Incendie au marché d'Akébé
Ecrit par Owali
Les Equêteurs des Matitis
Enquête 01: Incendie au Marché d'Akébé
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Le garde posté au point de contrôle redresse sa tête.
Lorsqu'il me voit il se lève complètement et sort de son box.
Je baisse la vitre.
- Bonjour Didier, vous allez bien?
- Bonjour Lieutenant, ça va oh, on est la.
- Bien et la famille?
- Ah les enfants la me fatiguent, ils passent leur temps à se plaindre qu'ils ont faim! Et avec le malien qui a décidé de fermer son cahier de bons, je ne sais même plus quoi faire.
- Ah le 25 c'est dans 2 jours, il faut tenir bon jusque-là!
- Oui ca va aller. Je leur ai dit d'aller chez ma grande sœur à midi, y a toujours à manger la bas.
- Ah d'accord, bon on fait comme ça hein!
Il ouvre la portail et je me dirige vers le parking de l'EMJIP.
A peine je franchis la porte de mon bureau que mon collègue, le lieutenant Ndzegue m’interpelle.
- Ossouka! Depuis que j'essaie de te joindre la tu faisais quoi?
- Hein? Tu as essayé de m'appeler?
Je tâte mes poches et fouille dans mon sac mais aucune trace de mon téléphone.
- Oh la la... j'ai du l'oublier à la maison. Ehhh je vais encore retourner si loin à Owendo?
- Pas le temps! Le chef nous a mis sur une affaire d'incendie qui a eu lieu il y a quelques heures au marché d'Akebe, on doit y aller.
- Akebe? Mais pourquoi c'est nous qui devons aller la bas? Ce n'est pas notre secteur.
- Ah, ce n'est pas à moi qu'il faut dire ça, fait-il en se levant et en prenant ses clés. Si tu veux te faire remarquer négativement tu peux toujours aller discuter avec lui mais pour ma part, j'y vais.
Pfff je rale un peu mais finis par le suivre.
Nous montons dans la voiture de service et prenons la direction d'Akebe.
- Ca va sinon? Me demande t-il
- Oui oui, pourquoi?
- Ben je ne sais pas, je te trouve un peu fatigué. Ca ne fait pas partie de tes habitudes d'arriver après moi au boulot...
- Hum. J'ai dormi tard et mon réveil n'a pas sonné voilà tout.
- Tu as dormi tard? Qu'est ce qui s'est passé? Tu es sorti? Tu as fais des rencontres... me demande t-il sur le ton de la plaisanterie
- Rhho arrête de m’embêter avec ça!
- Ah ah ah
- Je n'aurai jamais due me confier à toi. Ce n'est vraiment pas drôle.
- Ah si si c'est drôle. La grande Ossouka, inspectrice de son état se faire draguer par une fille ah ah ah!
- Tchip!
- Bon blague a part, j'ai un ami que je pourrai te présenter vu que tu n'arrives pas à trouver de gars sérieux.
- Je n'ai pas besoin de ton aide, merci!
- Tu es sur? Tu avances en age hein... et si tu veux avoir une chance de réaliser ton rêve de devenir mère, il va falloir te dépêcher...
- Bon ça suffit maintenant. Je t'en pose moi des questions sur tes gosses que tu pompes partout partout ?
- Oh ma chère, il faut bien qu'il y en ai qui se dévoue pour repeupler le pays. Avec tous les morts qu'on voit tous les jours la...
- N'importe quoi!
Nous arrivons rapidement sur les lieux. En contre bas, une foule de badauds est massé autour de la maison carbonisée. Les éléments arrivés sur place en premier ont mis en place un ruban de barricade pour circonscrire l'endroit du drame.
- Ah Ndjota, matsang? Demande mon collègue à l'un des policiers présent.
- Bonjour Inspecteur Ndzegue, d'après l’enquête de voisinage c’est une certaine Dolorès Ovono, la vingtaine qui vivait ici seule. Il y a eu coupure d'électricité dans la nuit et la victime aurai allumé une bougie pour s’éclairer. Le temps que les voisins se rendent compte et alertent les pompiers, il était déjà trop tard.
- Mais comment ça ? Elle n’a pas pu sortir ?
- Apparemment non, puisqu’on a retrouvé les restes de son corps calciné à l’intérieur.
- Oh la la ! M’exclamè-je
- D’autres victimes ?
- Non Ndzegue, aucunes autres identifiées, mais allez voir le capitaine des pompiers la bas, il vous donnera certainement plus d’infos.
Nous dévalons la pente et traversons les quelques cahutes en planches juxtaposant celle qui est partie en fumée et qui ont, comme par miracle, échappées aux flammes.
Après avoir traversé le ruban qui tient la foule à l’écart, nous pénétrons dans ce qui reste de ce qui devait être une maison en semi dur. Tout s’est complètement volatilisé. Nous progressons à pas feutré entre les restes de planches brûlées et tôle froissée lorsque le capitaine des pompiers vient à notre rencontre.
-Ossouka et Ndzegue ! Quel bon vent vous emmène ici ?
-Bonjour Foumbou ! Répond Ndzegue. C’est le boss qui nous a collé cette affaire pour je ne sais quelle raison mais bon ! Quels sont les éléments dont tu disposes pour nous aider à avancer dans notre enquête ?
-Eh bien ! Rien d’extra hein. Nous avons identifié la source du départ de feu.
Il y avait des traces de cire et de dentelles à proximité de la fenêtre.
-De la dentelle ? Repris-je étonnée. Des rideaux ?
-Oui, oui c’est ce à quoi nous avons tout de suite pensée. Il y a eu une coupure hier dans la nuit et elle a allumé une bougie qu’elle a posé près des rideaux de la fenêtre.
-Sait-on a quelle heure précisément a eu lieu la coupure ? Questionne Ndzegue
-Oui, les voisins s’accordent tous pour situer l’interruption aux alentours de 23h. Nous sommes en train de vérifier l’information auprès de la SEEG.
-23h ?!? A quelle heure l’incendie a-t-il été déclaré ? Demandai-je
-Tôt ce matin, vers 5h.
-Donc à 23h elle aurait allumé sa bougie et le feu ne se serait déclaré que 6 heures plus tard ?
Je lance un coup d’œil à mon collègue. Cette histoire n’est pas claire…
- Il y a t-il une possibilité pour que cet incendie ait une origine criminelle ? Demande t-il
- Ah ça ! C'est une bonne question. Pour être honnête je ne saurais vous le certifier à 100%. L' analyse des débris nous a juste permis de constater qu'il n'y a pas eu effraction. La serrure de la porte principale était fermée ainsi que le loquet des fenêtres, ou du moins ce qu'il en restait.
- Ok je vois. Répond Ndzegue en prenant des notes. Où est la victime ?
- Elle est dans la pièce d’à côté qui faisait office de chambre.
Venez suivez-moi.
Nous le suivons en prenant garde à l'endroit où nous posons nos pieds.
- Voilà ! Nous l'avons trouver la. Fait il en nous montrant le corps sans vie complètement calciné au milieu des débris. Le médecin légiste ainsi que deux de ses assistants s’activent autour.
Ndzegue va à leur rencontre tandis qu'un haut le cœur m'oblige à sortir en catastrophe de la maison pour prendre de l'air.
- Ça va? Me demande mon coéquipier en me rejoignant quelques minutes plus tard.
- Oui oui, ça va aller. Merci. Qu'est-ce que tu as pu relever?
- Eh bien, la victime semblait être en train de dormir au moment où le feu s'est déclaré. Elle était allongée en chien de fusil, comme quelqu'un qui dort tranquillement, non consciente du danger.
- Ce n'est pas possible ! L' odeur de la fumée aurait due au moins l'alerter. A moins que...
- A moins qu'elle ait été drogué ou déjà morte avant que quelqu'un ne foute le feu... Termine-t-il
- C'est cela. Donc la thèse de l’incendie d’origine accidentel ne tient plus.
- Je crois qu'il n'y a plus de doute la dessus... Mais laissons le médecin légiste faire son travail. Il pourra certainement nous apporter plus de preuve pour étayer cette hypothèse.
- Oui je pense que...
"Ma fille!!! Ou est ma fille?!? Laissez-moi passez! "
Une femme crie au milieu de la foule créant une cacophonie monstre. Les policiers en faction vite dépassés par la furie de cette dernière la laisse malencontreusement passer. Elle se rue alors vers nous dans le but de rentrer dans la maison.
- Laissez-moi passez Ooohhhhh ! A Tare nzame ! Ça c'est encore quelle épreuve que tu veux m'infliger comme ça ?!?
Ndzegue aidé des policiers qui l'avaient laissé passer arrivent à l'immobiliser.
- Madame calmez-vous et expliquez-nous ce qui se passe ! Vous connaissez la personne qui vivait ici ?!? Vous êtes un parent ?
- Woï Woï! Oyyooo! C'est ma fille qui vit ici oohhh snif snif ! Elle est où?!? Qu'est-ce qui s'est passé? Oyyooo !
- Madame je suis désolée mais nous avons retrouvé un corps à l'intérieur. Une équipe médicale est actuellement en train de vérifier l'identité de la personne mais il est fort probable que...
- Oyyooo !!! NON NON !! Ne me dites pas ça !! Je vais aller expliquer ça comment au village !!! Woï Woï
La dame saute dans tous les sens et devient de plus en plus difficile à maîtriser. Dans sa détresse elle jète son sac que je ramasse par réflexe. D'autres policiers doivent venir en renfort au moment où on sort le corps pour l’analyser à la morgue.
En état de choc, elle finit par tomber dans les pommes.
Sous le brouhaha général que provoque sa perte de connaissance, Ndzegue prend la décision de l'embarquer dans notre voiture pour la transporter rapidement à l'hôpital de Nkembo.
Avec la carte de la CNAMGS qu’on retrouve dans ses affaires, ils ne discutent pas trop pour la prendre en charge. Nous patientons alors dans le couloir le temps d'avoir des nouvelles.
- Ntsame Gisèle, 58 ans, secrétaire. Lit Ndzegue sur la pièce d'identité de la femme. Nous voilà bien avancé. Nous arrivons à trouver quelqu'un qui peut nous fournir plus d'informations sur la victime et elle nous claque entre les doigts. Tchiipp
- Rho ne soit pas si négatif. Je suis sûre que ce n'est rien d'autre qu'une hausse de tension passagère. Attends je vais jeter un coup d’œil sur son téléphone peut être que... Ah! Voilà le médecin qui revient vers nous. Alors docteur?
- HE bien, ça va aller. Elle a eu une hausse de tension lié sûrement à la nouvelle que vous lui avez annoncé, mais nous lui avons donné des calmants.
Je regarde mon collègue d'un air disant "tu as vu, je te l'avais bien dit"
- Très bien, on peut donc la voir ?
- Mais enfin Ndzegue elle doit avoir besoin de repos..
- Tout à fait, votre collègue a raison. Vous pourrez passer dans l'après-midi si vous avez des questions, mais pour l'heure, il faut qu'elle dorme un peu.
-OK très bien, merci docteur.
Il s'en va et nous nous dirigeons vers la sortie. Lorsque la sonnerie d’un téléphone provenant du sac de la malade se met à sonner.
Je regarde Ndzegue qui me fait signe de la tête de décrocher.
~ Allo? Inspecteur Ossouka à l'appareil à qui ai-je l'honneur ?
~ Inspecteur ? Heu… excusez-moi je pense que je me suis trompé de numéro… Me répond un jeune homme à l'autre bout du fil.
~ Non, non, vous êtes bien sur le téléphone de Mme Ntsame, elle a été admise à l'hôpital de Nkembo. Vous êtes un proche ?
~ Oui enfin, non, enfin... heu... pourquoi elle est à l'hôpital? Il ne lui ai rien arrivé de grave j'espère.
~ S'il vous plait, pourrais-je savoir quel lien vous avez avec la concernée?
~ Je suis… je suis le copain de sa nièce. Elle m'a appelé il y a une heure en pleure car elle a entendu parler d'un incendie aux abords de chez ma copine, elle devait me rappeler mais...
~ Ok je vois. Vous êtes le compagnon de la dénommé Dolorès Ovono?
~ Oui, oui… elle va bien ? Elle aussi est à l’hôpital ? J’essaie de la joindre depuis ce matin mais je n’arrive pas à l’avoir, ça m’inquiète.
J’entends un gros bourdonnement de moteur ainsi que des éclats de voix dans le fond, on aurait dit des rires.
~Monsieur, où êtes-vous présentement ?
~Je suis heu… je viens de dépasser Kougouleu, je vais bientôt arriver à Ntoum je dois faire une pause la bas.
~Vous êtes en voiture c’est cela ?
~Oui oui, je suis chauffeur de poids lourd, je transporte les grumiers.
~Ah je vois. Donc vous êtes au volant et au téléphone en même temps ?!
~Oui, je suis inquiet, c’est pour ça j’ai appelé vite…
~ Très bien. Nous allons nous mettre en route pour Ntoum. Attendez nous la bas
~D’accord Inspecteur mais dites-moi, ma copine, vous avez de ses nouvelles ?
Je réfléchie deux secondes à la réponse la plus appropriée vue les circonstances.
~Nous venons à votre rencontre pour en parler, ne vous inquiétez pas, tout va bien.
~Heu… d’accord, d’accord.
Je raccroche et mon regard reste figé sur le téléphone.
-Pourquoi tu lui as menti ?
-C’est un chauffeur de poids lourd, je ne voulais pas risquer la vie d’autre personne en lui annonçant une mauvaise nouvelle. Allons le rejoindre à Ntoum, quelque chose me dit qu’on y apprendra des choses intéressantes...
Nous prenons la route et trois quart d’heure plus tard, nous entrons dans la petite ville de Ntoum.
- Mais il t'a dit de le retrouver où exactement ?
- Il me parlait d'un dos tourné à deux pas du lycée technique… attends ralenti un peu, je pense que c'est son camion qui doit être là.
On se gare sur le côté et on descend pour inspecter le camion stationné dans un terrain vague à proximité de l'établissement.
- Le moteur est encore chaud, ça ne fait pas longtemps qu'il est là, relève Ndzegue.
Je jète un coup d’œil autour. Quelques vendeuses ambulantes installent au bord de la route.
J'avise l'heure, 11h55.
- Ça va être l'heure de la sortie des cours, il faut qu'on le rejoigne rapidement si on veut éviter de se retrouver mêlé à la foule d'élève à la recherche de quelques choses à se mettre sous la dent.
- Tu as raison. Allons de ce côté, je crois apercevoir des vendeurs de soya, il doit y avoir un « dos tourné » pas loin.
- Huummm. Tu m'as donné faim la, je pense qu'on va acheter à manger en même temps hein.
- Comme tu veux.
On fait donc une halte aux « coupé-coupé » et pendant qu'il attend que notre commande soit préparée, je vais acheter du pain et des unités chez le boutiquier à côté. Lorsque je ressors, je perçois une conversation qui attise ma curiosité.
« Dolorèse ? Non ce n’est pas possible, je suis sûr que tu dois faire erreur sur la personne. J’ai eu des policiers tout à l’heure, ils m’ont dit qu’elle va bien et qu’elle est à l’hôpital… »
Je comprends que j’ai en face de moi la personne que nous sommes venu retrouver alors je fais signe à mon collègue et nous nous dirigeons vers lui.
-Bonjour Monsieur, inspecteur Ossouka et voici mon collègue l’inspecteur Ndzegue, l’abordè-je en lui montrant ma plaque.
-Ah ! Vous êtes la !
« Bon Rodrigue je te laisse, on s’appelle après… »
-Re-bonjour inspecteurs, vous avez fait vite ! Je suis arrivé il n’y a pas longtemps et vous ne devinerez jamais ce que mon ami vient de me dire… ah ah ah. Il me dit que la maison de Dolorès a pris feu et qu’elle a péri à l’intérieur, n’importe quoi ! Vraiment les gabonais et leur kongossa la...
Je jète un œil à mon collègue qui me regarde d’un air désolé. Bon, quand il faut y aller, il faut y aller !
-Monsieur… c’est comment votre nom déjà ?
-Mezui, je m’appelle Sylvain Mezui madame, répond t-il d’un air sympathique. J’étais en train de manger, venez-vous attablez avec moi je vois que vous avez pris à manger.
-Heu… non nous n’allons pas pouvoir le faire, nous sommes en fonction. Répondè-je. Si nous avons fait le déplacement M. Mezui c’est parce que, comme je vous l’ai dit nous avons dû nous rendre à Akebe ce matin où un incendie nous a été déclaré…
Il me regarde droit dans les yeux et m’écoute attentivement pendant que je lui relate les faits tels que vécu.
-Mais attendez, m’interrompt-il. Je ne comprends pas. Tout à l’heure vous m’avez dit qu’elle était à l’hôpital et maintenant vous me dites qu’un corps a été retrouvé chez elle. Qui est mort alors ?
-Monsieur Mezui, ce que ma collègue tente de vous expliquer depuis la c’est que tout porte à croire que le corps retrouvé dans la maison calcinée est celui de votre compagne…
- HEIN ?!?
-Pour des raisons évidentes de sécurité nous avons jugé prudent de ne pas vous en informé alors que vous étiez au volant mais…
L’homme semble en état de choc. Il est complètement pétrifié et nous regarde sans nous voir. Le temps c’est comme arrêté autour de lui.
-Je suis désolée pour cette nouvelle monsieur…repris-je.
-Heu… excusez-moi… j’ai heu… j’ai besoin de m’asseoir…
-Oui, oui bien sûr. Nzegue aide le à s’installer à l’intérieur s’il te plait.
Nous rentrons dans la cafète d’où il était sortie et après avoir bu une bonne rasade d’eau, il semble reprendre peu à peu ses esprits alors nous décidons de poursuivre notre interrogatoire.
-Monsieur Mezui, les circonstances dans lesquelles nous avons retrouvé la défunte nous pousse à penser que cet incendie a une origine criminelle…
-Criminelle vous dites ?!
-Oui. Savez-vous si elle avait des ennemies ou des personnes susceptibles de lui vouloir du mal ?
-Ennemies ? Nonnnn Dolorès est une jeune fille sans problème…
« Dring Dring… Dring Dring »
Le téléphone de Ndzegue sonne, il s’excuse et sort pour répondre à l’appel. Je poursuis avec mes questions.
-Vous êtes son petit ami c’est cela ? Depuis quand la fréquentiez-vous ?
-Depuis pas longtemps hein, peut-être 6 mois comme ça. Je l’ai rencontré à un retrait de deuil à Minvoul, elle cherchait une personne pour la raccompagner à la capital. J’avais un camion et je faisais la route donc je lui ai proposé mon aide et c’est comme ça que tout a commencé.
-Bien et donc vous viviez ensemble ?
-Non, à cause de mon travail et puis pour veillez sur ma mère qui est déjà vieille, j’habite au PK12. Mais on se voyait de temps en temps quand j’étais sur Libreville, même si ces derniers mois elle m’évitait...
-Ok je vois. Ou étiez-vous hier soir ?
-Sur la route. Je suis resté bloqué 2 jours dans la forêt car ma roue s’est retrouvée complètement embourbée et ce n’est qu’hier que j’ai pu m’en sortir. J’ai roulé toute la nuit et là je me suis arrêté ici pour manger et faire le plein pour les derniers kilomètres qui me séparent du port.
Ndzegue revient et s’installe.
-C’était le médecin légiste, m’informe ce dernier. M. Mezui s’avez-vous si votre compagne avait des plombages dans la bouche ?
-Des plombages ? Heu… c’est possible hein mais je n’en suis pas sûr.
-D’autres signes distinctifs qui permettrai d’être sûr de son identité ?
-Non je ne vois pas désolé. Comme je l’expliquai à votre collègue, nous ne nous connaissions pas depuis très longtemps.
-Ok bon, nous allons vous laissez dans ce cas. Si vous vous souvenez de quoique ce soit n’hésitez surtout pas, appelez nous.
-Très bien, inspecteur. Merci…
Après nous être assurer qu’il est en état de conduire, nous regagnons notre véhicule où nous nous accordons une pause déjeuner avant de reprendre la route.
-Cette affaire est vraiment bizarre, déclare Ndzegue. Je n’ai pas voulu en parler devant lui mais le médecin légiste ma fait part d’une autre découverte.
- Ah oui ? Laquelle ?
-Il a retrouvé des traces de sectionnement au niveau du ventre de la victime.
- Sectionnement ? Tu veux dire qu’elle aurait été mutilé avant d’être bruler ?!?
- C’est cela. Il n’a pas pu me dire s’il y a eu prélèvement d’organe au vu de l’état dans lequel le corps a été retrouvé mais…
-… on pourrait bien être une fois de plus en présence d’un cas de crime rituel… terminè-je.
Pour toute réponse il acquiesce.
-Il faut en parler au boss ! Déclarè-je.
-Et pour lui dire quoi ? Nous n’avons pas assez d’éléments pour le faire, attendons de réunir plus de preuve, c’est plus sage.
-Tu as raison.
-J’ai appelé l’hôpital. On pourra passer d’ici 2h. Pile le temps qu’il nous faut pour arriver à Nkembo avec tous les embouteillages la.
-Super ! Mettons nous en route alors.
Il démarre le moteur et 2h30 plus tard nous nous retrouvons au chevet de la tante de la victime. Bien qu’elle soit plus calme elle est complètement abattu. Mais il nous faut avancer, alors je décide de lui poser des questions malgré tout.
-Madame Ntsame, nous avons rencontré le copain de votre nièce tout à l’heure, il nous a informé ne pas avoir connaissance d’une quelconque personne pouvant vouloir du mal à Dolorès. Est-ce votre cas ?
-Du mal ? Vous voulez dire que quelqu’un l’a tué ? C’est pas le feu ? Demande-t-elle d’une voix faible et tremblante.
-Non Madame, nous avons réuni un ensemble d’éléments qui nous font penser que les raisons de sa mort sont toutes sauf accidentelles…
-Quels genres d’éléments ?
Je regarde mon collègue, il acquiesce de la tête.
-Nous avons trouvé des traces qui montrent que son ventre a été ouvert.
-OH NON PAS CA ! S’exclame-t-elle en se redressant vivement.
-Madame calmez-vous s’il vous plait, tentè-je de la maitriser.
-Le bébé ! Il a pris le bébé !!! Laissez-moi descendre.
Ndzegue vient en renfort et à deux on arrive à la coincer contre le lit.
Quelques minutes plus tard elle consent à redevenir raisonnable alors nous la lâchons.
-Pouvez-vous nous expliquer cette histoire de bébé, demande Ndzegue à qui je décide de laisser mener le reste de l’interrogatoire. Son copain ne nous en a pas fait mention.
-C’est normal, est-ce qu’il est au courant ?
-J’ai peur de ne pas vous suivre…
Elle soupire longuement avant de poursuivre.
-Il y a quelques mois, Dolorès qui n’avait plus que moi comme parents proches depuis l’accident de circulation qui a tué sa mère, est venue m’annoncer qu’elle était enceinte. Elle venait de faire la rencontre de Sylvain et comme elle craignait de le perdre à cause de son état, elle avait décidé d’avorter car de toute façon le géniteur ne voulait pas entendre parler de cette grossesse.
-Mais l’avortement a échoué ?
-Oui, elle a rencontré divers problèmes dont le principal était financier. Bien qu’ayant de l’argent, celui qui l’a grossit a catégoriquement refusé de lui donner un francs. Il ne voulait pas de l’enfant mais en même temps il ne voulait pas payer l’avortement… Sorcier !
-Donc elle a dû assumer toute seul les frais liées à sa grossesse ?
-Oui, avec l’argent du marché et des petits ménages qu’elle faisait part ci par là elle essayait de s’en sortir. Elle était déjà à terme et devait accoucher d’un jour à l’autre, c’est sûr que c’est pour ses sacrifices là qu’il m’a tué l’enfant ! Eh A Nzame wom !!!
-Je vois. Vous avez un nom a nous communiquer ? Nous aimerons rencontrer ce monsieur.
-Hum ! Vous allez le rencontrer où ? Tchippp
Elle nous dévisage de haut en bas avant de détourner sa tête. Ndzegue et moi nous nous regardons surpris par sa réaction.
-Madame pourquoi dites-vous cela ?
-Parce que vous, la police, ne pouvez rien faire contre lui !
-Pouvez-vous être plus explicite ?
-Bien sur ! Si je vous dis que celui qui est derrière tout ça n’est nul autre que Basile MAMBOUNDOU !
-Balise MAMBOUNDOU ?! Le procureur général ?
-Lui-même !
-Mais… Madame êtes-vous consciente que les accusations que vous portez sont lourdes de conséquences ?
-Je l’accuse ! Et comme je sais que cette affaire sera étouffée, dès que je sortirai d’ici, j’irai taper le diable pour que justice soit faite !
Nous décidons d’abréger l’entretien et c’est complètement retourné qu’en fin de journée, nous rentrons au bureau.
« Ossouka, Ndzegue ! Le chef vous fait appel dans son bureau » nous lance un collègue a notre arrivé.
-Pfff même pas le temps de souffler, ralè-je discrètement
Nous lui faisons le compte rendu verbal de l’état de nos investigations. Comme on pouvait le pressentir, le chef balaie d’un revers de la main les accusations portées sur le procureur et nous renvoie de son bureau en nous gratifiant de quelques qualificatifs peu élogieux.
-Bon ! Encore une journée à nous être cassé la tête pour rien, déclare complètement dépité Ndzegue. Heureusement qu’on est vendredi, ce week-end ne sera pas de trop pour me reposer.
-Ca tu l’as dit ! Bon, on fait comment pour le rapport ? Tu le rédiges ou…
-Nann tu ne m’auras pas une fois de plus ! C’est moi qui l’ai fait la dernière fois. C’est à ton tour ! Les gars m’attendent pour la réunion de parent d’élève, il est déjà 18h la !
-Quel réunion de parent d’élève la ? Dis plutôt que tu vas aller t’asseoir au bar oui !
-Ah pardon Ossouka je ne suis pas ton gars pour te rendre des comptes, je m’en vais. Voilà mon carnet de note, passe un bon week-end !
-Okay au revoir oohhh !
Il s’en va et je reste encore une heure pour taper le rapport en y adjoignant les photos qui vont bien, je peaufine quelques détails pour clore le dossier, je l’enregistre et range mes affaires.
< Deux heures plus tard >
Je franchis la porte de chez moi les bras chargé des courses que j’ai faites en route.
-Bonsoir Madame Ossouka !
-Bonsoir Didi, la journée s’est bien passée ?
-Oui impeccable, elle a été adorable. Elle n’a presque pas pleuré, pour un bébé qui vient de naitre c’est très rare…
-Hum. Elle est où ?
-Dans son couffin au salon. Elle dort.
-Ok je vais prendre le relais je crois que vous pouvez y aller.
-Ok madame, mais surtout si vous avez le moindre soucis n’hésitez pas hein, je ne suis pas loin.
Je lui souris.
-Merci Didi, je n’y manquerai pas. Mais je pense qu’il est important que je tisse des liens avec ma fille... nous nous en sortirons.
-J’en suis sûr Madame ! Vraiment je vous trouve très courageuse de recueillir cet enfant alors que votre sœur vient à peine de mourir en couche. La vie la vraiment…
-On va encore faire comment. Par contre, on est bien d’accord, cette histoire ne sort pas d’ici hein.
-Motus et bouche cousue madame. Je serais muette comme une tombe, y a trop de sorcier dehors !
-Tout à fait. Bonne soirée Didi.
-Bonne soirée madame.
Elle referme la porte derrière elle et je me dirige vers le couffin.
J’admire la jolie petite frimousse de ma fille et ne résiste pas à l’envie de la prendre dans mes bras. Enfin mon rêve s’est réalisé !
Ce ne fut pas facile mais j’y suis parvenue d’une main de maitre !
Elle sourit et gigote un peu dans son sommeil.
Chhuuuttt bébé… chut maman est enfin la… ça n’a pas été évident mais Dieu merci tous s’est déroulé selon le plan que j’avais savamment mis en œuvre. Tout a été fait pour que nous soyons enfin réunies.
Tu n’as rien à rien à craindre, je serais une meilleure mère que celle que tu as failli avoir. Je te fais la promesse de te couvrir de tout l’amour dont tu pourras avoir besoin.
Plus rien ni personne ne pourra nous séparer…