ma belle-fille : chapitre 1
Ecrit par Djiffa
AUTEUR : DJIFA BLESSINGS
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Mon nom est Esther. Je reviens du mariage de mon fils unique. J’entre
dans ma chambre et je me déchausse. J’ôte ma belle robe, j’enlève mes
boucles d’oreilles ; je suis si fatiguée que je remets mon bain à plus
tard. Je m’allonge sur le lit sur le dos. Je baille. Je ferme les yeux
pour dormir mais le sommeil ne vient pas. Au
contraire, toutes ces années défilent dans ma tête, depuis la naissance
de mon fils jusqu’à ce jour où il vient de se marier. Laissez-moi vous
embarquer pendant quelques minutes dans le passé, puis nous reviendrons
au présent.
Mon fils est mon enfant unique. Je n’en ai pas eu
d’autre. Ce n’est pas que Dieu m’en a privé mais je n’ai pas eu le
courage d’ en avoir un autre, vu les conditions dans lesquelles je l’ai
eu, lui.
J’ai rencontré son père Edmond de retour du collège
par un soir d’un mois de novembre. J’étais jeune, j’avais dix-sept ans.
Je ne sais pas comment les choses se sont passées pour que je me laisse
embobiner par son baratin. Certains hommes ont vraiment le don de
convaincre les femmes : de vrais beaux-parleurs.
Deux mois
après, j’étais dans son lit, lui offrant ma virginité dans le studio
qu’il habitait. On va dire que je me suis laissée convaincre ou alors
que je suis une fille facile. Mais non, je ressentais vraiment de
l’amour pour lui. C’est peut-être trop tôt, mais c’est la vérité.
Edmond était un étudiant en faculté d’agronomie. Il m’a dit qu’il
habite dans le sud du pays ; il s’était rendu au Nord où j’habitais,
juste pour un stage de six mois dans une ferme avant de soutenir son
mémoire de fin de formation. Je comprends bien plus tard que je n’ai
été qu’une distraction pour lui. Enfin, c’est ce que je me suis dite.
Je me souviens encore comme si c’était hier, du jour où ma mère a
constaté que je portais une grossesse. Elle a crié comme une folle, m’a
donné deux paires de gifles, disant que je l’ai honni. C’est alors elle
qui m’informait car je n’étais pas consciente qu’une vie se développait
en moi.
- Qui est l’auteur de ta grossesse ?
- C’est Edmond, maman.
- Quel Edmond ! Comme si tu me l’as déjà présenté, fille indigne, est-il élève comme toi ?
- Non, Maman, il est étudiant.
- C’est du pareil au même ; allez, va me le chercher, il faut qu’on
trouve une solution avant que ton père ne remarque ton état.
Je
sortis en larmes de la maison de mes parents pour me rendre dans le
studio d’Edmond. Je le rencontre juste au niveau du portail avec une
valise en main.
- Où vas-tu Edmond ?
- Je fais un tour chez mes parents.
- Et tu comptais y aller sans me le dire ?
- Tu m’as toujours défendu de venir chez toi à cause de tes parents,
comment pourrais-je te prévenir ? Je t’ai quand même laissé un message
chez les voisins.
- Tu m’as dit que tu avais six mois à faire, tu viens d’en faire quatre et tu veux déjà faire un tour chez tes parents ?
- Je viens de leur téléphoner et il parait que ma mère est gravement
malade. Je ne suis plus tranquille, je veux la voir ; dès qu’elle ira
mieux, je reviendrai terminer mon stage.
J’entre dans la chambre pour voir s’il ne me mentait pas et je constate que ses affaires sont encore là.
- Mais tu ne peux pas partir ainsi, je suis venue te chercher en fait, ma mère veut te voir.
- Quoi ! et pourquoi ? elle me connait où ?
- Elle vient de découvrir que je suis enceinte.
Edmond écarquille de gros yeux. Il soupire.
- Enceinte !
- Oui, enceinte, j’espère que tu ne vas pas nier.
- Pas du tout ; que vas-tu imaginer là ma chérie ? Ok, allons-y
rapidement, il ne faut pas que je rate le train de l’après-midi.
Je retourne chez ma mère avec Edmond.
- Maman, voici Edmond.
Edmond salue poliment ma mère.
- Bonsoir Madame.
Ma mère le toise un instant puis s’adresse à lui :
- Reconnais-tu que tu as engrossé ma fille ?
- Oui, tout à fait.
- Très bien, il faut que tu me donnes de l’argent pour la faire avorter avant que son père ne remarque son état.
- Et pourquoi doit-elle avorter Madame ?
Ma mère regarde Edmond bizarrement.
- Elle ne va pas avorter parce qu’elle peut faire quoi d’autre ? As-tu pensé à ses études ?
- Oui mais ce n’est pas une raison.
- Et toi, un étudiant, tu veux assurer les charges de quelle façon ?
- Mes parents sont pas si pauvres ; je vais leur expliquer la
situation. Je suis d’ailleurs en train de voyager ; je leur en parlerai
et au retour, je reviendrai vous voir. Mes parents ne laisseront pas
Esther souffrir. Ils vont s’occuper d’elle. Laissez-moi partir et
revenir.
- Dans ce cas, ne traîne pas.
- Cela dépendra de l’état de santé de ma mère mais je ferai aussi vite que possible.
Je raccompagne Edmond au portail. Il me dit :
- S’il te plaît Esther, ne laisse pas tes parents te convaincre d’avorter cette grossesse ;
- Tu sais que je suis encore très jeune.
- Oui, j’en suis conscient mais l’avortement est un crime et tu pourrais y perdre la vie !
- Est-ce que tu me promets de revenir ?
- Oui, je ne peux pas t’abandonner, je reviens dès que possible.
C’est ainsi que Edmond partit. Deux semaines après, il n’était toujours
pas là ; aucune nouvelle de sa part. Ma mère commença à vociférer. Elle
n’avait pas d’argent sinon elle m’aurait emmené à l’hôpital
discrètement. Pendant qu’elle se mettait à réfléchir à comment prendre
de l’argent chez mon père pour m’ôter cette grossesse, sans qu’il s’en
rende compte, ce dernier découvrit le pot aux roses. En effet, mon père
me surprit un matin en train de vomir et il tenait à m’emmener à
l’hôpital car maman était allée au marché.
A l’hôpital, le docteur nous fait faire des analyses.
- Monsieur, félicitations, votre fille est enceinte.
Mon père entra dans une colère noire et commença à me tabasser sauvagement ; je dus mon salut ce jour-là au Médecin.
Une fois chez nous, mon père me battit encore copieusement, puis il
m’intima l’ordre de partir de chez lui et de me rendre chez l’auteur de
ma grossesse. Je ne voulais pas obtempérer ; il me donna encore quelques
baffes. Je lui demandais pardon mais il prit le coupe-coupe et je fus
obligée de courir pour sortir de la maison. Il m’a dit que si jamais je
remettais les pieds chez lui, il allait en finir avec moi.
Je
ne pouvais même pas bien courir, tellement mon corps était endolori. Je
ressentais des douleurs atroces dans tout mon corps ; j’avais de la
peine à marcher.
En larmes, je pris le chemin du marché,
clopint, clopant pensant rencontrer ma mère mais ce ne fut pas le cas.
Ce jour-là, je ne savais plus quoi faire ; je finis par passer la nuit
sous une baraque au bord de la voie. Je n’avais aucun habit, ni de
l’argent sur moi. Cela a été une chance que les bandits ne soient pas
passés par là car c’était l’époque de la recrudescence des vols et des
viols.
Dans quel guêpier me suis-je fourrée ? Je me demande si
je n’aurais pas dû écouter ma mère et obliger Edmond à me remettre de
l’argent pour effectuer cet avortement ? Mon père alors n’aurait rien su
et je ne serai pas à traîner dans la rue à cette heure de la nuit.
J’étais assaillie d’idées négatives. Ce n’était pas facile pour une
jeune fille de dix-sept ans de se re retrouver dehors avec un enfant
dans le ventre ! C’était une dure épreuve pour mon âge. Mes parents ne
m’ont jamais enseigné sur la sexualité ; je me retrouve enceinte et leur
première réaction, c’est de me jeter dehors comme s’ils n’avaient
aucune part de culpabilité. Si seulement ma mère avait pris la peine de
m’éduquer dès que j’ai eu mes règles ! Ce n’est qu’à l’école qu’un
professeur de sciences naturelles, qui ne comprenait pas lui-même ce
qu’il nous disait, nous avait dicté un cours sur la reproduction.
Il faisait très froid cette nuit, signe que l’harmattan approchait à
grands pas. L'harmattan est, au Sahara et en Afrique Centrale et de
l'Ouest, un vent du nord-est, très chaud le jour, plus froid la nuit,
très sec et le plus souvent chargé de poussière. Par temps d'harmattan,
les nuits sont fraîches voire un peu froides comme pendant l'hiver au
désert, mais l'air s'échauffe très rapidement avec le soleil.
Je n’avais qu’une légère camisole et une jupe comme vêtements. Je
commençais à grelotter. Je n’avais aucune couverture. Pourquoi n’ai-je
pas réfléchi avant de me donner à Edmond ?
Je me regarde et je me
fais pitié à moi-même : voilà où m’a conduit quelques minutes de
plaisir, voire d’imprudence. Que vais-je faire maintenant ?
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