Chapitre 19 : La déception

Write by kaynaliah

****Orlane****


Assise dans la maison de ma mère, je regarde ces portraits de notre famille. Ces sourires que nous affichons semblent indiquer un bonheur parfait alors que la réalité est complètement à l'opposé. Elle est bien là heureuse alors qu'elle a côté la vie à un être humain. Elle a sa fille à ses côtés mais elle n’a pas hésité à retirer celle d'autrui. Caroline avait un père, des sœurs, des amis, des membres de son entourage à qui elle a été brutalement arrachée. Je me demande pourquoi ma mère est un tel monstre. Je sais que personne ne naît ainsi. Qu’a-t-il donc bien pu lui arriver pour qu'elle parvienne à de telles extrémités ?

 

Je me rappelle quand j’étais plus jeune, j'idéalisais presque ma mère. Toute petite fille voudrait être la réplique de sa maman. Mais malheureusement les enfants ne perçoivent pas toujours la réalité même lorsqu’elle est sous leurs yeux. Ces derniers temps, je découvre des éléments sur ma mère qui me poussent à m'en éloigner et même à vouloir complètement couper les ponts entre nous. De la même façon qu'elle a construit sa famille de la même façon elle l'a détruite. Cette vie de famille que j’idéalisais tellement avec mes deux parents à mes côtés étaient juste un profond et amer mirage. Je me souviens de la douleur que j'ai ressentie lorsque mes parents m'ont appris leur intention de divorcer. J’étais tellement peinée et en colère. Lorsque papa était silencieux sur les raisons de ce divorce houleux en ne disait jamais rien de méchant sur maman, de son côté c’était tout simplement le contraire. Elle n’arrêtait pas d’insulter papa et de vouloir me monter contre lui. Je j’étais qu'une enfant qui ne comprenait rien à ce qui se passait et qui n'avait pour seul repère sa mère avec laquelle elle vivait constamment. Je me souviens que pendant leur séparation, maman a refusé la garde partagée avec papa et j'ai dû rencontrer un juge pour enfants suite aux accusations mensongères de maman contre mon père. Je ne le voyais qu'à la sortie des cours ou durant ma pause-déjeuner. J’étais obligée de mentir à maman sur mon emploi du temps car je voulais passer des instants avec mon père. Elle tentait de me manipuler pour me pousser à le détester.

 

J'ai fini par comprendre pourquoi papa ne réagissait pas à ses nombreuses attaques. Il avait beau aimer maman, il m'aimait encore plus. Elle avait beau le traiter de tous les noms, il se refusait de faire la même chose et d'être comme elle. Elle est juste diabolique. En me rendant chez mes cousines tout à l'heure et que j'ai entendu leur secret d'enfance, nous avons toutes finalement comprises pourquoi maman a assassiné Caroline.

 

Je pense qu'au-delà de la haine , la déception est un des pires sentiments qui puisse exister en nous. Je suis tellement déçue de la femme qu' est Ruth. Tellement déçue de la personne qu'elle est. Tellement déçue de la mère qu'elle est. Une honte indescriptible l’habite depuis peu. Honte d'être sa fille, d'avoir une partie de son ADN en moi. Malgré tous ces sentiments contradictoires qui dominent en moi, je suis obligée pour l'instant de prendre sur moi, du moins pour quelques heures encore jusqu'à ce qu'elle rentre à la maison. Plusieurs personnes me qualifieraient de « traitresse » mais je ne peux pas rester là à faire la sourde oreille face à un problème aussi gravissime. Mon père m'a inculqué certaines valeurs m'empêchant de fermer les yeux sur les actes posés par ma mère. Fermer les yeux là-dessus signifierait tout simplement que je la soutiens dans ses œuvres et que je me rends surtout complice de ses actes.

 

Je prends mon téléphone et compose le numéro de papa. Je raccroche par la suite en me disant que je le verrai demain avant d’aller récupérer maman à l’hôpital. J’éteins toutes les lumières et ne tarde pas à aller me coucher après m’être assurée que toutes les lumières sont éteintes. Je prends ma Bible posée sur ma table de chevet et décide de méditer sur un verset.


Je me lève en sursaut du lit toute en sueurs. J’avise l’heure sur mon réveil : il est trois heures du matin. Je me lève et me rends à la salle de bains me rafraîchir avant de revenir toute pensive m’asseoir sur mon lit. Comment est-ce possible ? J’ai l’impression que plusieurs flashs viennent perturber mon esprit déjà désorienté. Ce n’est pas possible. Tout me revient. Je commence à comprendre la raison de mon accident. Je pense comprendre pourquoi maman n’était pas à mes côtés. Elle s’est bien foutue de mon état et de moi. Il faut que je vois mon père le plus tôt possible. Je reste allongée sur le lit durant des heures à fixer le plafond sans pouvoir bouger. A six heures du matin, je vais prendre une douche rapide, bois un café noir bien corsé et prends mes clés de voiture avant de sortir de la maison.

Lorsque j’arrive, les volets sont encore fermés : il dort encore. Je gare la voiture et en descends. Je salue le gardien avant de me diriger vers la porte d’entrée. Heureusement que j’ai mon jeu de clés. Tout est sombre dans la maison encore. J’en profite pour ouvrir les volets et lui préparer son petit-déjeuner. Une vingtaine de minutes plus tard, il me retrouve à la cuisine

  • Orlane ? Mais que fais-tu ici à une heure aussi matinale ? Y a-t-il un problème ?
  • Non papa. Je voulais te voir.
  • Entre.
  • Merci.
  • Tu es sûre que tout va bien ?
  • Oui papa.
  • Tu veux boire quelque chose ?
  • Papa tu n’as pas à faire le service pour moi. Si j’ai besoin de quelque chose, j’irai me servir.
  • Mmmh.
  • C’est vrai en plus. Tu dis toujours que c’est chez moi aussi ici. Et tu es mon aîné donc tu n’as pas à faire cela pour moi.
  • Ok.

Je porte un regard attentif sur mon père. Il n’a pas beaucoup vieilli quand même. Il a toujours été mon parent préféré. Il a toujours été de mon côté, dans les bons comme mauvais moments lorsque ma mère était inscrite aux abonnés absentes.

  • Papa j’aimerai te poser une question s’il te plaît.
  • Je t’écoute.
  • Que m’est-il arrivé lorsque j’ai eu mon accident ?
  • Pourquoi me demandes-tu cela ? Fit-il en fronçant les sourcils.
  • Je fais des cauchemars ces derniers temps.
  • ….
  • J’ai l’impression que s’est lié à ce qui m’est arrivé.
  • Es-tu sûre de ce que tu dis ?
  • Je n’en suis pas certaine mais tout me ramène à cette période ? Comment ai-je eu mon accident ?
  • Tu étais avec ta mère ce jour-là.
  • …..
  • J’étais en mission à Brazzaville lorsqu’elle m’a appelé pour m’informer que tu venais d’être hospitalisée et que tu étais dans un état grave.
  • …..
  • J’ai sauté dans le premier vol pour venir vous retrouver.
  • …..
  • Elle m’a dit que tu as certainement dû faire un mauvais pas dans les escaliers et que tu as dégringolé les marches en tombant. Tu as été retrouvée au pied des escaliers.
  • Maman était seule ?
  • A l’hôpital oui. Mais pourquoi poses-tu toutes ces questions ?
  • Je recherche la vérité papa. Juste la vérité.
  • Je ne comprends pas où tu veux en venir.
  • Depuis quelques temps, je me pose des questions sur maman.
  • ……
  • J’essaye de comprendre à quel moment elle est devenue ce monstre sans cœur.
  • Parle de ta mère avec respect.
  • Papa, j’ai rêvé de mon accident cette nuit.
  • Ah oui ? Pourtant les médecins disaient que cela allait être compliqué que tu te souviennes de quoi que ce soit à cause de ta chute.
  • Je sais papa mais Dieu m’a révélé des choses cette nuit.
  • Qu’est-ce qui se passe ?
  • Je me souviens de tout papa. De tout. Je sais exactement ce qui s’est passé cette nuit.
  • ……
  • J’avais pris le dîner avec maman cette nuit-là. J’ai regardé un petit peu la télévision car c’était un samedi avant d’aller me coucher.
  •  Au milieu de la nuit, après être allée me servir un verre d’eau et en remontant dans ma chambre, j’ai entendu des bruits bizarres.
  • ….
  • J’ai mis du temps à comprendre que cela venait de votre chambre.
  • ….
  • J’ai entendu maman discuter avec une personne.
  • J’étais tellement heureuse car je pensais que tu étais rentrée de mariage et que tu voulais me faire une surprise.
  • …..
  • Je ne voulais pas attendre et te voir de suite. J’ai donc fait demi-tour et oublié de cogner à la porte comme d’habitude.
  • Qu’as-tu vu ?
  • Maman dans une position très explicite avec tonton Fabrice.
  • …..
  • Ils étaient au lit ensemble et n’avaient même pas remarqué ma présence.
  • ….
  • Je me souviens avoir hurlé. Comment pouvait-elle faire cela ? Pourquoi se comportait-elle ainsi ?
  • ….
  • Je n’étais plus une gamine pour ne pas comprendre ce qui venait de se passer.
  • ……
  • Je voulais juste tout casser.
  • …..
  • Elle m’a suivie dans les escaliers et nous nous sommes disputés violemment. Je la haissais.
  • ……
  • J’ai effectivement fait un mauvais pas et une très mauvaise chute qui a créé mon accident.
  • …….
  • Je suis désolée papa.
  • …..
  • Je suis vraiment désolée.
  • …….
  • …….
  • Ce n’est pas de ta faute chérie. Tu n’es en rien responsable des actes de ta mère.
  • Nous ne la connaissons pas du tout papa.
  • ….. Elle est trop dangereuse.
  • ……
  • Elle n’a pas hésité à tout valser pour cacher ces vilains petits secrets.
  • …..
  • Quand je me suis réveillée de mon coma et que je la cherchais partout, elle est partie se cacher aux Etats-Unis.
  • Pourquoi se cacher ?
  • Maman a tellement de vilains secrets qu’on pourrait en faire un film pour tout un siècle.

Je sors de ma poche l’extrait d’acte de naissance que j’ai trouvé.

  • Elle a eu une fille aussi avec son frère.
  • Pardon ?
  • Elle n’a jamais été envoyée en mission.
  • …..
  • Tu as déjà vu une entreprise papa qui envoie une de ses salariées en mission à l’autre bout du monde alors que son enfant est entre la vie et la mort ?
  • …..
  • Elle s’est foutue de tout le monde.
  • Elle devait bien célébrer le fait que je demeure dans le coma aussi longtemps car elle pouvait cacher tous ses secrets.
  • ….
  • Pire encore lorsqu’à mon réveil, je ne me souvenais de rien du tout. Cela a vraiment arrangé ses affaires.
  • Je n’arrive pas à y croire.
  • La vérité était sous nos yeux depuis le début et on l’a involontairement laissé nous berner.
  • Elle a eu deux enfants avec son frère ?
  • Elle s’appelle Alexa et je sais juste qu’elle vit aux Etats-Unis.
  • Elle est née deux mois avant le retour de ta mère au pays. Comment n’ai-je pu rien voir ?
  • Je ne sais pas comment faire pour la regarder papa et dire que je dois aller la chercher tout à l’heure.
  • Non.
  • Pardon.
  • Je rejette cela. Tu vas chez ta mère faire tes bagages. Je t’attends ici. Quand tu seras de retour, j’irai la chercher moi-même.
  • ….
  • La récréation a assez duré. Il est temps qu’elle sache que je sais tout.
  • ….
  • Et dire que je l’aimais comme un fou. Prêt à tout pour elle. Elle a fait le choix d’être malhonnête toute sa vie. Je me demande si elle a déjà dit au moins une fois la vérité. Tout est pardonnable, excepté le mensonge, l’infidélité et la trahison.
 

Je sais que je viens de blesser mon père mais je ne pouvais pas garder ces informations pour moi. Je ne peux pas lui mentir. Je l’embrasse avant de rentrer chez ma mère faire mes bagages. La tristesse et la déception que je ressens son trop grandes. Je suis tellement déçue que des larmes de désespoir, déception ne tardent pas à dégouliner de mes yeux.

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