L’invitée indésirable

Ecrit par Saria

Chapitre 5 : L’invitée indésirable

***Villa Oasis – Wemtenga – Ouagadougou***

***Selma***

Audrey sort de ma chambre et je m’écroule en pleurs. Tout ce que je veux oublier tout… ABSOLUMENT… tout remonte à la surface. Comme si tous ces mois ne m’avaient pas guérie. Kader ! Humm, sa fille… Cette vague impression de la connaître, c’est justement le visage de son père. Il y a un an, dans le dossier que Timmy m’a envoyé, il y avait des photos. Celles-ci datent c’est vrai ; sur les images, elle était encore petite… Hum… Le portrait de son père… Il faut les voir s’affronter : le même front buté, le menton levé, la posture… même certaines expressions et mimiques. Comment n’ai-je pas vu ça ?!

Timmy et Lulu m’ont endormie ! Je cherche à tâtons mon téléphone. Dès que je pose la main sur l’appareil, je lance le numéro de mon traître d’ami. Après une dizaine de sonnerie, le mec ne décroche pas. Ce n’est pas grave ; de toute façon, il ne perd rien pour attendre lui.

J’appelle Lulu ; après plusieurs essais, j’abandonne. Je fais quoi maintenant ? Lentement, je me dirige vers le lit et me couche. Je me recroqueville sur moi-même. Je sens la migraine monter.

 

***Environ deux heures plus tard***

Ce sont quelques coups frappés à ma porte qui me sortent de ma léthargie. La chambre est plongée dans la pénombre, je me redresse sur le coude et regarde autour de moi perdue… Je suis beaucoup plus calme, c’est sûr.

Audrey (voix inquiète) : Tatie ? Tatie ?

Ah Audrey ! Toute cette histoire rocambolesque ! Comme ça, je suis à Ouagadougou dans la maison de Kader ! Si je raconte ça à maman !

 

La porte s’ouvre et je vois une tête passée par l’entrebâillement :

Moi : Hum hum… Je suis là. Je crois que je me suis assoupie.

Audrey : Je me suis inquiétée.

Moi (ironique) : Je suis bouleversée mais pas au point de me jeter par la fenêtre.

Audrey : Pardon tatie chou.

Moi (sévère) : Stop jeune fille ! Il n’y a pas de tatie chou qui tienne ici ! Tes acolytes et toi ne perdez rien pour attendre !

Audrey : …

Moi : Tu voulais me dire quelque chose ?

Audrey : Je voulais te dire qu’on passe à table dans une dizaine de minutes… Mon frère Yacine dort chez un copain aujourd’hui… Il ne sera pas de la partie.

Moi : Ok… Il y a des règles particulières pour apparaître à la table de ton père ?

Audrey : Non… Mais… Fais-toi belle !

Incrédule, j’allume pour voir quand-même sa tête, elle est vraiment sérieuse ! Malgré tout, elle ne perd pas le nord celle-là ! Elle me fait un clin d’œil et sort. Pensive, je regarde dans mes affaires. Malgré moi, les propos d’Audrey me suivent. Oui… Si c’est la dernière soirée à passer ici, autant laisser un beau souvenir. Au moins, quand il se souviendra de mon incursion dans sa nouvelle vie, il retiendra l’image d’une belle femme !

Mon choix se porte une jupe maxi dans les tons fuchsia, fendue jusqu’à la cuisse. Je la porterai sur un débardeur noir. Sûre de moi, je vais à la salle d’eau me rafraîchir un peu et me maquiller légèrement. Je complète le tout par des sandales plates. Quelques minutes plus tard, je descends les escaliers avec quand même une boule au ventre.

 J’arrive à la dernière marche quand Kader sort de son bureau. Nous nous fixons un moment, puis son regard se pose sur ma gorge, glisse sur ma poitrine et me détaille jusqu’aux pieds. Pendant l’examen, je reste debout toute tremblante. Même si rien ne transparaît sur son visage, je sais que ce n’est pas anodin. La tête haute, je murmure un bonsoir avant de passer mon chemin.

 

***Kader***

Elle est juste magnifique, ce débardeur qui moule sa poitrine, la jupe qui affine sa taille… Hum… Je sens un désir brut m’envahir mais je ferme mon esprit pour que rien ne se montre sur mon visage. Lorsqu’elle me dépasse, son parfum emplit mes narines… Je le connais et les fois où son souvenir vient  me hanter, je le sens.

Le dîner se passe dans un silence absolu, chacun reste enfermé dans ses pensées. Chérifa nous lance de temps en temps des regards inquiets. Les rares fois où nos yeux se rencontrent, Selma baisse ou détourne rapidement les siens… comme si ma vue l’insupporte. Une chose est sûre désormais : elle est là malgré elle. J’ai cru devenir fou de la voir debout, à l’entrée de mon bureau cet après-midi.

Ah ! Selma, elle n'a pas changé d'un iota. Toujours aussi magnifique avec sa touffe impressionnante. Elle avait les yeux agrandis par le choc et la peur. Désolé, mon intention n’était pas de lui faire peur mais je ne pensais pas la revoir chez moi ici.

       

***Le lendemain matin très tôt***

***Quartier Zogona***

***Selma***

J’ai décidé de débarquer chez Lulu tôt le matin. J’ai encore mes repères dans Ouaga. Dès qu’il ouvre et me voit à sa porte, il sourit comme s’il m’attendait. J’entre et pose mon sac à main dans un fauteuil.

Lulu : Tu ne t’assois pas ?

Moi : Non… Lucien, comment Tim et toi, avez-vous osé ?! Audrey n’est qu’une gamine mais vous ! Lucien tu étais aux premières loges quand il m’a virée de sa vie ?! Pourquoi tu me fais ça ?

Lulu : Calme-toi, s’il te plaît ! Viens nous allons nous asseoir et en parler !

Il me prend par la main et nous nous asseyons dans le salon en osier, très beau d’ailleurs, mais ce n’est pas le sujet. Je reporte un regard douloureux sur lui.

Moi : Je vous fais confiance, moi !

Lulu : Selma, j’étais là comme tu le dis si bien ! Je vous ai vus ensemble, un amour comme le vôtre ne s’éteint pas à cause de broutilles.

Moi : Non …Un mensonge délibéré… Je sais ce que j’ai fait !

Lulu : Peu importe… Il t’aime encore, et toi, tu l’aimes aussi. Oui ! Tim et moi, nous nous sommes mêlés de ça parce que tous les deux vous êtes fiers et têtus ! Nous sommes vos amis ! Quels genres de proches serions-nous si nous n’essayions rien ?!

Moi : Il ne veut pas de moi dans sa vie, encore moins chez lui ! Les regards qu’il me lance ne me rassurent pas !

Lulu : Jamais Kader ne te fera de mal… En tout cas pas physiquement… Il ne peut pas te virer ! Ecoute… Hum… Essaie au moins ! Vous avez droit au bonheur… Il traverse des moments difficiles… Même s’il n’en parle à personne. Sa charge est lourde ! Il a besoin de toi mais jamais il ne le reconnaîtra !

Moi : Et moi dans tout ça… Si tout ceci échoue, je suis déjà en miettes…

Lulu : Tout ira bien !

Moi : Hum ! Appelle ton complice, je veux quand-même lui passer un savon !

Lulu : Ok… Donc ce que tu as fait sur moi ça ne suffit pas ?

Je secoue la tête, il sort son téléphone de sa poche et lance l’appel. Dès la première sonnerie, Timmy décroche.

Tim : Hey djo !

Moi : Eh ben dis donc ! Tu vis toi ?!

Tim (gêné) : Oh chérie, tu…

Moi : Traître ! Qui est ta chérie ? Non mais tu es….

Je le chauffe pendant dix minutes. Lucien finit par calmer le jeu et tous les deux me font des excuses. Mais je dois retourner chez Kader, j’espère juste que quelque chose est encore possible entre nous !

 

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