Joël et Ami 20 : Non ! Pas toi ! (2ème partie)
Ecrit par Dja
Brahim était arrivé.
Finalement, ils n’avaient pas pu se voir l’autre soir. Une urgence à la clinique avait obligé Abou à rester de garde la nuit. Et, deux jours plus tard, Ami était rentrée chez elle et la réunion pu enfin avoir lieu.
Khady attendait dans sa chambre. Elle ne comprenait rien ! Abou refusait de lui expliquer les raisons de cette réunion. Pourquoi autant de mystère ? Mais bon, comme elle devait préparer des commandes pour des particuliers, elle passa le temps sur son ordinateur. Elle avait demandé à son cadet de l’avertir dès que Brahim serait arrivé.
Elle terminait de rentrer une énième série de chiffres, lorsqu'elle entendit son pas dans l’entrée. Abou frappa à la porte de sa chambre, qui donnait sur le salon. elle avait transformé cet ancienne bibliothèque en chambre à cause du volume. Son ancienne chambre était devenu le bureau de leur père.
Elle sortit en ouvrant les bras et en souriant joyeusement à celui qu’elle considérait comme un deuxième frère.
« _ Bonsoir Khady ! Abou !
_ Bonsoir Brahim ! Comment vas-tu ? Cela fait longtemps que je ne t’ai pas vu dit donc.
_ Ça va ! Sauf que je suis un peu occupé ces derniers temps !
_ Hum ! J’espère que ce n’est pas à cause d’une fille que tu ne viens plus manger chez moi hein.
_ Mais non ! Qu’est ce que tu vas t’imaginer ?
_ Haa ! En tout cas, je l’espère ! »
Abou les regardait en piaffant d’impatience. Il attendait qu’ils en aient terminé avec les salutations pour entrer dans le vif du sujet.
« _ Quand vous aurez fini, vous me direz.
_ Hey ! Qu’est ce que t’as toi là ! Tu vas arrêter de te comporter comme un policier.
_ Franchement, je ne sais pas ce qu’a ton frère. A cause de lui, j’ai raté une bonne affaire l’autre jour.
_ Ha bon !?
_ Tu veux que je lui dise de quelle affaire il s’agit Brahim ?
_ Hooo ! Laisse tomber ! On ne peut plus rigoler avec toi. Mais, bon sang, qu’est ce que t’as ?
_ Bon, asseyez-vous ! Il manque une personne et nous serons au complet. Ha ! Je l’entends arriver. Très bien, nous pouvons commencer.»
A peine finit-il sa phrase qu’Ousmane, le domestique entra en compagnie de la dernière invitée. Khady se leva promptement et lança un regard étonné à son frère qui lui fit de la main, le geste de se rasseoir.
« _ Hey, petit ! (elle usait de ce surnom lorsqu’Abou l’agaçait). Fais attention ! Je suis ton aînée et tu me dois du respect.
_ Pardon grande sœur ! Mais, voudrais-tu bien te rasseoir s’il te plaît ! C’est très important ce dont nous avons à traiter. Et, elle y est autant liée.
_ Hum ! Moytoul (1) !
_ Defal ndank (2) ! Je vais tout vous expliquer
_ Tu as plutôt intérêt ! »
Khady se rassit, non sans avoir lancé un regard noir à Jeneba, la dernière invitée. Elle répondit à Khady avec le même regard, puis s’assit à l’endroit indiqué par Abou. Pendant ce temps, Ousmane avait apporté des rafraîchissements sur un plateau et quelques amuses-bouches. Il sortit aussi discrètement qu’il était venu. Abou prit la parole pendant que Jeneba remplissait copieusement une assiette :
« _ Merci à tous les trois d’être venus. Si je vous ai appelés, c’est parce que je pense qu’il est grand temps que nous ayons des réponses aux questions que nous nous posons depuis quelques temps.
_ Peux-tu être plus explicite ! Et puis, je ne vais pas durer. Tu sais que mon chéri m’attend. Donc, fais un peu vite s’il te plaît !
_ Jeneba, tu vas devoir patienter et ton chéri aussi. D’ailleurs, je crains que tu ne doives bientôt parler qu’en singleton.
_ De quoi !? (elle failli d’étouffer avec la chips qu’elle venait d’avaler) Qu’est ce que tu racontes ?
_ Calme-toi ! Bien, maintenant que j’ai toute votre attention… Jeneba, qu’est ce que c’est ? (il avait sorti un téléphone de sa poche.)
_ Bein, un téléphone, ça ne se voit pas !?
_ Si ! Si ! Mais, si tu regardais mieux, tu comprendrais pourquoi je te pose la question… Alors !?
_ Ho ! »
Maintenant, Jeneba commençait à s’agiter sur son fauteuil. Elle avait reconnu le téléphone. Celui qu’elle avait oublié dans le taxi l’autre fois. Ho, merde ! Mais, comment avait-il fait pour l’avoir entre ses mains ? Pourvu qu’il n’ait pas lu les messages. De toute façon, il aurait fallu le décoder pour le faire. Et, elle doutait que même avec ses connaissances chirurgicales, Abou ait pu y arriver.
Elle reprit contenance et le regarda droit dans les yeux.
«_ C’est mon vieux téléphone. Où l’as-tu trouvé ?
_ Tu le sais bien Jene, arrête de jouer à l’innocente.
_ Hum ! Merci de me l’avoir rapporté. Bon, si tu as fini, je vais devoir y aller. Mon chéri doit s’impatienter.
_ Tu n’iras nulle part Jeneba. En tout cas, pas avant d’avoir répondu à mes questions.
_ N’importe quoi ! (alors qu’elle s’était relevée, Abou l’avait forcée à se rasseoir) Hey, tu vas arrêter, ok !
_ Ecoute Jeneba, je ne suis pas là pour m’amuser. C’est soit tu réponds maintenant, soit je vais donner le téléphone à ta cousine. On verra si elle sera aussi conciliante que moi. »
Cette seule menace suffit à la calmer. Les deux autres qui n’avaient rien dit jusque là les regardaient sans rien comprendre. Avant que Khady n’ouvre la bouche, Abou expliqua.
Le jour où les deux femmes s’étaient disputées à la sortie de la clinique, un monsieur venait de déposer un téléphone. Comme il avait reconnu Abou, il était allé directement vers lui pour le lui remettre en mains propres. Et coïncidence faisant, Jeneba sortait avec Khady au même moment. Le monsieur avait désigné les filles du doigt en expliquant qu’elle avait oublié l’appareil des semaines plus tôt dans son taxi. Il avait hésité avant de venir le déposer, mais un soir il avait répondu à un appel. C’était un certain Richard qui voulait parler à Jeneba. Comme ce monsieur appelait de loin, le taxi-man avait eu des remords et, il avait donc décidé de déposer le téléphone au docteur. Car, il se souvenait qu’il avait lui-même accompagné la jeune femme et payé sa course. Malheureusement, il n’avait pas eu l’occasion de passer plus tôt car il avait été malade.
Abou n’avait pas bien compris à qui était le téléphone. Comme les filles s'en allaient et semblaient se disputer, il ne voulait pas intervenir. Il avait rallumé le portable et lui avait avoué l’avoir fait déverrouiller pour le garder pour lui. Mais, pris de remords, il avait décidé d'aller rendre le téléphone. Finalement, Abou lui avait remis une certaine somme pour le remercier de son geste. N’étant plus sûr de la personne que le monsieur avait désignée, il avait parcouru machinalement la messagerie jusqu'à prendfe connaissance d'une correspondance suspecte.
C’était donc Jeneba qui avait envoyé les messages pour lui annoncer la grossesse d'Ami. Il avait croire à une bonne blague. Le pire dans tout cela avait-il pensé, était le fait que l'idée de percer les préservatifs de Joël venait d'elle. Richard avait suivi ses conseils.
Mais, pourquoi tout cela ? Et dans quel but ? Au fur et à mesure, il s’aperçut que la Jeneba qu’il pensait connaître; celle qui montrait beaucoup d'inquiétudes par rapport à l'état de sa cousine était en fait une personne méchante et avide.
Il se tourna vers elle. Jeneba avait cessé de piocher dans son assiette. Elle le regardait avec colère.
« _ Pourquoi tout cela Jeneba ? Je croyais qu’Ami et toi étiez bien plus que des sœurs.
_ Parce qu’Aminata n’est qu’une traînée ! (Jeneba avait maintenant de la rage dans la voix) C’est une enfant pourrie gâtée. Elle a toujours tout eu, alors que moi rien. Je devais toujours la suivre comme un petit chien derrière sa maîtresse. Tout les gens l’aimaient alors que moi, j’étais toujours reléguée en arrière plan
_ De quoi !? Mais qu’est ce que tu racontes ?
_ C’est la vérité ! Aminata Traoré a toujours été la préférée de tous. Depuis toute petite déjà. Comme ses parents sont riches, elle s’est toujours crue tout permis.
_ Tu es d’une méchanceté ! Vraiment ! Et quand je pense que mon cousin était prêt à t’épouser.
_ Parlons-en de lui ! Il a osé me dire qu’Ami était plus classe que moi. Et toi Abou, quand je pense que je t’ai tendu la perche pour me choisir à sa place, mais tu ne comprenais rien.
Pfffft! Tu devrais me remercier pour ce que j’ai fait. Je t’ai épargné une honte monumentale. Car, ce que tu ne sais pas, c’est que ta chère et tendre protégée prévoyait de s’envoler au Maroc tout juste après votre fameux mariage. Tu vois, je t’ai aidé ! »
IBrahima et Khady n’en croyaient pas leurs oreilles. Comment pouvait-on être rempli d’autant de haine ? Ils n’en revenaient pas. Ce fut Khady qui brisa le silence :
« _ Je comprends maintenant ton animosité à mon encontre l’autre jour à la clinique. Tu craignais que je n’aie dit à ta cousine que tu m’avais fait passer un message pour mon frère.
(elle se tourna vers l’intéressé)
Oui, Abou ! Elle est passée une ou deux fois ici pour te rencontrer et à chaque fois tu étais absent. Elle était un peu saoule la dernière fois et m’a confié qu’elle était amoureuse de toi. Elle ne tenait pas sur ses jambes et, je lui ai conseillé de rentrer et de repasser le lendemain. Puis, je l’ai mise dans un taxi. Le lendemain, elle m’a retrouvée au restaurant et supplié de ne rien te dire. »
Khady termina à peine sa phrase que la porte derrière elle s’ouvrit. Ami était là, le visage fermé, accompagné de Claude, le cousin. Ils étaient tous les deux stupéfaits.
L’instant de surprise passé, telle une furie Jeneba hurlant de rage se rua sur Khady. Mais, Ami fut plus rapide. Elle se jeta sur elle, la jeta par terre et lui assena plusieurs paires de gifles. Ils durent s’y mettre à quatre pour l’obliger à lâcher prise.
Ibrahima souleva Jeneba de terre. Elle se dégagea et voulu à son tour rendre les coups à Ami. Mais, Khady s’interposa en bloquant un de ses bras derrière son dos. Ce qui eut pour effet de redoubler la rage de Jeneba :
« _ Tu ferais mieux de me lâcher, si tu ne veux pas que je m’en prenne à toi.
_ Tu ne devrais même pas essayer. Je te préviens ! Je suis ceinture noire de karaté et, je ne souhaite pas te donner la correction que tu mérites.
_ Hum ! Khady, lâche mon bras ! »
Alors qu’elle tentait une fois de plus de se dégager, une voix tonna :
« IL SUFFIT ! »
La voix paternelle de M. Mbaye claqua comme un coup de fouet. Tous les jeunes s’immobilisèrent. Il prit alors place dans son canapé favori et d’un regard, intima à tous l’ordre de s’asseoir.
« _ Khady, que se passe t-il ici ?
_ Bonsoir Baye !
_ Bonsoir ! Alors ?
_ Rien papa ! Il ne se passe rien de grave. On discutait un peu bruyamment.
_ Hum ! Ok ! Bon, vous allez vous calmer un peu. (il se tourna vers Claude) Alors jeune homme, comment vont tes parents ? Et ma sœur ? J’espère que ton père s’en occupe bien hein !
_ Bonsoir mon oncle ! Oui mon oncle ! Elle va bien mon oncle !
_ Hey mon cher, il faut te détendre. Tu n’es pas obligé de me donner du « mon oncle » à chaque fois. Bon, comme vous êtes tous ici, je vais donc vous laisser tranquille. Mais, je ne veux surtout pas entendre de bruit.
_ Oui Baye (lui répondit Abou)
_ Allez Docteur ! Bien, passez tous une bonne soirée les jeunes ! Bonsoir Aminata ! Je suis passé voir mon ami avant de rentrer. Comment va ta mère ?
_ Elle va bien mon oncle.
_ Très bien ! Tu lui transmettras mes salutations. Courage ! Allah finira bien par entendre nos prières.
_ Merci mon oncle ! »
Elle baissa la tête avec un sanglot dans la voix. Sur ce, le doyen prit congé en lui tapotant l’épaule. Dès qu’il referma la porte et que les jeunes se furent assuré qu’il était dans sa chambre, Aminata se tourna vers sa cousine :
« _ Comment as-tu pu me faire ça ? Je t’ai toujours aimée comme la sœur que je n’ai jamais eue.
_ Hum ! C’est cela oui !
_ Je me rends compte maintenant que pour toi, ce n’étais pas pareil.
_ Tu m’as aimée ? Moi !? Quelle blague ! Tu as toujours fait de moi ta suivante oui ! Parce que tes parents sont riches, tu m’as toujours fait passer pour ta boniche. « Jeneba fais ci ! Fais ça ! Porte-moi ceci ! Vas me faire cela ! Ecoute-moi bien très chère. Je ne suis pas ton esclave.
_ Tu délires complètement. Ta mère et la mienne nous ont quasiment élevées ensemble. Pourquoi ne m’as-tu pas exprimé tes ressentiments depuis ? J’ai failli mourir à cause de toi Jeneba. Est-ce-que tu t’en rends compte ?
_ Vas te faire foutre Aminata Traoré ! Vas te faire foutre !
_ Jeneba, tout le monde aurait pu me faire du mal, mais jamais je n’aurais pu m’imaginer que toi tu le ferais. Non ! Pas toi ! »
Elle ne put continuer et s’effondra sur le sol. Abou se précipita pour la soulever et alla la déposer sur son lit, dans sa chambre. Il cria qu’il ne voulait surtout pas retrouver Jeneba à son retour au salon. Celle-ci sans aucun remords se leva en toisant tout le monde :
« N’importe quoi ! »
Khady appela Ousmane et lui demanda de la faire sortir. Ce dernier ne se le fit pas répéter. Il avait suivi toute l’affaire et voulait la jeter dehors. Mais, Claude prit les devants et la raccompagna jusqu’au portail. Il regardait Jeneba avec dans les yeux un mélange de colère et de tristesse :
« _ J’avais confiance en toi ! Pourquoi ?
_ Tu ne sais pas ce que j’ai enduré depuis mon enfance Claude.
_ Alors, cela supposait que tu fasses autant de mal autour de toi ?
_ Ecoute Claude, je ne suis pas aussi méchante que les gens veulent bien le faire croire. Mais, Aminata n’est pas aussi bonne que tu le vois comme ça. Tu ne sais pas de quoi elle est capable.
_ Arrête Jeneba ! Arrête ! Ce n’est pas elle qui a créé toute cette histoire.
_ Ok, c’est vrai certes ! Mais, tu aurais donc préféré qu’elle épouse ton cousin alors qu’elle était enceinte d’un autre ?
_ Je n’ai pas dit ça !
_ Alors ! Avoue que j’ai bien fait. Même si je ne pouvais pas m’imaginer que son père irait jusqu’à vouloir la tuer. Ce n’ets qu’une petite traînée qui n’a finalement eue que ce qu’elle méritait. Elle trompait ton frère tout de même ! Tout le monde devrait me remercier. Mais non, vous m’accusez comme si j’étais une criminelle. Alors qu’elle couchait avec quelqu’un d’autre. »
Claude ne pouvait en croire ses oreilles. Il sentait monter en lui une envie de la frapper. Mais, il se reprit à temps :
« _ Et toi, ce Blanc avec qui tu as tout fomenté ?
_ Claude, écoutes, je…
_ Stop ! Maintenant c’est toi qui va m’écouter. Tu as assez fait de mal comme ça. Je tenais juste à te dire de m’oublier.
_ Pourquoi Claude ? On devait se marier. Ne laisse pas les gens détruire ce que nous avons commencé à construire. Tout ce que j’ai fait c’était pour m’en sortir. Ce Blanc n’a jamais compté pour moi. Il me fallait bien trouver de quoi être comme toutes les filles de mon âge. Moi, mes parents n’ont pas autant d’argent comme ceux d’Ami.
_ Tu n’as que ça à la bouche. L’argent, l’argent ! On dirait qu’il n’y a que ça qui est important.
_ Comment aurais-je fait alors ?
_ Je t’envoyais de l’argent ou pas ? Ou alors, ce n’était pas assez ?
_ Je suis désolée Claude. Ne m’en veux pas ! Je vais tout faire pour me racheter. JE t’aime Claude !
_ Ne dis plus jamais ça tu m’entends ! Et sache que toi et moi, c’est terminé !
_ Ho, non Claude ! Pitié, ne dis pas ça ! JE t’en supplie ! Je ferais tout ce que tu me diras, mais ne me laisse pas ! Je t’en supplie ! Claaauude ! »
Le regard qu’il lui lança suffit à la clouer sur place. Claude lui tourna le dos et referma le portail derrière lui, la laissant là, toute malheureuse. Jeneba s’était effrondrée dans la poussière, le téléphone-révélateur à la main.
De son côté, Claude avait le cœur lourd. Lui qui avait mis tous ses espoirs en elle. Il regarda sa montre et voyant qu’il était déjà trop tard, il décida de prendre le 1er vol pour Douala le lendemain. Il était venu pour Jeneba et passer du temps avec elle. Vu qu’à présent plus rien ne le retenait sur place, il allait s’en aller.
De retour au salon, il trouva Khady assise sur le canapé, en train de regarder une émission culinaire à la télévision.
« _ Comment va Aminata ?
_ Je ne sais pas trop ! Depuis que ton type l’a portée dans sa chambre, ils n’en sont toujours pas ressortis. »
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Moytoul (1) : Fais attention !
Defal ndank (2) = Fais doucement, Calme toi