Chapitre 21

Write by Annabelle Sara


  

Véronique

  

Si je disais que j’avais dormi cette nuit ce serait un mensonge. J’étais soulagée de savoir Paul à la maison, son retour m’apportait une certaine paix, pas seulement vis-à-vis de moi mais surtout par rapport aux enfants qui durant ces dernières semaines avaient posé un nombre incalculable de questions auxquelles je n’avais pas toujours la réponse.

Il était là, mais je sentais que quelque chose n’allait pas. Nous avons dormi dans le même lit et pour la première fois dans ma vie je me suis posée des questions sur ce que cela impliquait réellement. Que ce soit pour moi ou pour lui !

Nous dormons dans le même lit depuis déjà 14 ans et j’ai réussi à cacher tellement de chose sur moi et sur ma véritable nature à mon mari.

J’ai été infidèle et pas comme lui ! Lui il était tombé dans le piège d’une femme dangereuse, moi j’avais décidé consciemment de lui cacher tout un pan de ma vie, de ma sexualité, de ma personnalité. Je ne l’avais pas trompé juste pour le plaisir mais surtout pour qu’il n’ait pas cette partie de moi.

Je ne voulais pas qu’il me possède en entier, alors je lui ai délibérément ôté le droit à la décision, aux choix, à ma loyauté et ma compréhension.

Je refusais de comprendre comment il fonctionnait.

Il n’avait jamais voulu prendre en compte la façon dont sa famille le traitait, pas parce qu’il ne pouvait pas leur tenir tête, je l’ai vu quand il a demandé à sa sœur de sortir de notre maison cette fâcheuse nuit, mais parce qu’il voulait d’une façon ou d’une autre faire parti d’un ensemble. Savoir d’où il vient.

Je l’ai coupé de sa famille, je les ai éloignés et j’ai tout fait pour qu’ils ne puissent pas influencer sa vie et ses choix.

Il voulait être le protecteur de cette famille celui vers qui on se tourne au besoin. Il ne m’a jamais empêché de travailler, il a toujours apporté son soutien et ses encouragements à chacune de mes réalisations. Il n’a jamais cessé de me dire qu’il est fier de moi !

Mon mari a tout donné pour me plaire et consolider notre couple, il l’a fait pas parce qu’il m’aime !

Et comment est-ce que j’ai répondu à cet amour ?

Avec la traitrise, la fourberie, l’orgueil, l’infidélité, tout ça parce que je cherchais la satisfaction de mes envies et de mes désirs. L’argent, le sexe, la liberté !

La liberté ! Je n’ai jamais été dans ce mariage.

Je m’en rendais compte et ça me frappait comme une gifle en pleine face.

Plus je me remettais en question et plus je me sentais m’engouffrer dans des sables mouvants.

Je ne me suis pas comportée comme une épouse mais comme celle qui détient les clés de la vie de Paul en décidant de tout pour lui, de comment il doit respirer, comment il doit penser, exigeant de lui de dire Amen à tout ce que je désirerais.

Je n’avais même pas été émue par l’idée qu’il puisse avoir un enfant avec une autre femme, c’est dire le degré de mon égo.

Sans m’en rendre compte des larmes se mirent à couler de mon visage.

Cette fois ce n’était pas parce que j’avais peur de me retrouver seule, mais parce que je savais que j’allais me retrouver seule.

Je me demandais juste combien de temps ça allait lui prendre à me percer à jour. Dans combien de temps il allait comprendre que je n’étais vraiment pas une épouse ? Il doutait déjà de ma loyauté combien de temps cela prendra pour qu’il comprenne qu’il était même loin du compte ?

J’ai réfléchi toute la nuit à la meilleure façon de rattraper cette situation. Existait-il une option de repentance, une façon de faire amende honorable ? Je ne voyais aucune issue.

A l’aube, l’ai personnellement reconduis Mama Josiane là où elle avait elle-même décidé de s’installer. Nous étions toutes les deux dans le véhicule, silencieuses, chacune de nous avait les yeux rivés sur la route. Je ne savais pas ce que je pouvais lui dire, j’avais le sentiment d’avoir usé de la position qu’elle me donnait dans la vie de son fils pour pousser le ballon trop fort.

-         Si tu veux sauver ton couple tu vas devoir faire un choix entre les envies primaires et la construction d’un avenir à long terme avec Paul ! Vous êtes jeunes vous pouvez reprendre votre relation sur de bonne base.

Elle avait parlé avec calme et je savais exactement de quoi elle parlait.

-          Je n’ai jamais cherché à lui nuire…

-         Mais tu n’as pas non plus mis ses intérêts en avant ! Je n’ai jamais rien dit parce que ce n’était pas mon rôle, j’étais là pour prendre soin de mon fils ce que sa femme faisait en dehors de son couple… je ne voulais pas m’en mêler…

Elle s’arrêta un moment et se tourna vers moi.

-         Mais Véronique ce que tu as fait de mon fils ces dernières années, dit-elle le visage endolori. Aucune mère digne de ce nom ne l’aurait supporté ! Paul était faible déjà parce que cette famille l’a diminué… mais toi tu en as fait une larve ! Un moins que rien ! Et si je n’ai rien dit… si je me suis retenue de te faire ce que j’ai fait à tout ceux qui ont fait du mal à mon bébé c’est parce que j’ai vu qu’il t’aimait !

-         Ma’a…

-         S’il t’était arrivé quoi que ce soit il ne l’aurait pas supporté ! Il n’y aurait surement pas survécu !

-         Je ne voulais pas lui faire du mal !, ai-je répété.

-         Tu peux te dire cela ! Mais celle à qui tu ne voulais pas faire du mal, celle que tu as mis avant tout le reste c’est toi-même ! Je ne sais pas ce qui t’a rendu ainsi… Imperméable ! Mais je te le dis de connaissance de cause… ça va causer ta perte !

J’avais cette voix dans ma tête qui me disait qu’elle avait raison et que je devrais être assez honnête pour reconnaitre que je me protégeais d’abord avant de protéger ma famille.

Elle respira bruyamment pendant que je me garais devant le portail de sa nouvelle demeure.

Elle avait les larmes aux yeux.

Je ne savais pas quoi dire !

-         Je ne sais pas ce qui va se passer, mais tu dois tenir ta promesse et continuer de protéger mon fils… Même si cela implique le protéger de toi !

J’ai agrippé le volant pour maitriser le subit tremblement de mes mains. Je savais exactement ce qu’elle voulait dire par là. Elle m’avait donné la permission de vivre comme je le voulais et aujourd’hui elle trouvait qu’elle avait fait un mauvais choix en me donnant autant de liberté avec son fils.

Elle venait donc de me libérer de ma promesse d’une manière… ou me le rappelait-elle ?

Protéger son fils en lui rendant sa liberté !

Sans un mot de plus elle ouvrit la portière et me laissa plantée là, le regard perdu et l’esprit en pleine tourmente. Je savais que si je chargeais assez bien Paul il se résignerait et toute cette histoire ne serait que du passé pour nous. Mais sur quelle base allions nous reconstruire si nous continuons à vivre dans le mensonge et la tromperie ?

Toutes ces choses était dans ma tête jusqu’au moment où je suis retourné chez moi !

Trop de chose traversait mon esprit et ce n’était pas facile pour moi d’y voir clair, à peine j’ai traversé le pas de la porte que ce sentiment d’insécurité traversa mon corps.

Il se passe quelque chose ici !

La maison était calme et aucun enfant ne jouait ni ne parlait, ce qui était bizarre pour un samedi matin, je suis entrée dans la salle de séjour et je suis tombée sur mon pire cauchemar. Les choses que je pensais bien enfouies, gardées et inaccessibles avaient refaits surface et je sentais la vie quitter doucement mon corps.

-         Bonjour Miss Véro, fit Oluwa.

Il avait toujours son sourire, ce sourire qui vous faisait oublier votre nom, encore plus séduisant et enjôleur que d’habitude.

Si je ne l’avais pas trouvé avec une arme à la main, braquant mes enfants et mon époux attachés, j’aurais imaginé qu’il était là parce que je lui manquais et qu’il nourrissait une sorte d’obsession pour moi.

-         Qu’est-ce que… que fais tu ici ?, lui ai-je demandé avec un léger tremblement dans la voix.

J’avais peur ! Je ne savais pas ce qui allait se produire.

Il  leva son arme et se tapota une tempe avec le bout du canon de son pistolet automatique, le cran était en place, pour le moment.

-         J’ai pensé qu’il était temps de faire une petite réunion…

-         Ma famille n’a rien à voir avec tout ça… s’il te plait !, lui ai-je répondu. Si tu as quelque chose contre moi, on peut en parler… Mais libère mes enfants !

J’ai jeté un œil vers Elodie et son frère, mon cœur fit un raté !

Je ne savais pas quelles étaient mes options, je me retrouvais face à la preuve que je n’avais pas été loyale à Paul et je me demandais comment j’allais pouvoir sauver notre mariage après ce qui va se passer maintenant.

-         Oh tu t’inquiètes pour tes enfants ? Ils sont mignons je dois avouer ! C’est triste qu’ils aient une mère comme toi…

-         Qu’est-ce que tu veux… Je peux te donner de l’argent…

-         Tu vois le problème avec toi c’est que rien n’a de la valeur à tes yeux que si c’est quantifiable et banquable !

Son regard était fou mais sa voix toujours aussi sexy avec son accent.

-         De quoi tu parles ?, ai-je demandé.

Mon mari faisait les gros yeux comme pour me demander de m’en aller ou d’appeler de l’aide, je lisais la terreur dans les yeux de mes enfants en particulier de mon fils qui pleurait.

-         Chéri calme toi !, lui ai-je dis. Calmez-vous…

-         Tu vois tes enfants ont peur ! Ce qui est un sentiment normal quand un homme débarque chez toi avec une arme, menaçant de te tuer alors que tu es attaché et bâillonné ! Alors Paul, posez vous la question, pourquoi est-ce que votre femme ne panique pas plus que ça ? Pourquoi elle n’est pas complètement déboussolée… En larmes, suppliant pour que je vous détache…

Mon regard croisa celui de Paul, les carottes étaient cuites, là elles sont bonnes pour une purée.

-         Tu leur dis pourquoi me voir ne te cause pas plus d’émotion ou tu préfères que je m’en charge…

J’ai répondu par réflexe d’autoprotection :

-         Stop ! Arrêtes ce jeu malsain et dis-moi ce que tu fais…

Il éclata de rire !

-         Mais si tu veux que je t’explique ce que je fais il faut bien que je leur dise dans quelle circonstance nous nous sommes rencontrés ! Paul vous voulez savoir ?

-         Oluwa…

-         Tata Miriam ! Je suis certain qu’elle vous a dit qu’elle ne connait pas cette Tata Miriam Paul, poursuivit-il.

La lueur dans les yeux de mon mari aurait pu me tuer sur place.

-         La réalité mon cher Paul, c’est que votre femme était bien plus qu’une simple petite protégée de Tata Miriam, elle était sa préférée, celle a qui elle confiait les meilleurs partis… Celle qui avait droit au meilleur morceau…

-         Il y a mes enfants ici Oluwa !, ai-je coupé. Laisses les partir et tu pourras me dire quel est ton problème.

-         Parce que tu penses que je suis celui qui a un problème ?

Il parlait en me braquant avec son arme, c’était encore mieux que de le pointé vers mes gosses.

-         Alors explique-moi à quoi toute cette histoire rime… Comment je peux arranger la situation ? S’il te plait laisse-moi mettre mes enfants à l’abri…

-         De quoi ? Tu crois que je suis un danger pour ta famille parce que je porte une arme ? Dis-moi à cause de qui est-ce qu’un fou armé se retrouve aujourd’hui dans ta maison ? Parle !

Il avait crié tellement fort que j’ai sursauté.

-         Moi !

-         Comment ?, fit-il l’arme à l’oreille.

-         A cause de moi !

-         Et tu ne t’aies jamais dis que tu es le danger pour ces gens ? Qui vivent avec toi, t’aime et te respect mais n’ont pas une seule petite idée de qui tu es en réalité ?

Mon regard croisa une fois de plus celui de Paul, j’y lisais une seule question à laquelle j’avais peur de répondre.

-         Tu veux que leur dire ou bien tu préfères que j’en parle moi ?

Je ne voulais pas qu’il dise un mot de plus, mais il n’écouterait pas mes supplications.

-         Okay je vais leur dire !

Je me suis tournée vers Paul, avec la supplication qu’il me garde près de lui après ce qu’il allait entendre aujourd’hui, dans mon regard. Je priais intérieurement pour qu’il lissait dans mes yeux et voit la place qu’il avait dans ma vie et dans mon cœur.

-         Miss Véro est le genre de femme assoiffée d’argent et de pouvoir qui va séduire un homme le mettre dans son lit… pour mieux le spolier et le laisser à la rue sans aucun remord !

Mes oreilles ont sifflés et je me suis tournée vers Oluwa qui avait un regard fou et son arme pointant droit sur ma tête, une tête qui ne comprenait plus ce qui se passait.

 

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