6. Je te déteste
Write by Samensa
ELA
J’ai dû m’absenter du boulot
suite à la foulure de ma cheville. Grr. Ça m’énerve de rester inactive. Me
voici bloquée à la maison en train de regarder des vidéos sur YouTube,
précisément des recettes de gâteaux que je veux tester. Mais, j’ai du mal à me
concentrer. Je soupire en pensant à ce qui s’est passé hier avec David.
Ce gars ne respecte rien. Ma
cheville en est une preuve. Je me rappelle de la manière dont il m’a jeté à la
porte. Je me suis retrouvée carrément assise au sol. Et quand il a fallu que je
me relève, j’ai senti une vive douleur à la cheville qui m’a arraché un cri. C’est
avec horreur que je me suis rendue compte que je m’étais foulée la cheville.
J’ai donc dû me rendre à l’hôpital pour un bandage avant de rentrer à la
maison.
A mon retour, j’ai bien senti que
mon mari ne croyait pas vraiment à mes prétextes. C’est pourquoi, je n’ai pas
hésité à faire l’amour avec lui pour le mettre en confiance. Hormis ce fait, il
faut dire que j’en avais vraiment besoin. J’aime mon mari et être dans ses bras
me procure trop de bien.
-Madame, vous avez de la visite.
Annonce la servante me sortant de mes réflexions.
-Qui c’est ? Je demande en
posant l’ordinateur sur la table basse.
-Bonjour Ela. Dit une voix
derrière la servante.
Pas besoin de voir pour savoir
qui c’est. Sa voix hante mes pires cauchemars. David. Pour une surprise, c’en
est vraiment une.
-Bonjour David. Que … que fais-tu
ici ?
Il prend place dans l’un des
fauteuils de la terrasse alors que je me perds à le contempler dans son jean
noir et sa chemise blanche dont il a négligemment retroussé les manches.
-Ela ?
Je sursaute à son appel.
-Je demandais comment tu allais.
Il me montre du menton mon
bandage avec un petit sourire au coin.
-Ça va.
Il me tend un paquet que je
prends, sceptique.
-Je t’ai apporté du chocolat…
Alors comme ça, tu as fait une chute ?
-Euh excuse-moi David (Je dépose
le paquet près de mon ordinateur.) Tu joues à quoi là ? On est amis
maintenant ?
-Non. Je voulais juste voir ce
que tu as inventé cette fois-ci.
Exaspérée, je hausse le ton.
-Inventé ? Tu te prends pour
qui pour venir chez moi pour m’insulter ?
Avec un calme exaspérant, il sort
une cigarette de son paquet qu’il allume puis tire une bonne bouffée avant de
poser les yeux sur moi.
-Arrête ton cinéma tu veux ?
-David, c’est de ta faute si je
suis comme ça !
L’hypocrite fronce les sourcils
comme s’il ne savait pas ce qui c’était passé.
-Fais pas comme si tu ne savais
rien ! Tu étais bien conscient lorsque tu m’as jeté à la porte et que je
me suis mal. Tu me détestes, je le sais mais tu n’avais pas le droit.
J’écrase furtivement une larme
qui m’échappe de mes yeux en évitant de le regarder.
-Je ne savais pas que tu t’étais
fait mal. Dit-il d’une voix étrangement calme.
-Oh s’il te plait ! Comme si
j’allais te croire.
-Et oui, contrairement à toi, je
ne suis pas un menteur.
-Pourquoi tu n’arrêtes pas de
m’insulter ? Pourquoi tu es si méchant ?
Contre mon gré, j’éclate en
sanglots. Je suis tellement mal de me laisser aller devant lui de cette
manière. Je n’aime pas passer pour une faible. Il me tend un mouchoir, le sien.
Je le prends et au lieu d’en user pour essuyer mes larmes, je le jette loin et
détourne la tête.
-Je suis… (Il soupire) désolé
pour ta cheville.
Il se lève pour arpenter la pièce
un moment puis s’arrête, faisant face à la piscine. J’en profite pour
l’observer de dos. L’une de ses mains dans les poches de son jean et l’autre le
long de son corps tenant sa cigarette, il est tout raide.
-Je suis désolé pour ta cheville
Ela. Mais crois-moi, ton mélodrame ne m’empêche pas de rester sur ma position
selon laquelle tu ne vaux rien.
Il a parlé sans se retourner mais
la froideur de sa voix m’a atteint.
-Va t-en s’il te plait David. Je
ne supporte plus de te voir.
Il se retourne pour me faire face
et me fixe d’une manière étrange; j’en ai des frissons.
-Je me fiche pas mal de ce que tu
peux supporter. Tu me comprends ?
-Je te déteste !
-Alors le sentiment est partagé,
Ayehla… Ceci dit, je te laisse 1 mois, je dis bien 1 mois pour en parler à ton
mari. Si passé ce délai, tu persistes à ne rien vouloir lui dire, je m’en
chargerai volontiers.
-…
-Est-ce clair ?
Sur ce, Eric fait son entrée dans
la pièce. Il me donne une bise sur le front et une accolade à son frère. Quand
il remarque mes yeux rougis, il s’assoit près de moi et passe sa main autour de
mes épaules.
-Bébé, qu’est ce qu’il y
a ?... David, pourquoi elle pleure ?
-J’ai la cheville qui me lance un
peu. Ça va aller. Je réponds avant que l’autre ne prenne la parole.
-Je vois bien que ça ne va pas.
La preuve tu pleures. Tu veux qu’on aille à la clinique ?
-Non bébé ! Ne t’inquiète
pas s’il te plait.
Eric me prend dans ses bras pour
me caresser le dos. Je remarque que David regarde la scène avec dégoût. Il
croit que je n’aime pas Eric ? C’est le moment de lui prouver le
contraire. Je me retire de l’étreinte de mon mari pour l’embrasser
langoureusement. Ce dernier ne se fait pas prier pour répondre à mon baiser.
Nous sommes interrompus par les
toussotements de David.
-Euh ! Excusez-moi mais je
crois que je vais vous laisser. (Il rit) Je ne désire pas assister à plus que
ça.
-Déjà ? Demande mon mari. Je
croyais que tu voulais me parler.
-Ah ! Oui. J’ai déjà pu
régler l’affaire dont je voulais te parler… heureusement.
-D’accord.
Je me blottis dans les bras
d’Eric pour toiser David. Il peut tout dire maintenant mais pourquoi il ne fait
rien ? A quoi sert cet ultimatum ? Qu’attend t-il de moi ?
-Bon les jeunes mariés, je vous
laisse !
Il pose délicatement sa main sur
mon épaule en m’adressant le sourire qu’une star de cinéma adresserait à ses
fans. Hypocrite va !
-Prompt rétablissement Ela.
Et il part de la maison.
DAVID
Cette fille a le don de me faire
sortir de mes gongs. Il fallait voir sa tête en train de pleurer comme une
madeleine. Si je ne la connaissais pas, je serais tombé en émoi devant ces
larmes. Elle est vraiment forte, soit dit en passant. Et son réservoir de
larmes est vraiment fourni car si à chaque fois qu’elle me voit, elle doit en
verser alors je la plains.
Mais je dois reconnaitre que j’ai
eu un pincement de cœur en sachant que ce qui lui est arrivé est de ma faute.
Dans ma colère, je ne me suis même pas rendue compte que je lui avais fait du
mal. Je veux lui rendre la vie dure mais de là à lui porter atteinte
physiquement, il y a un grand pas que je ne veux pas franchir.
Elle m’a paru si vulnérable
assise dans ce canapé. Et heureusement qu’elle était dans les bras de mon frère
qui la consolait car elle en avait besoin et je me serais porté volontiers pour
le faire. La serrer contre moi, lui toucher le dos, la réchauffer…
Shit ! Qu’est-ce que je
raconte, moi ?
Je frappe le volant en remuant la
tête. Cette fille avec sa sorcellerie est en train de me mélanger les esprits.
J’ai vraiment besoin de me
changer les idées. J’appelle Raïssa qui accepte de venir chez moi le soir même.
Elle débarque donc à la maison
vers 19h. Nous passons du bon temps ensemble dans le salon avant de manger la
pizza qu’elle a apporté.
-Dis Raïssa, comment tu connais
Ela ?
Je suis curieux d’en savoir plus
sur ma belle-sœur.
-La femme de ton frère ?
-Oui.
-On se connait depuis le lycée.
-Et pourquoi j’ai l’impression
que vous ne vous aimez pas beaucoup ?
-Ce n’est pas une impression, on
se déteste !
-Pourquoi ?
-Pour la petite histoire, sa sœur
et elle m’ont pris mon petit copain.
-Ah bon ? Fis-je étonné.
-Oui. Je sortais avec un mec au
lycée mais il a fallu que sa petite sœur ait des vues sur lui. Elles ont donc
manigancé des coups pour me le prendre et quand j’ai voulu réagir, elles ont
envoyé leur bande pour me passer à tabac.
-Wow !
-Oui, c’est inimaginable hein…
Les filles Aké sont des sorcières. Elles ont tout pour elles mais ne peuvent
s’en contenter. Il faut toujours qu’elles prennent à autrui ce qui leur
appartient.
Elle parle avec amertume, le
regard dans le vide. Lorsqu’elle s’aperçoit que je la regarde, elle me sourit.
-C’est du passé tout ça.
Maintenant, je t’ai toi. Dit-elle en se lovant contre moi.
No Darling ! Tu n’as
personne.
Je lui rends son sourire avant de
mordre dans ma part de pizza.
Plus tard, en repensant à
l’histoire de Raïssa, je me rends compte que le cas Ela est complexe.