Ma est passée de l’autre côté !

Ecrit par Saria

***Parakou***

***Nouveau Quartier***


Je plie quand tu plies, je pleure quand tu pleures
Je prie quand tu pries alors, ton deuil, c'est mon deuil
Je vibre quand tu vis, un cœur pour un cœur
Puisque je brille quand tu brilles, alors je meurs quand tu meurs
Dis-moi pourquoi je m’essouffle et je m'entête
Pourquoi je tousse, pourquoi c'est moi qui m'étouffe quand c'est toi qu'on enterre
Pourquoi la vie ne dit pas c'qu'elle coûte ?
Pourquoi on a beau tuer le temps, mais c'est le temps qui nous enterre tous ?
Pendant qu'la terre tourne sans dérision
La mort s'en fout de vos doutes entre la science et la religion
Je crois au paradis sans preuve, trop de larmes
Et les sceptiques me taquinent et veulent mon Instagram de l'au-delà *

 

On était tous de blanc vêtus ce samedi matin à la mosquée du quartier. Je ne serai pas autorisé à aller au cimetière musulman c’est ici que ma mère et moi nous nous séparons : Ma s’est éteinte hier vendredi après la prière de Djuma. Après un coma de trois jours. La chanson de Youssoupha tournait en boucle dans ma tête.


 

Mes belles-sœurs s’activaient autour de moi pour s’occuper des gens moi je n’ai la force de rien. J’ai juste envie de me rouler par terre. Ma vie est un tas de cendre, ma maman est partie, toutes ces années de rancœur ont tout gâché ! Même si ces trois derniers mois ont été les plus beaux moments de partage, de fusion avec Ma. Oui vous avez bien entendu, les médecins lui donnaient un mois, maximum deux mois mais elle en a tenu trois !


 

Elle était posée sur une natte, enroulée dans un pagne blanc, pour la prière d'inhumation. Il n’y a pas la notion du cercueil chez les musulmans. Mes frères s’avançaient, certainement pour emmener la dépouille, j’ai essayé de me lever pour la toucher une dernière fois mais je ne sentais plus mes jambes. Elles étaient comme coupées, alors je rampe, le plus vite que je pouvais, j’avançais. Je parviens à mon but au moment où, ils donnaient le top pour la soulever. Je m’agrippe au corps ! Mon corps est secoué de gros sanglots, une complainte déchirante sors de mes tripes et remplit la mosquée. Je sens tout le monde retenir son souffle autour de moi. J’entends, des murmures s’élever.

 

Moi : Ma ne me laisse pas ! A qui tu vas me laisser Ma ! Qui va s’occuper de ton mari, moi je ne peux pas !



Kabir a commencé à m’engueuler, Akim et mon père se rapprochent de moi, mon grand-frère parle mais je ne l'entend pas, je refuse de l'écouter. Les deux parviennent à me faire lâcher le corps, je regarde les yeux rougis de mon père, il me lançait un regard suppliant en secouant la tête. Je sentais que s’il ouvrait la bouche, il aurait du mal à se retenir de pleurer devant la communauté! Alors je la laisse partir, quelqu’un vient me soulever et m’emmener vers les voitures !


 

Je réalise plus tard que c’est Dylan. Je pleure toutes les larmes de mon corps et la chanson de Youssoupha tourne en boucle dans ma tête !


  

Je plie quand tu plies, je pleure quand tu pleures
Je prie quand tu pries alors, ton deuil, c'est mon deuil
Je vibre quand tu vis, un cœur pour un cœur
Puisque je brille quand tu brilles, alors je meurs quand tu meurs
Dis-moi pourquoi je m’essouffle et je m'entête
Pourquoi je tousse, pourquoi c'est moi qui m'étouffe quand c'est toi qu'on enterre
Pourquoi la vie ne dit pas c'qu'elle coûte ?
Pourquoi on a beau tuer le temps, mais c'est le temps qui nous enterre tous ?
Pendant qu'la terre tourne sans dérision
La mort s'en fout de vos doutes entre la science et la religion
Je crois au paradis sans preuve, trop de larmes
Et les sceptiques me taquinent et veulent mon Instagram de l'au-delà *



  

***Quelques mois plus tard***

 

***Nimata***


 

Saad aura un an demain. Bientôt six mois que ma mère est partie et je continuais de sombrer ! Je n’ai pas encore touché aux pilules de bonheur mais je sombrais. Heureusement  que la dada et Rita sont efficaces. La première s’occupait très bien du bébé et l’autre de la boutique.

  

Moi je me baladais à longueur de journée dans un long t-shirt marron qui avait appartenu à ma mère, pieds nus, les cheveux défaits…En gros je me négligeais. J’avais deux collections sur le marché. Je travaillais sur une nouvelle, je noyais ma peine dans le boulot et rien d’autre.

  

Dylan ? Moi je ne le calcule pas vraiment, il vient voir son fils et je reste enfermée dans ma chambre. Quelques semaines avant le départ de Ma, il était venu me voir avec sa mère. C’était la première fois que je la voyais, j’étais un peu réticente mais après j’ai laissé faire.Elle avait le droit d'entrer dans la vie de son petit-fils.

  

Un thé à la main, je retourne me coucher. Hier j’ai travaillé toute la nuit, là je me suis réveillée parce que j’avais faim. J’en ai profité pour voir rapidement Saad. Je n'arrive pas encore à m'occuper de lui. J'ai tendance à entonner les comptines en dendi et parfois en sérère que lui chantait ma pauvre mère, je ne pouvais pas encore gérer ça!


  

***Quelques heures plus tard***


 

Voix : Nima !!!! Nima !!!!

Moi : Oui…Ma…Ma ? C’est toi ?

Ma : Oui c’est moi mon enfant

Moi : Mais Ma tu pleures ?!

 

Je voyais ma mère dans un halo de lumière son beau regard était tellement triste, et elle avait des traces de larmes sur son visage.

  

-Mais pourquoi ?


Ma : Tu refuses de me laisser partir ma fille…J’ai besoin de me reposer, je suis si fatiguée ! Laisse-moi partir Nima!

Moi : Ma je ne comprends pas, je te retiens comment?

Ma : Tu te laisses sombrer mon enfant, tout s’assèche autour de toi, comment voudrais-tu que mon cœur de mère sois apaisé ?!

Moi : Ma tu me manques !

Ma : Je serai toujours là ma puce…Toujours, en toute circonstances, je suis là où rien ne peut m’enlever…Je suis dans tes souvenirs et dans ton cœur, n’oublie pas ce que je t’ai dit !

  

Je me réveille en sursaut ! J’étais dans mon lit mais ce n’était pas un rêve j’étais dans une semi-conscience. Je pose la main sur mon cœur, mes yeux tombent sur sa photo à mon chevet. C’était une belle femme. Ses paroles résonnent dans ma tête, Ma est venue ! Elle est venue !

  

Je me rappelle encore notre conversation quelques jours avant qu’elle ne tombe dans le coma.

  

Ma : Tu devrais mettre de l’eau dans ton vin Nimata

Moi : Ma han han dèh ! Toi tu veux ramener l’affaire de Dylan ici oh !

Ma : Il vient ici me voir, comme vous ne venez plus ensemble je suppose que ça ne va pas

Moi : Hum !

Ma : Pour certaines le chemin est facile, pour d’autre c’est tortueux et éprouvant mais ce sont celles-là qui connaissent les joies du mariage…La légende dit qu’il y a du miel au cœur de la pierre, c’est à force de patience qu’on finit par y goûter !

Moi : Ah Ma toi aussi ! C’est quelle science tu me sors ici ?!

Ma : Quand je ne serai plus là, tu ne pourras pas compter sur tous tes frères…Akim devra aussi gérer sa peine et s'occuper de sa famille...Il te faudra le soutien de ta propre famille, Dylan et Saad. Il faut que tu préserves ça ma fille. Promets-moi d’y penser !

Moi : Promis Ma.

  

Je me lève de mon lit la première chose que je fais c’est d'ôter mon T-shirt et de le plier, je passe à la douche. Un nouveau départ avec moi-même, mon fils ensuite et qui sait…Je laisse les options ouvertes. Il fallait que j'avance, ma peine empêche ma mère de trouver la quiétude. Ce qui n'est pas juste, elle avait déjà trop souffert ici!

 

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*En savoir plus sur http://www.paroles.net/youssoupha/paroles-mourir-mille-fois#yxSEz3BzrlDuqpg2.99

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