PROLOGUE

Ecrit par L'UNIVERS DE JOLA

Prologue:


Je suis assise sur le lit de cette chambre d'hôpital, tenant la main de Karelle ma meilleure amie, ma confidente et moitié. Elle est d'ailleurs la seule personne que je considère réellement comme mon parent ; et comme toutes les autres personnes à qui je tenais, elle est en train de partir. Je retiens mes larmes pour ne pas l'attrister alors qu'elle est entrain de me parler. 


Karelle : (Voix faible) Charly tu sais que tu es la seule personne en qui j'ai une confiance aveugle, je te confierai même ma vie si je le pouvais. Tu le sais n'est-ce pas ? 

Moi: (Retenant mes larmes) Oui chérie je le sais, je le sais. 


Karelle : Je veux que… 


Elle s'est mise à tousser bruyamment tant le fait de parler lui demande un grand effort. Le sang sortait de sa bouche. Paniquée, j'ai voulu sortir en courant pour chercher un médecin mais elle m'a retenu par le bras. 


Karelle : Attend Chacha


Moi: Non K, tu saignes par la bouche, je vais appeler le médecin. 


Karelle : Toi et moi savons que même s'il vient actuellement, il ne pourra rien faire pour moi. Je suis condamnée. 


J'ai laissé couler les larmes que je retenais depuis tant la douleur était forte dans mon cœur. J'étais à la fois en colère, frustrée et triste. En colère parce que ce maudit cancer s'en prenait à mon amie. Frustrée parce que malgré tout l'argent que j'avais, je ne pouvais rien faire pour elle car cette saleté était à son stade final. Triste parce que je savais qu'elle avait raison, elle était condamnée. Condamnée à mourir à à peine 28 ans de vie. Elle avait encore tant de choses à vivre, toute sa vie était encore devant elle. Elle était jeune, belle, avait un boulot, un mari aimant, une petite fille de 3 ans, des parents, des frères et sœurs en plus des amis qui l'aimaient tellement. Elle croquait la vie à pleine dents et partageait la bonne humeur et la joie de vivre partout où elle allait. Tout cela s'était arrêté, il y avait à peine 6 mois. 


      Ce matin où tout a commencé, nous étions en salle de réunion avec tous nos employés quand à la fin, elle avait eu le vertige et s'était plainte d'un léger mal de tête qui avait très vite été attribué au fait que nous ayons beaucoup travaillé et que nous n'avions pas mangé avant. Sauf que les semaines qui avaient suivi, elle se plaignait de plus en plus de maux de tête accompagnés de vertiges et de fatigue, au point où 2 semaines après elle s'était évanouie dans son salon. Bradley, son mari, l'avait emmenée à l'hôpital et moi j'étais restée veiller karly, ma filleule qui n'avait pas de nounou. La semaine qui avait suivi, le diagnostic était tombé, tumeur maligne au cerveau. Elle se développait tellement vite qu'elle avait déjà atteint les ¾ de son cerveau donc impossible à opérer. Nous avions refusé cette information. C'était inadmissible à la fois pour elle, pour Bradley mais aussi pour moi, donc nous avions cherché d'autres avis. On avait fait plusieurs structures, locales et étrangères, mais le résultat était encore et toujours le même, il fallait donc s'y faire. Un médecin à Londres nous avait conseillé de rentrer chez nous et de profiter des derniers instants avec elle. J'avais giflé ce monsieur qui nous racontait des inepties, comme si on allait tranquillement rentrer pour la regarder mourir. Il était hors de question qu'on fasse une telle chose, on allait se battre jusqu'au bout et dépenser jusqu'à notre dernier centime s'il le fallait, mais jamais on allait abandonner. Sauf que ça c'était mon idée car Karelle avait décidé d'écouter le monsieur et avait convaincu Brad de la ramener au pays, elle voulait passer son temps avec sa famille. Je ne pouvais pas rester là et la regarder mourir jour après jour, c'était au-dessus de mes forces aussi bien que lorsqu'elle m'avait dit de rentrer avec elle au Gabon, j'avais refusé. Ils avaient décidé d'abandonner et de la laisser mourir, je n'allais pas les accompagner dans cette bêtise. J'étais donc restée à Londres pour suivre quelques affaires que j'avais sur place pour passer le temps . Je m'y adonnais corps et âme pour ne pas avoir à y penser. 


     Il y a 3 jours, Brad m'a appelé pour me dire qu'ils étaient rentrés à l'hôpital depuis une semaine et que le médecin lui avait dit qu'elle n'avait plus pour longtemps et elle voulait me parler. J' ai sauté dans le 1er avion et ai couru à son chevet. Je l'ai retrouvé complètement pâle, amaigrie et sans cheveux. J'avais du mal à croire que c'était la fille qui me quittait à Londres 2 mois en arrière. Quand elle m'a vu, elle a souri et a essayé de se redresser sur son lit. À cause de sa force et de son courage, je me suis interdite de pleurer. Sauf que là, c'est difficile, je n'y arrive plus, je ne peux plus retenir mes larmes. Alors je pleure en silence en l'écoutant parler. 


Karelle : (Voix faible) Tu sais que si tu continues à pleurer je vais aussi m'y mettre non ? 


Moi: (Silence) 


Karelle: C'est ce que tu veux Chacha ? Tu veux me faire pleurer ? 


Moi: (petite voix) Non. 


Karelle : Donc arrête ça déjà. 


Moi: (Essuyant mes larmes) D'accord. 


  J'ai essayé autant que faire se peut de me retenir afin de ne pas la faire pleurer aussi. J'ai essuyé mes larmes et ai levé les yeux en soufflant pour qu'elles s'arrêtent et ce fut le cas. 


Moi: (Voix enrouée) C'est bon. 


Karelle : OK. Je disais donc que si je pouvais le faire, je te confierais ma vie. Mais à défaut, je te laisserai ce que j'ai de plus précieux, mon mari et ma fille. Je te les confie Charly, assure-toi qu'ils soient heureux après ma mort. Je sais que quand je partirai, ils seront complètement perdus. Mais je sais aussi que si tu es là, tu sauras comment les remettre sur le droit chemin. J'ai confiance en toi, je sais que tu es une femme forte, quoiqu'il arrive, tu te relèves toujours. Alors prends soin d'eux. S'il le faut, installes toi même à la maison mais s'il te plaît, ne les laisse pas tomber. 


   Je suis restée à la regarder sans parler, moi-même je ne sais même pas comment je vais faire pour tenir après son départ et elle veut me mettre son mari et sa fille entre les mains ? Par où je vais d'abord commencer à prendre de la force pour les porter ? 


Karelle : (Me serrant très fort la main) Promets-moi moi que quoi qu'il se passera tu ne les laisseras pas tomber Ly ! 


"Ly" est la façon dont elle m'appelle lorsque ce qu'elle a à me dire est trop sérieux ou lui tient à cœur et moi je l'appelle "Elle". 


Moi: (Après un moment) Je te promets que quoi qu'il arrive, je ne laisserai pas tomber ton mari et ta fille Elle. 


Elle m'a souri faiblement, a fermé ses yeux rapidement avant de les ouvrir à nouveau. 


Karelle : Je savais que je pouvais compter sur toi. Je veux aussi que tu me promettes une dernière chose Ly. 


Moi: Je t'écoute. 


Karelle : Promets moi aussi que tu ne vas pas te replier sur toi comme par le passé et que tu vas t'ouvrir à la vie car elle a encore beaucoup de choses à t'offrir. 


Hum ! Je veux déjà bien faire un effort avec ta famille, il ne faut pas aussi pousser le bouchon trop loin en me demandant plus que je ne peux faire. En cette vie, je n'y crois plus et je n'attends plus rien. Elle m'a déjà tout pris, mes parents, ma jeunesse, mon innocence, mon fiancé et mon bébé. La dernière personne qui me restait et me donnait espoir, elle est aussi en train de me la prendre, donc je ne veux plus rien d'elle. Tout ce qu'elle me donne, elle me l'arrache avec 2 fois plus de violence donc… 


Moi: (Sans grande conviction) OK. 


Karelle : (soupirant) Tu ne le crois peut-être pas mais je te l'ai toujours dit et te le redis encore Ly. Tu connaîtras le bonheur avec un grand "B". Tu auras une vie de famille heureuse, un homme qui t'aimera de tout son cœur et des enfants merveilleux. Tu accomplira de grandes œuvres et seras une source de bénédictions pour plusieurs personnes. C'est moi qui te le dis. 


Moi: (N'y croyant pas) Je te crois. 


Karelle : Et il en sera ainsi. (Après un bref silence) Tu sais, je t'ai toujours admiré. Tu n'as pas idée de la force qui émane de toi. Peu importe la difficulté qui s'est présentée à toi, tu as toujours su la surmonter et t'en es ressortie toujours plus forte et plus grande. Très peu de personnes auraient survécu à ce que tu as subi et auraient continué à avancer. Mais toi tu n'es pas comme tout le monde Ly, tu es une femme forte, une femme courageuse, une femme intelligente, une femme sage et une femme pleine d'amour. Peu importe ce que les gens diront ou penseront de toi, n'oublie jamais qui tu es. Peu importe les combats, les doutes, les oppositions, les peurs, n'oublie jamais qui tu es. Souviens-toi que comme tes parents, moi je crois en toi, tu es une étoile et surtout n'arrête pas de briller. D'accord ? 


Moi: (Reniflant) D'accord. 


Karelle : (Esquissant un sourire en me regardant) Je suis contente et fière d'avoir partagé ta vie. Merci d'avoir été mon amie. 


Moi: Je le suis et le resterai pour toujours. C'est moi qui suis contente et fière d'avoir partagé ta vie. Tu es et resteras ma lumière Karelle ADA ONDO 


 Nous sommes restée un moment silencieuses à nous fixer dans le blanc des yeux avant qu'elle ne m'invite à m'allonger à ses côtés. Je me suis exécutée et l'ai serrée dans mes bras comme on avait l'habitude de le faire par le passé. Après un moment, elle a levé son auriculaire et m'a dit de faire de même afin de les nouer. 


Karelle : Amie, moitié, confidente et sœur pour la vie. 


Moi: Amie, moitié, confidente et sœur pour la vie. 


Elle a porté nos 2 doigts à ses lèvres et y a fait un bisou, j'en ai fait de même. 


Karelle : Je t'aime Charly Star Nanda ne l'oublie jamais. 


Moi: Je t'aime aussi Karelle ADA Ondo épouse NZIENGUI. 


Après m'avoir souri, elle a soupiré. Ce fut son dernier soupir avant de s'en aller pour l'éternité. Mon amie, ma moitié, ma confidente, ma lumière, ma joie de vivre, ma sœur venait de mourir. L'horloge posée au mur indiquait 15h03 et c'était le 15/03 de l'année. J'ai fermé les yeux et me suis mise à pleurer en silence. J'avais l'impression qu'on venait de m'arracher une partie de moi. J'avais connu Karelle le jour de mon 6ème anniversaire et depuis on ne s'était jamais quittée, elle était tout pour moi. La douleur était telle que j'avais envie de crier, d'hurler jusqu'à en perdre la voix mais je n'y arrivais pas. 

   J'aurais voulu être à sa place, après tout, moi je n'avais pas grand chose à perdre dans cette vie contrairement à elle. Si c'était moi qui était partie, je n'aurais pas laissé un grand vide. Mis à part elle et quelques 2 ou 3 personnes, je ne vois pas qui m'aurait pleuré ou même regretté. En dehors de l'argent et des entreprises , je n'avais rien et je n'étais rien. Si j'étais morte à sa place, ça n'aurait pas changé grand chose à la vie des gens. Mais non, il a fallu que ce soit elle, la seule personne qui me restait et en qui je tenais venait aussi de m'être arrachée. Je n'attends plus rien de cette vie. J'en ai vraiment et définitivement fini avec ça. C'est bon j'ai compris la leçon. 


      Je suis restée près de 2 heures de temps toute seule avec elle jusqu'à ce que Brad et le médecin entrent dans la salle et me trouvent dans la même position que j'avais avant sa mort, mes yeux étaient fermés et je ne faisais aucun mouvement. Le médecin s'est approché et a dit à Brad que c'était fini, elle était morte. Ce dernier s'est assis à même le sol et s'est mis à pleurer en criant. Moi je refusais d'ouvrir les yeux et de la lâcher, ce qui fait que malgré les cris de Brad et les tapes du médecin, je restais stoïque… 


Deux semaines plus tard. 


Je suis debout comme toutes les personnes qui ont fait le déplacement jusqu'au cimetière de Plein Niger en train de voir le cercueil de Karelle descendre dans la tombe. Les aînés nous ont dit qu'ici personne ne doit pleurer car quand on enterre le défunt, pleurer est un mauvais présage. Je ne connais que trop bien la chanson car ce n'est pas le premier être chère que j' enterre, mais à la différence des autres où j'avais une personne pour me soutenir ; pour mes parents, ma tante ; pour mon fiancé et mon bébé, Karelle et la famille de tonton Étienne ; aujourd'hui je suis toute seule car elle était tout ce qui me restait. Ses parents et ceux de Brad avaient fait des petits groupes et se tenaient tantôt par la main, tantôt par la taille. Bradley même était entouré de part et d'autre par son petit frère Anthony et son meilleur ami Kenji. Moi j'étais dans mon coin et regardais comment on refermait le caveau de mon amie. 


    Une heure plus tard, tout le monde s'était retiré et était parti au domicile de Brad où se déroulaient les funérailles, moi, je n'avais pas bougé du cimetière. J'étais restée en train de fixer sa tombe. Je regardais avec stupéfaction l'inscription qu'ils y avaient mis.

 « Ci-gît Karelle Nziengui née Ada Ondo 19..-20.., nous ne t'oublierons jamais. Repose en paix ! »

Et c'était tout. Toute la vie de Karelle se résumait à ça. Je me suis allongée juste à côté de sa tombe et j'ai fermé les yeux. J'avais ainsi le sentiment d'être proche d'elle. Beaucoup de personnes , en me voyant , diraient certainement que je ne suis pas normale; mais je m'en fiche pas mal, être ou paraître normale actuellement est le dernier de mes soucis. Je suis restée là jusqu'à la tombée de la nuit, c'est le gardien qui m'a interpellée et m'a demandé de partir. Je suis montée dans ma voiture et suis partie chez Bradley. Comme il y avait encore beaucoup de monde, j'ai garé hors du portail. Lorsque je suis entrée j'ai constaté qu'ils étaient en pleine réunion, n'ayant rien à y faire, j'ai rebroussé chemin et ai croisé Kenji au portail il rentrait. 


Kenji: Tu es là ? Nous t'avons cherché partout Brad et moi en vain. Il a même essayé de t'appeler mais ton phone était fermé. Où étais tu ? 


Moi: Dans le quartier. 


Kenji: Ah OK. Tu sais un moment on a même pensé que tu étais restée au cimetière. On s'apprêtait à y retourner quand on a appelé Brad pour la réunion. 


Moi: je vois. 


Kenji: Alors où vas-tu ? 


Moi: je rentre chez moi, j'ai besoin de dormir. 


 En effet, ça faisait 2 semaines que je n'avais pas concrètement dormi. J'aidais pendant les funérailles, j'avais besoin de m'occuper l'esprit donc j'ai essayé de me rendre utile. Comme je n'avais pas sommeil, je ne dormais presque pas. Kenji a effectivement vu que j'étais fatiguée et n'a omis aucune objection à ce que je rentre chez moi me reposer un peu. 


Kenji: tu rentres comment ? 


Moi: ma voiture est garée dehors. 


Kenji: Tu pourras conduire toute seule jusqu'à la maison ? 


Moi: oui t'inquiète pas. 


Kenji : OK. Fais moi signe quand tu arrives. 


Moi: D'accord. 


Je me suis dirigée vers ma voiture, je suis montée et j'ai quitté les lieux. Je ne voulais pas aller dans ma grande maison, alors je suis allée à l'appartement du bord de mer. Une fois à l'intérieur, je me suis lavée et j'ai enfilé une grenouillère en forme de lapin rose qu'elle m'avait offerte avant de me mettre au lit. Je me suis souvenue que je devais faire un message à Kenji. J'ai rapidement allumé mon téléphone et j'ai envoyé le message. Après sa réponse, je l'ai à nouveau éteint et posé sur la table de chevet. J'ai profité pour soulever le cadre photo qui s'y trouvait. C'était une photo de Karelle et moi le jour de la soutenance de notre Master2 à l'université de Stanford aux États-Unis, la "Stanford graduate business school" . On s'attrapait par les épaules, les têtes collées et on souriait avec nos diplômes en main. J'ai regardé la photo un long moment avant de l'embrasser et de la serrer très fort contre ma poitrine, ce faisant, je me suis remise à pleurer tellement les souvenirs me remontent à l'esprit. 


     Je suis Charly Star Nanda, 28 ans, célibataire et sans attaches. La dernière personne que je considérais véritablement comme ma famille vient d'être mise en terre. Je ne sais pas encore comment je vais faire pour vivre sans elle, mais je sais une chose. Je tiendrai la promesse que je lui ai faite sur son lit de mort. Je prendrai soin de Bradley et Karly…


LE MARI DE MA MEILLE...