Le macabo
Ecrit par Farida IB
Noémie.....
*** Flashback Avril ***
Toc Toc.
Debbie : Noé t'es là ?
Moi : mmh.
Elle ouvre la porte et entre.
Debbie : ça va ?
Moi (sans décrocher les yeux de mon cahier) : ouais.
C'est en sentant son regard insistant sur moi que je finis par relever la tête.
Debbie : tu es sûre ?
Moi soupirant : ouais ça va Debbie.
Debbie (me regardant d'un air suspicieux) : et pourquoi tu t'enfermes tout le temps ?
Moi : les révisions.
Elle se penche sur la table d'étude en posant ses bras allongés dessus et se mets à me dévisager. Je retourne à mes occupations sans lui prêter attention. Sauf qu'au bout d'un moment, je craque encore que connaissant ma sœur, elle ne va pas me lâcher tant qu'elle n'aura pas exprimé le fond de sa pensée.
Moi : quoi ?
Debbie : je te trouve bizarre depuis un moment.
Moi fuyant son regard : bizarre de quoi ?
Debbie : à toi de me le dire, tu as quel problème ?
Moi : aucun.
Debbie : et pourtant tu donnes l'impression de porter le poids du monde sur tes épaules. Tu dépéris à vu d'œil, tu t'enfermes tout le temps (pointant son doigt vers moi) et cet air torturé que tu affiches dès que tu penses qu'on ne te regarde pas, ou sinon tu as l'air dans les vapes. Tout le temps le nez dans tes cahiers, tu ne te divertis même plus. C'est à peine que tu touches à tes assiettes. Alors ma question Noémie qu'est-ce que tu as ?
Moi : je n'ai rien. Je révise, c'est tout. Le bac approche à grand pas.
Brrr brrr.
Je déglutis et elle me lance un regard appuyé.
Debbie : les révisions inh ?
Moi exaspérée : mais puisque je te le dis ! Tu es la même à te plaindre que je ne prends pas mes études au sérieux, maintenant que c'est le cas, tu t'en plains encore.
Debbie : je veux que tu aies ton bac oui, mais pas au point de te surmener. On est samedi, sort de cette chambre. Va respirer l'air frais de la plage, ça te fera du bien. Tu voulais la moto, tu l'as, mais tu ne l'utilises jamais.
Brrr brrr
Moi lorgnant mon téléphone : pas envie.
Debbie ton ferme : ce n'était pas une suggestion.
Moi pour couper court : je le ferai.
Debbie : j'y veillerai personnellement et au fait, décroche les appels de grand-maman.
Elle tourne les talons et s'en va. J'hésite un moment à prendre mon téléphone qui n'arrête pas de vibrer. Je n'ose même pas le toucher, je n'ose pas lire les messages de ce cancre. Je me lève et commence à faire des va-et-vient entre la table d'études et le lit en me mordant le doigt par moments. Ma tête chauffe à un point et mon cœur tambourine à vive allure. Au moindre bruit, à la moindre vibration de mon téléphone, je sursaute. Je ne peux pas me déconnecter ou mieux couper mon téléphone parce que ce fou est capable de mettre ses menaces à exécution. Je vais me coucher sur le lit et me replie sur moi-même. Des larmes de désarroi finissent par sortir toutes seules. Ça ne s'arrêtait plus. Je me suis vidée un bon coup avant que le sommeil ne m'emporte. Je me suis réveillée par la sonnerie de mon téléphone, c'est lui. C'est toute tremblante que je décroche et dis d'une voix pâteuse.
Moi : allô.
Wanda martelant : tu te fous de moi ?
Moi la petite voix : non
Wanda : donc tu fais exprès d'ignorer mes messages depuis le matin ?
Moi : je je dormais.
Wanda rire sarcastique : tu dors ? Tu as le temps de dormir pendant que j'ai le ventre vide Noémie ? Mon transfert devait arriver depuis 10 h et là, il est 15 h. Tu veux vraiment que je m'énerve ?
Moi en larmes : je suis désolée, je n'ai pas trouvé les sous.
Wanda : souffre donc de voir tes photos nues sur Internet. Ton joli petit cu en fera baver plus d'un. (ton rêveur) Le max que je vais me faire sur Pornhub avec tes vidéos coquines. Je te laisse définir les prix. Fais un bon prix parce que toi ma jolie, tu as du potentiel. Tu devrais te lancer dans la pornographie.
Moi tétanisée : non s'il te plaît, on peut trouver un arrangement. On est samedi. Lundi, tu l'auras tes sous.
Wanda ton menaçant : ça vient de doubler.
Moi éclatant en sanglots : d'accord, tu l'auras.
Wanda : Nono_La_Diva, pourquoi tu pleures ? Je t'ai frappé ?
Moi : non
Wanda tonnant : essuie-moi ses larmes.
Je m'exécute comme s'il était devant moi.
Wanda : je veux une nouvelle vidéo et tu dois bien me montrer ton visage, pas la connerie que tu m'as envoyé hier. Je veux que tu te défonces avec la bouteille. Tu as toujours tes concombres ?
Moi : oui
Wanda : utilise les deux, le plus gros han.
Moi essuyant mes larmes : d'accord.
Wanda : et je veux te voir sourire jusqu'à l'oreille, tu tournes bien les reins bébé.
Moi : hum
Wanda : je n'ai rien entendu.
Moi : d'accord ok.
Wanda : tu as dix minutes bébé.
Clic.
C'est toute tremblante que je vais fermer la porte et me plie à ses ordres. Je sors un sac de maquillage que je cache dans mes dessous et l'ouvre pour sortir les bêtises qu'il me fait acheter. Je pose le concombre, la bouteille, du lubrifiant sur le lit et place le téléphone sur la table une fois camera en marche, je me positionne sur le bon angle. Je me mets à toucher chaque arpent de mon corps accompagné d'une danse sensuelle avant de passer aux choses sérieuses. Comme à chaque fois, malgré tout, j'y prends plaisir et c'est sans pouvoir me contrôler que je gémis et que je m'y mets à fond. Ça a commencé par un bonsoir en octobre dernier. Je traînais sur Facebook prise d'insomnie. Puis peu à peu, nous avons fait plus d'amples connaissances, je dois dire plus sur moi. Je sais de lui qu'il est Guinéen et qu'il vit à Conakry. C'est tout ce que je sais. Oui, j'ai été bête, immature, et je ne sais quoi encore. Wanda m'avait mis des paillettes dans les yeux. Il faut dire que c'est un as des mots. Durant deux mois, il me gardait éveillée à me dire des douceurs. Des paroles que Thomas ne pourra jamais me sortir même avec un doctorat en poésie. J'ai vite fait de l'éjecter de ma vie. Au bout de deux mois de relation à distance, virtuelle pour être plus précise, j'étais résolument dingue de Wanda.
Nous parlions de tout sans tabou, notamment du sexe. Toutes nos conversations tournaient d'ailleurs autour. Un soir, il m'a envoyé sa queue et m'a demandé de faire de même avec mon minou. C'est sans hésiter que je le lui ai envoyé, j'ai même chassé Sophie et Caroline de la chambre ce jour là pour avoir de l'intimité. Deux jours avant, nous avions parié sur le fait que j'étais une petite fille pudique, rétrograde, une has been quoi. Alors pour lui prouver que je suis de la new school, dans la mouvance, j'ai envoyé la photo sans hésiter. Puis une après l'autre, nous avons évolués vers les vidéos hot. Il m'a induit à faire l'amour par visioconférence sur Skype. Pour me perfectionner, il m'envoyait des vidéos pornos, me donnait parfois des directives en direct. Je me suis déviergée toute seule avec une bouteille pendant qu'on était en appel vidéo. (éclatant en sanglots) J'ai tellement eu mal que j'ai décidé d'arrêter. Et c'est depuis lors que les menaces ont commencé. On est passé à une vidéo par jour et maintenant, il me force à lui verser une somme d'argent tous les mois. Je lui refilais mon argent de poche, mais ce n'était jamais assez pour lui. J'ai commencé par inventer des documents fictifs et comme Debbie ne rechigne pas lorsqu'il s'agit des études, elle donne sans poser des questions. Bientôt cinq mois que je suis enfermée dans ce train de vie sans pouvoir en sortir. Je ne peux pas me résoudre à en parler et surtout pas à Debbie, elle va me trucider. J'ai tellement peur que je ne dors plus, je ne mange plus. Dans trois mois, c'est le bac et cette histoire est en train de me bouffer la cervelle. Ma concentration à l'école en a pris un sacré coup. Du coup, mes notes du deuxième trimestre ont dégringolé. Si je fais celle qui étudie tout le temps, c'est pour ne pas éveiller des soupçons parce que la plupart du temps, je lis sans vraiment lire.
J'ai envoyé la vidéo à Wanda et me suis empressée de ranger mon arsenal puis je suis partie prendre une douche. Je suis revenue m'enfermer de nouveau pour recevoir l'appel vidéo de ce psychopathe. Il a aimé. Et pour me le démontrer, il a passé les trente minutes que l'appel a duré à se masturber tout en lisant la vidéo sur un autre téléphone et en criant combien je suis bonne, combien il rêve de me défoncer le cul. Toutes les cochonneries qui sortaient de sa bouche m'ont donné un haut-le-cœur. Je me suis précipitée dans la cours pour vider mon estomac. Mon bruit a alerté dada, mes frères et sœurs qui étaient dehors pendant tout ce temps. Sophie m'a apporté de l'eau pour me rincer le visage ensuite, ils m'ont tous suivi dans la chambre, même Etiam qui trottait sur ses deux pieds. Junior vient se coucher près de moi en me palpant le front, trop mignon cet enfant. Caroline part sur l'hypothèse d'une crise de paludisme et à Sophie de renchérir :
Sophie : elle est malade dada, il faut qu'elle aille à l'hôpital. Je vais appeler dagan.
Noémie : non ça va.
Dada ne pipait mot, elle est assise sur la chaise à m'observer intensément pendant des minutes alors que je l'évite du regard.
Dada les regardant : laissez moi seule avec Noémie.
Sophie porte Etiam en sortant et pousse Caroline qui traînait des pieds. Junior les suit simplement. J'évite toujours de regarder ma mère dans les yeux.
Dada : Noémie, tu es enceinte n'est-ce pas ?
Je me redresse toute tremblante.
Moi : je ne suis pas enceinte.
Dada : mieux tu me dis la vérité parce que si tu m'emmènes à te forcer la main, tes aïeux ne te reconnaîtront pas.
Moi en larmes : je ne suis pas enceinte dada. Je te jure, je ne connais même pas les hommes. (snif)
Dada me sondant : tu n'es pas enceinte.
Je hoche la tête.
Dada posément : Noé si tu l'es, dis-le-moi avant qu'il ne soit trop tard. Tu sais ce qui t'attend si ta sœur l'apprend.
Cette dernière m'appelle sur le moment.
Moi : c'est Debbie.
Dada : décroche, qu'est-ce que tu attends ?
Moi décrochant : allô
Debbie : lève-toi, tu vas à la Source de Vie. Je te rejoins là-bas.
Elle a raccroché sans m'avoir laissé le temps de placer un mot.
Moi (répondant au regard inquisiteur de dada) : elle veut que je me rende à la clinique.
Dada m'a suivi à la clinique après avoir donné des consignes à Sophie. Le docteur Luc m'a pris en charge sans attendre. Après consultation et une prise de sang, on me place sous perfusion. Le diagnostic est tombé le lendemain sur une fièvre typhoïde. J'ai donc passé quatre autres jours à l'hôpital sans téléphone pour un repos total. Debbie et Armel m'ont veillé pendant les quatre jours durant lesquels j'ai été très choyé au point où dès mon retour à la maison dada s'est amenée avec ses combines.
Moi pas d'accord : tu ne trouves pas que tu exagères parfois ?
Dada faisant la moue : je n'exagère rien ! Le fils Elli lui donne, il faut que nous en profitions aussi.
Moi : dans ce cas demande lui directement.
Dada : tu sais bien qu'elle ne me donnera rien si je lui demande.
Moi : et avec raison ! Dada il faut avoir pitié d'elle parfois. Elle n'a pas de repos, elle est partout à la fois parce que vous avez démissionné papa et toi.
Dada : Noémie contrôle ton langage.
Moi : non dada tu vas m'écouter parce que j'en ai franchement marre de vous voir vous moquer d'elle. Elle n'est en rien obligé de faire tout ça, mais elle le fait quand même pour nous. Et tu es là peinarde, tu ne fais rien pour l'aider. Au contraire, tu ne fais que lui augmenter les soucis. Le commerce que tu as choisi toi-même de faire, tu es incapable de le mener à bout. Elle te donne de l'argent, tu remets à papa. Elle t'en redonne, tu trouves que ce n'est pas assez. Tu passes par moi, Caroline même Junior pour l'extorquer. À quel moment tu te remets en question ? À quel moment tu redeviens normale, tu prends tes responsabilités, vous prenez vos responsabilités ? À quel moment tu prends conscience que tu es une mauvaise mère, que tu es toxique pour elle, pour nous ?
Dada piquée : jeune fille ne m'insulte pas.
Moi : tu sais, tu sais bien que c'est la stricte vérité. Tu t'en es pris à nous quand papa est parti, insultes, bastons, tout. Tu as décrété que tu ne t'occupes plus de nous sachant que la présence de papa était égale à son absence. Elle a lavé les bols, nettoyer les crasses, elle s'est promenée partout où faire de l'argent se peut et tu étais la première à jouir du fruit de ses labeurs. Tu la malmenais à ta guise et tu continues de le faire. Quand les mères des autres se lèvent le matin pour leurs enfants. Quand leur souci premier, c'est leur enfant mari ou pas mari.
Dada hurlant : Noémie ça suffit ! Ce n'est pas toi dont il s'agit, mais de Deborah. D'aussi loin que je me souvienne, je ne lui ai jamais demandé de le faire. C'est son choix personnel et elle l'assume très bien. Elle n'a pas besoin de mon aide.
Je fronce les sourcils et la regarde abasourdie, dégoûtée, lasse.
Moi : tu es pathétique dada, je pense même que tu as un problème qui ne dit pas son nom. Je ne demande rien à Debbie. Comme Sophie, je refuse désormais de rentrer dans tes combines. Débrouilles-toi comme tu peux !
Elle sort de la chambre avec les nerfs à vif. Elle n'a rien à dire pour sa défense, rien ! Je rumine une trentaine de minutes avant de revenir à mes problèmes. Sans mentir, les quatre jours sans téléphone m'ont fait énormément du bien et en ce moment je n'ai aucune envie de le toucher. En même temps, j'appréhende ce qui m'attends. Je finis par le faire, aucune trace de Wanda et nos messages se sont volatilisés comme par enchantement. Je me mets à tourner en rond dans la chambre en mode panique. Je tente de l'appeler plusieurs fois sans succès. Tous ses comptes avaient disparu de la circulation donc pas moyen de savoir s'il a agi ou pas. L'angoisse, la peur ont sitôt ressurgi. J'ai replongé dans la déprime et ça ne s'est pas arrangé le soir quand Debbie est rentrée du boulot.
Debbie : maintenant que tu es sortie d'hôpital, on va pouvoir bien parler.
Moi le cœur battant : ....
Debbie : je vais dans ton école pour justifier ton absence, et qu'est-ce j'apprends ? Qu'est-ce j'apprends Noémie ? Que tu as eu 2,78 comme moyenne trimestrielle. 2 Noémie, 2 ? Pourtant, tu as le nez fourré dans tes notes matin midi soir. Tu as un répétiteur. Tu participes au cours de renforcements à l'école. C'est quoi le problème ? À quelques mois du bac tu me ramènes 2 alors qu'au premier trimestres tu as eu 13 ? Il y a quelque chose qui se passe Noémie, quelque chose que tu ne me dis pas, mais que tu vas me dire à l'instant même parce que je ne vais pas continuer à te regarder et faire comme si je ne sais pas que quelque chose te tracasse.
Moi : pleurs* il n'y a rien.
Debbie avec véhémence : jamais, ne me dis pas qu'il n'y a rien. (se radoucissant) Je ne vais pas t'engueuler, je ne crierai pas. Dis-moi simplement ce qui ne va pas.
Moi : tout va bien.
Debbie : tout va bien, Noémie ?
Oui de la tête. Elle m'a reposé la question deux fois de suite, je suis restée à hocher la tête.
Debbie : bien ! Si tout va bien, bien ! Tu t'arranges comme tu peux pour me l'avoir ce bac si tu n'as pas envie de te retrouver au village.
Elle sort de la chambre comme elle est venue, en mode ouragan. Je me suis couchée à califourchon avant de pleurer un bon coup.
Les semaines qui ont suivi mon retour d'hôpital ont été les plus pénibles. Je n'avais toujours pas de nouvelles de Wanda et Debbie me stressait de plus en plus. Je suis restée de marbre jusqu'au soir où elle m'a convoqué dans sa chambre. Nous étions à six semaines du bac.
Debbie : Noémie, il faut qu'on parle.
Moi levant les yeux sur elle : euh, j'ai fait quelque chose ?
Debbie : tu le sauras assez tôt, suis moi.
Elle me conduit dans sa chambre et ferme la porte à clé. Elle m'a demandé de m'asseoir sur le lit. Pendant ce temps, elle a tiré une chaise dans le coin, s'est assise et me regarde bien en face.
Debbie : tu peux me dire qui est Wanda ?
Je sursaute, tétanisée.
Debbie : regarde moi quand je te parle.
Je lève les yeux sur elle en me triturant les doigts.
Debbie : qui est Wanda Noémie ?
Moi : euh
Debbie ton dur : il n'y a pas de euh qui tienne. Ça ne sert à rien non plus de me faire ta crise de larmes, tu me dis toute la vérité.
Moi : je ne le connais pas, nous avons fait connaissance sur Facebook.
Debbie : c'est qui, il vit où ? Il fait quoi dans la vie ? Il est qui pour toi ? C'est à ce genre de réponses auxquelles je m'attends.
Moi : c'est un Guinéen, il vit à Conakry. Comme je l'ai dit, on s'est rencontré sur Facebook, il m'a dit qu'il est un informaticien.
Debbie : et il est qui pour toi ?
Moi : personne.
Debbie : donc il n'est pas ton petit ami.
Moi secouant la tête : non.
Debbie : ça explique pourquoi tu lui envoies des nudes et des vidéos à caractère pornographique, de l'argent ?
Moi faisant l'étonnée : hein ?
Debbie criant : tu arrêtes de me prendre pour une conne Noémie. Tu me dis tout où je t'arrache les mots par la force.
Je me suis mise à tout lui raconter telle une automate, à aucun moment elle n'est intervenue. Elle me regarde juste avec du mépris mêlée à la déception. C'est toute honteuse et penaude que je me mets à bégayer à un moment.
Moi : dis, s'il, euh dis quelque chose. S'il te plaît.
Debbie : je n'ai rien à te dire Noémie, je laisse ta conscience s'en charger. Si je t'ai appelé, c'est pour te dire que j'ai réglé cette histoire depuis belle lurette. S'il fallait attendre que tu te décides à parler un jour, on aurait vécu le remix de l'histoire du viol alors qu'il serait trop tard. Ton Wanda a en pris pour une année de prison avec amende et interdiction à vie de s'approcher de toi. Les images et vidéos ont été effacées. Tu remercieras Armel, Bradley et son ami Bilal, leur oncle, mon collègue Paterson pour ça parce que si ça ne tenait qu'à moi, je t'aurai laissé te démerder toute seule comme tu voulais le faire. D'ailleurs, je te le dis uniquement à cause de ton examen et tu as intérêt à le décrocher ce bac.
Moi la tête baissée : d'accord.
Debbie : j'en ai fini avec toi.
Moi : mer-merci.
Debbie : je t'ai cité les noms de ceux qu'il faut remercier.
Moi me jetant à ses pieds : je suis désolée.
Elle retire ses pieds et se lève pour sortir de la chambre en prenant sa serviette et sa savonnière au passage. Elle ouvre la porte, tiens le loquet et se tourne vers moi.
Debbie : soit dit en passant, il s'appelle Henri Konaté, 28 ans. Père de famille et chômeur de son État. Il vit grâce aux idiotes comme toi.
Elle va dans la douche. Je me suis mise à tourner en rond dans la chambre. A la sortie de la douche, elle se met en pyjama et se couche sans m'accorder un seul regard. J'avoue que je préfère qu'elle ne le fasse pas parce qu'à chaque fois que je croise ce regard rempli de déception, mon cœur se brise. Les jours suivants, j'ai intégré divers groupes de travail, je me suis donnée à fond et mes efforts ont payé. Cependant, la culpabilité, la honte et les remords ont aussi fini de me hanter depuis lors. D'autant plus que Debbie est restée froide avec moi pendant ce temps. Même d'avoir eu le bac avec brio n'a rien changé à cela. Elle s'efforce à me parler oui, mais je me sens toujours aussi mal vis-à-vis d'elle et je ne pense pas arriver à surmonter cela un jour.
*** Present day ***
Debbie....
Moi téléphone : non !
Armel : écoute au moins ce que j'ai à te dire.
Moi : ce sera toujours non Armel. Je ne remettrai plus aucun sous à cette famille.
Armel : ta famille.
Moi : de la fesse gauche ! Est-ce qu'il en a tenu compte lui ? Quand il violait Caroline, sodomisait un bébé de trois ans est-ce qu'il s'est rappelé qu'il y a le sang quelque part qui nous lie ?
Armel : il n'est pas question de lui. Je parle de sa femme, ses enfants qui n'ont rien fait.
Moi : il n'a pas pensé à eux avant d'agir comme un porc, ce n'est pas moi qui vais me tracasser à sa place. D'ailleurs, il n'est pas détenu en prison pour mes frères seuls. Il y a une panoplie de familles qui s'est levée comme un seul homme pour témoigner, qu'elle aille faire le porte-à-porte chez eux. J'ai passé mon tour.
Armel : au moins, qu'on l'aide à avoir une activité ou lui trouver un travail.
Moi rire nerveuse : quand tu vois Angèle, sa trempe travaille ? Tu vois Angèle se casser les ongles ? Ou tu vois Angèle se lever tous les matins pour se plier aux ordres d'un tel ? 300.000 pas même deux mois elles reviennent quémander, parce qu'elles ont déjà trouvé leur machine à sous ! Tout ça, c'est toi. J'ai senti l'arnaque de loin, mais tu n'en as fait qu'à ta tête. Je dis qu'elle n'aura rien, rien de rien.
Il souffle. Il n'a qu'à bien souffler.
Armel : tu sais qu'elle ne te lâchera pas tant qu'elle n'aura pas ce qu'elle veut.
Moi : je sais me défendre, la rue ça me connaît.
Armel : je n'en doute pas (rire) c'était à combien de volts ?
Moi amusée : 400.000 par là, ma main siffle encore jusque-là.
Armel : mais ma petite, tu es quand même culottée inh. Ta grande sœur ?
Moi souriant : laisse ça comme ça. C'était sous le coup la colère.
Armel : donc si je t'énerve, tu me gifles aussi ? Tu vas me regarder droit dans les yeux et me gifler Diapena ?
Moi : que j'ai peur de toi ?
Armel faisant la grosse voix : tu n'as pas peur de moi inh ?
J'ai éclaté de rire.
Moi plié de rire : tu es trop bête bé.
Armel : je le prends comme un compliment. Bon maintenant que la fiancée de l'homme vert a disparu et que j'ai retrouvé ma copine, on peut parler d'un autre volet du problème ?
Moi : lol vas-y.
Armel : quand prévois-tu partir à Cinkassé ?
Moi : la semaine prochaine sûrement. Enfin, je dois consulter tata Mimi d'abord. Elle revient de son congrès dimanche. Pourquoi tu demandes ?
Armel : pour demander une permission également.
Moi plissant les yeux : une permission pour ?
Armel : je viens avec toi, je ne vais pas te laisser partir seule pour qu'on vienne m'appeler que tu as eu un accident, que je suis veuf à 21 ans.
Moi riant dépassée : non mais lol, tu as mangé quoi ce matin pour être si drôle ?
Armel : mais toi non ! La meilleure nourriture, j'avoue.
Frisson.
Armel : tu es trop fan de moi, la chair de poule.
Moi : si ça peut te faire plaisir.
Armel rire : arrête de faire genre. Bon pour revenir à notre voyage, préviens moi lorsque tu seras fixée sur le jour.
Moi pas pour : je peux y aller toute seule Mel.
Armel : tu seras sous ma protection mi amor.
Moi : est-ce que j'ai le choix de refuser ?
Armel : you know better than that ! (tu sais bien que non)
Moi : on en reparlera ! (la petite voix) Babe.
Armel au tac : il faut que je débourse combien ?
Moi : rire* rien, pour cette fois seulement.
Armel : lol dis toujours.
Moi : j'ai invité Atayi ce soir pour l'anniversaire qu'on fête ça ne finit pas.
Armel boudant : j'avais d'autres plans pour nous ce soir.
Moi : on reporte juste. Ce soir, j'ai envie de sortir.
Armel : est-ce que je peux venir avec vous ?
Moi : nop, c'est un after entre collègues.
Armel : donc tu me laisses seul avec Madame Elli.
Moi amusée : mais c'est ta mère non ?
Armel : hmm.
Moi : est-ce que moi, je n'ai pas le meilleur chéri au monde ?
Armel : tout flatteur vit au dépens de celui qui l'écoute.
Moi : lol à toute. Bisou mon chéri.
Armel : tu gardes ça au chaud pour ce soir lorsque je viendrai te chercher.
Moi voix sexy : sans faute.
Clic !
Je pose le téléphone sur la table pensive. Je suis réticente à l'idée que Mel veuille me suivre au village parce que l'histoire que grand-maman veuille "assurer mes arrières" flotte toujours en l'air. Elle me le rappelle inlassablement. J'ai beau lui dire que ma relation est bien comme elle est, que le type me colle déjà trop, elle ne veut rien entendre. Je ne peux pas l'y emmener, non. Ce serait l'envoyer direct dans la gueule du loup. Grand-maman a plus d'un tour dans son sac croyez moi. Je finis par m'adosser contre mon siège, la tête reposant sur le haut du dossier. Autant dire que je n'ai pas la tête à travailler ce matin. Cette cruche m'a tout simplement gâcher la journée. Je décide d'aller me défouler sur Atayi. Je mets donc le poste en veille et sors du bureau pour le sien. Non mais sérieux, je commence à douter de son statut d'homme. Il n'y a que lui pour rapporter mon clash avec Angèle à Armel. Même pas vingt minutes après qu'il m'ait laissé dans mon bureau après m'avoir servi un verre d'eau que j'ai reçu le coup de fil d'Armel. Moi je voulais le tenir à l'écart de cette histoire justement pour qu'il ne se prenne à jouer au bon samaritain. En tout cas, je vais bien l'avertir, Angèle ne me prendra pas pour sa machine à sous !
C'est d'un pas pressé que je traverse l'aile gauche du bâtiment. Tout le monde semblait joyeux à mon passage, autant de sourire que de regards admiratifs. Je fronce le visage, intriguée. Qu'est-ce qu'ils ont eux ?
Moi (m'introduisant dans le bureau sans m'énoncer) : dis-moi Atayi,
Il lève un sourcil dans ma direction.
Paterson : pardon
Moi : Armel, te paye-t-il pour lui raconter tout ce qui se passe ici ?
Paterson se levant : pardon Madame.
Il a un mouvement de recul lorsque j'arrive devant lui.
Moi fronçant les sourcils : et là qu'est-ce qui t'arrive ?
Paterson cachant son visage : j'ai peur de recevoir une gifle.
Moi fronçant davantage les sourcils : tu te fous de moi ?
Paterson voix de détresse : pardon pardon, ne me gifle pas s'il te plaît.
Moi soupire frustrée : tu vas arrêter de te foutre de ma gueule ? Tchhrrrrr.
Il rigole.
Moi : Paterson je ne suis pas en train de rigoler, tu ne vas pas relayer tout ce qui passe ici à Armel à chaque fois.
Paterson : ce ne sont pas toutes les informations que je lui relaie, seulement celles qui sont importantes.
Moi : en quoi la folie d'Angèle nécessité de l'intérêt ?
Paterson : je ne l'ai pas fait pour elle, mais pour toi en ce sens qu'il est le seul à pouvoir te redonner le sourire. Et j'ai vu juste, la fiancée de Hulk a disparu.
Moi me laissant tomber sur un siège : vous vous êtes même passer le mot. Toi ce n'est pas la peine quoi, un rapporteur interespèce !
Paterson sourire en coin en haussant l'épaule : en tout cas ma petite, tu as forcé l'admiration ce matin. Ça ne parle que de toi dans tout l'immeuble.
Moi : c'est pour ça qu'ils sont aussi bizarres ? (oui de la tête) Mieux d'eux ! On sort toujours ce soir ?
Paterson : oui et c'est moi qui invite.
Moi : si tu insistes.
Paterson : lol ! En parlant de ça, ça me fera plaisir que Noémie soit de la partie. Ma chérie me manque trop.
Moi soupirant : elle est toujours dans sa bulle.
Paterson : laisse-moi faire, tu me passes son numéro ?
Moi : Atayi ne va pas me détourner l'enfant.
Paterson riant : tu es folle (téléphone en main) je t'écoute.
Moi : 90 91....
Il lance l'appel aussitôt.
Noémie....
Dring Dring
Sophie me regardant : tu décroches ?
Je hausse les épaules.
Sophie : tant pis, je vais le faire.
Moi : Sophie non !
Sophie imitant ma voix : allô mademoiselle Noémie Diapena à l'appareil, que puis-je pour vous ?
Je bouscule la tête amusée.
Voix de Debbie : Sophie pourquoi tu décroches le téléphone de Noémie ?
Sophie discrète : ow ow, la mama est dans la place.
Je souris seulement.
Voix : ce n'est pas Noémie ?
Sophie joyeuse : tonton Paterson !
Debbie lui répondant : c'est Sophie.
Paterson : ah d'accord, bonjour ma beauté.
Le sourire qu'elle a fait mdr.
Sophie : bonjour tonton Paterson.
Debbie : et pourquoi tu t'excites ? Où est Noémie ?
On se regarde Sophie et moi, ça sent le mauvais poil.
Moi : je suis là.
Paterson : la chérie de mon cœur.
Moi souriant : bonjour tonton Paterson.
Paterson : c'est Pat ou Paterson, tonton ça fait vieux.
Sophie glousse.
Paterson : alors la chérie de mon cœur, j'attends toujours ton ok pour sauter les champagnes.
Moi : mais mon bac est vieux d'un mois.
Paterson : tant qu'on ne l'arrose pas, c'est comme si tu ne l'avais pas eu.
Moi : je vois le topo.
Paterson : ce soir alors, à 20 h.
Moi : oh ?
Sophie me soufflant : dis oui, dis oui, dis oui.
Paterson : on sort en couple, on va faire des jaloux.
Debbie : oui, c'est ça !
Paterson : alors la chérie de mon cœur ?
Moi simplement : ok.
Debbie ton interloqué : hein ok ?
Paterson : oui, elle a dit ok il y a quoi ?
Debbie : Noémie donc c'est comme ça ? Ça fait un mois que tu rejettes toutes mes propositions de te faire sortir, mais lui, tu acceptes d'un coup.
Paterson : qu'est-ce que je disais déjà ? Les jaloux vont...
Sophie et moi à l'unisson : maigrir !!!
Debbie le ton boudeur : regarde moi leurs têtes là-bas.
Paterson : ma petite, ta vieillesse ne sera pas de tout repos.
Moi parlant vite : vraiment !
Debbie s'offusquant : qui a parlé ?
L'appel se coupe et je regarde Sophie genre " sauver pas le gong". Celle-ci se lève d'un bond.
Sophie : faut qu'on te trouve une tenue, je vais m'occuper de tes ongles. Il te faut un massage complet aussi (soulevant mon menton) tu as des cernes beurk. Allons voir l'esthéticienne du quartier une bonne fois. (tapant des mains excitée) Ça tombe bien, j'ai lu qu'elle est en promo. Un soin complet payé, des produits de soins offerts.
Moi : ho ho ho Sophie calme toi, ce n'est pas un dîner chez la reine. Tu sors même tout ça d'où ?
Sophie : bah l'esthétique, c'est ma passion.
Moi : et les dessins ?
Sophie : mon autre passion plus que les mangas.
Moi dépassée : Diapena tu m'étonnes.
Sophie me jetant un drôle de regard : enfin on va pouvoir parler les bonnes choses.
Je ris sans vraiment comprendre. Ensuite, je n'ai rien compris, elle est venue me sauter au cou et me serre à l'étouffée.
Moi : mais mais tu m'étouffes.
Sophie : je suis trop contente que ma sista aies retrouvé le sourire.
Moi la fixant les yeux plissés : rhoo pourquoi tu pleures ?
Sophie : tu n'imagines pas ma joie ! Le quotidien n'était pas pareil sans ta touche de bonne humeur, nos Confidences sur les oreillers. Mon niveau est trop élevé pour Caroline.
Là, j'éclate de rire. Cette petite m'étonnera toujours.
Moi : tu as Marianne non ?
Sophie : ce n'est pas la même chose, il y a des choses que je ne peux dire qu'à mes sistas. Surtout que vous, vous me donner des directives, des conseils. Car vous avez déjà vu ce que nous voyons actuellement. Elle comme moi, on se suit seulement dans nos bêtises.
Moi blasée : ma grand-mère Sophie !
Sophie s'égosillant : arrière grand-mère s'il te plaît !
On se marre toutes les deux.
Moi : je t'aime trop toi, viens là.
On se fait un gros câlin.
Sophie : je t'aime aussi gros comme ça, allez lève-toi, on se prépare.
Moi : c'est 20 h Sophie.
Elle veut parler lorsqu'un entend un brouhaha à l'extérieur de la maison. Nous avons foncé aussi vite que nous avons pu. Angèle était en train de s'échauffer. Nos voisins pointus là sont déjà au taquet.
Dada : arrête de crier et explique moi doucement ce qui se passe.
Angèle : il se passe que ta fille a osé me gifler ! Elle a osé m'humilier moi Dotsè devant ses collègues de bureau.
Dada les yeux plissés : Deborah ?
Angèle hautaine : qui d'autre veux tu que ce soit ?
Dada : je ne comprends pas, comment Deborah peut te gifler toi Angèle. On parle bien de ma fille ?
Angèle : tu parles que tu ne connais pas ta fille qui ne se prend jamais pour de la merde ? Ta fille et son air suffisant, toujours à regarder les gens de haut. Une petite fille impolie qui se donne des airs de grande parce qu'elle se croit déjà arrivée. Elle se tient gaillardement crier devant tout le monde que c'est elle qui s'occupe de sa famille.
Moi intervenant : et c'est le cas !
Angèle me fixant avec dédain : toi qui t'a sonné ? En voilà une autre, non mais vous les filles Diapena vous vous prenez même pour qui souvent ? (se tournant vers dada) Je suis venue t'avertir parce que la prochaine fois, je n'hésiterai pas à lui foutre une bonne raclée à ta Deborah. C'est par respect pour toi, pour l'aide que tu nous apportes depuis que papa est en prison que je me suis retenue de lui donner la raclée qu'elle mérite. Dis lui bien que j'attends mon argent, je lui donne une semaine pas plus.
Elle est partie comme si elle avait le feu aux fesses, nous étions tous bleus bleus à nous regarder.
Moi : donc Deborah a giflé Angèle ? Non mais la sœur, rire* le ndem. Il faut que je l'appelle.
Dada : oui fais le parce que je n'ai rien compris à ce qu'elle racontait.
Ils me suivent tous, je dis même Etiam.
Moi : mais dada tes parentes-là aussi, elles ont toujours quelque chose. (plaçant le téléphone à l'oreille) Elle veut quel argent encore ? (activant le haut-parleur) Allô la sis, Angèle est passée toute à l'heure...
Debbie me rabrouant : si tu m'appelles pour me parler d'Angèle mieux tu raccroches parce que je ne suis pas d'humeur à entendre des conneries.
Dada : Debbie dis nous simplement ce qui s'est passé, pourquoi Angèle vient te menacer ?
Debbie rire dérisoire : tiens donc, elle me menace de quoi ?
Moi : si je reprends ses mots, tu lui donnes son argent dans une semaine ou elle te fout une bonne baffe.
Sophie rectifiant : raclée.
Debbie : j'attends de voir ça tchip. Mes bébés sont là ?
Caroline/Junior : oui.
Je leur laisse le téléphone.
Dada soupirant : on ne finira donc jamais avec cette histoire. Ta sœur n'écoute jamais quand on lui parle. Laisse Yema...
Moi l'interrompant : de laisser Yema là où il est. (lui faisant les yeux doux) Je veux 5 000 dada.
Dada renfrognant la mine : tu demandes 5 000 à qui ? À la mauvaise mère ? La mère toxique ? Va demander à ta mère Debbie !
Moi : oh, tu es encore sur cette histoire ? C'était la fièvre typhoïde, pas moi.
Elle me toise en tchipant et sort en trombe de la chambre.
Sophie (essuyant une sueur fictive sur son front) : ouf, nous l'avons échappé bel.
Moi : je te dis, le bruit avec cette histoire de Yema. Bon ma petite, je suis à toi.
Sophie souriant : top.