Prologue
Ecrit par Sandy BOMAS
Prologue
-Maman ? Pourquoi pleures-tu ? demanda Yasmine avec une voix triste.
J’ai tressailli en levant les yeux vers ma fille. J’ai essuyé mes larmes et je me suis levée de mon siège pour aller m’asseoir près d’elle sur le lit d’hôpital et je l’ai prise dans mes bras. Elle a tellement maigri ces dernières semaines. Je pensais que cela pouvait être une maladie virale ou l’alimentation mais mon cœur de mère n’a jamais imaginé que ma fille pouvait être si malade.
-Maman, tu pleures toujours. Est-ce que je vais mourir ? Est-ce que j’irai rejoindre papa au ciel ?
Deux questions si émouvantes formulées par une petite fille de quatre ans se trouvant déjà au soir de sa vie qui m’ont arraché un sanglot ; je sais que je ne devrais pas pleurer devant elle mais c’est juste que la nouvelle est tombée il y a peu de temps et je n’arrive pas à me faire à l’idée que je vais perdre mon enfant unique. J’ai fermé les yeux et les minutes passées en compagnie du docteur sont revenues me hanter.
« -Votre fille est malade Madame MIKALA. Vous êtes venue seule à l’hôpital ?
Je n’avais pas jugé bon de préciser que malgré mon âge, je demeurais encore une demoiselle. MIKALA étant mon nom de famille mais la priorité ne se situait pas à ce niveau.
-Je suis seule docteur…pourquoi ? demandais-je la voix pleine de panique.
-Votre époux se trouve où ? fit-il inquiet
-Je suis une mère célibataire docteur. J’ai toujours élevé seule mon enfant. Pourquoi aurais-je besoin de son père ? Mais dites-moi ce qu’il y a bon sang !!!!
Il a soupiré et son expression m’a alertée. J’ai compris qu’il y avait un problème bien plus grave que ce que je pensais.
-C’est la cinquième fois qu’elle s’évanouit depuis le début du mois et j’ai poussé les examens plus loin….J’ai découvert que votre fille souffre probablement d’une leucémie.
Choquée, je me suis levée d’un bond. Une quoi ? Est-ce une blague de mauvais goût qu’il est en train de me faire ?
-Ne vous affolez pas, asseyez-vous s’il vous plaît….
M’assoir ? Comment veut-il que je m’asseye ?
-Une leucémie ? Une leucémie dites-vous ? Demandai-je la voix tremblante. Voulez-vous dire que ma fille est entrain de mourir ?
Même si je ne savais pas de quoi il s’agissait précisément, j’en ai souvent entendu parler dans différents films que j'ai déjà eu à visionner et les acteurs en étaient décédés.
Son expression a été la réponse à ma question. Je me suis assise à nouveau sur mon siège. Il s’est mis à parler mais je n’entendais plus rien. J’étais comme pétrifiée. Je ne cessais de revoir le moment où mon bébé avait poussé son premier cri et que la sage-femme l’avait posé sur ma poitrine. Je me rappelle que je m’étais promis de tout faire pour qu’elle ne manque jamais de rien. Pour qu’elle grandisse entourée d’amour et de tout ce dont elle aura besoin. Je m’étais promis de me consacrer à elle et d’être à la fois un père et une mère pour elle. Ce sont les enfants qui enterrent leurs parents pas l’inverse. C’est cette pensée qui m’a achevée. J’ai fondu en larmes et depuis, je pleure tout le temps ».
-Non mon bébé…je suis juste émue répondis-je en enfouissant ma tête dans ses cheveux crépus.
-C’est quoi être émue alors ? Cela veut dire que lorsqu’on est ému, on pleure ?
-Oui Yas, c’est exactement cela. Quand on est ému comme je le suis, on peut pleurer….
-Je suis malade hein maman demanda t-elle d’une petite voix toute triste.
Que faire dans ce cas ? Lui mentir ou lui dire la vérité ? Puis-je même dire à une fillette de quatre ans qu’elle est condamnée ?
-Oui ma grande, tu es malade mais ce n’est rien de grave.On viendra souvent à l’hôpital jusqu’à ce que tu ailles mieux. Tu as foi en moi non Yas ?
-Oui Maman
-C’est qui ta magicienne ? demandais-je en la fixant droit dans les yeux ?
-C’est toi Maman ! répondit-elle en m’adressant un large sourire qui m’a fait chaud au cœur.
-Bon tu sais ce qu’on va faire ? Tu vas t’allonger et te reposer un peu. Je vais régler les formalités de l’hôpital et on pourra rentrer à la maison.
-D’accord.
Je l’ai bordée quelques minutes puis je l’ai laissée seule. En sortant de la chambre, je me suis refugiée dans un coin et je me suis mise à pleurer. Je n’arrivais plus à m’arrêter. Oh mon Dieu ! Si c’est à cause de mes erreurs précédentes que tu punis la chair de ma chair, laisse la et prends moi à sa place. Elle est trop petite pour s’ajouter au nombre de toutes les personnes que la vie martyrise. Elle n’est pas responsable de mes erreurs et ne doit en aucun cas avoir à payer pour ce que j’ai fait.
Je m’appelle Francine MIKALA et je suis d’origine gabonaise punu grâce à mon père (paix à son âme). Je suis une fille du sud, de la Ngounié et ma mère est une béninoise. Donc je suis moitié gabonaise et moitié béninoise.
Agée de 32 ans, je suis célibataire et maman d’une adorable petite fille : Yasmine MIKALA âgée de quatre ans. Elle porte mon nom de famille parce que je ne pouvais pas lui donner le nom de son père. On a tous commis des erreurs sur cette terre. Je ne vais même pas essayer de justifier les miennes parce que contrairement à d’autres (les vertueuses) je les assume parfaitement. Ou du moins je les assumais jusqu’aujourd’hui. La vie me met face aux conséquences de mes actes.
-Madame MIKALA ? Que faites-vous dans ce coin ? demanda le docteur en apparaissant brusquement derrière moi
-Je voulais juste un moment de solitude pour pouvoir pleurer sans que ma fille ne me voit.
-Ecoutez…Tout à l’heure, vous ne m’avez pas laissé le temps de tout vous expliquer et justement c’est vous que je cherchais.
-Que voulez-vous me dire de plus que vous n’aviez déjà dit ?
-Il y a un centre de cancérologie non loin d’ici, je vais vous donner la carte et vous appellerez pour vous renseigner. Ils vous expliqueront la suite et confirmeront ou infirmeront mon diagnostic.
J’ai levé la tête soudain intéressée.
-Je ne vais pas vous mentir en vous disant que les semaines ou mois à venir seront faciles. Et si son père est en vie, vous devriez le contacter. Il faut qu’il vienne faire des tests et vous aussi d’ailleurs pour qu’on voit s’il existe des possibilités que l’un de vous lui donne de sa moelle.
-Pardon ? m’exclamai-je en me rendant compte que la vie me mettait réellement devant mes erreurs.
-Il y a bien sûr les examens préliminaires, la chimiothérapie et tout mais le don de moelle osseuse est le moyen le plus sûr en cas de leucémie. Il vous en parlera plus quand vous le verrez. Tenez, voici sa carte.
J’ai pris la fameuse carte, l’esprit en proie à tous types d’émotions.
« Tout mon monde s’écroule peu à peu tel un château de cartes ».
-Merci….dis-je faiblement
-C’est mon travail. On vous fera les papiers de sortie.
Il m’a tapoté l’épaule avant de m’abandonner à mon triste sort. Les mains tremblantes, je fixais la carte qu’il venait de me remettre.
« J’ai l’impression que la course contre la mort vient de commencer ».
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