Bonus8

Write by Annabelle Sara


 

Maman et moi ne sommes pas retournées à Bafia, malgré qu’elle soit sortie de l’hôpital. Nous sommes restées chez mes grands-parents, toutefois, j’allais à l’école plus dans celle de la ville mais dans une petite école publique dans le village. Elle était différente de celle de la ville, tous les enfants étaient bien plus vieux que moi dans ma salle, ils étaient aussi très particulier.

Nous n’avions pas de gouté, mais toujours des fruits plein le sac, parfois certains ramenaient des restes de nourriture de la veille de chez eux. Le temps à l’école était plus court qu’en ville.

Je me suis habituée au rythme surtout que Maman était présente, elle aidait grand-mère aux champs et allait tous les vendredis au marché de la ville pour vendre les produits des champs. Elle faisait même des bâtons de manioc pour les vendre. J’aimais le vendredi parce qu’elle rentrait toujours avec du pain et du chocolat.

Je n’avais pas vu mon père depuis un bon moment  et quand je posais la question à ma mère elle me répondait qu’il viendrait un jour. Elle manquait de sincérité lorsqu’elle me répondait parce qu’elle se débrouillait pour détourner mon attention à chaque fois que je lui demandais. Elle réussissait toujours.

Mon père me manquait mais son absence ne m’affectait pas plus que ça ! Il n’avait jamais vraiment été présent de toute façon donc…

Un jour pendant que jouait sous les arbres avec des camardes de classe, ma mère m’appela. En allant vers elle je m’attendais à tout sauf à la trouver apprêtée comme elle l’était.

Elle avait mis sa plus belle robe et se maquillait les yeux avec un crayon noir.

Ma mère : Kiki… tu sors d’où ? Je t’ai demandé de te laver, non ?

Moi : Je jouais avec mes amis…

Ma mère : Il y’a ton seau d’eau derrière, va te laver tu t’habilles !

Moi : Ma’a on part où ?

Elle tourna vivement sa tête vers moi.

Ma mère : Va faire ce que je t’ai dit au lieu de poser les questions !

Valait mieux que j’obéisse !

J’ai pris mon bain comme d’habitude dans la bassine  à l’arrière de la maison, tous les passants pouvaient me voir verser l’eau froide puisée le matin même à la source par ma mère. Je profitais pour jouer avec le savon et l’eau, ma mère me rappela à l’ordre en me demandant de me dépêcher.

Une fois habillée, de ma plus belle robe je suis sorti rejoindre ma mère, c’est à se moment que j’ai remarqué que des gens de la famille étaient réunis sur la cour de mon grand-père, les femmes et ma grand-mère s’affairaient dans la cuisine en terre cuite, apprêtant de grosses marmites de nourriture.

Comment j’ai fait pour ne pas me rendre compte qu’il y avait une fête.

Ma mère : Ne te salis pas hein ! Vas rester avec Taata…

S’il y a une fête je voulais rester présentable donc j’ai couru m’installer avec mon grand-père qui discutait avec d’autres hommes, d’autres grands-pères. J’aimais bien rester en leur compagnie, parce que mon grand-père me donnait toujours de la cola et parfois me donnait du vin de palm à gouter.

Je les écoutais discuter en mangeant ma cola tranquillement, lorsque deux véhicules chargés de personne et de vivres déboulèrent en klaxonnant dans la cour de mes grands-parents.

Je n’ai rien compris à ce qui se passait mais j’ai vu mon Papa, avec des membres de sa famille que je ne connaissais pas venir chez nous avec des chants, des rires et des danses. La joie s’est contaminée et tout au long de la journée, il y avait des rires et des youyous.

J’étais heureuse de voir ma mère et mon père enfin réuni, dans cette ambiance de fête, je ne savais pas trop ce qui se passait mais je savais que mon père offrait des cadeaux à mon Grand-père et il m’avait dit qu’il reviendrait nous chercher très vite.

Ma mère elle était de bonne humeur, mieux elle était heureuse, son sourire ne la quittait plus et elle restait collée à mon père. Moi je les observais de loin accrochée au bras de ma grand-mère. Quelque chose en moi me retenait de me mêler aux festivités.

A un moment ma grand-mère s’en alla dans la chambre où elle s’assit pour pleurer, je ne savais pas ce qui la rendait triste, je l’observais impuissante au pas de la porte. Mon grand-père qui la cherchait arriva, entra et ferma la porte derrière lui. Ils se mirent à discuter mais je pouvais entendre parce que la maison de mes grands-parents n’avait pas de plafond donc les pièces n’étaient pas isolées.

Ma grand-mère : Dong biban bi fé biè le ? (Dong c’est quoi ces histoires ?)

Mon grand père piaffa bruyamment.

Ma grand-mère : Laa inè uri le u ghéren di kuu di byom bi feley ? Bediang nye yè ghèsèe felè ? Nsoo mum bog bi be Taata kèè yuy ? (Comment tu peux accepter ce genre de choses? Bediang mérites ça? Même pas un seul de ces parents n’est présent ?)

Mon grand-père : Ni’nki làa ? I’tey boo be’tey ? Wèe mig u yii le man woo a tsé i’nto u tey ! (Et je dois faire quoi? Aller les chercher de force? Tu sais que ton enfant est têtue !)

Ma grand-mère : Kiban ki kèe yaag bisii asu’u ! Mum ayin fo’o, i mè ki kpaa Bediang folo’o lè a ghèsèe ki tchaari kiban ki… La’ine mum ari lè a yuy ki yine ghiib nsoo seuni bog kè ba woo ! a kpaa folo’o le bi yin bi kilong ! (Cette histoire va nous dépasser ! Il n’est pas sérieux, et je l’ai déjà dità Bediang, elle doit oublier cette relation… Comment un homme peut venir doter une femme aucun de ses parents n’est présent ! Justifiant cela qu’ils ne sont pas au village !)

Ma grand-mère pleurait et mon père réussi à la calmer.

Mon grand-père : U feuk lè yèè be faa me boo moneu, ari ti lè a ki man wem tsom ki a’nkii ki i tchay ? (Tu crois que parce qu’ils m’ont donner un peu d’argent, il peut encore faire ce qu’il a fait à ma fille et je laisse ?)

Ma grand-mère : Bell a mang le kèe wey nyi bi di di yère ! ( Que Dieu fasse en sorte qu’il ne la tue pas cette fois ci !)

J’aurais aimé continué à écouter mes grands parents mais j’entendis ma mère crier mon nom dehors. Apparemment mon père voulais me présenter à certaines personne. J’avais encore ne mémoire la conversation que j’avais entendu donc je ne souriais pas vraiment.

Après cette folle journée ma mère m’a annoncé que nous irions rejoindre mon père à la grande ville après les vacances de fin d’année, je savais que mes grands-parents n’appréciaient pas cette idée pour eux ma mère devait attendre encore un peu et surtout devais elle-même chercher du boulot au lieu de continuer à suivre mon père à l’aveuglette.

Revoir mon père m’excitais beaucoup et la joie de ma mère commençais à déteindre sur moi. J’allais voir la grande ville, vivre à Yaoundé, la ville aux sept collines. Le jour du départ arriva. Le voyage bien trop long pour la petite fille impatiente que j’étais, il ne durait que 3 heures mais j’avais 6 ans, c’était la première fois que je faisais un voyage aussi long et à l’arrivée il était normal que je sois fatiguée, dépaysée, désorientée.

Mais à notre arrivée comme il n’y avait personne pour nous récupérer à la gare routière, ma mère avait dû se débrouiller pour trouver le chemin, dans cette grande ville pleine de rue, de voiture, de maison et gens.

D’abord il fallait prendre un taxi jaune, pour aller dans un quartier très éloigné de la gare routière et avec l’état des routes c’était un autre voyage insupportable, une fois dans le quartier trouver la maison de mon père fut une quête. Nous avons tout de même eu la chance de tomber sur une dame qui apparemment le connaissait et qui a demandé à un de ses fils de nous y conduire. Maman avait beaucoup trop de provision pour me porter alors je devais me débrouiller pour marcher vite et suivre le rythme du garçon qui nous guidait. Enfin arrivée, il nous montra une maison dans une clôture ou plus tôt plusieurs petites maison dans une clôture. Il appela cela une cour.

En entrant il nous a montré une porte en nous disant que c’est celle de mon père, ma mère est donc allée cogner à la porte.

Une fois de plus ce fut la joie, la joie des retrouvailles, notre petite famille était de nouveau réunie.

Notre nouvelle maison était petite mais je m’y suis adaptée.

Ma mère aussi en quelque jours a appris à connaitre notre entourage, il y’avait 5 autre famille dans la cour, des jeunes et vieux couples tous avec des enfants donc je savais que je ne manquerais jamais de compagnie.

J’étais contente de voir ma mère souriante, mais j’étais consciente que les choses n’étaient pas exactement comme avant. A Bafia maman travaillait dans un restaurant, ici elle était tout le temps à la maison et les questions d’argent avec papa était tous le temps posé.

« Ta fille n’a pas mangé ! » « Je suis fatiguée de mendier chez les voisins ! » « L’école a repris et tu n’as toujours pas inscrit l’enfant ! »

Mon père avait une seule réponse que j’arrivais à percevoir : « Je n’ai pas d’argent !

Ma mère je l’ai toujours vu se battre, elle était d’un dynamisme sans pareil, alors elle était allé dans une dans une école publique avec moi pour demander à ce que je sois inscrite. Je me souviens que la dame du bureau lui avait demandé pourquoi elle m’amenait aussi tard, la rentrée était dépassée d’1 mois, ma mère lui répondit qu’elle était nouvelle en ville et qu’elle n’avait pas de travail mais qu’elle voulait que je retourne à l’école. Elle avait suppliée la dame de me prendre et d’attendre un peu pour les frais de scolarité.

La dame : Avez-vous ses papiers ?

Ma mère : Oui, son acte de naissance et son carnet de vaccination…

La dame : Elle va dans qu’elle classe ?

Ma mère : Cours préparatoire…

La dame : Non, Si vous voulez que je la prenne elle ira d’abord en SIL, mais je ne la prendrais que si vous promettez de venir payer ses frais en totalité avant la fin du mois d’octobre !

Ma mère : Oui Madame la directrice !

C’est comme cela que je suis allez à l’école cette année-là, mon père n’avait même pas bronché en apprenant que je retournais à l’école il n’avait exprimé aucune émotion. Tous les matins ma mère me déposait à l’école et venait me chercher à midi, la première semaine. Parce que la semaine qui suivit elle me demanda le Lundi matin si je pouvais rentrer toute seule à la maison, je me sentais déjà grande alors j’avais dit oui, je ne comprenais pas trop pourquoi elle ne venait pas me chercher alors je lui ai posé la question.

Moi : Mama tu ne viens pas me prendre ?

Ma mère : Non Kiki… Mama a trouvé du travail ! Donc je vais au travail, je ne pourrais pas venir te chercher !

Moi : Ok Mama !

Ma mère : Quand tu rentres à la maison tu restes chez tantine Emilie hein ?

Moi : Oui Mama !

Ma mère : Bonne journée Kiki !

Ma mère avait trouvé un travail qui lui permettait de payer mes frais scolaire, à mangé pour la maison aussi. Nous nous adaptions petit à petit à notre nouveau style de vie. Un soir ma mère est rentrée plus tard que d’habitude et mon père est arrivé à la maison avant elle.

De suite son humeur me montra que quelque chose allait se passer, il me demanda à plusieurs reprises où se trouvait ma mère et je lui répondais en haussant les épaules.

A la seconde ou Maman franchit le seuil de la porte les voix s’élevèrent.

Mon père : Madame, d’où tu viens ?

Ma mère : Bonsoir… comment ça d’où je viens ?

Mon père : Je viens de te demander d’où tu viens tu me réponds quoi ?

Ma mère : Moulon tu ignores d’où je viens ?

Mon père : Tu n’as pas encore répondu à ma question !

Ma mère sentais que la tension montais alors elle baissa le ton et répondit calmement.

Ma mère : Je t’ai dit que j’allais faire des cours du soir pour appendre le secrétariat, non ?

Mon père : Madame je ne crois pas t’avoir donné la permission !

Ma mère : Taata Bell ! (Seigneur !) J’ai besoin de ta permission pour apprendre un métier ?

Mon père : tu es ici chez moi !

Ma mère : Oui je suis chez toi mais je vis comme une mendiante ! Si je n’avais pas trouvé un travail de ménagère nous serions où aujourd’hui. Quand ma patronne me donne l’opportunité de travailler un meilleur travail en me payant des cours du soir dans sa société tu veux que je refuse ? Pendant ce temps tu ne me donnes même pas 5 francs…

Mon père : Ton patron payes tes cours que tu lui donnes quoi ? Tu es venue à Yaoundé faire la prostitution hein ? Mais pas dans ma maison Madame… Je ne veux plus entendre ça !

Ma mère : Tu vas seulement me mettre dehors parce que je ne vais pas arrêter…

Le coup parti bien plus vite que ce que j’avais imaginé, envoyant ma mère valser de l’autre coté du petit salon, le cris de ma mère fut faible par rapport au mien. Très vite je me suis interposée entre les deux, les larmes aux yeux. Quand le regard de mon père a croisé le mien j’ai compris que si je bougeai il allait une fois de plus envoyer ma mère à l’hôpital.

Il ne fit pas un pas vers nous, mais sortit de la maison. Il passa la nuit dehors !

Ma mère avait tenue tête et avait continué son travail et sa formation, demandant de l’aide aux voisines pour me garder lorsque je rentrais de l’école. Pendant les fêtes, elle avait réussi à m’offrir des cadeaux et de belle tenue. Mon père était encore aux abonnés absent, mais nous faisions avec jusqu’au jour ou la grande sœur de ma mère vint nous rendre visite.

Ma tante, je ne la connaissais pas bien, mais je savais qu’elle vivait dans un village Bassa’a selon ce que disait ma mère. Ma tante était physiquement plus forte que ma mère et avec elle on ne rigolait pas. A son arrivée, elle a félicité sa sœur pour son travail, et sa formation, elle posa alors la question qui fâche.

Ma tante : Où est ton mari ?

Ma mère : Hum je ne sais pas ! Il entre il sort il ne me dit rien !

Ma tante : ET tu dis que tu es mariée ? Vraiment les villageoises hein… donc tu ne sais pas où il va et tu ne le cherche pas ? Bediang !

Une voisine qui avait écouté leur conversation arriva et intervint.

La voisine : Voisine excuses moi de te poser la question mais, tu es marié avec le type ci ?

Ma tante : Pourquoi tu demandes ça ? Tu croyais que c’est sa sœur ? Ils vivent en concubinage !

Ma mère : Nous ne sommes pas encore allez chez le maire mais je suis dotée !

La voisine : Hum… Pardon ce ne sont pas les problèmes ! Je dis ça parce que le type ci a une autre maison…

Ma tante : Hein ?

La voisine : Avec une femme et des enfants comme Kiki là…

Ma mère s’énerva contre la voisine mais sa sœur le retint.

Mes tantes : Calmes-toi ! Un homme ne dort pas ici tous les jours à ton avis ? Il est forcément… Ma chérie s’il te plait tu sais où il vit ?

Les explications de la voisine exaspérait ma mère, mais ma tante la prenait très au sérieux et nota tout sur un bout de papier. Elle décida ensuite d’aller elle-même certifier les dires de la voisine.

Ma tante : Tu viens avec moi Bediang ! Tu crois que je vais aller là-bas…

Ma mère : Hééhéé ! (Non !) Je ne viens pas !

Ma tante : Tu viens…

Elle avait tellement insisté que ma mère a cédé, elles m’ont donc confié à la voisine le temps d’aller vérifier cette information.

Assise devant la porte de la maison, jouant avec ma poupée j’attendais que les deux femmes reviennent, je me demandais pourquoi elles ne m’avaient pas emmené avec elle mais bon je ne m’ennuyais pas non plus.

Soudain, le portail de la cour s’ouvrit avec fracas, ma mère avait violemment poussé le battant, et sa sœur avait fermé derrière elle. Elles se sont dirigées vers moi sans un mot, ma mère est entrée dans la maison sans même me regarder, leur mine ne présageait rien de bon. J’ai voulu la suivre, mais ma tante m’a demandé d’attendre dans le salon pendant qu’elle s’occupait de ma mère.

J’ai entendu des pleurs et des cris, ma mère se lamentant sur ce qu’elle allait devenir, sur le fait que Dieu l’avait abandonné.

Ma tante : Bediang ca va !

Ma mère : ça ne  va pas Ma’amang, i ri di dyièm ! (Je suis enceinte !)

 


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