Partie 9 : pardon

Ecrit par labigsaphir

[ BLESSING ]

- Mais que fait-elle debout à cette heure, maman ?

- Elle a dormi assez tôt hier.

- Il n’est que 5h du matin, maman.

- Ah, que veux-tu alors que je fasse ?

- C’est elle qui parle là ?

- Mais oui, ça va lui faire du bien de t’entendre.

- Merci maman.

- Pas besoin de me remercier, c’est ma petite fille.

- Comment vas-tu ?

- Mieux ?

- Oui, mieux.

- Attends, je ne comprends rien à ce que tu racontes.

- Je ne saurais vraiment te l’expliquer.

- Humm, Blessing, continues-tu à aller à l’église ?

- …

- Blessing !

- Non, mais je prie à la maison.

- Prier à la maison n’est pas mauvais mais le Seigneur dit que là où ils sont deux, trois et plus, il est là.

- En priant seule dans ma chambre, n’est-il pas là ?

- Je n’ai rien dit de tel, Blessing.

- J’ai compris ce que tu veux dire.

Je soupire et me rends compte que c’est seulement chez moi que j’arrive à prier. Chez Malick, je ressens souvent une certaine lourdeur. Je peux commencer à prier mais m’arrete toujours pour faire je ne sais quoi.

- Ok et comment pries-tu ?

- Quand je suis ici ; je pose la main sur la bouche comme si elle pouvait me voir.

- Quand tu es là ? Blessing, que voudrais-tu dire ?

- Maman, tu sais, je dors encore.

- Humm, Blessing et avec ton chéri ?

- Ça va.

- Que fait-il dans la vie ?

- Il est ingénieur mécanicien dans le domaine aéronautique et autres.

- Il gagne bien sa vie.

- Oui.

- Et il n’a pas de femme ?

- Il ne s’entendait pas bien avec elle et ils se sont séparés.

- Humm. T’a-t-il présenté à sa famille ?

- Oui.

- Quand ?

- Hier.

- Et,

- Ça n’a pas été terrible.

- Blessing, je ne veux pas te décourager mais tu es une grande fille.

- Merci, maman. Maintenant passe-moi, féfé.

Un bruit, puis la voix de la petite se fait présente. Je souris d’emblée et rapproche le combiné de mon oreille comme si cela pourrait nous rapprocher.

- Mama, mama, mama.

J’ai immédiatement le regard mouillé et pense à dernière fois que nous nous sommes vues. Elle me manque, ma fille. Je discute avec elle ou plutôt, l’écoute babiller durant une dizaine de minutes et sursaute à chaque fois qu’elle dit « maman ».

Je discute avec maman cinq minutes après avoir eu féfé, puis raccroche secouée malgré moi. J’ai consenti à faire ce sacrifice pour son bien-être. Je fais une dernière prière avant d’aller me doucher.

En sortant de la salle de bain, j’allume mon mobile et comme je m’y attendais, il se met à chanter. Trente appels en absence, vingt-cinq messages et rien que ça ! Je suis trop en colère pour discuter avec lui. Je soupire, efface les messages sans les lire et repose le mobile sur la table de chevet.

J’ouvre en grand la penderie et au lieu de mettre des robes talaires comme le préfère Malick, je choisis une robe courte, un sac à main avec des escarpins aux talons vertigineux. Je maquille, mets une lingerie aguichante et termine en m’aspergeant de parfum de marque.

Un tour devant le miroir du salon, la journée peut commencer. Je suis hyper belle et tout l’opposé de ce que Malick aime.

TROIS QUARTS D’HEURE PLUS TARD…

En rentrant dans la salle de classe, je croise monsieur AVOMO, celui qui nous dispense les cours de sténographie.

- Bonjour monsieur.

- Bonjour mademoiselle Nanfack. Comment vas-tu ?

- Bien, monsieur. Et vous ?

- Bien. Vous êtes en beauté murmure-t-il.

- Comme toujours, dis-je en le dépassant.

Je sens son regard sur mon popotin, mes jambes telle une douce caresse et souris à Camron qui bave. Decielle qui a autant de grâces qu’un éléphant dans un magasin de porcelaine, met son coude dans les côtes de Camron qui hurle de douleur.

- Bon sang ! Mais qu’est-ce qui te prend ?

- Tu baves sur la femme d’un autre, Camron.

- Et alors ? Où est ton problème ?

- Tu me remercieras plus tard.

- La ferme !

- Ok, c’est bon. Dis-moi, Blessing, combien sont-ils ?

- Bonjour à tous, fais-je en m’asseyant. De quoi parles-tu ?

- Les accidents que tu as causés avec une tenue pareille.

- Je n’ai pas fait attention, Decielle. Souviens-toi que je …

- Je…Quoi ? Me coupe Camron.

- Ah, j’avais oublié que tu étais là.

- Alors, jolie poupée, comment vas-tu ?

- Et l’on se demande pourquoi tu ne gardes jamais tes conquêtes longtemps ?

- Camron, toutes les femmes n’aiment ces petits noms neuneu. Tu devrais à l’avenir, t’en souvenir.

- Bien, bien, nous pouvons commencer le cours. Dit monsieur Avomo, le regard braqué sur ma poitrine.

Il ergote, je finis par m’évader et repenser à la soirée d’hier ou plutôt, celle du matin.

*** FLASH-BACK DE QUELQUES HEURES ***

Depuis l’incident des vêtements avec ses frères, je m’occupe des invités mais ne me limite qu’au minimum. Comment sourire alors que le cœur n’y est pas ? Adossée l’encoignure de la porte, j’observe les autres profiter de la soirée et repère aller en cuisine, faire la vaisselle. Je sursaute un quart d’heure plus tard en entendant la porte couiner.

- Oh ! Fais-je la main sur le cœur en me retournant.

- Excuse-moi. Je ne souhaitais pas te faire peur.

- Ce n’est pas grave, Moktar.

- Comment ça se passe ici ?

- Bien, merci.

- Je veux dire, avec Malick.

- Tout va et je ne souhaite pas parler de ma vie privée avec toi.

- Je comprends mais la vie privée de Malick est aussi la nôtre.

- Ce qui n’est pas mon cas.

- Je te sens…Sur la défensive.

- C’est normal.

- Tu sais, nous ne sommes pas méchants. Je tiens juste à m’assurer que tu es la bonne et pas là pour tes intérêts.

- Pardon ?

- Nous savons tous combien les bamilékés sont intéressés, lâche-t-il en me regardant droit dans les yeux.

- Je ne miserais pas lorsque j’ai fait la rencontre de votre frère, à ce je sache. Et ce n’est pas parce qu’on est bamiléké que l’on est obligatoirement intéressé.

- Blessing, Malick, je te dois du respect mais ce que tu viens de dire est choquant. Entre nous, Malick est venu vers moi pour ses intérêts ou les miens ?

- …

- Arrêtez donc de me juger sans me connaitre. Tu es le grand-frère de Malick et moi, Blessing, simplement.

- …

- Je ne cherche pas une deuxième famille, j’ai déjà la mienne. Mes parents sont encore vivants.

- Ok. Je ne souhaitais pas te blesser.

- Je dois aller m’occuper de mes invités.

Je prends un plat et quitte la cuisine, sans plus un regard vers lui. Je vous avoue que mes tremblent en ce moment, tellement je suis choquée. Malick s’avance justement vers moi, souriant comme toujours.

- C’est toi que je cherchais, chérie.

- …

- Nos invités manifestent le désir de s’en aller.

- Ok.

Il me regarde, tend la main que j’esquive et le précède dans le salon. Malick et moi, raccompagnons ses invités à la porte, échangeons quelques mots avec eux, avant de les laisser s’en aller. A chaque fois que Malick essaie de me frôler, je recule ; il le remarque mais ne dit rien.

- Blessing, c’était un plaisir de te faire ta connaissance. Malick a du gout comme tous les Badjeck, très bon choix.

- Merci Omar.

- Je le pense vraiment. Tous savent que je suis avare en compliment.

- Je vois.

- Frérot, intervient Malick, laisse ma femme tranquille.

- J’ai déjà la mienne, réplique-t-il en regardant Aisha qui me fait un signe de la tête.

Asiha s’avance vers nous, tend la main de leur fils à Omar qui la dévisage, elle baisse les yeux.

- Je dois montrer quelque chose dans la cuisine à Blessing, explique Aisha.

- Je vais me débrouiller, Aisha ; je n’ai plus envie de me disputer avec une personne.

- Blessing, j’insiste ; son regard est suppliant.

- Ok, fais-je de mauvaise grâce.

Nous nous rendons à la cuisine en silence, je soupire une fois la porte fermée.

- Tu t’en es rendue compte, embraie-t-elle, tu n’es pas de taille.

- Je ne comprends rien à ce que tu baragouines, Aisha.

- Tu peux encore tout arrêter, Blessing. Tu n’es pas mariée avec Malick donc prends le peu que tu as déjà pu avoir et va-t-en.

- Fous-moi le camp ! Qui êtes-vous pour vouloir contrôler ma vie.

- Tu n’es qu’une enfant ! Le mariage n’est pas pour les gamines.

Je me dirige vers la porte, ulcérée par ses dires et l’ouvre en grand.

- Dégage ! Tonnai-je en me foutant du monde dans le salon.

- Blessing, essaie-t-elle en posant la main sur mon avant-bras.

- Dégage et ne me touche pas !

Myriam qui n’est pas loin, accourt et demande à Aisha de rentrer dans la cuisine ; je m’y oppose, regardant vers le salon.

- Demande à ton affaire de belle-sœur de foutre la camp de chez moi, sinon je ne répondrais plus de mes actes.

- Aisha, je crois que tu en as trop fait, rentre chez toi.

- Il faudrait bien qu’une personne lui dise les vérités, s’insurge Aisha.

- Ma vérité, tu la veux ? M’enquis-je en m’avançant dangereusement vers elle.

- Je ne me suis donc pas trompée, en plus d’être une trainée, tu es une sauvage.

PAF ! PAF !

Des personnes approchent, Malick et Omar nous observent durant quelque secondes.

- Que se passe-t-il, ici ? Nous demande Malick.

- L’on vous entend du salon, renchérit Omar.

- Je me suis fendue de quelques critiques sur le déroulement de la soirée et Blessing qui se croit arriver, m’a giflée. Balance Aisha.

- Quoi ? S’exclame Omar.

- Blessing, comment as-tu pu ? C’est ma belle-sœur !

- Belle-sœur ou pas, Malick, elle me manque de respect, je réagis.

- Excusez-moi, Aisha l’a traitée de …

- La ferme, Myriam ! Gronde Omar en prenant la main de sa femme.

- Aisha, dit Malick en se tournant vers elle.

- Dresse mieux ta femme, Malick. Gronde Omar avant de s’éclipser.

- Malick, j’étais là, essaie Myriam.

- Je n’ai pas le temps pour commérages, fait Malick cinglant. Et toi, va m’attendre dans la chambre !

Je m’y rends, martelant le sol de mes talons, m’assieds sur le lit et me met à pleurer, de rage. Je me déshabille, remets mon slim, un chemisier courtes manches, garde mes chaussures à talons et me maquille.

Je suis en train de faire mon sac, lorsque Malick rentre dans la chambre telle une furie et s’immobilise devant moi.

- Malick, je préfère que nous fassions une pause.

- Non, bébé, non. Si je te laisse partir dans cet état ou accepte la pause, tu me quitteras.

- C’est ce qui serait mieux pour tous.

- Ecoute, je reconnais m’être emporté tut à l’heure mais comprends-moi.

- Tu m’as humiliée, Malick !

- Je suis désolé, chérie. En fait, je suis assez spontané et très maladroit.

- …

- Je ne voulais ni te blesser ni t’humilier.

- …

- Ecoute, je me suis mal exprimé. Il était important que mes frères aient une bonne image de ta personne. Tu es ma femme, celle qui partagera ma vie.

- …

- C’est avec toi que je prendrais les plus grandes décisions de ma vie.

- Raison pour laquelle tes sœurs choisissent de refaire la décoration d’une maison censée être la mienne ?

- Je lui parlerai, chérie.

- T’es-tu entendu ? Tu prenais les décisions avec elle comme si je n’étais pas là, comme si je n’existais et pourtant j’étais tout près.

- Blessing,

- Tu m’as manquée de respect devant ta famille. Si tu leur montres comment faire, crois-tu qu’ils me respecteront encore ?

- Oui, j’y veillerais.

- J’ai toujours été franche et directe, Malick. Je t’ai toujours dit ce que je pense.

- Je sais et l’apprécie vraiment.

- Je ne crois pas….

- Tu ne crois pas, quoi ?

- Laisse-tomber ! Fais-je en me rendant compte que tout est confus dans ma tête et mon cœur.

- Je t’aime Blessing, tu le sais.

- …

- Je peux être un lion devant les autres mais toi, tu sais réellement qui je suis. Tu es ma faiblesse et les autres n’ont pas à le savoir.

- Je veux rentrer chez moi.

- Je ne peux pas quitter la maison, comme ça. Brahim et les autres sont encore là.

- Tant pis, je vais chercher un taxi.

- Tu ne viens pas leur dire au revoir ?

- J’ai la tête de quelqu’un qui se préoccupe de ce que peuvent penser les tiens ?

- Blessing, tu ne peux pas t’exprimer ainsi !

- Je m’en suis prise plein la gueule toute la journée mais ai gardé le sourire et suis restée polie. J’en ai ras-le-bol ! Finis les ronds de jambes et les sourires jaunes. Je ne suis pas certaine que tu apprécierais la Blessing qui est devant toi.

Je me lève, prends mon sac et me dirige vers la porte, au bord des larmes. Il me rattrape, me tire par la main et me plaque sur la porte.

- Pardon, bébé, pardon. Ne me quitte pas, je t’aime.

- …

- Tu es ce qui m’est arrivé de meilleur dans ma vie.

- …

- Je t’aime, Blessing, n’en doute pas. J’ai fait des erreurs et promets de ne plus recommencer.

Il rapproche son visage du mien, j’essaie de tourner la tête mais il est trop près. Je sursaute en sentant ses lèvres se poser sur les miennes. Je résiste durant quelques secondes puis laisse faire. Son baiser, brutal eu début, devient doux avec le temps ; je me laisse aller et passe les mains autour de son cou.

Nous haletons tous les deux en nous séparant. En entrouvrant les lèvres, j’ai le gout du sel dans ma bouche.

- Tu pleures, fait-il remarquer.

Je profite de cet instant de flottement pour le repousser et sortir par la porte de derrière en courant. J’essuie les larmes et fais mine de ne pas entendre les appels répétés de Malick. J’allonge le pas et arrive au portail que l

BLESSING, petit femm...