
49- Les couleurs de nos amours
Write by lpbk
Le cœur léger, je regagne mon appartement. Je ne sais pas pourquoi mais tout ce que Tristan nous a raconté ne me fait ni chaud i froid. Mes parents et même Iris semblaient bien choqués d’apprendre les tréfonds pervers e la vie de leur fille et cousine. Je comprends mieux la réaction de sa belle-mère maintenant. Mes parents avaient fabriqué un monstre. Oui, ils étaient responsables de ce qu’était Tina. A force de lui passer le moindre de ses caprices. Je commence même à croire que ma sœur a des problèmes psychologiques. Et dire qu’après tout ça, la seule chose qu’elle avait trouvée à faire après avoir pleuré avait été de me sauter à la gorge.
« Humm… », fis-je en me regardant dans la glace.
J’effaçais la buée de ma paume de main.
« Qu’est-ce que tu as changé Nowa ! », m’exclamais-je.
Le constat était là, j’étais passée de petite fille timide à jeune femme sûre d’elle. L’amour m’avait transformé. Mon amour pour Rudy m’avait poussé à grandir, à me dépasser. Je n’avais pas eu peur de mes parents lorsque j’avais dû affronter ma sœur. Ma sonnerie retentit, m’arrachant à ma rêverie. J’attachais une serviette et je m’en allais ouvrir.
« Tu as l’air surprise de me voir ! »
Je souris. Il a raison, je suis surprise. Je pensais que je devais aller chez lui. Qu’est-ce qu’il fait là ?
« Tu ne dis rien ? Je peux entrer ? »
Je me mettais sur le côté pour le laisser passer. Mon cœur cognait fort dans ma poitrine. Un peu comme à notre première rencontre. Il me regardait, je le regardais.
« Tu devrais t’habiller. », finit-il par dire en s’approchant de moi.
Je sentais mon rythme cardiaque s’accéléré à mesure que son regard léchait chacune des parties nues e mon corps. Je sentais la terre se dérober sous mes jambes et une chaleur envahir mon intérieur. Un brasier ardent naissait en moi.
« Tu rêves mon cœur. »
« Mon cœur ? »
« Arrête de te mordre la lèvre ainsi Nowa. Tu sais que j’ai faim. »
« Je sais que tu as envie de crêpes. »
« Non ! J’ai envie d’autre chose. », dit-il en s’approchant de moi encore.
Il soupira, serra les mâchoires.
« De quelque chose de plus chaud et de plus moite Nowa. »
Je reculais jusqu’à la porte, posant ma tête contre elle. Je la sentais lourde, pesante.
Puis, tout d’un coup, il se retourna et alla s’assoir comme pour mieux m’observer.
« Dans quelques temps, je vais devoir quitter la Côte d’Ivoire. »
« Pardon ? »
Alors ça, je ne m’y attendais pas. Il va quitter la Côte d’Ivoire ? Quoi ? Donc tout ce que j’avais fait il y a quelques heures c’était pour rien ? Je me tournais pour prendre la direction de ma chambre, j’étais folle de rage.
Il se leva et me rattrapa, me forçant à m’arrêter.
« Je veux que tu viennes avec moi. »
« Quoi ? Qu’est-ce que tu racontes Rudy ? Je ne sais même pas o tu vas et tu veux que je te suive ? »
« C’est tout à fait ça mon cœur. Je veux que tu viennes avec moi. Parce que je veux me coucher et me réveiller à tes côtés. Je veux devenir meilleur à tes côtés. Je veux que tu deviennes meilleure Nowa. », rétorqua-t-il en me lâchant le bras.
« Tu te rends compte de ce que tu me demandes ? Tu me demandes de quitter toute ma vie pour toi. De tirer un trait sur tout pour toi Rudy. Juste pour toi ? »
« Non ! Je te demande de tirer un trait dur ton passé pour construire ton avenir. Je te demande de… »
« Non ! Ne fais pas ça ! Ne fais pas ça Rudy. »
Mais c’était trop tard. Il avait déjà un genou au sol et sous mon nez, brillait un anneau. Il était petit mais si beau.
« Nowa, je te le demanderai une seule et unique fois. Nowa NYANE… tu es la seule femme qui fasse battre mon cœur autant. Je suis conscient de ce que je fais ce soir, je suis conscient du fait que tu ne sois pas un cadeau mais c’est avec toi que je veux partager le reste de ma vie. Ce soir, tu peux dire oui ou non Nowa. »
Je respirais tellement fort que j’avais peur de tomber dans les pommes. Il prit l’une de mes mains et la caressa.
« Si je dis non… »
« Humm… Je serai perdu. »
« Et si je dis oui… »
« Je serai l’homme le plus heureux du monde Nowa. Je n’aurai peut-être pas la meilleure femme du monde, ni la plus belle mais j’aurai celle qui fait battre mon cœur comme aucune autre. »
« Je peux aller me laver le visage ? »
« Pour être sûre que tu ne rêves pas ? », me demnda-t-il.
« Oui. »
Il soupira, se mit debout et me laissa passer. Je me suis enfermée dans la salle de bain durant une éternité. J’ai fait couler un bain et je m’y suis enfoncée. Quand je me suis réveillée, l’eau était froide. Combien de temps s’était-il écoulé ? J’ai marché sur la pointe des pieds jusque dans ma chambre où je l’ai trouvé allongé sur le lit. Je me suis placée au-dessus de lui pour être sûre qu’il dormait. Il dormait. Je suis sortie avec une paire de draps et je suis allée m’allonger dans le canapé au salon. Ma tête tournait, j’ai avalé un comprimé et je me suis endormie mais dès l’aube, j’étais déjà debout alors, je suis allée dans la cuisine. J’ai sorti le nécessaire et j’ai fait des crêpes. Au Nutella. Je me suis assise sur le tapis, le visage à hauteur de la table basse. Le regard plongé sur le petit bijou.
« Tu n’es pas mal tu sais. Humm… Pourquoi il faut toujours qu’il me fasse des trucs improbables ? Ce n’est pas drôle ! Et si je t’essayais ? »
Je me saisis de l’anneau et je le passais à mon doigt. Il brillait tellement. Je ne pus m’empêcher de me rappeler ce jour, ce fameux après-midi au débarcadère. Il avait l’air de l’homme trop sûr de lui et hier, il était différent. On dirait qu’il avait peur de m’entendre lui dire non. Nul doute que Rudy avait changé.
« Elle te va bien pourtant. », chuchota-t-il à mon oreille, me faisant sursauter et cacher ma main.
Puis, il est venu se mettre en face de moi.
« Je n’ai pas dit non. »
« Tu n’as pas dit oui non plus. Alors ? »
« Alors elles sont prêtes tes crêpes. »
Je me levais et j’allais ramasser l’assiette dans la cuisine pour venir la poser devant lui. Il prit une et l’avala sans rien dire. Puis une deuxième.
« Je pensais que le Nutella c’était pour un autre usage. », me dit-il l’air plein de malice.
« Tu es fou ! »
« De toi Nowa ! C’est de toi que je suis fou. Tellement fou que tu vois, j’ai plus peur que tu dises non que de ce qui pourrait arriver après si tu me disais oui. »
« Alors tu es vraiment près à te passer la corde au cou ? »
« Si c’est toi la corde je le suis ! »
« Et si les choses ne marchent pas comme tu le penses ? »
« Je ferai tout pour qu’elles marchent. »
« Mais Rudy, la vie n’est pas un conte de fée ! Tout ne se passe pas toujours bien. Et si un jour, tu le regrettes ? Si je ne te rends pas heureux ? Et si… »
« Arrête avec les si ! Tu as peur de quoi ? »
« De tout ! J’ai peur de ne pas être à la hauteur. »
« Nowa, tu es belle, tu es intelligente et tu es bonne. Tu es même super bonne. »
Il m’arracha un rire.
« Je suis sûre que c’est seulement pour ça que tu veux m’épouser. »
« Un peu ! Plus sérieusement, tu décides quoi ? Tu ne vas pas me faire croire que tu as besoin de 24h pour te décider. Je peux avoir un peu plus de chocolaté ? »
« Oui. », répondis-je en prenant l’assiette.
Je suis retournée dans la cuisine avec elle et sur la crêpe du dessus, j’ai dessiné un oui plutôt maladroit avant de la porter à nouveau à Rudy.
C’est peut-être trop tôt pour que nous nous marions mais je crois que Rudy c’est le bon. Sinon je n’aurai jamais affronté ma sœur aussi frontalement. Sinon après avoir su que ma sœur était passée dans son lit, je n’aurai même plus jamais accepté de le revoir.
« La tête que tu fais. »
« Oui, c’est ma tête de l’homme le plus heureux du monde ! »
Il se mit debout et s’approcha de moi pour m’embrasser.
Rudy EYA
Assis dans mon salon, je fais une partie de jeux vidéo avec mes amis. C’est l’une des dernières parties que nous ferons tous ensemble. Ils vont me manquer c’est certain mais une part de moi est plutôt contente de quitter Abidjan et son ambiance de folie.
« Et si tu craquais à nouveau pour une guinéenne ? »
« Il n’y a pas de chance ! J’ai déjà ma femme et pas de bol, elle est canon. Et toi ? Iris, tu lui passes la bague au doigt quand ? »
« Même si notre relation est un long fleuve tranquille, je préfère que nous prenions encore quelques temps. »
« Jouez au lieu de causer. »
« Et toi Loïc ? Tu continues de nous faire croire que tu es allé jusqu’à Bamako juste pour faire plaisir à Georgette ? Calvin, dis-lui que nous n’y croyons pas un instant. »
Nous nous charrions tranquillement et gentiment en attendant l’arrivée des filles. Nous avons prévu un diner entre amis. Elles arrivent ensemble, toutes souriantes. Je me demande si c’est le fait de nous voir qui les rend aussi heureuses.
« Vans ou escarpins ? »
« Euh… Escarpins ! »
« Vans ! Ça se voit que ce n’est pas toi qui auras les orteils en feu en dormant. »
« Mais moi j’aime te voir avec des escarpins mon cœur ! C’est sexy ! »
« Vans !!! »
« Humm… De toutes les façons, tu sortirais pieds nus que tu serais aussi belle. Je t’aime mais s’il te plait dépêche-toi ! Tu deviens comme Iris. »
Comme Nowa trainait un peu, les autres ce sont avancés. J’ai dû l’attendre encore une quinzaine de minutes car elle ne trouvait pas son rouge à lèvres. Elle en a une bonne dizaine mais je ne comprends pas cette manie selon laquelle les couleurs dépendraient de son humeur du jour, du moment.
« Arrête de te plaindre. Tu as attendu quoi ? Cinq minutes à peine. »
« Quoi ? Ca fait bien vingt minutes que je t’attends. Allez monte ! Je suis sûr que les autres pensent que nous sommes en train de faire l’amour. »
Je démarre et nous sortons du parking. En arrivant juste dans la rue, je remarque la voiture de Mika. Le capot est ouvert et il est penché, il doit avoir une panne. Je le dépasse puis je me gare.
« Tu fais quoi ? », me demande Nowa.
« Rien mon cœur. Reste là. »
Je suis descendu et j’ai marché jusqu’à lui.
« Bonsoir Mika. »
Il s’est redressé, surpris de me voir.
« Bonsoir. Tu vas bien ? »
« Oui et toi ? »
« Ça va. »
« Il a un souci ton moteur ? »
« Pff… Je ne sais pas trop. Je n’arrive pas à démarrer. »
Je me suis également penché pour regarder son moteur.
« Tu as vérifié le carburateur ? »
« Oui. »
« Et le filtre à air ? »
« Aussi. »
Je trifouillais un peu le radiateur mais avec la lampe de son portable pour seul éclairage c’était un peu difficile alors, je le proposais de le déposer où il allait.
« Je ne veux pas t’embêter Rudy. Je peux prendre un taxi pour y aller. »
« Mais non… Je te dépose à la clinique et je continue. Ça ne me dérange pas le moins du monde. »
« Sûr ? »
« Si je te le dis ! »
« D’accord ! »
Il refera le capot, retourna dans la voiture pour prendre ses affaires et nous avons marchés en silence jusque dans la voiture.
« Mon cœur, ça ne te dérange pas de monter à l’arrière je crois. Il y a Mika que nous allons laisser à la clinique. »
« Mika ? Mais… »
« Oui ! »
Je crois que son esprit a dû prendre une seconde pour percuter. Elle est tout de même descendue pour le laisser prendre sa place à mes côtés. L’ambiance était bizarre. Je dirai même spéciale. Je comprenais parfaitement cela.
« Tiens, c’est la carte de mon garagiste. Il est plutôt bon. », dis-je en lui passant la carte de visite.
« Merci. »
Je roulais tranquillement.
« Alors, vous vous êtes remis ensemble à ce que je vois. C’est super. Je suis content pour vous. »
Je le guettais du coin de l’œil pour essayer de déceler des signes de sincérité dans ses propos mais voilà, je n’y parvenais pas. La vérité est que je ne pouvais pas dire s’il ironisait ou s’il était faux.
« C’est gentil ! », lança Nowa.
« C’est un peu grâce à toi tu sais ! », dis-je.
« Je sais. », rétorqua-t-il avant de rire.
Sans savoir pourquoi, moi aussi je me suis mis à rire puis, Nowa a fait de même. On aurait dit des amies de longue date.
« Tu peux me laisser là, je ne vais pas vous prendre plus de temps. »
« Je t’ai dit que ça ne me dérange pas. »
J’ai pris le rond-point pour le déposer juste devant les portes de la clinique.
« Nowa, prend la peine de lire tes messages sur Facebook. J’ai perdu mon téléphone et je t’ai laissé des dizaines de messages mais pas de réponse. »
« Euh… »
« Merci Rudy ! Bonne soirée. », dit-il en descendant.
Nowa a repris sa place à côté de moi. Elle avait le nez rivé à son portable. J’ai passé ma main dans la sienne, la faisant sursauter.
« Ça va ? »
« Oui. Je pensais que tu ne pouvais pas le sentir. »
« Il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis. »
« Je t’aime. », souffla-t-elle avant de sourire.
J’ai senti ses doigts se resserrer sur ma main. C’était agréable.
Fin***