Quand les Souvenirs resurgissent
Ecrit par Kossilate
Chapitre 27 : Quand les souvenirs resurgissent (Part 1)
*Adjilé *
La dernière chose que je souhaitais en venant à Popo, c’est de me retrouver confronter à l’objet de ma fuite. Mais comme le disent si bien les dictons, le monde est petit et seuls les montagnes ne se rencontrent pas. Quelques doutes persistaient dans ma tête mais j’avais la ferme conviction que Shadé et la femme qui a bouleversé ma vie quelques semaines plutôt sont la même personne. Je ne pouvais pas autant confondre les choses. Même si le visage entier de ma belle inconnue reste un mystère pour moi, il y a cependant certains points qui ne peuvent être confondu, en commençant par sa bouche. Une bouche que j’ai tellement regardé, tellement embrassé, qu’il me serait quasi impossible de ne pas la reconnaître car elle éveille en moi un désir brut et sauvage. Pourtant en quittant Lomé, il y a trois jours, j’avais décidé de tirer un trait définitif sur ce désir et sur tous les souvenirs qu’il réveillait en moi. Depuis l’épisode Raïssa qui a fait de moi le monstre que Nani décrit, je n’avais plus connu une telle soif a la vue d’une femme, une telle entente charnel mais aussi intellectuel et le fait de réaliser que je ne revivrai pus pareille symbiose m’a replongé dans l’état de léthargie dans lequel m’avais laissé Raïssa.
- Adjilé, qu’est ce que tu entends par c’est moi la victime ?? demanda Nani dont le visage c’était décomposé lorsque je lui avais répondu
- ……
- Adjilé, mon cœur n’a plus l’âge de jouer aux devinettes alors parle s’il te plait, ajouta t elle d’une voix tendue
- Nani, j’ai couché avec une femme que je crois être Shadé et je suis celui qui est sorti de cette relation le cœur brisé…encore, murmurai-je en me levant.
J’ai besoin de respirer, d’arranger mes idées et d’échapper au regard inquisiteur et septique de Nani. Connaissant ma grande mère, je sais que ce résumé simple de l’histoire ne lui conviendra pas. Elle voudra savoir comment cela est arrivé et ce dans les moindres détails or je suis tout sauf près à me remémorer ces souvenirs doux-amers. J’essaie de puiser mon calme du roulis des vagues que l’on aperçoit depuis la baie vitrée du bungalow. Ces baies vitrées sont l’une des caractéristiques des bungalows du Millenium Popo Hôtel que j’affectionne particulièrement. Elles donnent une vue unique sur la mère de Popo en déferlement constant, et par ailleurs, elles permettent de profiter de panoramas splendides lors du lever et du coucher du soleil. Je comprends pourquoi Nani aimait autant cet endroit et préférait séjournée dans un bungalows plutôt que dans une suite.
- Que tu crois être ??? n’as tu pas vu son visage ???
- ……
- Petit prince. Qu’est ce qui s’est passé ?? questionna Nani dont la voix était remplie d’une sensation d’urgence
- …..
- Déjà à ton arrivée, j’avais remarqué ton air morose et je me demandais ce qui t’était arrivé. J’attendais que tu m’en parles quand tu seras prêt mais désormais, je ne peux me le permettre. Tu sais que je t’aime plus ce que tout mais si l’une de tes bêtises pourrait avoir un incident sur mon travail actuel, j’ai besoin de le savoir. D’autant plus si cela concerne, cette jeune fille pour qui j’avais commencé à nourrir de grand projet, déclara Nani d’une voix qui se voulait ferme mais qui m’amène cependant à faire volte face.
Je me doutais bien que Nani appréciait Shadé mais pas à ce point. Il ne pouvait en être autrement, si elle l’avait choisi pour rédiger sa biographie qui était en projet d’écriture depuis bientôt cinq ans. Je ne connaissais pas toute son histoire mais elle nous avait souvent dit à mes frères et moi, qu’elle n’avait rien de rose et que pour cela elle nécessitait d’être écrite par quelqu’un d’objectif et non quelqu’un en manque de gloire ou de potins. Secouant ma tête pour me ramener dans l’instant présent, je retourne m’asseoir dans le canapé en face de Nani et je plante mon regard dans le sien, ou tout moins je fais semblant de le faire. Je sais par avance quelles émotions, ils reflèteront au cours de mon histoire et je n’avais pas besoin de les voir. Néanmoins, ma grand-mère insistait toujours pour qu’on la regarde dans les yeux pout lui parler donc je n’avais pas vraiment le choix de faire autrement.
- Nani, je t’avais dit que je revenais de Lomé où j’avais accompli une mission pour papa, n’est ce pas ? demandai-je en prenant mon souffle.
- Oui, je men souviens mais quel est le rapport avec Shadé ?
- C’est à Lomé que je l’ai rencontrée. Ce voyage qui était censé être un simple voyage d’affaire a eu sur ma vie, bien plus de répercussions qu’il n’aurait du.
- C’est-à-dire ??demanda Nani en arquant le sourcil
- J’ai rencontré Raïssa à Lomé, avouai-je d’une traite.
- Je le savais. Cette petite peste….que je l’attrape et elle saura qu’il ne faut pas réveiller l’eau qui dort, cria ma grand-mère en se levant de son siège comme ci elle en était éjecter par un ressort
- Nani, s’il te plait calme toi, suppliai-je en la regardant faire les cents pas dans le petit séjour et en traitant Raïssa de tous les noms de maladie qu’elle connaissait.
La situation aurait pu être drôle si je ne m’attends pas à être le suivant lorsqu’elle saura le fin mot de l’histoire.
- Attends, lança ma grand mère en se figeant. Où est le rapport avec le fait que tu as potentiellement couché avec mon auteure ??? demanda-t-elle en en fronçant les sourcils.
- Tu le sauras si tu arrêtes de me couper. Je sais que je ne suis en position de réclamer quelque chose mais raconter cet épisode n’est pas une partie de plaisir pour moi…alors si tu pouvais me laisser tout fini d’une traite, dis je en me pinçant l’arrête du nez.
- …….
Sans rien ajouter, Nani regagne sa place et se remet à me fixer. J’en viens presque à regretter ces va-et-vient.
- Dernièrement Papa et maman se sont trouvé une véritable passion pour l’art et en particulier pour celui béninois. Ils comptent d’ailleurs investir dans un musée privé qu’ils rénoveront et rempliront. Papa a ainsi lancé des recherches pour localiser nos trop nombreux objets culturels historiques éparpillés dans le monde.
- Je sais, vu que c’est moi qui leur ai proposé ce musée en particulier, répondit Nani avant de se taire sous mon regard suppliant.
- La seule fausse note sur le tableau, c’est que papa à un contrat d’exclusivité dans sa société. Contrat dont il a eu l’idée tout seul, mais qui entrave désormais une activité en parallèle. En outre, il ne se voit pas laisser le fruit de sa sueur aux mains cupides des membres du conseil d’administration, expliquai-je à Nani qui me souriait de façon sarcastique.
C’est sa façon à elle de me dire, j’ai vu claire dans ton jeu et je lui suis gré de ne pas m’arrêter. En effet, nani avait compris que si je lui racontais tout cela c’est pour retarder le moment où je lui dirai ce quelle voulait réellement entendre. Pas que tout ce que je raconte n’a aucun lien avec l’histoire, mais ce sont des détails, dont on aurait bien pu se passer.
- Papa compte donc nous léguer ses parts de l’entreprise a mes frères et moi, mais en dépit de son titre d’actionnaire majoritaire, il a besoin de certaines voix des membres du conseil pour une tel transaction. Et pour les convaincre de nos compétences, il nous a laissé nous occupé d’un marché assez compliqué mais qui pourrait ouvrir de nouveau horizons a la boîte
- …..
- Tu te souviens de Madame AYI ? demandai je
- Je pense. N’est ce pas la cliente de ta mère qui a perdu son mari il y a quelques années ??
- Oui c’est elle. Son mari était le directeur des sociétés de fabrication de valises AYI
- Ah, oui ! maintenant que tu le dis…..
- Depuis la mort de son mari il y a cinq ans, elle a reprise l’entreprise et lui a fait atteindre de nouveau sommet dans la sous région. Elle compte faire entrer ses valises sur la scène internationale et cela nécessite selon elle une nouvelle campagne publicitaire.
- Adjilé…, commença Nani pour marquer son impatience.
- J’y viens. La société de papa a été contactée pour proposer un nouveau design pour les valises et la campagne publicitaire qui va avec. Mes frères et moi avons donc été chargés de ce contrat. Adélé s’est occupé de dessiner la maquette, Akanni a trouvé les meilleurs marchés pour les matériaux, Adechina a mis en place le modèle publicitaire et moi je me suis occupé de la paperasse et de la présentation du produit.
- ……
- Il y a deux semaines nous sommes tous partis à Lomé au Togo pour la dite présentation. Nous fûmes surpris d’apprendre que nous n’étions pas les seuls. Madame AYI avait contacter deux autres sociétés de design publicitaire. Faisant fi de l’affront nous avons présenté nos produits et assisté à la présentation des concurrents. Après quelques discussions supplémentaires, le marché nous a été attribué et nous avons ensuite été conviés au bal masqué que la directrice donnait le soir même en l’honneur du rétablissement de sa filleule. Pour ne pas la froisser et mettre à mal notre collaboration naissante, j’ai dit oui….ça a été ma première erreur
Flashback
- Vu que c’est toi qui as dit oui et qui est en plus l’aîné, je ne crois pas que ma présence soit requise, déclara joyeusement Adélé mon frère cadet, lorsque nous nous retrouvâmes à l’hôtel.
- Je pense que je vais faire comme toi et ne pas y aller , renchérit Akanni notre petit frère en s’affalant comme une masse dans l’énorme canapé du salon.
- Vous ne pouvez pas faire ça, répondis je calmement en me dirigeant vers le bar pour mes servir un whisky
- Attends Adjilé, je veux te faire goutter ma recette de mojito, s’exclama Adechina en pénétrant dans la suite juste après moi.
- Pourquoi moi, fais-le plutôt gouter à ton jumeaux affaler dans le fauteuil comme une femme enceinte, récriminai je lorsqu’elle courut m’arracher le verre de Jack Daniels que je m’apprêtais à vider.
- Je suis son frère jumeau mais c’est toi elle préfère, lança Akanni depuis son canapé
- Qui ne préfère pas le petit ange Adjilé ? demanda Adélé en pianotant sur son portable.
- Les gars, la jalousie ne vous va pas au teint, répondit China à ma place. Et ne me parle pas de préféré hein Akanni. La fois dernière quand je tai supplié de venir gouter mon cocktail, n’as tu pas fui en criant qu’il te restait beaucoup de chose à vivre avec tes enfants que tu n’as même pas encore?? demanda t elle provoquant ainsi un éclat de rire général.
J’avais conscience qu’à cet instant nous agissions comme des enfants, mais nous chamailler était notre façon de décompresser après ce mois pour le moins intensif. Nous n’avions jamais autant travaillé ensemble et en si peu de délai et si au départ l’entente avait été chaotique nous avons vite trouvé notre rythme pour donner le meilleur de nous et ne pas décevoir notre père.
- Mais plus sérieusement les gars, pourquoi vous rentrez ? demandai-je en rejoignant mes frères au salon.
- Sincèrement moi ça ne me dit trop rien, finis par avouer Akanni. Madame AYI est connu pour le faste de ces soirées et vous savez comment je me sens à l’aise dans ce genre de fête, dit en faisant un grimace
- Là, il marque un point. Il risque d’être tellement crispé et mal à l’aise qu’on en perdra le contrat, dit China en venant au salon avec un plateau de quatre verre de mojito.
Plateau qui fut accueilli avec un regard septique de la part de mes frères et moi. China aimait toujours sortir des normes conventionnelles des cocktails et nous nous retrouvions toujours à jouer ses cobayes au plus grand dam de nos estomac et de tout notre être d’ailleurs.
- Goutez avant de juger, ordonna t elle en surprenant nos regards peu convaincus. Moi pour ma part, je compte bien profitez de cette soirée, si le conseil d’administration accède à la requête de papa, Dieu seul sait quand on aura le temps de nous amusez de nouveau, déclara t elle prenant une gorgée dans son verre.
- Elle n’a pas tord les gars, fis je en buvant mon verre a contre cœur.
- Il n’est pas si mal, s’étonna Akanni qui en avait fait de même.
- Pour ma part, j’ai des enfants et une femme a retrouvé donc je ne peux me permettre de rester. Tout a été conclu donc on n’a pas à avoir peur de la froisser. Ce qui m’étonnerait même vu comment elle était emballée par notre projet, affirma Adélé en suivant le mouvement en buvant son breuvage.
- Donc China et moi seront les seuls à nous présenter à ce bal ???
- Je le crains, répondit Akanni qui pour une fois semblait énormément apprécier un cocktail fais par sa jumelle.
- Ok ! petite sœur, je pense qu’on devrait aller chercher quelques chose à se mettre pendant que nos chers frères font leur valises, affirmai je en me levant.
Le soir venu China et moi nous présentons à la villa de Madame AYI où se déroulait l’événement. Akanni n’avait pas tord en parlant du faste de ce genre de soirées. Tout respirait l’opulence et l’aisance. Du jardin à l’allée dans laquelle s’engageaient les voitures, en passant par la devanture de la villa elle-même. Mais cela n’était en rien comparable à l’exubérance des fourreaux des dames et des masques des hommes présents dans la salle principale et qui ne manquaient de me rappeler par contraste l’habillement simple et raffiné que ma sœur et moi avions optés. J’étais vêtue d’un smoking trois pièces bleu nuit rehaussé avec une chemise en wax et d’un masque vénitien très simple.. China quant a elle, avait opté pour un fourreau argenté avec un corset et des louboutins noir classique. Seuls son masque et ses accessoires ô combien nombreux, rappelaient l’esprit du wax qui était autant de mise que celui du masque. En effet, chaque invite avec une pièce en wax dans son vêtement et même la décoration de la salle rappelait le pagne. Malgré la présence d’un buffet d’amuse gueule et d’un bar, de nombreux serveurs déambulaient dans la salle au rythme de la musique assurée par l’orchestre de cote d’ivoire invité pour l’occasion. Les lumières de la salle étaient vives comme pour accentuer l’éclat naturel des couleur des wax
Je ne tardai pas à retrouver madame AYI et avec me sœur nous allâmes la saluer et la complimenter sur cette soirées « magnifique »
- Bonsoir Madame AYI, dis-je en retirant mon masque.
- Oh ! fit elle en abaissant le sien aussi. Comment m’avez vous reconnu jeune OLYMPIO, s’exclama t elle.
- La vraie question est comment n’aurai je pas pu vous reconnaître ? demandai je en lui faisant un baisemain et en me retenant de lui rappeler que c’est ma mère qui lui avait confectionné sa robe, sous le regard hilare de China.
- Beau parleur va, gloussa t elle en faisant mine de me frapper avec son masque à bâton. Le contrat est déjà signé vous n’avez plus besoin de me faire du charme même si je dis avouer que j’apprécie.
- Eh bien ! pourquoi m’arrêter alors, dis je en lui faisant mon plus beau sourire.
- Il est toujours ainsi votre frère, minauda t elle en regardant China
- Non, il n’est ainsi qu’avec les belles femmes, répondit China en se prenant au jeu.
- Je ne suis plus de toute fraîcheur mais si vous aimez les belles femmes, laissez moi vous présentez ma filleule, dit elle en faisant signe à une jeune femme pas loin de nous.
- Monsieur et mademoiselle OLYMPIO, permettez moi de vous présentez ma filleule Raïssa OTEGBEYE, annonça t- elle tandis que la concernée retirait sensuellement son masque.
Je du me retenir à ma sœur pour ne pas tomber à la renverse, je lui la même expression dans les yeux de China. Avant de ne pouvoir remarquer quoi que ce soit, Madame AYI fut accaparée par un nouvel invité qui réclamait sa présence. Dès qu’elle fut à une distance raisonnable, ma sœur et moi fîmes volte face pout ne pas avoir à parler avec cette vampire qui avait sucé bien plus ce que mon sang.
- Attends Wil, je dois te parler, entendis je dans mon dos tandis que main légère me retint quelques secondes.
- Comment oses tu encore l’appeler ainsi, sale sorcière, répondit China en se retournant pour lui offrir son sourire le plus fake et le plus hargneux.
Ça c’était ma sœur tout craché, toujours prêtre à répondre à toute attaques tout en préservant les apparences.
- Je ne te parle pas China. Wil regarde moi
- Tu ne me parles pas hein ??? quand tu parles à Wil tu parles à toute la famille OLYMPIO donc là tu la fermes et tu laisse mon frère en paix espèce de sacabo.
- Je n’ai ni d’ordre ni d’insulte à recevoir dune gamine en manque de respect, répliqua perfide
- C’est toi la gamine en manque de respect, lui assena China. Tu as perdu le droit de lui parler depuis bien longtemps.
- Espèce d’enfant gâtée
- Que ce soit la dernière fois que tu parles ainsi à ma sœur. Le seul truc qui m’empêches d’être aussi discourtois que toi c’est ta marraine car moi au moins on m’a appris le respect de soi et des autres. Et China a raison. Tu as perdu le droit de m’appeler le jour où tu as accepté d’écarter les jambes à mes ex-amis.
- Wi….
China et moi la laissons sur place et nous allons profiter de la soirée a l’autre bout de la salle aussi loin d’elle que possible. Mais c’était sans compter sur la ténacité de cette fille. Elle ne manqua aucune occasion pour se retrouver au même endroit que moi ou pour essayer de discuter avec moi comme elle le disait. Je réussis a convaincre China que cela ne me faisait rien de me retrouver dans la même pièce qu’elle mais je ne réussis pas à endiguer le flux de souvenir douloureux attachés a son nom. Je sortis donc un moment histoire de me calmer et de respirer de l’air pur. Mes pas me portèrent dans le jardin où je m’assis sur un banc, comme convoquer par mes souvenirs, je vis Raïssa se matérialiser devant moi