Chapitre 1
Write by Plume de Nano
Chapitre 1
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Bonne
lecture. Kiss.
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Les
épaules pesant comme si je portai tout le poids du monde, je descends enfin de
la voiture après d’interminables minutes à essayer de me préparer
psychologiquement à la crise d’émotion qui m’attend à l’intérieur de la maison
juste en face de moi.
Trainant
pas après pas, j’arrive enfin devant l’entrée et nonchalamment j’appuie sur la
sonnette. En moins d’une minute, Affoué, la gouvernante m’ouvre grandement la
porte. Un large sourire aux lèvres et les bras grands ouverts pour un câlin. Je
n’hésite pas une seule seconde et me jette dans ses bras. Dans mon état actuel,
un câlin est plus que la bienvenue.
—
Oh, mon fils. Comme tu m’as manqué!
—
Haha, Affoué, tu ne changeras jamais. Il y a moins d’une semaine que j’étais
ici.
—
Oui, mais c’est un intervalle assez long. J’aimerai bien voir ta belle
frimousse tous les jours!
—
Bah, à ce rythme je n’aurai qu’à emménager ici!
—
Pour ton plus grand bien, mon chéri. Car ainsi tu reprendras ta belle forme.
Regarde
comment tu as maigris! tu as besoin de quelques bons plats de foutou… Allez,
viens t’installer. Je monte prévenir ton amoureuse de ton arrivée. Cela fait un
bon moment qu’elle attend impatiemment ta venue.
—
Merci Affoué,
—
De rien, mon grand, Alice (cuisinière et femme de ménage) viendra te servir un
breuvage…
Sans
plus attendre, elle me fausse compagnie et prend la direction des escaliers.
Affoué… Affoué, c’est l’une des femmes les plus humbles, serviables, joviales
et j’en passe, que je connais. Elle a fait son entrée dans nos vies à ma
famille et moi alors que j’avais seulement trois ans. En tant que ma nounou.
J’ai la trentaine aujourd’hui.
À
l’époque, bien que mes parents me couvaient d’amour et d’attentions, infinie,
l’arrivée d’Affoué fut un grand soulagement pour papa et maman qui
travaillaient d’arrache-pied pour monter l’entreprise : Cosm’Ivoire
Nous
nous sommes tout de suite adoptés elle et moi. Par ailleurs, Affoué est devenue
dès lors ma seconde mère… les années sont passées et elle n’est plus repartir.
Dans les moments aussi bien joyeux que tristes, elle a été là pour ma famille
et moi. Elle m’a vu devenir un homme et moi je l’ai vu vieillir année après
année.
De
simple nounou, ma mère l’avait promu au poste de gouvernante, juste un an après
son arrivée. Tant elle se montrait dévouer pour nous. Cependant, en plus de son
nouveau poste, elle avait insisté pour demeurer ma nounou et depuis toutes
c’est année, je n’ai qu’un portrait jovial d’elle dans ma mémoire. Sauf pendant
les moments de grandes douleurs pour toute la famille…
Parlant
de grandes douleurs, je la ressens toujours cette douleur. La plus grande
douleur de ma vie et encore plus ces trois derniers mois… Prenant une grande
gorgée du verre de jus qui m’a été servi par Alice, je laisse trainer mon
regard çà et là de la grande pièce qui constitue le salon quand mes yeux
tombent sur une photo. Cette photo n’était pas là à ma dernière visite. Ma
mémoire me ramenant des années en arrière, nostalgique, je me lève et marche
jusqu’à l’imposante bibliothèque remplir de souvenirs.
Un
faible sourire étirant mes lèvres, je me saisis du cadre photo et l’admire. Je
me souviens du jour où cette photo a été prise comme si c’était hier… Pourquoi
la vie est-elle si cruelle?
—
Te souviens-tu du jour où cette photo a été prise?
Sursautant
presque, je lève la tête et me tourne vers l’entrée de la pièce pour rencontrer
le regard plein d’appréhensions de cette femme pour qui je donnerai ma vie sans
hésitation.
Habillé
d’un complet en pagne (tissu africain) de couleurs multiples avec un foulard
sur la tête dont seule elle sait comment nouer, un simple inconnu lui donnerait
une quarantaine d’années d’existence sur cette terre. Pourtant, elle approche
dangereusement de la soixantaine. Malgré toutes ses années de vie, ajouter aux
différents coups que la vie lui a portés. Du haut de son mètre soixante-neuf,
avec son beau teint noir ciré, elle demeure belle, rayonnante et plus que
jamais active et en pleine forme…
—
Je ne t’ai pas entendu arriver, maman.
—
Peut-être parce que tu étais à mille lieues d’ici, mon chéri
—
Oui… tu as remplacé les photos?
—
Oui, je faisais du tri dans mes affaires hier et je suis tombée sur celle-là.
Je me souviens que ton père était très heureux ce jour-là. Nous tous
d’ailleurs…
—
Oui, c’était un jour heureux. Je m’en souviens comme si c’était hier…
Du
bout des doigts, je caresse au travers de la vitre du cadre, le visage du bel
homme souriant et plein de fierté assis à mes côtés…
Ce
jour-là, exactement trois semaines après mon retour de France, après y êtes
resté de longues années, mes parents avaient organisés une grandiose fête pour
célébrer ce retour ainsi que la bonne nouvelle que j’avais apportée avec moi :
j’étais enfin prêt à m’installer définitivement au pays et à diriger la société
au côté de mon père, comme ils l’ont toujours souhaité maman et lui.
Je
me souviens qu’après le repas, alors que maman et moi étions en train de
« gaspiller » sur la piste de danse, papa était venu nous chercher avec un
photographe sur les talons. Il insista pour que nous soyons photographiés tous
les trois à ce moment précis là, et cela malgré nos protestations, car nous
voulions remettre cela à plus tard. Préférant danser.
Il
avait alors dit avec plein d’émotions : allez, c’est un grand jour pour moi en
tant que père. J’ai rêvé de ce jour depuis des années. Le jour où mon fils
unique viendrait prendre la relève du flambeau; notre patrimoine familial; son
héritage qui pèse des tonnes sur mes épaules à moi, tout seul et l’emmener de l’avant.
Affrontant vents et marées pour le défendre… tu ne sais pas à quel point je
suis heureux, Raphaël. Je pourrais mourir aujourd’hui même, sans crainte ni
regret, car Dieu m’a donné la chance d’avoir une épouse merveilleuse et un fils
qui fait ma fierté. Sans compter sur notre belle situation financière.
Oui,
j’adorerai rencontrer mes petits-enfants, mais je crois en toi pour leur donner
de bonnes valeurs… je suis prêt à partir si la mort se pointait et si cela
arrivait, je voudrai qu’un jour tu tiennes dans tes mains cette photo spéciale
et que tu te souviennes que ton père est parti heureux, accompli et surtout
fier…
Le
ton sérieux qu’il prit le long de son monologue me glaça le sang. Apeurer, ma
mère et moi lui passâmes un « savon » pour avoir tenir de tels propos avant de
prendre enfin cette photo-là. Par contre, maman insista pour que nous prenions
la photo juste lui et moi. Nous nous étions donc installés dans le salon où je
me tiens présentement. Papa s’était assis dans l’un des fauteuils une place et
moi, sur l’accoudoir. Tout près de lui.
Nous
étions en train d’essayer de toutes nos forces de ne pas éclater de rire au
moment où la photo avait été prise. Car ma mère avait choisi ce moment-là pour
nous faire des blagues. Au final, la photo était belle. Nous étions heureux et
cela se reflète par l’éclat de nos yeux et nos sourires sur cette photo…
Aujourd’hui,
tout comme ma mère, je comprends que papa nous disait sérieusement à Dieu ce
jour-là. En général, il détestait se faire prendre en photo…
D’une
manière ou d’une autre, il avait senti sa fin venir, car seulement un mois et
demi plus tard, l’on m’annonçait par un appel téléphonique son décès dans un
accident de la circulation…
—
Mon intention n’était pas de générer de la tristesse. Encore moins de te faire
pleurer en sortant cette photo… excuse-moi, chéri. Je la rangerai plus tard.
Dis ma mère, me serrant contre elle.
Par
la saveur salée du liquide qui à trouver son chemin jusqu’à mes lèvres, je
réalise qu’effectivement, je pleure.
—
Non, laisse là ici. Sinon je m’en irai avec.
J’aurais
besoin de voir son sourire plus souvent pour me rappeler que mon héritage vaut
de l’or et que je me dois d’affronter vents et marées pour le maintenir au
sommet…
—
Pourquoi parles-tu ainsi?... Ton rendez-vous s’est mal passé? Il t’a refusé son
aide? Parce que si tel est le cas, tu sais que…
—
Maman, s’il te plaît, respire. Réussis-je à dire, tout en m’essuyant la joue
mouillée.
—
OK, OK. C’est bon, je suis calme... Raconte-moi. Reprit-elle après avoir
inspiré et expiré lentement à plusieurs reprises.
—
Bien, asseyons-nous. L’invitais-je
L’air
impatient, ma mère se dépêche de prendre place dans l’un des fauteuils et me
supplie du regard.
—
Alors?
—
Heu, je l’ai finalement retrouvé dans un restaurant, au lieu de son bureau. Il
a fait le changement à la dernière minute. Il a dit être ravi de me rencontrer
enfin et qu’il suivait depuis bien longtemps le progrès de la société. Bien
avant le décès de papa…
—
Mais? Épargne-moi des faux détails et donne-moi la conclusion de ta rencontre
avec cet homme même si je sais que ton attitude ne présage rien de bon.
Le
regard souder à celui de ma génitrice, je tourne et retourne mon cerveau dans
tous les sens, me demandant comment lui annoncer la nouvelle. Seigneur, je vous
prie de venir à mon secours.
—
Il a dit être disposé à me venir en aide. À une condition.
De
surprise, les yeux de mon interlocuteur s’écarquillent en même temps qu’elle
fronce les sourcils. Elle se cale contre le dossier de son siège puis se croise
les bras avant de reprendre :
—
Et c’est quoi cette condition?
—
…
—
Raphaël!?
—
Il désire que j’épouse sa fille… dis-je d’une petite voix
Comme
un ressort, ma mère quitte son siège et se met à faire des vas et vient tout en
se tapant des les mains et en jurant dans sa langue maternelle.
—
Mum, calme-toi s’il te plaît… viens, assis toi
—
Hey!!! Comment les gens peuvent-ils être si amère? (se tapant fortement les
mains) je dis comment hein?
Qu’avons-nous
fait de mal au bon Dieu pour que tout autour de nous s’écroulent hein…
—
S’il te plaît, calme-toi, maman
—
Comment peux-tu me demander de me calmer quand tout va mal autour de moi ?
Depuis combien de mois que tu cours dans tous les sens à chercher de l’aide !
Tous nous ont tourné le dos oh (pleure) je dois maintenant me résoudre à perdre
la chose auquel mon mari tenait le plus… cet homme était notre plus grand
espoir.
—
Nous n’allons pas perdre la société, maman. Je compte…
—
Tu vas enfin accepter de te confier à ta cousine ou à tes oncles pour qu’ils
t’apportent leur aide?
—
Non… je ne suis pas encore certain de ma décision, mais je pense que je vais
accepter l’offre de Mr Kossonou. Dis-je calmement.
—
Quoi? hurla maman
—
…
—
Tu vas faire quoi Raphaël?!
—
Écoute, si on analyse bien dans les moindres détails, c’est moi qui sortirai
gagnant de cette histoire. Si j’accepte d’épouser sa fille, il me donnera
l’appui financier dont j’ai besoin et il deviendra un actionnaire par seulement
10 % d’actions. Ainsi, il pourra apporter son savoir-faire au sein de la
société. En plus, je…
—
Jamais! Tu m’entends? Jamais je ne permettrai que tu fasses une bêtise pareil.
Même ton père se retournerait dans sa tombe s’il t’entendait dire de telles
âneries. Oui, je tiens à cette entreprise, mais pas au point de sacrifier mon
fils unique. Je préfère encore mieux te voir avec cette idiote qui te serre de
fiancée que de te voir épouser une inconnue…
Sa
colère et ses cries sont tellement sonores qu’elle alerte toute la maison. Du
coin de l’œil, je vois Affoué et George (jardinier), à l’entrée de la pièce.
L’air inquiet.
—
Maman, s’il te plaît pense juste…
—
Non! Il en est hors de question! Soit nous trouvons une autre solution, soit
nous la vendons…
—
Mais…
—
Il n’y a pas de, mais! c’est mon dernier mot Raphaël.
Ceci
dit, elle s’empresse de traverser la pièce comme un torrent pour quitter la
pièce. Pff, je savais bien que cette conversation se terminerait en tohu-bohu,
mais pas si rapidement. Je n’ai que rarement vu ma mère dans ce genre d’état et
de ces rares fois-là, j’ai retenu qu’il ne servait absolument à rien d’insisté
de pousser le bouchon…
Récupérant
la photo que j’avais posée sur la table, je me lève et sors du salon à mon
tour. Dans le couloir, je retrouve Affoué, la mine soucieuse.
—
Qu’est-ce qui se passe, mon garçon? Questionne-t-elle
—
Rien de bien grave, Affoué…
—
Rien de bien grave et ta mère se met dans un tel état?
—
Je lui ai juste annoncé mon probable futur mariage.
—
Oh, tu comptes vraiment aller au bout de ta décision en épousant cette idiote?
—
Je suis fatigué de vous le rappeler à maman à toi et à tous qu’elle se
prénomme Valérie et non ce n’est pas avec elle que je compte faire ce mariage..
—
Mais, alors…
—
Je te donnerai plus de détails une prochaine fois, Affoué. Là j’ai la tête qui
menace d’exploser. Je vais y aller…
—
D’accord, mon chéri. Prends soin de toi s’il te plaît…
Pour
toutes réponses, je lui adresse un faible sourire et continue mon chemin vers
la sortie, la photo toujours en main. Je repasserai voir maman une autre fois.
De
toutes les façons, j’ai encore trois jours pour donner ma décision à Mr
Kossonou.