1 mois plus tard

*****Naomie***

Je suis arrivée à Libreville dès que j’ai fini de passer mes partiels à la faculté. Je n’avais pas la patience d’attendre les résultats pour partir vu la crise que traverse ma famille je ne pouvais me le permettre. Mes frères et papa ont besoin de moi plus que jamais. Papa ne s’attendait même pas à mon arrivée tellement cela a été soudain. Je me souviens encore qu’il y a quelques semaines, ma mère m’a appelée pour me dire qu’elle s’en allait. Elle est partie définitivement sans se retourner. Ce jour là, j’ai bien cru que j’allais m’effondrer après le monologue qu’elle m’a tenu. Mes rapports ont toujours été tendus avec ma mère et ce depuis toujours. Bien que j’avais peur d’en parler, elle me faisait peur. J’ai assisté à de nombreuses disputes avec mon père alors que je suis cachée ans un meuble. Je devais avoir 8 ans je pense lorsque j’ai vu ma mère se saisir d’une arme et tirer sur mon père. Elle me faisait tellement peur que je suis restée cachée dans le dressing de mon père durant près d’une journée avant d’être retrouvée par ma tante Flora. Maman a fini par savoir que j’y étais et que j’ai donc assisté à tout. Elle m’a toujours menacée de se débarrasser définitivement de mon père ou de mes frères si j’en parlais à qui que ce soit. Elle a en quelque sorte volé mon enfance. A partir de ce moment, je n’ai plus été la même petite fille. Je vivais dans la peur car je ne savais pas ce qu’elle pouvait me faire pendant que je dors. J’étais toujours près de mon père. Je refusais de faire une quelconque activité avec ma mère car elle me terrorisait tout simplement.

Pendant longtemps, je ne comprenais pas pourquoi papa restait marié avec elle car elle était tout simplement un danger pour lui mais pour moi aussi. Maman a commencé à devenir à peu près normal quelques semaines avant mon 18ème anniversaire. Elle parlait beaucoup de nostalgie, que j’avais beaucoup vite grandi à son goût. Je n’ai jamais pris au sérieux un de ces propos. Pendant longtemps, j’ai cru que ma mère était peut-être malade pour tenter d’expliquer son comportement. Elle était tellement différente avec mes frères. Elle semblait être une mère aimante avec eux. Je n’ai jamais compris la raison de ces différences entre nous mais je ne m’en suis jamais offusquée au contraire car j’avais l’amour de mon père et celui de ma marraine, ma tante Nessa.

Je me souviens déjà que toute petite, maman pouvait devenir folle en entendant le prénom d’une femme « Annick ». C’était toujours un sujet de dispute entre papa et elle. Je ne comprenais pas à l’époque. A l’âge de 15 ans, j’ai su réellement qui était cette femme et ce qu’elle représentait pour mon père de la pire des façons. J’ai trouvé des photos de mon père plus jeune dans son bureau avec une jeune femme qui n’est pas ma mère. Le regard qu’il posait sur elle voulait tout dire : il l’aimait. En retournant la photo, j’ai vu le prénom d’Annick et celui de mon père. Je ne sais pas ce qui s’est passé entre eux mais j’ai commencé à penser à ce moment là qu’il était possible qu’il aime toujours cette femme. J’ai commencé à analyser le comportement de mes parents lorsqu’ils étaient ensemble. Jamais je n’ai surpris un regard doux ou une délicate attention entre eux.

J’ai grandi avec cette idée jusqu’au jour de mon 18ème anniversaire. J’avais organisé une fête à la maison pour ne pas avoir à supporter les humeurs étranges de ma mère. Lorsque Jamil est entré au restaurant, j’ai immédiatement été intrigué par cette fille qui l’accompagnait. Elle avait le même regard que mon père. C’était fou. Je pensais que c’était peut-être une pure coincidence. A table, j’ai été encore plus frappée par certains comportements de sa part : sa façon de tenir la fourchette ou de se gratter la tête lorsqu’on lui pose des questions embarrassantes me rappelait une personne unique : mon père. La fête avait continué chez moi et lorsqu’elle a croisé mes parents et surtout mon père, j’ai su la vérité. Elle s’appelle Anaelle et est ma sœur. Tout le monde a été secouée par cette soirée et en particulier papa et moi. Plus tard ce soir-là, j’ai vraiment su de quoi ma mère était capable. Elle m’a tellement écoeurée.

J’ai eu mon bac et ma bourse pour étudier la médecine à la faculté de Lille. Mais avant mon départ, j’ai contacté Jamil car je voulais me rapprocher de ma sœur mais il a été catégorique : il en est hors de question. Anaelle ne voulait avoir aucun rapport avec mon père et il ne pense pas qu’elle voudrait en avoir avec moi. Ce n’était pas le moment de tenter de se rapprocher d’elle. Elle n’était pas prête psychologiquement. Il est très proche d’elle et s’inquiète pour elle. J’aurai aimé avoir un aîné qui s’intéresse autant à moi. Je voulais tout savoir de sa vie. J’allais consulter ses pages respectives sur les réseaux sociaux pour tout savoir. J’ai une sœur qui ne veut rien savoir de moi. C’est vraiment difficile pour moi. J’en ai tellement voulu à mon père pour cette situation. Je voulais néanmoins qu’il me parle d’elle et de sa mère. Annick est sa tante et à partir de ce moment j’ai commencé à assembler les pièces du puzzle.
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****5 jours plus tard****

Jamil m’avait interdit d’entrer en contact avec Anaelle. Elle passe le bac cette année et il ne veut pas qu’elle soit perturbée par quoi que ce soit et je le comprends parfaitement. J’ai donc pris mon mal en patience. Je me suis occupée de mes frères et surtout de Marc qui cherche maman partout sans succès. Papa ne parle pas beaucoup. Je sais qu’il est heureux d’être officiellement divorcé de maman mais il n’est pas pour autant heureux dans sa vie. C’est tellement visible.

Les résultats du bac sortent aujourd’hui. Cela fait trois jours que mes frères sont chez tante Nessa et que Jamil est arrivé à Libreville également. J’ai peur de lui dire que je veux aller au Lycée national Léon M’BA pour tenter d’approcher ma sœur. Je parie qu’il va m’en dissuader encore. Je ne sais pas si c’est la meilleure idée mais Anaelle est tellement fermée qu’elle ne me laisse pas trop le choix. Je ne veux pas l’embêter mais juste qu’elle me donne une chance de la connaître.

Anaelle a eu son bac d’office. Elle sautait de partout. Je ne savais pas s’il fallait que j’aille à sa rencontrer à ce moment –là jusqu’à ce que je la vois courir vers une magnifique femme : Annick. Elle est vraiment belle. Elle lui saute dessus et elle la serre dans ses bras. J’ai été jalouse à ce moment là de ne jamais avoir eu ce genre de moment avec ma mère. Elles ont été rejointes par un homme et une adolescente. Ils semblaient heureux tous ensemble. J’ai vu l’homme se rapprocher d’Annick et lui tenir la main avant qu’ils ne s’en aillent tous ensemble. J’ai attendu qu’ils quittent les lieux avant de descendre et de me rapprocher des listes affichées. Je cherche le nom d’Anaelle mais en pensant d’abord qu’elle s’appelle OGOWET. Je cherche donc ave le nom de famille de Jamil et je la trouve. Elle n’a pas été reconnue par papa. Je prends son nom en photo et je rentre à la maison. Je trouve mon père assis à la terrasse en train de lire le journal.

-« Anaelle a eu on bac si ça t’intéresse »
-« Pardon ? »
-« Ma sœur a eu son bac »
-« Waouh ! Comment le sais-tu ? »
-« J’étais au centre d’examen »
-« Pourquoi ? »
-« Je veux apprendre à la connaître »
-« ….. »
-« C’es une Remanda et non une OGOWET »
-« Que veux-tu dire ? »
-« Tu ne l’as pas reconnue papa. Je suis déçue de toi »
-« ….. »
-« Pfff »

Je suis partie dans ma chambre et je n’en suis ressortie qu’en soirée. En allant sur instagram, je vois qu’Anaelle est avec Jamil, Innaya et Tara sont au Wapety à Louis. C’est peut-être une opportunité que je dois saisir. Je file à la salle de bains prendre une douche et m’apprête avant de quitter la maison après avoir demandé à papa de me prêter une de ses voitures. Il me demande où je vais et je lui réponds que je veux voir ma sœur.

Garée pas loin du restaurant, je fais une petite prière avant de rejoindre le restaurant. Je repère très vite leur table et je me rapproche d’eux le cœur battant. Anaelle est sur son téléphone.

-« Bonsoir tout le monde »
-« Bonsoir Naomie. Ca va ? » dit Jamil
-« Oui et toi ? »
-« Mais prend place » dit Innaya
-« Je ne voudrais pas m’imposer »
-« Mais non vas-y »
-« Si Anaelle accepte je veux bien. Je peux te parler Anaelle s’il te plaît ? En privé »

Elle pose son téléphone sur la table et semble hésiter un moment avant de me répondre.

-« Ok »