Partie 19 : Un dîner en famille
Ecrit par labigsaphir
[ BLESSING
- Où sont les enfants ? Demande Malick à Zakir.
- Ils sont chez Omar.
- Oh ! J’aurai aimé porté mes neveux.
- Ce n’est pas possible, réplique-t-il en riant. C’est la belle-sœur,
- Ah oui, c’est la future belle-sœur, confirme Malick avec malice.
- Bienvenue dans la famille….
- Blessing, je m’appelle Blessing.
- C’était fait exprès, tu as l’air préoccupé et ailleurs.
- Oui, je me suis évadée durant quelques secondes.
- Ça va ?
- Oui, merci Zakir et toi ?
- Bien, merci. Ne restez pas debout.
- Merci.
- Où est ma sœur ?
- En cuisine ou dans la chambre mais elle arrive, répond Zakir.
Des pas approchent puis Lubna apparait, plus belle que jamais dans un sari rouge avec des motifs couleur or.
- Wow ! Tu es magnifique dans ce sari, il va à ton teint. M’exclamai-je en la regardant avancer, si majestueuse.
- Merci ma belle.
- De rien. Ça va ?
- Oui, merci et toi ?
- Bien, merci.
- Ta fille, tes frères et sœur ?
- Bien, merci.
- Bienvenue chez nous.
- Merci.
- Malick, toi, je ne te parle pas.
- Zakir, qu’as-tu encore donné à ta femme ?
- Malick, je ne parle plus de vos problèmes. Blessing, un conseil, quand ca chauffe entre deux Badjeck de naissance, reste très loin.
- Merci du conseil.
- Zakir, tu me lâches là, réplique Malick en souriant.
- Et j’assume ma lâcheté. Si si si.
Nous éclatons tous de rire, c’est si vivifiant et gai qu’il en devient communicatif.
- Malick, repart Luban. Tu me cherches seulement à cause de ta femme.
- Lubna, tu sais que je ne suis rien sans vous.
- Aka, depuis qu’elle est rentrée dans ta vie, tu me zappes.
- Akieuuuu Zakir prend bien soin de toi, regarde comment tu brilles.
- C’est vrai que c’est un nounours et toi, mon frère.
- Lubna, laisse-moi tranquille, ne cherche pas les problèmes.
- Aka, attends quand elle va se mettre à bouder, je verrai.
- Zakir, un enfant est-il en route ? S’enquiert Malick en se tournant vers son beau-frère.
Nous éclatons à nouveau de rire durant deux minutes, j’en ai les larmes aux yeux. Malick pose sa main sur la mienne et s’assure que je n’étouffe pas.
- Cherie, doucement, c’est comment ?
- Ha ha ha ha Malick à croire qu’il n’y a que des specimen dans ta famille.
- Je t’avais bien dit que tu te sentirais trop à l’aise dans cette famille.
- Lubna, je ne te savais pas si drôle.
- Elle ne doit pas devenir ta confidente ou meilleure amie, attention.
- Malick ooooo tu abuses.
- Tchiiip ! Malick, tu es aussi jaloux de ta sœur ?
- Lubna, ne me cherche pas.
- Aka, ma chérie, repart Lubna en me tirant par la main, viens.
- Pardon ?
- Allons dans la cuisine, ils vont bientôt commencer à parler affaires ou football.
- Ah oui, oui.
- Tu comprends, allons-y.
- Les filles, faites doucement, fait remarquer Malick malicieusement.
Je me lève, nous longeons un couloir et arrivons dans une cuisine spacieuse recouverte de carreaux du sol au plafond et très fonctionnelle.
- Elle est belle, ta cuisine, remarquai-je émerveillée.
- Merci. Cadeau de mariage de Zakir.
- Bah, c’est bien. Je suppose que c’est ton ante.
- Mon laboratoire, oui.
- Ne reste pas debout, assieds-toi, s’il te plait.
- Merci, dis-je en avisant un siège en plexiglas.
- Tu es de très bonne humeur, Blessing.
- Oh oui, rien ne saurait mettre de mauvaise humeur.
- J’aime beaucoup cette joie de vivre.
- Tu as tout compris.
- Je suppose qu’entre mon frère et toi, tout va bien.
- Au beau fixe.
- J’aime ça.
- Huhum.
- Tu es plus facile que nous le pensions.
- Ah bon ? Que pensiez-vous au fait ?
- Je te voyais comme une femme compliquée, ce qui n’est en rien le cas.
- Je vois.
- Tu es quelqu’un de bien puisque tu rends mon frère meilleur.
- Merci.
- Tu as ce petit truc qui fait que l’on ne peut te vraiment te détester.
- Crois-tu ?
- Laisse du temps à Fatima, elle est plus méfiante que moi.
- Je vois.
- Je sais qu’elle peut être virulente lorsqu’elle s’y met mais elle n’est pas méchante dans le fond.
- Si tu le dis, soupirai-je.
- Blessing, sois patiente envers elle. Elle n’est pas seulement méfiante et dure envers toi, nous faisons tous les frais de sa verve.
- Huhum. Que puis-je faire pour t’aider ?
- Je suis en train de terminer la salade.
- Donne, je vais disposer dans le plat.
- Merci, Blessing.
- De rien. Nous sommes entre femmes.
Elle me tend des plats contenant tout le nécessaire, je me mets à ranger dans le plat et fait une fleur avec une tomate. Je suis tellement absorbée par ce que je fais que je sursaute lorsqu’elle pose sa main sur mon épaule.
- C’est magnifique, ma chère.
- Merci.
- Excuse-moi, je ne souhaitais pas t’effrayer.
- Je me suis évadée.
- Je sais que mon frère mange bien.
- Merci ; je lève la tête et lui souris.
Elle contourne la table en pierre au milieu de son immense cuisine et va poser les marmites sur le feu.
- Je peux commencer à réchauffer les plats.
- Je le pense aussi.
- J’ai pensé à un rendez-vous à trois.
- A trois ?
- Oui. Toi, Fatima et moi.
- Je ne crois pas que ce soit une bonne idée.
- Moi, je le pense.
Elle se tourne, tenant la spatule et pose la main sur la hanche.
- Blessing, nous avons tous besoin de deuxième chance.
- Lubna, je n’ai pas envie de me faire insulter.
- Je comprends mais tu pourrais faire des efforts.
- Nous n’avons pas donné à boire aux hommes.
- Ne t’inquiète pas, je m’en suis occupée.
- Quand ?
- Pendant que tu travaillais.
- Oh !
- Au fait, que voudrais-tu boire ?
- Du jus de corossol.
- J’en ai.
- Ah oui ?
- Malick m’a dit que tu peux en boire toute la journée.
- Oui, j’aime bien.
- Prends dans le frigidaire, s’il te plait.
- Merci.
- Là-haut, tu trouveras un verre.
- Merci.
- De rien.
Je me lève, prends la bouteille de jus, le verre et me rassieds. Elle vient prendre le plateau de salade et le met dans le frigidaire.
- Blessing,
- Oui, Lubna.
- Que sais-tu de notre mère ?
- Elle est au village.
- J’ai pensé qu’il serait bien d’aller la voir.
- Malick…
- Laisse Malick et pense à toi. Tu feras bientôt partie de la famille, c’est le plus important.
- …
- Nous avons discuté avec elle à ton sujet, il y a de cela quelques jours.
- Je ne sais pas, je verrai.
- Ok, je ne te forcerai pas, non plus.
- Humm.
- Oulaaa, j’ai oublié de mettre le plantain mur au feu.
- Où est-il ? Je peux m’en occuper.
- Là, fait-elle en me montrant un placard.
- Ok.
Je me lève, tire sur la porte et prends le sac contenant les plantains murs. Je prends une gamelle non-loin et un couteau, me mets à éplucher les plantains en discutant avec elle. De temps à autres, nous éclatons de rire et sommes interrompues par Malick, un verre de jus à la main.
- Dis donc, pas de bagarre. Glisse-t-il en me fixant.
- Nous ne sommes pas des sauvages, réplique sa sœur.
- Ha ha ha ha Malick, pour qui nous prends-tu ?
- Je demandais seulement. Quoi de mieux, voir sa sœur et sa femme, discuter en riant.
- Bah oui, ça existe, repart Lubna en me faisant un clin d’œil.
- Ne la fatigue pas trop, Lubna.
- Aka, sors de ma cuisine, dis donc.
- Eukieee quand tu me parles de cette façon devant elle, que va-t-elle penser ?
- Que je chambre mon frère.
- Heureusement que je t’aime.
- C’est ça, c’est ça. Les choses des blancs.
Lubna et moi, éclatons de rire, Malick nous observe en silence, secoue la tête et va rejoindre Zakir dans le séjour.
- Dis-moi,
- Oui, Lubna.
- Où vit ta mère ?
- Euh…chez elle.
- Je veux dire, chez elle ou dans une cour familiale ?
- Elle loue. Pourquoi ?
- Par curiosité.
- Humm.
- A-t-elle construit ?
- Non.
- Compte-t-elle le faire ?
- Si elle avait les moyens, elle le ferait certainement.
- Je vois.
- Pourquoi ces questions ?
- Pour rien ; elle me parait pensive.
- Son père a-t-il laissé de biens ?
- Je ne lui ai jamais posé la question. De toutes les façons, si elle avait quelque chose, je serai au courant.
- Ok.
- Toi, comment vois-tu la vie en couple ?
- Ta question est bizarre ou mieux, complexe.
Elle enlève la marmite de Ndolè du feu et pose celle contenant le mouton.
- Avez-vous déjà parlé de tout ce qui a trait aux biens ?
- Je ne comprends pas, Lubna.
- Les biens immobiliers et autres ?
- Pas encore et je ne crois pas que cela puisse te regarder.
- Blessing, tout ce qui a trait à mon frère, me regarde d’une façon ou d’une autre.
- …
- Tout ce qu’un Badjeck a, reste généralement dans la famille.
- …
- Si jamais un Badjeck venait à perdre sa femme, ses biens reviendraient à la famille et non, sa femme.
- Et si la femme travaille ?
- Et même.
- Eh ben ?
- J’ai pensé qu’il serait important que tu saches où mettre les pieds ou sur quoi compter.
- Je trouve que tu t’impliques trop dans les relations de ton frère.
- C’est mon frère, Blessing, une femme ne saurait nous séparer.
- …
- Breff…c’était juste une parenthèse.
- Humm.
- C’est prêt, nous pouvons aller faire la table.
Lubna a toujours le chic de casser l’ambiance, c’est inouï et elle excelle dans cet art. Nous nous rendons dans le salon, coté salle à manger. Elle débarrasse la table et va chercher la nappe. Pendant que je la mets, elle ramène le nécessaire. Je l’aide mais ne suis plus vraiment là.
- Blessing, qu’y a-t-il ? S’enquiert Malick.
- Rien, rien. Pourquoi ?
- Tu es bizarre et parais différente de la Blessing que j’ai vue en cuisine.
- Non, tout va bien.
A cet instant, Lubna revient avec les premières assiettes pleines.
- Qu’y a-t-il ? S’enquiert-elle.
- Elle est bizarre, je trouve.