chapitre 2

Write by Max Axel Bounda

Lundi 07 aout 2017

BSI Building

11 h 37


Il était près de douze heures, et tout le bureau attendait en salle de réunion au siège du BSI situé dans la commune d’Akanda. Le BSI comprenait une quarantaine d’agents divisés en deux brigades, celle de la lutte contre le terrorisme, placée sous la direction de Guillaume Ivala, et celle de la lutte contre la criminalité, sous l’autorité de Ruffin Asselé.


Le Directeur Assélé avait convoqué toute l’équipe pour faire le point sur l’enquête. Mais à son arrivée il y avait avec lui, quelqu'un que personne ne s’attendait à voir dans les locaux flambants neufs de l’Akanda Building. Le boy bouche royal, avec son sourire narcissique sur sa tête chauve de premier de la classe entra à la suite du directeur. Mais qu’est-ce que faisait le ministre de la communication dans les locaux du BSI ? Tout le monde s’attendait au trop à voir le ministre de l’intérieur, leur ministre de tutelle pas mais celui-ci.

Le directeur Asselé fit un bref discours avant de passer la parole à son invité.

« Bonsoir à tous. Comme vous le savez, une sixième victime du chirurgien a été découverte ce matin dans la commune d’owendo. Cette découverte macabre plonge encore plus toute la ville dans la stupeur. Et jusqu’aujourd’hui, vous n’avez toujours rien qui pourrait nous conduire à l’arrestation de ce tueur qui trouble la quiétude des populations, quiétude promise par le Chef de l’État dans son projet changeons ensemble.

Où était le rapport avec l’enquête ?

Le gouvernement me charge de vous informer que compte tenu de la situation, et des avancés insignifiantes que votre Bureau Spécial a fait depuis le début de cette affaire, tant que vous n’aurez pas mis la main sur cet opposant à l’émergence du Gabon, vos congés sont suspendus. »

La salle fallait éclater de rire. Soit il n’était pas informé soit il avait mal lu ses notes. Les membres du BSI n’avaient pas de congés. Quand ils préparaient une mission d’interventions par exemple, accompagné du Groupement d’Intervention Rapide, les agents spéciaux du BSI dormaient et mangeaient sur place dans une aile qui leur était affectée. Leurs chambres étaient meublées de façon spartiate : un lit, une douche et un petit placard. Pas de télévision ni d’ordinateur. En fonction de la dangerosité de l’opération, ils disposaient d’armes légères précisément des Glock et Beretta 9 mm, ou des armes plus lourdes des M16 et M4.


« Le gouvernement veut que vous retrouviez ce tueur de grand chemin, reprit le ministre. Vous allez mettre tous les moyens possibles pour trouver cet homme qui doit certainement être un opposant frustré qui se venge sur de pauvres innocentes jeunes filles. La police a mobilisé une douzaine de ses meilleurs agents qui ne travaillent que sur cette enquête depuis plusieurs mois, mais nous ne voyons aucun résultat. Les plus hautes autorités de la république veulent avoir des résultats avant les festivités du 17 août. Sinon vos salaires seront coupés dès la fin de ce mois. »

Quoi ?! Qu’est-ce qu’il raconte celui-là ?

Mais il est malade ce type !


Toute la salle s’enflamma. Les agents spéciaux dans la salle n'étaient visiblement pas d’accord.


« Mais vous êtes fous ! » Lanca une voix.


« Vous dites que vous bossez, mais pour quels résultats ? On n’a rien ! Pas un indice, rien. Les populations commencent à se demander à quoi sert l’argent que l’on verse à ce Bureau Spécial police. Le gouvernement est pris à tabacs sur les réseaux sociaux, Info kinguélé, Info d’Akébé, tous les groupes Facebook et whatsapp se payent notre tête à cause de votre incapacité à résoudre cette affaire. »

— Vous écoutez ce que les Gabonais disent ? Pourquoi ils ne mènent pas l’enquête eux-mêmes ?

Le ministre tourna la tête pour voir qui était celui qui avait osé l’interrompre. Et cette voix était celle du l’agent spécial Christophe Varama, assis sur une table contre le mur.


Le BSI était commandé par le Directeur Rufin Asselé, secondé par le sous-directeur Lucien Nkulu, et constitué de trois équipes. Samson Mbenguet dirigeait la première, Axelle-Marthe Koumba la deuxième, et Christophe Varama, un ancien capitaine de la Police judiciaire, était le chef de la troisième équipe.

— On ne va pas faire le travail à votre place, riposta le ministre, le visage grave. Vous allez tous vous bouger et arrêter ce connard avant les fêtes sinon vous en subirez les conséquences ! D’ailleurs dès aujourd’hui vous êtes sur bon de caisse.

— Facile à dire… lâcha Varama, dépité. De tous les agents s’état lui le plus nerveux. Bientôt quarante ans, il avait recruté pour ses années de services impeccables à la PJ. On ne va pas arrêter ce fou d’un simple coup de baguette magique de l’émergence.

Le ministre avança vers lui d’un bond, mais le Directeur Asselé vint au secours du téméraire Christophe.

— D’accord Monsieur le Ministre ! Je crois que les agents ont compris le message. Ils vont redoubler d’efforts pour boucler cette enquête. Car il vaut mieux garder vos nerfs pour le chirurgien quand ils l’auront bouclé. Merci pour cet instant de rappel. Je crois que vous avez du boulot. On va mettre un terme à cette rencontre, un tueur en série court toujours dans les rues de Libreville, lança le Directeur.

Personne ne trouva à redire. Car si l’occasion leur avait été donnée de répondre, ces agents auraient tous été enfermés et radiés des effectifs de la police. Ce ministre serait mort d’injures. Osez menacer de couper leurs salaires, alors que si ça se pouvait, c'est même un de ses collègues qui envoyait le chirurgien faire cette basse besogne pour être maintenu au gouvernement. Il ne manquait pas d’air ce type.


Le Directeur raccompagna son invité hors de la pièce hors de la pièce et revint des minutes plus tard en souriant. Il encouragea ses hommes à poursuivre le travail, avant de les laisser entre les mains de son adjoint qui suivait cette affaire.

— Puisque notre ami est retourné dans son bureau climatisé, commenta le sous-directeur Nkulu en riant, nous allons pouvoir nous mettre au travail, il remplissait un tableau blanc d’indications.


Axelle-Marthe s’approcha du grand tableau fixé au mur pour se changer les idées. Un plan de Libreville y était affiché. À côté de celui-ci étaient accrochées les photos des cinq premières victimes, ainsi que plusieurs informations sur chacune d’elles. Varama et deux de ses hommes étaient débout devant le tableau. Leur équipe était chargée de la victimologie, c’est à dire l’étude de la personnalité et du statut psychosocial des victimes, et aussi de recueillir les informations sur les victimes. Vu qu’aucun d’eux n’était psy Axelle-Marthe leur prêtait volontiers les services de Cassydie. Sans cela, ils passeraient à coté de pas mal de détails. Quand Axelle-Marthe avait rejoint cette enquête les policiers disaient n’avoir trouvé de concret, par exemple qu’il n’y avait aucun lien entre les victimes. Pourtant, il y en avait plusieurs que les filles avaient repérés.

Pas besoin d’être Sherlock Holmes.

Les deux membres de l’équipe de Christophe Varama était la caporale Simone Wora, une femme de trente-cinq ans toujours d’humeur joviale, et le lieutenant Thierry Doumbia, d’origine ivoirienne un gars expérimenté d’une quarantaine d’années aussi, mais très taquin. Ce qui l’intéressait c’était sauter les filles du service. Malheureusement pour lui, les quatre femmes du Bureau Spécial avaient déjà compris le message. Il n’aurait aucune d’entre elle. Simone Wora était en train de coller sur le tableau, les photos prises ce matin à Owendo. Jusque-là, ils n’avaient pu mettre un nom que sur quatre des cinq premières victimes. Axelle-Marthe s’approcha du tableau juste derrière Simone, afin d’observer les portraits des autres victimes.


La première photo était celle d’une jeune femme de vingt-six ans, retrouvée il y a quatre mois. Elle s’appelait Pascaline Nkama, une belle fille aux petits yeux marron, qui mesurait un mètre soixante-sept pour cinquante-cinq kilos. Elle était comptable dans une boite d’Audit. Un débroussailleur l’avait découverte près de la décharge de Mindoubé. Tout le monde avait directement conclu à un crime rituel. Du coup l’affaire avait été banalisée. C’était du déjà-vu.

Le chirurgien lui avait coupé le clitoris, les ongles et les tétons des deux seins alors qu’elle vivait encore. Pour finir en beauté, lui avait arraché le cœur. C’était la première fois que l’on entendait parler d’un crime rituel avec ablation des ongles. La pauvre fille avait dû subir un calvaire.

D’après ce que disait le rapport d’enquête, elle n’était pas rentrée chez elle pendant trois jours. L’on pouvait donc supposer que le Chirurgien l’avait enlevée quelque part entre sa sortie du travail et son domicile. La dernière fois qu’on l’avait vu c’était en boite de nuit à Louis. Le chirurgien l’avait peut être enlevée après un groove bien arrosé.

Sur la photo de la seconde victime s’affichait le visage souriant d’Antonia Mboumbou, une jolie petite femme d’un mètre soixante pour soixante-huit kilos. C’était la plus âgée des victimes avec ses trente-cinq ans. Elle était avocate dans un grand cabinet du côté du Centre-ville, et vivait seule au charbonnage, dans le premier arrondissement de Libreville. Elle logeait Dans une grande bâtisse léguée par son grand-père, un ancien dignitaire de ce pays.

Antonia avait aussi disparu lors d’une soirée en boite et avait été retrouvée dans un entrepôt de stockage de poisson au Port-Mole, tout près de la Cathédrale Sainte-Marie. Le légiste avait dit que la mort avait été provoquée par un arrachement du cœur alors qu’elle vivait encore. La police avait interrogé les amis qui étaient sortis avec elle deux jours plus tôt. Et apparemment, elle était partie seule. Elle avait également interrogé son petit ami officiel, mais l’enquête n’avait rien donné de son côté. De toute façon, il n’était même pas au Gabon.

Le médecin légiste, qui était Claude Itomba sur cette affaire, avait dit qu’elle n’avait pas été tuée à l’endroit où avait été découvert le corps. Antonia Mboumbou avait été enlevée après avoir quitté la boite de nuit, puis le Chirurgien l’avait emmenée dans un endroit pour commettre son opération, avant de jeter le corps dans cet entrepôt qui puait le poisson pourri.

Déjà deux détails importants à se mettre sous la dent.

Au cours de l’autopsie, Claude avait découvert des traces de piqûre sur le cou de la victime. Un examen toxicologique approfondi avait révélé la présence d’un sédatif dans l’organisme, le Kobolo plus connu sous le nom de code KBL.

On ne savait pas trop comment on était arrivé là mais on s’était juste réveillé un matin avec une drogue de rue dans les lycées et collèges de Libreville. Au départ les élèves, ils avaient tellement d’imagination, mélangeaient du Tramadol et du valium. Ils disaient que cela les faisaient planer. Des petites pilules bleues, rouge ou rose, vendues à 250 Francs le comprimé. Avant qu’on ne comprenne ce qui se passait, le phénomène avait envahi le marché.

Un peu de Kobolo dans un verre de liqueur ou de bière, et c’était la défonce assurée. Il avait fallu attendre plusieurs mois, quelques agressions, des overdoses, pour que la république finisse par réagir en interdisant la vente de ces produits sans ordonnances. Et en surveillant leurs entrées sur le marché.

La réaction des autorités avait été tardive, mais cette enquête nous avait permis de soupçonner en fait qu’un réseau de trafic de de KBL avait vu le jour quelque part au Gabon. Mais on était complétement à côté de la plaque. C’était plus que cela. Il ne s’agissait pas seulement d’un réseau de trafic de KBL, mais plutôt de fabrique de Kobolo car un comprimé ayant les mêmes propriétés était fabriqué au Gabon, et vendu dans les rues de Libreville comme un bonbon. Juste là sous nos yeux.

On ne savait pas comment, ni qui le faisait mais une chose étaient sûre pour mettre sur le marché un tel produit il fallait avoir le matériel et l’arsenal adéquat. C’est-à-dire, toute une usine de fabrique de produit pharmaceutique ou d’avoir des connaissances très approfondies en chimie.

La troisième victime, Séraphine Diramba, avait été retrouvée nue elle aussi dans une veille maison abandonnée à Okala dans le Nord de Libreville. Deux bangando l’avaient retrouvée couchée sur un vieux matelas. Son cœur, son clitoris et ses ongles avaient été arrachés. Le Chirurgien avait enfoncé un bout de bois dans le vagin de la jeune femme. Cela rappelait des affaires précédentes de crimes rituels.

Séraphine avait vingt-quatre ans seulement, d’origine marocaine, mesurait un mètre soixante-quinze et résidait du côté d’Agondjé, non loin de l’endroit où elle avait été retrouvée morte. Elle était étudiante dans une école de management de Libreville. Ces condisciples s’étaient effondrés en apprenant la nouvelle. Elle sortait avec un mec élevé dans le sérail, et c’était lui qui avait signalé sa disparition deux jours avant qu’on ne la retrouve. Séraphine et lui devaient se rendre ensemble à une soirée au milieu de la nuit au Séisme, un complexe appartenant aux proches du fils du président de la République. Depuis son départ de chez elle, où semble-t-il quelqu’un était venu la chercher, plus personne ne l’avait revue, son corps avait été retrouvé mutilé trois jours plus tard.

L’audition du petit-ami, un émergent, n’avait rien donné, car au moment de la disparition de Séraphine, il se trouvait au Séisme, au Boulevard du Bord de Mer, non loin du Conseil Économique et Social, avec plusieurs personnes qui avaient confirmé son alibi.

Les résultats de l’autopsie avaient révélé la présence de KBL dans le corps de Séraphine. Nous savions à présent que le chirurgien injectait le Kobolo à ses victimes.

Troisième indice important.

La photo suivante montrait la quatrième victime en vacances dans une station balnéaire, une planche de sky sous le bras. Mauricette Opiangah était une étudiante gabonaise de vingt-huit ans qui étudiait à Laval au Canada depuis deux ans. Elle était rentrée passer ses vacances à Libreville et vivait avec sa mère du côté des Frangipaniers. La belle vie tranquille.

Son corps avait été retrouvé dans un immeuble en chantier au Boulevard Triomphal. Elle avait subi les mêmes mutilations que les autres. Comme les trois précédentes victimes, elle avait été violée, mais le chirurgien avait fait preuve de créativité. En effet, il avait coupé les trois doigts de la jeune femme alors qu’elle encore en vie.

D’apres ce que l’on avait appris, Mauricette était sortie un soir avec deux de ses amies, Josy et Amanda. Aucune de ses amies ne se souvenait l’avoir vue partir avec quelqu’un du Snack où elles étaient à London. Toutefois, l’autopsie avait aussi révélé des traces de KBL dans son organisme.

En somme, nous avions quelques informations sur la victimologie propre aux victimes. Même si la cinquième victime n’avait toujours pas été identifiée.

Les points communs entre ces quatre filles, étaient nombreuses : Elles étaient jeunes et jolies, toutes dans la vingtaine. Elles fréquentaient les boites de nuit. Et c’était là-bas qu’il les choisissait. Donc le chirurgien ne choisissait pas ses victimes à l’avance. Et c’était une bonne chose car cela supposait qu’il pouvait commettre des erreurs.

Autre chose, pour chacune des cinq victimes, l’ablation du cœur avait été faite de façon très propre. Cela nous faisait penser que le chirurgien devait être un médecin. Mais en vérité, nous n’avions pas une seule piste ni aucun suspect car il n’y avait pas d’empreintes, pas de traces mais surtout les liens entre les victimes. Elles ne connaissaient pas apparemment. Et cela rendait les choses très compliquées.

Le Chirurgien était quelqu’un de très méticuleux. Axelle-Marthe lors d’une réunion  avait émis l’idée que ce tueur nous lançait un défi. On était face d'un tueur en série rusé, organisé et sadique. Le plus difficile c’était les médias qui nous traitaient de tous les noms d’oiseaux ! D’ailleurs c’était eux, qui l’avaient surnommé le Chirurgien du Komo. Comment il s’appelait déjà ce journaliste de Gabonreview ? Dorian Ellassoumou. Il avait eu une très bonne inspiration.

— J’espère qu’on arrivera vite à identifier cette pauvre fille, fit Wora en se tournant vers Axelle-Marthe.


Cassydie se rapprocha d’elles. Elle était psychologue criminelle. Au début personne ne voyait l’intérêt d’avoir deux psycho-criminelles dans le BSI. Mais cela avait vite changé. Axelle-Marthe et Cassidy démontrèrent très  leur utilité car les analyses qu’elles apportèrent à l’affaire s’était avéré pertinentes pour plus d’un.

La jeune femme se place à la droite de Wora. Elle portait des petites lunettes fines et avait attaché ses cheveux en une queue de cheval, mettant en valeur son visage fin et gracieux.

— Je ne peux plus accepter le verre d’un mec dans Libreville. C’est devenu trop dangereux, dit-elle en regardant Wora.

— Vraiment, est ce qu’on a même encore le temps de se faire draguer en ce moment ? rendit Simone Wora. Cassidy éclata de rire.

— On espère quand même, rendit la lusophone. Cette enquête me donne mal à la tête. Il est trop malin ce gars.

— Ouais, il est soigneux, méthodiste et organisé. Il n'agit pas sur impulsion, et sait garder son sang-froid, dit Axelle qui arriva juste à côté d’elle, emporté dans ses analyses.

— Rien qu’imaginer ce qu’il fait à ses filles c’est horrible, répliqua Simone.

— C’est un tueur qui aime faire souffrir ses victimes, expliqua-t-elle sans quitter des yeux les photos affichées au mur. Il aime jouir de la souffrance de ses victimes. Plus elles souffrent plus il prend son pied.

— Tout ça c’est des conneries ! lança une voix derrière les femmes qui se retournèrent toutes les trois. Il prend son pied avec ses filles parce qu’il n’a pas l’occasion de le faire dans la vie réelle c’est tout, ricana l’homme qui entrait avec une tasse de café. Ce qui l’intéresse c’est juste toucher son pognon après avoir livré les organes, se hasarda Loïc Tsamba, c’était un membre de la première équipe. Il s’assit à quelques mètres des trois femmes sur un des bureaux et avala une gorgée de son liquide caféiné.

— Si c’était un sadique sexuel, il les aurait juste violé et tué et ne les aurait pas mutilées, répondit Axelle-Marthe. D’après moi, c’est un sociopathe que l’on cherche. Si ça se peut, il est même plein aux as. Donc pas besoin de vendre des organes. Et pour transporter des femmes dans Libreville au milieu de la nuit, il lui faut bien une voiture qui lui appartient. Ce qui écarte d’emblée la thèse du fauché en quête de sous.

— Il doit être excité par les cris de ses victimes pendant l’acte sexuel, voilà pourquoi il les viole, après les avoir mutilées. Il est au sommet de sa jouissance lorsqu’il les pénètre après les avoir charcutés, compléta Cassydie. Elle le dit avec un air de dégout si visible qu’on aurait dit qu’elle allait vomir.

— Et d’après vous pourquoi arrache-t-il leur cœur, si ce n’est pas pour le vendre ? demanda Ludovic qui écoutait tranquillement dans un coin de la pièce. Axelle-Marthe se retourna pour faire face à lui.

— C’est sa façon à lui de les tuer. En ôtant l’organe vital, il doit avoir l’impression d’absorber leur énergie vitale et d’augmenter son pouvoir de domination.

— Et peut-être même qu’il boit leur sang ou il mange leurs organes crus, rétorqua Samson Mbenguet. Le profil typique du policier gabonais. Tout dans les muscles et les galons, rien dans la tête. Toute la salle éclata de rire. Il était le chef de fil de ceux qui ne croyaient pas au profilage. Et il y avait de quoi, car jusqu’ici les profileuses du groupe avait du mal à peaufiner leur profil du tueur. Elles avaient au réussi à démontré que leur théorie de crimes rituels ne tenait pas la route. Les victimes de sacrifices rituels devaient être pures. Et en les violant, le Chirurgien les rendait impurs. Ce qui était inadmissible pour un commanditaire.

Cassydie et Joristana se mirent à rire.

— Jusqu’à présent, si on ne l’a pas encore arrêté c’est parce qu’il n’a pas commis d’erreur, ajouta Samson. Mais à un moment il finira bien en faire, et erreur fois mbout est corrigée par le ndos. Donc vos conneries de tueur en série là, je ne suis pas dédans.

Cassydie prit une forte inspiration en secouant la tête, comme si elle suffoquait.

— Vous êtes trop bêtes. Il y a deux types de tueurs en série, mon cher ! Il y a les psychopathes et les sociopathes, expliqua-t-elle. Les psychopathes ont généralement un comportement inadapté et ne sont souvent pas intelligents. Ils ne travaillent pas et ont beaucoup de problèmes. Ils sont très souvent violents et n'ont que très peu d'amis. Quand ils tuent, ça leur vient soudainement. Ils ne planifient pas leurs meurtres. C’est pour cela qu’on les arrête facilement. Par contre, les sociopathes, c’est une autre paire de manches. Ce sont des personnes bien intégrés dans la société. Ils ont une vie de famille, travaillent et sont comme monsieur tout le monde. Lorsque que l'un d'eux se fait arrêter, même sa femme est étonnée. Et n’arrive pas à croire qu'elle vivait avec un tueur en série. Tous leurs crimes sont soigneusement organisés et planifiés et ils ne commettent que peu d'erreurs. Voilà pourquoi notre enquête piétine depuis quatre mois.

Tout le monde écoutait Cassydie en silence, chacun mesurant la profondeur de son analyse.

— Cassy, ne perd pas ton temps à expliquer à cet idiot que le Chirurgien appartient à la catégorie du sociopathe et qu'il va nous falloir du temps pour l’arrêter. Si on arrive au moins à entrer dans sa tête, dit Axelle-Marthe.

Quelqu’un arriva dans la pièce en courant ; c’était le lieutenant Cathérine Nyingone.

— Les gars, on a identifié la dernière victime.

Impossible. On a retrouvé le corps de cette fille ce matin seulement, et on a déjà son identité ?

— Les photos de la fille du marais ont circulé sur internet, et ce matin, ses parents ont alerté la police. On la cherchait depuis quatre jours. Sa grande sœur est passée à la morgue il y a une heure pour identifier le corps.

Quatre jours ?? C’était plus longtemps que les autres filles. Il l’a gardé trois jours en vie. Le chirurgien a encore changé son mode opératoire. Il les gardes trois jours en vie. Il reste à savoir où et pourquoi ?


Le Sous-Directeur Nkulu parut excité, et ordonna à Ludovic et Cassydie de se charger de l’assistance psychologique de la famille. Le temps que l’on complète les informations et qu’on aille les interroger.

— Alors, qu'est-ce qu’on a sur elle ? demandai-je à Catherine.

— Elle s’appelait Rigoberta Nzouba Ndeka, âgée de trente-cinq ans, répondit la jeune femme en lisant la fiche qu’elle tenait entre les mains. Elle travaillait comme commerciale dans une entreprise située à Kalikak. Une boite de placement financier. C’est à peu près tout ce qu’on sait pour l’instant.

— Heu… autre chose, intervint gravement Christophe Varama. C’était la fille de Jacques Nzouba-Ndeka.

— C’est qui lui ? demandai-je.

Ludovic, Doumbia et le Sous-Directeur Nkulu me dévisagèrent soudain, je ne comprenais pas pourquoi. Il y eut un instant de silence.

— Mais y’a quoi ? C’est qui ce type ?!

— Sérieux ! Tu ne connais pas Jacques Nzouba Ndeka ?! Fit Doumbia. C’est le grand patron de BioPharma Gabon, la société pharmaceutique leader du marché des médicaments au Gabon. Et le fils de l’ancien président du Sénat.

Au même moment mon téléphone vibra dans la poche de ma veste en jean. Je regardai, encore Claude.

Qu’est-ce qu’il me voulait celui-là !

— Oui, Monsieur Itomba, que puis-je faire pour vous ?

— On dit bonsoir d’abord Axelle-Marthe. Peux-tu passer au CHUL le plus vite possible ! J’ai des infos importantes pour toi, elles t’aideront peut-être à arrêter le chirurgien !

— Sérieux ??! D’accord, on arrive tout de suite.



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