Mon Bel Ami, Mon Amour

Ecrit par Fortunia

Hey, Arthur, toi qui me connais si bien. Tu sais que je suis une femme de caractère. Je suis affirmée, délurée, survoltée. Je ne sais pas rester en place. J’aime voyager, rencontrer, savourer. Ma curiosité et ma faim de vivre sont sans limite. Toi tu es mon opposé. Tu es plus posé, mesuré, je dirais même cachottier. Aujourd’hui encore, je me demande si je sais tout de toi.

Je me rappelle encore de notre première rencontre.

C’était sur les bancs de l’école. En seconde, j’étais la reine. J’étais sur tous les fronts : studieuse, sportive et sociable. Le triplé gagnant. J’avais ma petite clique, un groupe d’amis qu’aujourd’hui j’ai perdu de vue. Nul dans les couloirs du lycée n’ignorait mon nom. Laetitia, la fille que tout le monde voulait à ses côtés. Et tu es arrivé. Tu étais le nouveau, une sorte d’animal curieux qu’on ne pouvait s’empêcher de dévisager. Un peu petit, silencieux et toujours sur tes gardes.

Je me rappelle t’avoir abordé. Rien d’anormal, je suis comme ça. Rappelle-toi que je suis sociable. J’ai discuté avec toi et j’ai découvert quelqu’un de très cultivé. Tu m’as impressionnée. Je te voulais pour ami. Oui, tu m’as bien entendue, seulement pour ami. Non, ça n’a pas été le coup de foudre, cette chose dont on parle dans les comédies romantiques et qui a des allures de rêve. C’est venu petit à petit.

Je t’ai fait une place dans ma vie et très vite, tu as trouvé tes marques. Nous avons grandi et aussi sûrement que la nature change avec le temps, les Hommes aussi. Tu es devenu si grand que je devais lever la tête pour te regarder. Tu en avais mal aux articulations. Je me moquais souvent. Nous avons eu notre Baccalauréat et nous sommes allés dans la même université. Tu étais devenu mon meilleur ami, la seule personne à qui je pouvais tout dire sans avoir peur d’être jugée, la seule personne avec qui je pouvais m’ouvrir sans passer pour une dégénérée. Tu étais mon pilier mais à ce moment, tu étais toujours cet ami que je chérissais tant.

Dans la fleur de notre vingtaine, tu m’as dit « Laetitia, tu sais que je suis amoureux de toi », aussi simplement que si tu m’avais dit que le coq chante.

Non, je ne le savais pas. J’ai ri. Je m’en veux aujourd’hui. Ce n’était vraiment  pas gentil. J’ai tourné tes sentiments en plaisanterie et toi tu as essuyé ce rejet sans sourciller. Le fait était que tu avais malgré tout semé les graines d’un quelque chose. Et en prime, tu n’as pas abandonné. De temps en temps, tu le disais, comme pour sonder ma réaction. Et moi je faisais semblant de ne rien voir, ne rien entendre. Je me demande encore aujourd’hui pourquoi j’étais comme ça. Alors qu’au fond de moi, je savais que je t’aimais.

Tu sais, c’est souvent bizarre, l’amour. On a beau poser des mots sur la situation, sur nos sentiments, la logique semble être ennemie de nos pensées. On se rebiffe, on brave l’inéluctable, on se bat contre soi-même alors que ça ne sert à rien de fuir. Quand je pense au temps que j’ai mis à accepter ce que j’éprouvais, je ris de mon idiotie.

Je bénis Dieu que tu aies été aussi patient à mon égard.

Aujourd’hui, nous fêtons notre premier anniversaire de mariage. Sur les plages de Kribi, je me rappelle de notre adolescence. Serrée contre toi, je regarde le paysage de toute beauté. Je me demande si c’est le bon moment pour t’annoncer qu’une nouvelle vie sommeille en moi. Je suis heureuse de t’avoir à mes côtés et je sais que nos plus beaux jours sont devant nous, Arthur, mon bel ami, mon amour.

Mon Bel Ami, Mon Amo...