Épisode 6

Ecrit par Mona Lys

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JAYDEN


‒ Bonsoir Pauline. Est-ce que tout va bien ?

‒ « Bonsoir grand-frère Jay. Oui tout va bien. Elle est dans sa chambre. Tu viendras ce soir ? »

‒ Non je rentre directement chez moi. J'ai beaucoup de boulot. Mais s'il y a une urgence n’hésite pas à m’appeler.

‒ « C’est compris. Bonne soirée. »

‒ Bonne soirée.


Je reste un moment à fixer mon portable en repensant à l’incident d'il y a quelques jours. Je ne sais pas ce qu'elle cherchait à une heure aussi tardive sur la terrasse mais cet incident m'a obligé à lui parler. Je voulais pourtant l'éviter jusqu’à la fin de tout ceci. Je ne veux pas lui donner ne serait-ce qu'un indice qui pourrait un jour lui permettre de me retrouver. Je ne veux pas lui parler pour éviter qu'elle ne reconnaisse ma voix dans l'avenir. Il est difficile de ne pas reconnaitre une voix qu'on a beaucoup entendu. Alors moins je lui parlerais et moins il y aura de chance qu'elle me retrouve par le plus grand des hasards.

 

Je range mes affaires et en rentrant je fais un saut dans un glacier acheter de la glace pour Pamela qui m'en a demandé. Je choisi un parfum et c'est une fois dans ma voiture que je me rends compte d’avoir choisi celui que cette fille aime. Le parfum Américain. Pamela aime pourtant le Málaga. Pourquoi ai-je fait ce choix ? Inconsciemment je suis en train de mémoriser ses goûts à elle. Je retourne dans le glacier acheter celui que ma femme aime et je rentre chez moi. Quand je franchis la porte d’entrée, j’aperçois de loin Pamela qui rumine en lisant sur une feuille qu'elle tient en main. Je donne les glaces à la servante qui m'a accueilli à la place de ma femme.


‒ Bonsoir.


J'essaie de l’embrasser quand elle me dévie.


‒ Qu’est-ce qui t’arrive ?

‒ As-tu une maîtresse ?

‒ Pardon ?

‒ Est-ce que oui ou non il y a une pétasse là dehors avec qui tu couches ?

‒ C'est quoi cette question ? Bien-sûr que non.

‒ Alors qui est cette Aaliyah à qui tu as ouvert un compte sur lequel tu as déposé 30 millions et que tu continues d’approvisionner encore ?


Je regarde les documents sur la table et ce qu’elle tient. 


‒ Tu as fouillé dans mes affaires ?

‒ Oui ! Je cherchais une preuve de ton infidélité. Je voulais savoir pourquoi tu rentrais souvent tard et pourquoi tu as découché récemment. Je voulais comprendre les raisons de ton indifférence face à notre couple et je suis tombée sur les documents de la banque. Dis-moi ce qu’elle a de plus que moi ?

‒ Ce n’est pas ma maîtresse.

‒ Arrête de me prendre pour une conne, hurle-t-elle.

‒ Et toi arrête de me gueuler dessus diantre. C'est la fille de l’accident.


Elle me regarde, incrédule.


‒ L’accident d'il y a 3 ans.


Je ramasse un à un les documents sur la table basse en verre.


‒ Quoi ? Jay, on en avait déjà discuté.

‒ Non. TU avais dit ce que tu avais à dire sans prendre en compte mes sentiments et moi j’ai fait ce qui me semblait juste sans m'attarder sur tes humeurs.

‒ Je suis ta femme et tu dois avoir aussi mon accord en toutes choses.

‒ Toi, as-tu pensé à moi lorsque tu refusais que je vienne en aide à cette pauvre fille qui est devenue aveugle par ma faute ?

‒ Pourquoi voulais-tu que j’accepte une telle chose alors que tu as toi aussi été une victime autant qu'eux ?

‒ Eux ils sont morts, elle aveugle PAR MA FAUTE. Regarde-moi, je n'ai aucune séquelle de l’accident. Je vais bien.

‒ Dois-je te rappeler que tu as passé une année dans le coma ? Ça fait deux années que nous sommes mariés mais j'ai l’impression que ça fait seulement un an parce que la première année qui a suivi ton rétablissement tu l'as passé entre l'alcool et le centre de désintoxication. Et j'ai été là pour toi alors permets-moi de te dire que tu n’as pas à réparer un accident dont tu as toi aussi été une victime.


Je pousse un soupir. Je vais beau lui expliquer les choses qu’elle ne comprendra jamais mon besoin de faire ce que je fais.


‒ Je veux que tu m’arrêtes tout ça maintenant, m’ordonne-t-elle d'un ton plus bas. Je ne vais pas accepter que tu gaspilles autant d’argent pour une histoire d'il y a trois ans et dont plus personne ne se souvient.


Je lui arrache la feuille qu'elle tient et je disparais dans notre chambre sans plus rien ajouter. Je savais que tout ce bruit était en rapport avec l'argent. Elle ne comprend pas que si j'ai travaillé d’arrache-pied ces dernières années c’était uniquement pour réunir assez d'argent pour cette mission que je me suis imposé. Ma survie et mon bien-être en dépendent. Longtemps j'ai été tourmenté par cette nuit. Depuis trois ans je fais ce même cauchemar. Je me revois rouler à vive allure sans me soucier des risques. Je vois tout ce qui s'est passé et je sais que si je ne répare pas mon tord jamais ce cauchemar ne me lâchera.


Je sens des mains m’encercler la taille pendant que je fais disparaitre la mousse sur mon corps sous le jet d'eau. Son corps nu se colle à moi.


‒ Je suis désolée bébé. Je ne veux pas qu’on se dispute. Surtout que demain c'est mon anniversaire.


Et voilà que ça m’était complètement sorti de la tête.


‒ Je suis désolé de te l'avoir caché, dis-je à mon tour.

‒ Excuse acceptée. On en reparlera plus tard. Pour demain je veux faire un grand dîner en famille.

‒ Fais tout ce qui te fera plaisir.

‒ Ok. Mais ce qui me fera plaisir maintenant c'est que tu me fasses l’amour.


Je lui fais face et capture ses lèvres. Je fais de mon mieux pour me montrer doux et romantique à chacun de nos rapports. Elle le sent mais ne s'en formalise pas. Elle sait tout sur les raisons de notre mariage et elle les accepte parce que ça va dans son intérêt. Pamela c'est le choix de ma mère, pas le mien. Entre elle et moi ce n’est pas vraiment le véritable amour. De son côté peut-être si, mais du mien non. Je suis avec elle juste pour honorer la promesse que j’avais faite à ma mère le matin de sa mort. Elle m’avait fait promettre d’essayer avec Pamela parce qu’elle croyait qu’elle ferait une bonne femme pour moi. J’ai donc décidé après sa mort de faire au moins une chose qui l’aurait rendu heureuse de son vivant. Je ne déteste pas Pamela mais je ne pourrais qualifier ce que je ressens pour elle pour de l’amour. Je la respecte juste et je la traite bien parce que je n’ai jamais été un homme volage. Mon problème avec elle c’est qu’elle est encore gamine dans la tête. Toujours là à parler de boite de nuit, de shopping, de fête et d’argent. Ça m’agace souvent.


En cherchant dans le magasin un cadeau pour Pamela, je me surprends à en chercher aussi pour la jeune fille. Que pourrais-je bien acheter qu'elle pourrait apprécier même sans voir ? En tout cas rien qui soit dans ce magasin de vêtement. Je m’y concentrerais plus tard. Pour l’instant je dois rentrer pour l'anniversaire. Pamela a invité sa famille et quelques-unes de ses copines à venir partager un grand dîner à la maison. Elle a toujours été fêtarde. Je suis même surpris qu'elle n'est pas prévue célébrer son jour dans l'un de ces bars qu’elle fréquentait.


Je suis accueilli par la musique qui joue à un volume raisonnable et des discussions qui vont bon train entre Pamela et ses copines. Elle vient m’embrasser avec fougue. J’y répond.


‒ Joyeux anniversaire.

‒ Merci !


Je lui tends son cadeau, salut ses copines et monte dans notre chambre me préparer pour le diner. Quand je redescends, ses parents et ses sœurs se sont joints au groupe. J’embrasse mes beaux-parents qui dégustent leur vin. Ce sont eux qui ont transmis à Pamela son goût pour l’alcool. Ses parents en ont de toutes sortes chez eux. Pamela sait pertinemment que je dois rester loin de tout ce qui est alcool mais ça ne l’a pas empêché d’en disposer partout dans cette maison. La table basse en est remplie. Je pars me servir un jus de fruit avant de revenir participer à la conversation qui risque de m’ennuyer.


‒ On passe à table maintenant ? Demande une de ses copines en boudant. J’ai faim là.

‒ Il reste encore mes derniers invités, répond Pamela en regardant sa montre. Ils seront là dans peu de…


Le ding de la maison se fait entendre.


‒ Ah ils sont là.


Assis dans le salon à boire mon jus, j’entends des pas s’approcher.


‒ Bonsoir !


Mon sang ne fait qu’un tour quand j’entends cette voix. Puis quand je relève les yeux sur le propriétaire, des envies de meurtre me tirent de tout côté. Pamela n’a pas osé. Je la regarde d’un air méchant. Elle me sourit.


‒ On peut maintenant passer à table.


Ils se lèvent tous pour la suivre mais mon regard reste rivé sur cet homme sans morale et sa maitresse. Il me regarde tristement mais j’ai juste envie de le buter. Ils finissent par suivre les autres. Voyant que je ne bougeais pas de ma place, Pamela revient vers moi.


‒ Bébé tu…

‒ Comment as-tu pu faire ça ?

‒ C’est mon anniversaire et je voulais avoir toute ma famille autour de moi. En plus tu m’as dit que je pouvais faire tout ce qui me ferait plaisir.

‒ Oui mais pas d’inviter cet homme et cette femme.

‒ C’est ton père que tu le veuilles ou non.


Je me retiens vraiment, mais vraiment de casser quelque chose.


‒ Bébé s’il te plaît c’est mon anniversaire. Fais juste un effort pour moi. Juste pour ce soir. En plus ils s’en iront juste après le diner.


Cette femme va me pousser à retourner sur elle la haine que je ressens pour cet homme. Je savais que j’allais m’ennuyer à cette fête mais pas que j’allais la passer en colère. Par respect pour mes beaux-parents je me mets à table. Le diner est entamé et se déroule dans une bonne ambiance mais je n’arrive pas à desserrer la mâchoire. Avoir cet homme en face de moi me met en colère à un tel point que je n’arrive à rien avaler. Après une dizaine de minute à lutter, je sors de table en m’excusant. Je prends mes clés et sors de la maison. Pamela me suit en hurlant mon nom.


‒ Jay où vas-tu ?

‒ Là où je ne sentirais pas le parfum de cet homme, lui répondé-je en lui faisant face.

‒ C’est mon anniversaire.

‒ Et ce n’est pas une raison pour m’imposer une chose que j’évite depuis deux ans. Comment as-tu pu me faire une telle chose ?

‒ Il est temps de passer l’éponge sur ce qui s’est passé.

‒ Passer l’éponge ? Fais-je choqué. Une femme en est morte je te signale.

‒ Et j’en suis navrée. Mais la vie continue et tu dois passer l’éponge pour récupérer ce que cette femme a gardé ici pour toi.


Encore l’argent et toujours l’argent. J’ouvre la portière de ma voiture mais elle me retient.


‒ Tu pars chez ta maitresse n’est-ce pas ? Et tu prends ton père comme excuse.

‒ Pense ce que tu veux Pamela. Tu t’en fiches bien de ce que moi je peux penser de toutes façons.


Je démarre et quitte les lieux. Je ne veux plus avoir affaire à cet homme que je déteste de tout mon être. Depuis trois ans que nous ne nous sommes plus revus, ou plutôt que je refuse de le revoir, encore moins d’être en contact avec lui, il a fallu que Pamela s’en mêle.


Cet homme que j’adulais tant, en qui je me voyais, qui était mon super héros, mon exemple d’homme parfait, est aujourd’hui l’être que je déteste le plus au monde. Il me dégoûte.


Je gare ma voiture quelques minutes sur un coin de la route une fois loin de la maison histoire de me calmer. La dernière fois que j’ai conduit en étant aussi en colère, j’ai tué un couple et rendu aveugle leur fille. Je ne dois pas reproduire la même chose. Je reprends la route une fois ma tension descendue. Je ne pensais plus jamais revoir cet homme à cause de qui ma mère a fait un infarctus en découvrant que son époux, celui à qui elle avait consacré toute sa vie et fait des sacrifices, avait une deuxième famille et des enfants de ma promotion, l’ainé ayant un an de moins que moi.


Ma mère ayant une santé fragile n’a pu que donner un seul enfant à son mari et au risque de sa vie malgré les interdictions des médecins. Elle l’a fait pour faire plaisir à mon père. Elle voulait même au risque de sa vie lui donner un héritier. Il lui avait fait le discours de l’homme qui s’en fichait. Il n’a cessé de lui dire qu’avec ou sans enfants il l’aimerait. Mais va croire que c’était un pur mensonge. Il y a trois ans, en l’occurrence six mois après la mort de ma mère, j’ai surpris une querelle entre mon père et mon oncle Xavier. C’était plus des paroles de malédictions de mon oncle contre mon père. Et c’est là que j’ai entendu mon oncle dire que mon père paierait d’avoir tué ma mère. A la question d’avoir une explication, mon oncle m’a appris que la mort de ma mère avait été causée par une découverte qu’elle avait faite. Mon père ayant une femme qu’il avait doté et trois enfants dont deux garçons et une fille. Son cœur n’a pas supporté le choc et elle en est morte sur le coup. Aujourd’hui je vois qu’il n’a vraiment pas aimé ma mère au point de s’afficher partout avec cette femme.


Je le déteste cet homme. Il a voulu m’expliquer l’inexplicable. Mais ce soir-là, pour la première fois de ma vie, j’ai porté main à mon père. Je lui ai envoyé une droite dans sa tronche avant de sortir rouge de colère. Je roulais sans destination jusqu’à ce que je fasse cet accident qui m’a envoyé un an dans le coma. Après mon rétablissement, apprenant les dégâts que j’avais occasionné, j’ai sombré dans l’alcool. Boire était devenu mon nouveau passe-temps. Je ne travaillais plus, ne m’occupais plus de moi. En gros je voulais me tuer en douceur. Mais c’était sans compter sur l’intervention de mon oncle et mon cousin Patrick qui m’ont envoyé de force dans un centre en France où je suis resté près d’une année. J’avais tenu à me marier avant d’être interné de peur de ne plus avoir la force de le faire après. Je n’aimais pas Pamela et je voulais l’épouser pour au moins rendre hommage à ma mère.


A ma sortie, j’ai pris la résolution de réparer mes erreurs. Je suis revenu en Côte     d’Ivoire rechercher la fille que j’avais rendu aveugle. Quand je l’ai retrouvé je me suis renseigné sur sa situation et ainsi j’ai versé une très grosse somme d’argent sur un compte pour elle, pour lui permettre de reprendre sa vie en main. J’ai acheté un appartement pour elle où elle vivra après son opération. Mon oncle, tante Mimi ont accepté de me suivre dans ma mission.


Assis dans le salon et juste éclairé par la lumière extérieure qui traverse la baie vitrée, je fixe le vide à réfléchir sur ma vie. Ce qu’elle aurait été s’il n’y avait pas eu cet accident. Je ne ressens plus aucune joie de vivre. Je passe mes journées à lutter contre la culpabilité et mes nuits à revivre la scène. J’ai tué deux personnes innocentes et j’ai foutu en l’air la vie de leur unique fille. Le bon côté c’est qu’elle soit en vie ce qui me donne la chance de me racheter.


Pensant justement à elle, je la vois apparaitre du couloir qui mène aux chambres du bas. Elle marche lentement, posant chaque pas avec précaution. Elle ne porte qu’un tee-shirt qui lui arrive à peine sous le bas des fesses. Mon cœur se comprime en la voyant privé de sa vue. Comment ai-je pu gâcher la vie d’une aussi jeune et belle fille. Je la regarde sans faire de bruit. Je ne veux pas qu’elle sache que je suis là. Je la suis du regard jusqu’à ce qu’elle disparaisse dans la cuisine. Elle revient quelques minutes plus tard avec en main une carafe à moitié remplie d’eau et un verre. Elle reprend sa marche. L’idée de l’aider me titille mais je préfère rester ainsi.


Mon portable posé près de moi sonne subitement. Je lance un juron en coupant l’appel de Pamela. La fille s’effraie et lâche tout ce qu’elle tient. La carafe et le verre se brisent.


‒ Qui est là ?


Toujours prise de frayeur elle marche dans les débris, trébuche et tombe.


‒ Putain de merde !


Je me précipite vers elle alors qu’elle continue de hurler et de douleur et de frayeur.


‒ Qui est là ? Ne me touchez pas. Aïe !


Elle se débat dans les débris qui la blesse un peu partout. Je la saisi.


‒ C’est moi. Calme-toi !

‒ C’est… c’est vous ?

‒ Oui. Attends je te relève.


Je la prends délicatement dans mes bras. Pauline qui a été alertée par les cris vient voir en courant. Je la rassure en marchant vers la chambre de la fille. A la lumière je vois qu’elle est blessée un peu partout sur sa cuisse. Mais juste de petites blessures. Je la repose dans son lit.


‒ Je reviens.


Je me rends dans sa salle de bain prendre le kit de premier soin que j’étale près d’elle. A l’aide d’une compresse imbibé d’alcool, je passe sur chaque petite déchirure. Il y a un peu de débris restés dans sa cuisse. Elle geint de douleur quand je les retire.


‒ Je suis désolé de t’avoir fait peur.


Elle continue de grimacer. Je parcours le long de sa cuisse avec la compresse. Elle s’habitue à la douleur. Elle allonge son dos sur les coussins. Je lève les yeux sur elle. Elle est plus calme. En continuant à la soigner, je la regarde plus attentivement. Cette fille respire l’innocence. Elle ne méritait pas ça.


‒ Vous me regardez ?


Je baisse les yeux sur sa cuisse.


‒ Voilà c’est bon. Encore désolé.

‒ Que faisiez-vous là ?

‒ Rien de particulier. Je t’apporte l’eau que tu voulais.


Je lui en rapporte quelques minutes plus tard. Elle vide un verre.


‒ Tu devrais dormir.

‒ Je n’ai plus sommeil.

‒ Tu dois pourtant te reposer.

‒ Est-ce que vous pourrez rester près de moi jusqu’à ce que je m’endorme ?


J’hésite à accepter cette demande. Je cherche comment refuser gentiment sans la vexer.


‒ S’il vous plaît. Vous n’êtes pas obligé de parler. Juste rester.

‒ Ok.


J’ai vraiment du mal à lui refuser ses demandes quand elle le fait avec cette mine si innocente et douce. On aurait dit un enfant. Je m’assois dans le fauteuil de l’autre côté de la pièce. Je la regarde tourner et se retourner dans son lit jusqu’à ce qu’elle finisse par s’endormir. Je reste quand même sur place à la contempler dormir. Ses cheveux tombent légèrement sur son visage ce qui lui donne un air d’ange. Mes lèvres s’étirent dans un sourire. Je me relève, arrange le drap sur elle et sors.


Je ne suis pas rentré à la maison le matin. J’ai continué au bureau. J’ai toujours des vêtements à mon appart. J’ai ignoré tous les appels de Pamela qui jusque maintenant ne cesse de m’appeler. Me disputer ou encore m’expliquer sur quelque chose que je n’ai pas fait est la dernière chose que j’ai envie de faire. Nous parlerons quand je serai à la maison.


J’arrive à la maison et vois des valises posées à l’entrée. Elles n’appartiennent ni à Pamela ni à moi. Je l’entends discuter dans le salon. Je m’y rends et quand je vois la personne assise près de ma femme je serre les dents. Et elle continue de me faire chier. Pamela me voit mais avant qu’elle n’en place une, je monte en chambre. Elle me rejoint.


‒ Que fait-elle dans ma maison ? Lui demandé-je en desserrant ma cravate.

‒ Elle traverse un moment difficile.

‒ Je m’en fiche de ça. J’ai dit que fout-elle dans ma maison ? 

‒ C’est aussi MA maison et j’y invite qui je veux.


Je commence à me déshabiller sans lui prêter attention.


‒ Elle n’a nulle part où aller parce que son petit ami l’a foutu à la porte alors qu’elle est enceinte. Elle ne peut aller chez ses parents parce que sa mère lui avait interdit de le fréquenter mais elle en avait fait qu’à sa tête. J’ai décidé de l’héberger le temps que les choses s’arrangent. Jay il s’agit de ta sœur.


Je lui agrippe violement la gorge en la plaquant contre le mur derrière elle. J’ai envie de lui en coller une. Mais je ne suis pas un homme violent. Je la relâche et elle me pousse.


‒ Plus jamais tu ne m’attrapes de la sorte. Ai-je menti en disant qu’elle était ta sœur.

‒ Fais-la sortir de cette maison. Je n’ai aucune sœur.

‒ Elle restera ici parce que je l’ai décidé. N’est-ce pas que toi tu as fait ce que tu voulais contre ma volonté ? Pourquoi veux-tu donc m’imposer la tienne ?


Je commence à sortir un à un mes vêtements. Ça ne l’empêche pas de parler.


‒ Tout ce que je fais c’est pour nous et nos futurs enfants. Je me bats pour que l’héritage de la famille n’aille pas chez cette étrangère et ses enfants. C’est aussi pour ta mère que je le fais. Elle a lutté avec ton père pour avoir tous ces biens. Maintenant qu’elle n’est plus, une autre veut s’en accaparer. Je me bats pour nous. Elle met la pression sur ton père pour qu’il l’épouse et vu comme il est faible face à elle à cause de ces poudres qu’elle lui a fait bouffer, c’est sûr qu’il va lui céder. Si nous sommes en bon terme avec eux, ton père n’osera jamais leur léguer l’héritage qui te revient de plein droit parce que tu es le seul et unique enfant légitime. Les autres sont justes des batards. Tu m’en veux maintenant mais tu me remercieras un jour.


Je jette mes vêtements dans ma valise et la referme.


‒ Qu’est-ce que tu fais ? Où pars-tu ?

‒ Puisqu’elle reste, je pars. Tu t’es lancée dans une mission, bah je vais te laisser la mener à bien. Je vais aussi me concentrer sur ma mission. Dans deux semaines je retourne en France, avec ou sans toi.


Je la repousse de mon passage en roulant ma valise. Elle me suit en bavardant alors que je descends les escaliers.


‒ Tu trouves toujours une excuse pour aller retrouver ta maitresse. Je suis ta femme et nous devons mener ce combat ensemble. Jay je te parle.


Je monte dans ma voiture et démarre en trombe. J’ai besoin d’être loin de toutes ces mauvaises ondes pour mieux me concentrer sur ma mission. Dans deux semaines tout sera terminé et je pourrai retrouver la vie. Si elle continue de me faire chier à vouloir m’imposer mon père et sa famille de merde, je n’aurais aucun remord à me séparer d’elle. Je crois que même ma mère en serait d’accord. 


Plus qu'un regard