Leçon de vie.
Ecrit par Saria
***Abomey-Calavi***
***Arconville***
***Chez les TONI***
***Maman Agnès***
Je venais de mettre Sitou dans son berceau : je le masse et lui fait faire de la gymnastique qu’avant la fin du bain il dort. Le problème, il faut que dès qu’il ouvre l’œil le sein de sa mère ne soit pas loin ou un biberon qu’il va descendre. Sinon…il ameute tout le quartier…Un vrai petit homme.
Moi : Kafu ? Viens t’asseoir ici à côté de moi.
Elle obéit sans un mot. Depuis notre dernière discussion elle ne sait pas à quelle sauce je vais la manger.
-Je suis quoi pour toi ?
Kafui : Ma mère
Moi : Tu es sûre ?!
Kafui : Maman c’est quelle question ça ? Tu es ma maman !
Moi : Je demande parce que je ne comprends pas que tu gères d’aussi gros problèmes dans le silence le plus absolu.
Kafui : Pour ma belle-mère…J’espérais que ça s’améliorerait et je ne voulais pas gâcher vos relations…Je ne voulais pas aussi que Guy en pâtisse.
Moi : L’enfant qu’il a eu ? Le divorce ?
Kafui : Tu…Enfin papa et toi vous vous comprenez tellement…
Moi : Tu as pensé que je ne te comprendrais pas ?!
Elle hoche silencieusement la tête. Je la prends contre moi et la serre fort. Elle commence alors à pleurer. Je suis triste qu’elle ait eu à traverser ça seule.
-Tu ne serais jamais allée au tribunal si j’avais su…On aurait géré autrement…
Kafui : Tu m’as aussi dit que je ne devrais pas me plaindre
tout le temps, que je devais affronter les choses seule comme une grande fille.
Moi : C'est vrai...Mais pas les grosses crises mon cœur…Parfois il faut demander l’aide de grandes personnes ! Des gens qui ont déjà vu et vécues avant toi !
On parle encore un peu elle et moi, puis elle se calme. La journée passe tranquillement, le soir quand Guy est de passage, j’aborde un autre sujet non moins sensible.
Moi : Guy ?
Guy : Oui maman
Moi : Je n’ai pas encore vu ta maman depuis que je suis là…ça va faire dix jours quand-même ?!
Guy : Euh…en fait je lui ai dit…hum elle a quelques ennuis de santé en ce moment
Kafui : Dis plutôt qu’elle me méprise trop pour venir nous voir oui !
Me tournant vers Kafui
Moi : Tu t’appelles Guy maintenant ? Parle-moi toor mon garçon!
Guy : C’est à peu près tout maman
Moi : Ok…Demain en allant au boulot tu pourrais déposer Kafui et le bébé chez elle ? Ils vont passer la journéelà-bas.
Guy : Euh…Ok maman
Moi : Merci mon grand à 7 h déjà ils seront prêts.
***Kafui***
Je tremblais de colère, non mais oh maman exagère ! Quelle est la partie de je ne veux plus rien avoir à faire avec mamie elle n’a pas compris ?! Je la rattrape un peu avant qu’elle n’entre dans la chambre qu’elle occupe depuis son arrivée.
Moi : Maman ! Je ne suis pas d’accord ! Je ne veux pas aller là-bas ! C’est à elle de venir nous voir ! Si Dieu lui a foutu la honte en me donnant un garçon moi « l’accoucheuse de filles » et…
Maman : Ouvre ta main
Moi : Mais…
Maman : j’ai dit ouvre ta main !
J’ouvre la paume de ma main et…ma mère crache dedans…Je vous jure. Je lève un regard choqué vers elle.
-c’est de la salive…elle est de quelle couleur ?
Moi : Blanche
Maman : Ok…J’ai du sang blanc alors ?
Moi : N…Non !
Maman : Ma fille on a beau avoir du sang rouge qui coule dans nos veines lorsqu’on crache la salive est de couleur blanche ! Tu en veux à Huguette pourtant l’enfant que tu as mis au monde qu’elle le veuille ou pas, que tu le veuilles ou pas c’est son petit-fils ! Lui n’a rien demandé et il devra avoir les bénédictions de sa grand-mère ! Il fait partie du clan des TONI ! Tu dois dépasser ta rancœur pour le bien de ton fils !
Moi (boudant) : C’est humiliant et elle va me faire des bénédictions qui ne sont pas sincères.
Maman : Tu te trompes chérie…La parole est sacrée et
même quand ton pire ennemi ouvre sa bouche pour te faire des bénédictions,
elles sont accordées, validées…S’il ressent autre chose se sont ses oignons. Le
bras de fer que tu engages avec Huguette l’arrange, et ça dessert Guy qui reste son fils. Donc tu me feras le plaisir d'y aller et te comporter bien!
Moi :…
***Lendemain matin***
A 7h j’étais propre mon bébé aussi. Le trajet jusque chez mamie se fait en silence, tellement je suis tendue ! A pareil moment, la circulation est plus ou moins fluide. On arrive, Guy passe sa main sur ma nuque et je le regarde.
Guy : Une journée s’est vite passée…Ne fait surtout pas son jeu.
La gorge nouée je hoche la tête, puis on descend avec nos bagages. J’attends sagement qu’il vienne sonner.
C’est mamie même qui vient ouvrir, quand elle nous voit elle tique et recule d’un pas. Je fais comme maman m’a dit je la salue poliment et lui met le bébé dans les bras.
Elle prend le nouveau-né contre elle et on avance dans la maison. On s’installe au salon, elle ôte le bonnet du bébé alors son expression change. Je l’entends murmurer, en posant une main sur sa bouche :
Mamie : Oh mon Dieu !
Moi je la regarde avec un peu de méfiance. Elle se reprend assez vite et demande à sa femme de ménage de préparer la chambre d’amis pour nous installer. Après quelques minutes Guy nous laisse et s’en va.
Moi : Mamie en quoi puis-je aider la dada ?
Mamie : Rien merci…Je crois que le bébé se réveille là…il doit avoir faim.
Elle me le tend et je m’installe pour la tétée. Alors j’entends comme dans un rêve.
-Il est vraiment magnifique !
Moi : Merci…
Mamie : Comment l’avez-vous nommé ?
Moi : Sitou nin mahou et son père lui a donné Elijah.
Mamie : Il m’a ramené quarante ans en arrière. Le portrait craché de Guy bébé, j’ai ressenti la même émotion que quand j’ai découvert la frimousse de mon fils…Si tu veux je vais te montrer quelques photos tout à l’heure.
J’hallucine ! Je vous jure j’hallucine ! Mamie veut me montrer des photos ?! Ok mieux je me tais.
Dès que Sitou fait son rot, elle le récupère et le pose sur ses cuisses pour le bercer. Elle m’explique comment m’occuper d’un garçon le changer, comment je dois veiller après la toilette mettre un peu de tchotcho* dans son prépuce, comment ça se fait pour qu’il est pas mal, à quel moment il faut penser à la circoncision, en l’allaitant fait attention à ce qu’une goutte de mon lait ne tombe sur son sexe…Bref, la journée passe comme ça et j’ai le guide complet de comment on prend soin d’un bébé garçon. Je ne portais mon fils que pour lui donner la tétée.
A la fin de la journée, c’est maman et JY qui viennent nous
chercher. Ces deux-là sont de vrais potes, ça remonte à Angers ça ! Dès qu’ils
arrivent je m’éclipse avec JY dans la
chambre avec le bébé...Ah pardon il faut qu'on se fasse un puissant kongossa!!
***Huguette TONI***
Mon cœur est rempli de joie, c’était tellement mal engagé avec mon fils que je n’espérais pas voir mon petit-fils. Je n’en revenais pas ce matin de les voir sur le pas de ma porte, en voyant ce soir Agnès la mère de Kafui j’ai compris que c’était elle qui avait fait le travail. Nous sommes assises sur la véranda seules, alors je la regarde droit dans les yeux et lui dit.
Moi : Merci Agnès.
Agnès : Merci ? Pour ?
Moi : Tu sais…
Elle inspire longuement avant de reporter son attention sur moi. De nous deux c’est la plus âgée, on s’est rencontrées quelques fois sans être de grandes amies, les relations ont toujours été cordiales.
Agnès : Tu sais quand je me suis mariée, plusieurs années plus tard je n’avais toujours pas d’enfants…Je tombais enceinte, j’accouchais et avant leur deuxième anniversaire je les enterrais.
Moi :…
Agnès : Alors j’ai demandé au Seigneur de m’empêcher de tomber enceinte, je n’en voulais plus…c’était douloureux de les enterrer après.
Moi :…
Agnès : Puis après deux ans, je suis tombée enceinte…Ma foi m’empêchait d’avorter…Alors j'ai mené ma grossesse à terme. Après trois jours de travail…Kafui est venue au monde. Je l’ai confié à ma grand-mère qui vivait au Ghana, elle y a vécu jusqu’à l’âge de cinq ans. J’ai dû me séparer de mon bébé dix jours à peine après sa naissance, je voulais qu’elle vive !
Moi : …
Agnès : Pour avoir Kafui ça a été un cheminement douloureux, je ne le souhaite à aucune femme ! Même pas à toi ! Je n’en dirai pas plus !
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*Huile de palmiste dotée de plusieurs vertus.