Episode 4

Ecrit par Mona Lys

Leela, la défigurée

Episode 4

   

***Kelvin Sylvain Taoulé***

 

Je suis en totale admiration devant le speech de cette jeune fille. Elle m’a l’air super intelligente et même d’en savoir beaucoup plus sur l’informatique pour une simple assistante. Mes yeux ne se sont pas décollés d’elle un seul instant. Depuis que je l’ai vu hier je ressens cette envie d’en savoir plus sur elle, comme par exemple pourquoi porte-t-elle son écharpe de cette manière. Pourquoi cache-t-elle une partie de son visage alors qu’elle est belle ? Oui elle est belle et je n’ai pas besoin de voir tout son visage pour le savoir. C’est peut-être une coutume chez eux puisqu’elle m’a l’air d’une orientale, Pakistanaise ou Indienne ou encore Arabe. Disons que j’ai assez tourné dans ce monde pour reconnaitre la nationalité de quelqu’un par ses traits mais bon il m’arrive souvent de me tromper.

 

La réunion se termine et j’ai remarqué qu’elle n’a pas levée la tête une seule fois lorsqu’elle est revenue s’assoir. Je me fais peut-être des films mais j’ai l’impression qu’elle est intimidée…par moi. Oui elle est timide ça j’ai pu m’en apercevoir dans sa manière de parler mais je pense qu’elle fuit mon regard à chaque fois que nos yeux se croisent. Bon en même temps je ne suis pas n’importe qui, l’ancien capitaine des Eléphants de Côte d’Ivoire donc normal que j’intimide. Je me dirige vers son bureau et je la vois discuter avec l’autre fille qui racontait n’importe quoi et qu’elle a contredite. Je perçois un peu leur conversation.

 

Laure : Pour qui tu te prends de me contredire devant tout le monde surtout devant le nouveau boss ?

 

Leela (la tête baissée) : Je suis désolée.

 

Laure : Tu penses qu’en faisant cela tu vas t’attirer les bonnes grâces du nouveau patron ? Eh bien tu te trompes. Tu es et tu resteras une…

 

Elle s’interrompt lorsqu’elle sent ma présence. Cette fille m’a vraiment l’air d’une embrouilleuse. Elle s’excuse et s’en va le visage attaché. Leela elle garde toujours sa tête dans la même position étant arrêté derrière son bureau. Je me place donc en face les mains dans mes poches.

 

Moi : Félicitations pour votre présentation, s’était très bien.

 

Leela : Merci monsieur…Je peux faire quelque chose pour vous ?

 

Moi : Non…Je peux vous serrer la main ?

 

Je la sens se crisper à ma demande et ça me fait sourire. C’est fou mais je trouve sa timidité adorable.

 

Moi (souriant) : Ok laissez tomber. Bon j’y vais.

 

Je reste là à attendre qu’elle dise quelque chose mais rien. Aucun mot ne sort de sa bouche. J’ai envie d’éclater de rire devant sa mine de bébé. Je décide donc de m’en aller pour ne pas davantage la mettre mal à l’aise. Je sens que je ne vais pas m’ennuyer avec cette fille.

 

**

 

Il est l’heure pour moi d’aller chercher Prunella ma fille à l’école. Son école dispose de car pour chercher et déposer les élèves mais moi je préfère le faire moi-même. J’aime ça et ça me permet de passer du temps avec elle. Nous n’en avons pas eu tellement ces dernières années entre le divorce de sa mère et moi et le procès pour sa garde. Il était hors de question que je laisse ma fille avec une femme frivole qui couchait ou plutôt qui couche avec presque tous les footballeurs qu’elle rencontre. Elle m’a foutu une sacrée humiliation cette petite Française à la noix. C’est même à cause d’elle que j’ai décidé de venir m’installer définitivement dans mon beau pays la Côte d’Ivoire pour ne plus l’avoir dans mes pattes. Bon en même temps je comptais le faire tôt ou tard mais je pensais le faire un peu plus tard avec elle et notre fille. Et puis ça tombe bien que je revienne au bercail vue que j’ai mis fin à ma carrière de footballeur l’an passé. Je pense avoir fait mon temps donc place à la nouvelle génération.

 

Quitter le monde du football ce n’est pas chose facile surtout quand on est un passionné comme moi. Le foot c’est ma vie et c’est pour ne pas trop me chagriner que j’ai décidé de me tourner en entreprise. Je ne sais pas comment on crée une entreprise ni tout ce que ça implique mais je vais apprendre tout ça. Je suis tombé un jour sur une annonce de Sébastien disant qu’il vendait 50% des parts de son entreprise parce qu’étant presque ruiné. J’ai donc sauté sur l’occasion mais avant de signer quoi que ce soit je dois d’abord m’assurer que cette boite me rapportera sinon ce n’est pas la peine. Je ne vais quand même pas miser dans quelque chose qui va me ruiner moi aussi.

 

Je gare devant l’école et attends que Prunella sorte. Dès que je la vois je descends pour qu’elle me voie. Elle ne m’a pas encore aperçu parce qu’elle discute avec un petit garçon qui doit avoir le même âge qu’elle. Elle me voit enfin et coure vers moi tombant dans mes bras.

 

Moi : Alors comment va ma petite chérie ?

 

Prunella : Bien papa.

 

Moi : Tu as eu un nouvel ami ?

 

Prunella : Non c’est Benji mon voisin de classe.

 

Moi : Ah bon ? Je ne l’avais pourtant jamais vu depuis que je viens te chercher.

 

Prunella : C’est parce que sa mère vient toujours le chercher avant que tu n’arrives mais aujourd’hui elle est en retard donc il l’attend.

 

Je lève la tête vers le garçon et le vois assis tout seul devant l’école. Je le trouve trop petit pour rester là comme ça surtout avec l’école qui se vide.

 

Moi : Ça te dit qu’on le dépose ?

 

Prunella : D’accord papa.

 

On s’avance vers lui pour lui proposer de venir avec nous mais à ma grande surprise il refuse sous prétexte que sa maman lui aurait dit de ne pas suivre des inconnus. Elle n’a pas tort mais il connait quand même Prunella donc il n’a rien à craindre. J’insiste une dernière fois mais c’est toujours non. Ok au moins j’aurais essayé.

 

**

 

Moi : Bonjour maman.

 

Maman : Alors comment vas-tu ? Et Prunella ?

 

Moi : Bien, elle est au salon avec Anicet. Où est papa ?

 

Maman : Sorti pour je ne sais quel réunion. Va t’installer que je t’apporte de quoi te rafraichir.

 

Je sors de la cuisine et me rends au salon retrouver Anicet mon petit frère. Maman voulait qu’on passe diner à la maison avec eux. Elle dit qu’elle avait subitement envie de nous voir. Hum les choses des mamans.

 

Moi (m’asseyant) : Mon poussin va dire bonsoir à ta grand-mère dans la cuisine.

 

Elle se lève et s’en va.

 

Moi : Alors frangin comment vont les affaires ?

 

Anicet : Coussi coussa. Mais bon on essaye de gérer.

 

Moi : Et ta fiancée ? Elle n’est pas venue aujourd’hui ?

 

Anicet : Non elle avait une séance photo. Tu sais avec les mannequins c’est toujours les même choses. Il y a toujours des séances photos qui apparaissent à l’improviste.

 

Moi : Mais toi apparemment tu aimes les mannequins. Ton ex fiancée était elle aussi mannequin n’est-ce pas ?

 

Anicet : Oui mais elle elle était à ses débuts donc pas encore très connue.

 

Moi : Et maintenant ?

 

Anicet : Je n’en sais rien. Peut-être qu’elle a quitté le pays. Dis-moi et toi comment ça bouge ?

 

Moi : Oh les choses avancent. J’observe encore pour l’instant AllTec pour voir si je peux en tirer quelque chose de juteux. Mais ce Sébastien m’a l’air d’un fainéant alors qu’il a pourtant une belle équipe qui travaille jour et nuit pour faire avancer sa boite. Dis c’est pour quand le mariage ?

 

Anicet : Pas pour l’instant.

 

Moi : Mais si tu n’avais pas envie de te marier maintenant pourquoi lui as-tu fait ta demande ?

 

Anicet : Parce qu’elle n’arrêtait pas de m’embrouiller avec ça. Au moins avec la bague de fiançailles en diamant qu’elle a au doigt elle se calmera un peu.

 

Moi : Je pense que tu devrais accélérer les choses. Tu sais qu’elle n’a aucune famille. Ses parents sont morts donc c’est toi dorénavant qui es son tout.

 

Anicet : Oui je sais. Tu n’as pas tort.

 

On continue dans nos discutions jusqu’à ce que maman nous appelle à table. Apparemment papa ne rentrera pas maintenant. J’aime ces moments en famille. Disons plutôt que j’aime l’ambiance familiale où tout le monde est réuni, ça bavarde, ça rit etc…C’est ce que je voulais aussi en allant me marier avec Liliane mais on dirait qu’elle non. Ça ne faisait pas partie de ses projets mais se marier à une star du foot ça oui.

 

***Une semaine plus tard***

 

J’ai déposé Prunella chez mes parents pour me rendre à une soirée dédiée aux chefs d’entreprises. Je n’aime pas la laisser avec une baby-sitter qui peut lui faire tout et n’importe quoi donc je l’emmène à chaque fois chez ses grands-parents quand j’ai des obligations. Je me rends à cette soirée espérant en apprendre plus sur la gestion d’une entreprise. Sébastien y sera, c’est même lui qui m’a invité. Je sais qu’il y aura plein de grosse tête donc je ne crains pas une troupe de fan en délire même si parfois ces messieurs trop aisés se laissent aller et demandent à prendre des photos avec moi.

 

J’entre dans la salle dans mon costume sur mesure et comme je m’y attendais je vois une multitude d’hommes d’affaires. La soirée bat déjà son plein. Il y a sur certaines tables des filles qui n’ont vraiment rien à faire là mais qui sont là quand même comme escortes. Vraiment de gros pervers ses boss. Ils ont des femmes à la maison mais préfère s’embrouiller avec des filles de joie. Je les rejoins donc et me jette dans le bain. Ça perle argent, contrat, business et même femme pour mon grand étonnement. Les yeux de Sébastien se mettent à briller à chaque fois que quelqu’un prononce le mot argent. Un vrai frivole ce type ça se sent.

 

Bon moi je commence à m’ennuyer avec tous leurs discours. Je me reprends lorsque quelqu’un évoque le mot foot. Enfin je me retrouve. La causerie est désormais centrée sur le domaine que je maitrise le plus. Je rentre donc dans le débat et je commence à relaxer. Je lève ma main pour faire signe à un serveur de m’apporter une coupe de champagne lorsque mes yeux tombent sur une femme avec un voile sur le visage. Ça me fait immédiatement penser à Leela…sauf que…oui c’est bien elle. C’est bien Leela assise tout au fond de la salle manipulant son portable. Il faut que j’aille discuter avec elle. Le foot ça peut bien attendre.

Leela, la défigurée