Chapitre 2 : La folle

Write by Mayei

CHAPITRE 2 : La folle

 

…Axelle Yebouah épse Fadiga…

 

Je me tiens devant le miroir et regarde mon corps…mes yeux passent de ma cicatrice laissée par une césarienne jusqu’à mes seins qui avaient perdu de leur teneur. Ils n’étaient pas flasques mais n’étaient plus aussi parfaits qu’avant ma grossesse. Je savais que mon corps aurait pris un coup si je donnais naissance ce pourquoi j’avais toujours repoussé l’échéance. Mais je m’étais retrouvée au pied du mur entre mon mari qui se plaignait et ma mère qui en faisait de même. J’avais eu un enfant et c’est tout ce que je pouvais faire pas plus.

Je continuais à regarder mon reflet ! comment un homme aurait-il envie de moi ? comment mon mari aurait-il envie de moi ? ce que je voyais n’avais rien de très attractif. Déjà que je n’étais pas très fine, j’avais rajouté du poids durant ma grossesse. Je me sentais laide et avais conscience du fait qu’il fallait très vite perdre ce poids. J’en avais perdu et même plus. Seulement cela n’avait fait aucun effet à mon mari…je ne l’avais pas vu réagir en bien ou en mal. Il était resté silencieux.

Ce jour-là, je me rendis chez ma coiffeuse. Sur un coup de tête, je décidais de faire quelque chose de radicale toujours en espérant que mon mari réagisse. Je m’étais coupée tous les cheveux. Il était rentré et m’avait simplement saluée. En sortant de la douche cette nuit-là, j’avais capté son regard sans qu’il ne s’en rende compte. Son regard était épreint de dégout. Mon mari ne me désirait plus. Je n’avais pas supporté ce regard au point où je nous avais imposé de dormir dans des chambres séparées. Tout avait dégringolé à partir de ce moment.

Mon ordinateur s’était mis à sonner. Sortant de ma torpeur, j’ai rapidement passé une robe qui trainait par la et ai répondu à cet appel hangout de Mireille. C’était celle qui s’était chargée de notre interview la dernière fois.

 

Moi : bonjour Mireille comment tu vas ?

Mireille : je vais bien madame Fadiga. J’espère que vous aussi. Je vous contactais par rapport à l’article. Il est prêt et je vous ai envoyé un brouillon.

Moi : ok je vais y jeter un coup d’œil rapidement.

Mireille : si vous avez une quelconque modification que vous souhaitiez faire n’hésitez pas.

Moi : c’est noté Mireille. Je vais parcourir le document de ce pas.

 

Chose dite, chose faite. J’ai minutieusement jeté un coup d’œil à ce document. Il fallait faire attention aux media dans ce pays. Ils ne tardaient pas à déformer vos propos et soulever toute l’opinion publique contre votre personne. Tout était parfait. Nos propos avaient été retranscrits à la lettre. Je répondis au e-mail en donnant mon ok. Ma chambre servait aussi de bureau. J’étais écrivain à plein temps alors pas besoin d’un bureau officiel. Mon inspiration me venait peu importe l’endroit. Je ne me déplaçais jamais sans mon petit carnet et mon crayon qui a force d’être taillé était devenu tout minuscule.

J’ai passé la majeure partie de la journée à jouer avec mon fils jusqu’à ce que ce dernier s’endorme et que le sommeil me gagne aussi. Je suis montée le coucher puis en allant dans ma chambre, passais devant celle de Philippe. Il ne fermait jamais sa porte à clé. Tout doucement, je poussais la porte et me glissais dans sa chambre puis dans sa douche. Je pris dans son panier à linge sale une de ses chemises sur laquelle on pouvait facilement sentir son parfum. J’inspirais profondément cette odeur qui me manquait terriblement avant de retirer ma robe et de l’enfiler.

Je me glissais dans ses draps. Il me manquait tant. Son odeur donnait l’impression qu’il était si près de moi. Je me mis à imaginer toutes ces fois où nous nous étions envoyés en l’air dans toutes les pièces de cette maison. Je me souvenais de ses caresses…de ses gestes…de sa façon de me regarder dans les yeux lorsqu’il s’enfonçait en moi. Je glissais ma main dans mon dessous en pensant au bien qu’il me procurait par le passé. J’imaginais qu’il était sur moi tandis que je me caressais le clitoris et les lèvres intimes. Comme j’avais envie de mon homme ! je me suis touchée en pensant à lui et en humant son odeur jusqu’à ce que je jouisse en criant son prénom. Je me suis endormie complètement vidée.

A mon réveil, je refis son lit comme je l’avais trouvé et remis sa chemise dans le panier à linges sales. Je suis sortie de là comme si je n’y avais jamais été.

 

Ce soir, Philippe est rentré bien tôt.

 

Philippe(froid) : bonsoir !

Moi : bonsoir Philippe !

Philippe : avant que je n’oublie, il y a Léon qui a proposé que nous allions passer un weekend avec sa famille sur San Pedro. Je ne sais pas si cela t’intéressera.

Moi : et c’est pour quel weekend exactement pour que je puisse voir dans mon agenda.

Philippe : ce weekend !

Moi : ok ?

Philippe : ok genre quoi ? oui ou non ?

Moi : oui Philippe ça m’intéresse que nous allions ce weekend à San Pedro avec Léon et sa famille.

Philippe : bien ! je suis en haut.

 

Il est monté avec le petit. Les soirs quand il rentrait, il s’en occupait tout seul me donnant le temps de souffler un peu. Nous n’avons pas de servante mais seulement un gardien. Travaillant depuis la maison, je ne trouvais pas ça utile d’engager une servante ou une nounou. De plus ce sont des personnes qui ne tardaient pas à exposer votre vie privée à qui voudrait bien entendre. J’ai moi aussi regagné ma chambre. J’avais hâte de me retrouver avec Philippe en weekend. Nous serions avec des gens alors il y aura forcément des moments tendres entre nous…des échanges qui ne seront pas froids. Il n’y avait qu’en public que mon mari se comportait comme un mari et moi je me sentais être sa femme.il voulait sauver les apparences alors j’en profitais moi aussi.

 

{Le week-end}

 

Léon : qu’est-ce que vous êtes belle madame Fadiga.  

Moi (flattée) : merci Léon

Philippe : c’est moi le chanceux puisque c’est ma femme.

Léon : on sait que c’est ta femme Philippe ! personne ne va te le prendre.

Philippe : je marque juste mon terrain !

 

Je souriais comme la femme la plus heureuse au monde. En ce moment précis j’étais heureuse. Les mots de mon mari étaient du miel sur mes lèvres. Du miel dont je souhaitais m’enivrer encore et encore. J’aurais aimé que ces mots viennent de son cœur. Je savais pertinemment qu’il le faisait pour l’apparence. Pour que les autres pensent que notre amour existait encore. Je ne comprenais pas pourquoi il était tant à cheval sur les apparences. Je m’en foutais moi des apparences. Tout ce que je voulais était que mon mari soit entier avec moi. Je voulais avoir celui que j’avais épousé.

Si seulement je pouvais communiquer avec lui ! si seulement ! depuis tout petite, prendre la parole avait toujours été un souci pour moi. Mes parents avaient plusieurs fois été convoqués à ce sujet. Mes notes étaient excellentes mais ma participation au cours catastrophique. Ils avaient tout essayé mais j’étais ainsi. Une grande gène s’emparait de moi chaque fois que j’essayais de prendre la parole. Plusieurs fois lors de mes exposés en classe, j’avais failli m’évanouir. Pour palier à cela j’étais très démonstrative et tactile. J’étais toujours celle qui faisait les câlins ou était la première à embrasser son copain. Puis ma carrière d’écrivain m’a permis de m’ouvrir un tout petit peu lors des interviews ou des journées dédicaces. Il fallait bien que je parle. Cependant parler de ce qui me touchait vraiment, de mes sentiments était beaucoup plus difficile.

 

Moi (regardant Line) : ça pousse hein !

Line (se caressant le ventre) : eh oui ! juste cinq mois et j’ai le ventre aussi gros. Je sais que cette canaille va me laisser beaucoup de traces.

Moi : je viendrai te chercher pour des séances de sport.

Line : je te suivrai avec bon cœur.

 

Line et Léon avaient déjà deux enfants. Ils attendaient leur troisième. Je ne me sentais pas capable de ça ! je ne pouvais pas sacrifier mon corps autant de fois et devoir souffrir par le sport encore une fois. La côtière étant dans un état presqu’impraticable, nous avons préféré prendre l’avion jusqu’à Sam Pedro. Trente minutes de vol, ce n’était pas bien long et Line pourrait supporter aisément. Philippe a fini de faire descendre nos affaires du coffre et a passé ma main autour de ma hanche.

Philippe : on peut y aller madame Fadiga

Moi (sursautant de surprise) : ok

 

…Missiba Fadiga…

 

Entendre mon réveil sonner chaque matin est un supplice. Tous les jours je devais me lever à 6h45 pour me tenir prêt afin d’arriver à l’heure à ce foutu stage. « Il est essentiel que vous soyez à l’heure tous les jours », c’est ce que mon superviseur m’avait dit lors de la première rencontre. Mon père avait fini par obtenir ce qu’il voulait de moi, c’est-à-dire, me bouger et obtenir ce stage. Heureusement que j’avais maman et ses connections. C’était elle qui avait réussi à me dégoter un stage en un rien de temps. Que serais-je sans elle ?

Je me levais malgré moi en remettant toute ma vie en cause tant je manquais de sommeil. J’avais juste envie de me tirer d’ici et continuer ma vie tranquillement aux États-Unis. Pendant que j’étais sur les toilettes à évacuer ce que j’avais ingurgité hier, je répondais aux messages que m’avait laissé Audrey. Il me fallait trouver des mots doux pour que madame soit satisfaite et se sente aimée au réveil. Bref, j’ai pris cette douche. J’étais prêt rapidement afin de pouvoir prendre mon petit déjeuner et ne pas arriver au stage en retard.

 

Maman : ça va mon chéri ?

Moi (l’embrassant) : bonjour maman ! je vais bien merci et toi ?

Maman : pareil ! je t’ai fait moi-même ton petit déjeuner. Il faut prendre des forces mon poussin.

Moi : c’est pour ça que je t’aime la dame de mon cœur !

Maman : flatteur !

 

Je souhaitais à tous une mère comme la mienne. Sur cette table il y avait tout ce que j’aimais. Elle prenait soin de moi comme si j’étais toujours un gamin pourtant j’avais 25 ans. J’ai tout mangé et avant de partir, elle me remit la somme de dix mille francs pour mon transport et la nourriture. Elle faisait ça chaque matin et comme c’était impossible de finir dix mille en une seule journée et bien j’économisais du mieux que je le pouvais. Monsieur Fadiga avait dit de me débrouiller comme les autres. C’est-à-dire que je n’avais plus droit au chauffeur. Tous mes déplacements se faisaient en taxi et c’était irritant de devoir à chaque fois m’asseoir sur ces fauteuils crasseux. Encore heureux que ce ne soit pas les transports en commun sinon j’en mourais. Il voulait me pousser dans mes retranchements mais je n’allais pas du tout céder.

 

« C’est toi le nouveau stagiaire ? »

Moi (regardant dans tous les sens) : c’est à moi que vous parlez monsieur ?

Lui : à qui d’autre voudrais-tu que je m’adresse ? tiens ça ! il faut en faire quinze photocopies pour la réunion qui arrive. Quand tout le monde sera là, tu nous fais des tasses de café et tu rapportes tout ça.

Je soufflais pour me calmer. C’est tout ce que je faisais depuis trois semaines que j’étais ici. Faire des copies à n’en point finir. Aucune formation à proprement dit. Je ne voyais pas en quoi ce stage apporterait à mes connaissances car ma filière même restait méconnue et peu exploiter dans ce pays.

C’était l’une des raisons pour lesquelles j’avais choisi de faire mon master en Data Science. La demande était forte à l’étranger et forcement j’allais avoir un travail là-bas. Mon objectif était de rester à l’étranger. Peu importe le pays mais pas la Cote d’Ivoire. Ce pays était juste bon pour les vacances. J’ai fini par faire toutes ces copies et ces tasses de café. Je me demandais même si ce monsieur qui m’avait adressé la parole avait un diplôme de la qualité de mon bachelor.

Tant qu’il n’y avait pas de photocopies à faire, je restais sur mon téléphone à échanger avec mes amis jusqu’à ce que l’heure de la descente arrive. Je suis parti de là comme si j’avais le diable à mes trousses. J’ai encore pris un taxi jusqu’à chez moi. Il me déposa juste devant mon portail.

 

« Missiba ? »

Moi (me retournant) : Coria ? qu’est-ce que tu fais la ?

Coria : je suis venue te voir. Tu as dit que tu allais me rappeler mais tu ne l’as pas fait. Je suis arrivée on m’a dit que tu n’étais pas là donc j’attendais.

Moi(dépassé) : j’ai dit que j’allais t’appeler mais je n’ai même pas eu du temps pour poser la tête. Je vais le faire.

Coria : d’accord il faut lancer mon numéro tout de suite.

Moi : comment ça ?

Coria : je t’ai donné mon numéro tu as enregistré non ?

Moi : bien sûr !

Coria : donc appelle moi là maintenant.

 

Je n’aurais jamais dû venir avec cette fille chez moi. Voilà qu’elle se mettait à me poursuivre. Pourquoi n’avais-je pas pensé à me rendre dans une résidence. Ça aurait été ni vu ni connu. Pourquoi n’avais-je pas réfléchi à ça. Depuis je fouillais dans mon téléphone comme si je cherchais son numéro sachant très bien que je ne l’avais pas du tout enregistré. Je ne comptais plus la voir de toutes les façons.

 

Moi (me frappant le front) : que je suis bête ! j’ai ton numéro dans mon deuxième téléphone.

Coria (me regardant de façon condescendante) : d’accord ! il faut donc me donner ton numéro je vais t’appeler. Comme ça tu auras aussi mon numéro dans ce téléphone.

 

Etant coincé, je dû lui remettre mon numéro pour qu’elle fasse ce dont elle avait envie. Elle m’a fait enregistrer son numéro de téléphone sous ses yeux. Elle m’avait bien eu en tout cas.

 

Coria : j’attends un appel ou un message de toi ce soir. Si tu pensais monter sur moi et disparaitre sache que ça ne marche pas du tout avec moi. Tu vas assumer jusqu’au bout. J’étais tranquillement en train de danser. Je ne t’ai pas appelé. De ton propre chef tu es venu donc ne me fatigue pas. Donne-moi l’argent pour mon retour.

 

Aucun mot ne sorti de ma bouche tant la situation me dépassait. Missiba ! dans quoi étais-tu allé te mettre. Tranquillement, je sortis le billet de dix mille que maman m’avait tendu ce matin. Elle prit le tout et s’en alla. Je restais longtemps debout à me demander ce qui venait de se passer. Les filles d’Abidjan étaient devenues autre choses. On ne pouvait plus s’amuser tranquillement ? il a fallu que je tombe sur une folle. J’ai fini par rejoindre la maison. Comme ce matin, je trouvais ma mère là.

 

Moi : oh tu es déjà de retour ?

Maman : oui c’est moi qui ai dit à cette fille que tu n’étais pas là. Qui est-elle ?

Moi : une amie maman ! bon je vais me débarbouiller.

Maman : reviens ici immédiatement Missiba.

Moi (agacé) : quoi encore ?

Maman : ce n’est pas la fille avec qui ton père t’a surpris à 6 heures du matin, vous faufilant comme des voleurs ? écoute moi très bien. Il faut savoir ce que tu fais ! je ne veux pas que la honte tombe dans ma vie à cause de toi.  Il faut savoir marcher…il faut savoir te comporter. Tu es ici pour les vacances, pour ton stage. Concentre-toi sur ça et rentre retrouver Audrey. Tu as compris ?

Moi : oui j’ai compris.

Maman : hum !

Moi : je peux m’en aller maintenant ?

Maman : vas-y

 

Déjà que cette journée avait été épuisante, il fallait que ma mère en rajoute à cause de cette fille qui m’était insignifiante. Je me suis assis sur le rebord de mon lit pour retirer mes chaussures. Sans me déshabiller, je me suis couché sur le lit pour récupérer un peu. J’avais mon téléphone en main quand j’ai reçu un message de Coria. Cette fille ne lâchait rien ! 

 

« Je suis bien arrivée. Bisous »

 

Je me redressais immédiatement pour lui écrire sa réponse.

 

« Écoute Coria ! il faut savoir que je t’ai abordée parce que j’avais juste envie de me vider les couilles ce soir-là et c’est tombé sur toi. Je ne suis pas à la recherche d’une relation sérieuse car j’en ai déjà une qui date et à laquelle je ne mettrai pas fin. S’il te plait arrête avec tes messages et que ce soit la première et la dernière fois que tu débarques chez moi sans y avoir été invitée au préalable. Aussi efface mon numéro. J’en ferai de même. Bonne soirée. »

 

Je crois que cette réponse avait su calmer cette fille car aucun autre message venant d’elle n’avait été signalé sur mon téléphone. Sauf qu’après avoir mangé en famille et lorsque j’étais prêt à fermer les yeux, la lumière de mon iPhone s’est activée avec une notification. Un message de Coria.

 

« Tu as une copine en quoi ça me concerne ? c’est à ton niveau et non au mien. Il y a un programme ce samedi à Assinie. Ose refuser et je ne vais pas me gêner pour atterrir chez toi sans y avoir été invitée. Dors bien chéri. A demain »

 

J’étais tombé sur une psychopathe. Que quelqu’un me vienne en aide s’il vous plait.

 

… …

 

Lorsque le samedi a pointé du nez, j’avais été tenté de fermer mon téléphone pour ne pas qu’elle puisse me joindre. Il faut dire que de mardi jusqu’à vendredi elle n’avait pas essayé de me joindre mais je m’attendais à tout venant de cette folle. Je me souvins de son dernier message disant que si elle ne me voyait pas, elle débarquerait ici encore une fois. En ce moment j’évitais tout problème avec monsieur mon père donc je me devais d’empêcher toute situation qui pourrait me le mettre à dos. Depuis sept heures que j’étais réveillé, je n’étais pas encore sorti de ma chambre. Mon père n’avait sans doute pas fini de prendre son petit déjeuner. Je ne voulais pas me retrouver à table avec lui.

J’ai sursauté lorsque mon téléphone s’est mis à sonner, pensant qu’il s’agissait de cette folle mais c’était un numéro qui ne faisait pas partie de mes contacts enregistrés.

 

Moi : oui allo ?

« Il faut sortir je suis devant chez toi »

Moi : c’est qui ?

« Coria. Prends une culotte pour nager et aussi une serviette…enfin tout le nécessaire »

Moi : tu penses vraiment que je vais suivre une personne comme toi. Tu devrais être à l’asile au lieu de te promener avec des gens normaux qui ne savent pas de quoi tu es capable.

Coria : tu as fini ? tu sors où je sonne ?

Moi : merde ! merde ! tu m’emmerdes !

Coria : ok si je ne te vois pas dans dix minutes je sonne à ta porte.

 

Elle avait un sacré culot tout de même. Je me suis juste changé et ai pris mon téléphone avec moi. C’est elle qui savait comment on allait à Assinie non ? j’ai fait exprès de laisser mon porte-monnaie. Elle allait payer tout aujourd’hui ou bien nous allions laver les assiettes. Comment même allions nous arriver jusque-là-bas ? avec quelle voiture ? c’est le taxi qu’elle va louer ? je suis sorti de la maison en faisant attention que mon père ne me voit pas. Je n’ai même pas pu voir maman. Je lui laisserai un message. Je me suis arrêté devant mais ne voyait pas la folle. Je l’ai immédiatement rappelée.

 

Moi : tu es où ?

Coria/la folle : mais devant chez toi !

Moi : tu vas arrêter de jouer avec mes nerfs ? je ne te vois pas

Ping ping !

 

J’ai vu une BMW X3 bleu venir en marche arrière jusqu’à mon niveau. Je ne comprenais rien jusqu’à ce que la vitre se baisse et que Coria au volant me demande de monter.

 

Moi (dépassé) : ou est-ce que tu as pris cette voiture ?

Coria : tu penses que tu es le seul à être riche dans ce pays ? mets ta ceinture.

 

Elle a démarré à vive allure. La folle conduisait comme un homme. J’étais encore sur le cul moi. Je pensais avoir affaire à une petite, or nous risquons de jouer dans la même catégorie. Et dure que je pensais avoir marqué des points en la faisant monter dans la range de mon père ! j’ai fait un message à Melaine pour lui demander le prix de cette voiture.

 

Melaine : 28 millions cinq cents.

 

…Audrey Yapo…

 

Haley : comment tu trouves ça ?

Moi : oh là là ce n’est pas trop osé ça ?

Haley : il faut bien qu’il soit marqué ou pas ? tu penses que les petites d’Abidjan se sont amusées avec lui ? il faut toi aussi marquer ton territoire.

Moi (morte de rire) : arrête de raconter des bêtises. Mon type se réveille matin, il va à son stage et on passe tout le reste de sa soirée au téléphone

Haley : d’accord blanche neige.

 

Je levais les yeux au ciel en riant. Haley était de celles qui n’avaient plus du tout confiance en un homme. Elle disait qu’ils étaient capables du pire. En même temps elle n’était tombée que sur des cancres. Missiba venait d’une bonne famille et était respectueux. Jamais il ne me ferait de coups tordus. Il rentrait dans peu de temps alors je m’approvisionnais lol. J’étais dans ce magasin coquin parce que je comptais lui préparer un accueil digne de ce nom. J’ai pris la tenue que Haley m’avait montrée et que j’avais traité de trop osée puis nous nous sommes dirigées vers la caissière.

  

Elle : nous avons des nouveautés dans le rayon lubrifiant. Si vous le souhaitez je peux vous en montrer quelques-uns.

 

Haley : mais bien sûr ! Si c’est tentant j’en prendrai bien moi.

 

Moi : Pourrie gâtée !

 

Haley (me tirant la langue) : ça ne fait rien 

  

C’est en souriant que la caissière est partie prendre ces nouveautés dont elle parlait. Il y en avait même au chocolat. Une histoire qu’on pouvait faire un massage avec et tout lécher sur le corps de l’autre. Qu’est-ce que les gens n’allaient pas inventer ? En tout cas nous avons pris ce qui nous intéressait avant de quitter la boutique. J’ai déposé mon amie à son boulot et j’ai continué chez moi.

 

J’avais voulu me faire une manucure mais j’attendrai deux jours avant le retour de Missiba. Je me suis couchée dans ma chambre en allumant ma télévision puis j’ai appelé ma mère. On aurait pu se passer des coups de fils au moins dix mille fois dans la journée que nous ne serions pas fatiguées de nous entendre. C’était ma complice et lui parler me faisait un bien fou. En même temps j’étais sa seule fille, obligée de composer avec elle. La télévision se regardait seule puisque j’étais en pleine conversation avec maman par vidéo.

 

Maman : alors où en êtes-vous avec Missiba ?

 

Moi : comment ça ?

 

Maman : est-ce qu’il parle des présentations, du mariage etc.

 

Moi : mais maman il n’a que 25 ans et moi 23. Nous n’allons pas nous marier maintenant. Il ne travaille même pas. Il vient tout juste de commencer son master et on va parler mariage ? même si on se mari c’est pour vivre où ? en famille ? ou bien vivre ici ensemble pendant que vous continuez de nous envoyer de l’argent chaque fin de mois ?

 

Maman : ce n’est pas ce que je dis ! je suis bien consciente que vous êtes encore jeunes et qu’il va vous falloir un certain moment avant de vous établir. Je te parle de sa façon de penser. Est-ce que dans vos discussions tu prends le temps d’analyser ce qu’il te dit ? est-ce qu’il a des projets d’avenir ? est-ce qu’il t’inclue à chaque fois ou bien ne parle qu’a la première personne du singulier ? est-ce qu’il se projette avec toi Audrey ? ça va tout de même faire trois ans que vous êtes ensemble. Il ne faut pas qu’il te gaspille le temps pour rien. Il n’y a rien de plus précieux que le temps. Une fois que s’est passé on ne peut pas rattraper et ça fait mal.

 

Moi : maman il m’inclut dans ses projets ne t’inquiète pas.

 

Maman : sinon qu’il y a deux semaines j’ai croisé madame Amani. Je ne sais pas si tu te souviens toujours d’elle. La femme de tonton Paul.

 

Moi : je m’en souviens très bien.

 

Maman : elle était avec son grand fils Dorian. Oh là là, il a fini ses études et il est rentré travailler pour la B.A.D. Je n’ai pas manqué de les inviter et dans la discussion, lui ai montré ta photo.  J’ai vu dans son regard que ce qu’il voyait l’intéressait alors je lui ai donné ton numéro afin que vous échangiez. Vous étiez amis lorsque vous étiez petits n’est-ce pas ?

Moi : tu as bien dit lorsque nous étions petits maman. Ça va faire combien d’années que je ne l’ai plus revu ou entendu parler de lui et tu te lèves comme ça pour lui donner mon numéro ? c’est quelque chose de personnel. Tu aurais dû me demander mon autorisation avant de le faire. Je ne suis pas du tout contente maman !

Maman : écoute je te rappelle tout de suite. Je dois suivre ce que la servante fait avant qu’elle ne rate la nourriture de ce soir. Bisous !

 

C’est comme ça qu’elle était. Lorsqu’elle était consciente qu’elle m’avait offensée, demander pardon était au-dessus de ses forces. Elle disparaissait et réapparaissait lorsqu’elle savait que j’étais calmée. Je voyais très bien ce qu’elle essayait de faire avec ses questions sur Missiba pour ensuite arriver sur le fils de l’ami de papa. Elle les mettait en concurrence pour me dire que d’un côté j’avais quelqu’un qui était déjà établi et d’un autre une personne avec qui c’est encore incertain. Je ne comprenais plus rien. Ces temps-ci, c’était comme si ma relation avec Missiba la dérangeait au plus haut point. Pourtant c’était elle qui avait insisté pour que je me mette avec lui au départ. On se perdait vite avec ma mère. Un jour elle était au nord et le jour d’après au sud.

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