moyen de nous avoir accès au dortoir pendant les heures de cours, et même pas faire quelques offrandes à votre grand frère. Vous êtes tous des ingrats. Krkrkrkr 


Will : Eli faut sortir d’abord, on veut parler des choses de grands. 


Ils se mettent tous à rire. Pffff ce sont tous des cons qui ne comprennent rien à rien. Je me demande  même quel esprit anime ces filles qui se donnent à eux si facilement. Moi je me contenterai de ma douce Orlane. 


Je rentre dans mon lit et met mes écouteurs pour éviter d’avoir à les écouter déblatérer leurs bêtises. 


Ce sont ces moments qui, depuis le jour de la rentrée me font regretter ces mecs si sympas dont j’avais fait la connaissance quelques heures plus tôt. Je pouvais me soulager en pensant toutefois à nos résultats aux premiers contrôles qui nous classaient dans la gamme des bosseurs mais néanmoins je ne pouvais m’empêcher d’avoir d’appréhension vis-à-vis de certaines des activités parascolaires de mes co-chambriers. 


Oui, depuis ce fameux premier jour de classe, après s’être rincés l’œil sur les pauvres filles d’autrui qui venaient se cultiver, ils avaient tous décider que d’ici à la fin de l’année scolaire, ils devront avoir couché avec une fille au moins dans chaque classe de chaque série du second cycle. Lol. Rien que ça. Le pire c’est qu’ils ont été tous unanimes à y adhérer. Je savais qu’un problème de faisabilité se poserait quant à la disponibilité de lieux propices pour leur débauche mais Tonton Jojo, comme il veut se faire appeler désormais, a réussi grâce à ses connaissances des rouages de l’internat à dégoter un double de la clé du dortoir donc…. Imaginez la suite vous-même


Mes écouteurs ne sont définitivement pas suffisants pour étouffer leur chahut. Il est 13h30 à ma montre. Je décide d’aller prendre une douche et de m’apprêter pour 15h


Une fois prêt je me rends en salle. Il n’est que 14h. Seuls les rares restés à la pause de midi sont encore présents. Je remarque les sacs d’ Orlane et Rachelle posés sur leur table mais elles n’y sont pas. Je demande à un de nos camarades s’il ne les aurait pas vues et il me dit les avoir aperçues sur le balcon derrière la classe. Je pose mon sac et décide de les rejoindre quand je surprends une discussion qui me brisa net


Orlane (O): Tu veux que je fasse quoi de lui-même ? Il est trop naze comme type


Rachelle (R) : HAHAhAhAH !! Avoues que c’est mignon cette façon de te déclarer sa flamme. Lol.. Qui écrit encore des lettres ? En plus avec dévinettes hein HAHAHAHA


O : Je te dis !! En plus il veut savoir si c’est réciproque ? Comme il a assez de crédit dans son téléphone à gaspiller en SMS qu’il m’adresse, je ferai de lui mon chihuahua. A la fin des cours je vais lui faire le coup de la fille incertaine de ses sentiments et plus l’enfoncer avant de le faire baver. Un idiot comme ça


R : t’es méchante !! On va bien rigoler


O : laisses moi faire seulement ma chérie. Ah au fait j’étais chez Cédric hier, ce gars là me fait tourner la tête. Ses parents sont absents donc on a toute…..


Je n’écoute plus le reste de la conversation. Je suis déjà au 50ème dessous. J’arrive pas à croire ce qui m’arrive. C’est donc ça une déception ? La douleur à la poitrine et ce vertige que je ressens font-ils partie de ses signes ? Comment ai-je pu me faire avoir aussi bêtement ? C’est de ma faute, elle est trop bien pour moi. Mais pourquoi ne se contente-t-elle pas de me dire juste NON ?  Je ne comprends plus rien. 


J’ai mal. Vraiment mal. Je me sens si honteux, si ridicule. Je sens mes yeux picoter. Pourquoi mon corps veut en ajouter plus à mon ridicule actuel ? Même lui veut me trahir. J’ai plus vraiment envie de suivre le cours. Je crois que je ferais mieux de rentrer et de me faire porter pâle. Oui c’est une bonne idée. 


Au moment où je commençais à ranger mes affaires je les vis rentrer et s’avancer vers leur place. Une fois installée, Orlane se tourne vers moi et de sa voix dont je lui ignorais ce dégré de sensualité me dit : 


Salut Eli, si t’as un moment à la fin des cours on se parlera. Ok ?


Moi : Désolé, je pourrai pas. Je dois vite rentrer.


Elle : ok, je t’écris alors quand je rentre à la maison.


Moi : D’accord on fait comme ça.


Je lui souriais mais au fond de moi je lui souhaitais le pire. Elle a réussi à me faire passer de la honte que je ressentais à un mépris qui se veut sans pareil envers sa personne, envers leur personne à elles deux. Finalement, je pense que je vais suivre les cours.


Une fois les cours terminés, je rentre au dortoir où je me retrouve seul. Les autres doivent sûrement traîner en bas. Et là je me lâche. Je sens un flot de larmes couler le long de mes joues sans pouvoir s’interrompre. La douleur à la poitrine réapparaît et je n’ai qu’une envie c’est être loin de cet endroit, de toutes ces personnes si méchantes. Je n’avais pas remarqué le retour de mes potes dont le silence et le regard compatissant mais non moins perdu et illuminé par l’incompréhension face à ce spectacle désolant qui s’offre à eux expriment assez clairement leurs interrogations. 


Moi (après avoir essuyé mes larmes) : Je veux faire partie de votre défi. Je ne veux plus jamais pleurer pour une fille. Mais j’ai besoin que vous me montriez comment y arriver.


PS: Merci d'avoir patienté pour cette suite. Et surtout MERCI DE FAIRE PARTIE DE L'AVENTURE. En cadeau :

- la personne qui décodera la photo aura l'exclusivité des chapitres avant leur publication 

Indice: J'ursupe la place de celui qui me suivant dans la hiérarchie pré établie, se retrouve lésé. 

Eli