
Chapitre 21
Write by Josephine54
Arthur
Flash-back
Je réalisai à cet instant que si j’entrais dans ce bar, c’était la fin, non, plutôt le début d’un cauchemar.
Je m’étais alors enfui à et avais couru aussi vite que mes jambes et mon souffle me le permettaient. J’arrivai à la maison dans un état d’agitation extrême. Heureusement pour moi, maman était déjà endormie, elle aurait immédiatement compris que quelque chose n’allait pas.
J’entrai dans ma chambre et me couchai sur mon lit le cœur battant. Je n’avais ni enlevé mes vêtements ni ôté mes chaussures.
Mon Dieu, que faire ? Et si mes amis craignaient que je ne les trahisse et ne décident de me la boucler à jamais ? J'étais au courant, pardon, j'avais participé à certains de leurs coups, et je savais exactement où se trouvait leur Q.G. Mon cœur à ce moment accéléra sa course dans sa poitrine. J'avais l'impression que les battements de mon cœur faisaient écho dans toute la chambre. Je n’avais plus rien à faire ici. Il valait mieux que je m’éloigne.
Je regardai les aiguilles de ma montre progresser lentement jusqu'au petit matin. Je me levai du lit de manière résolue et me saisis de ma valise. J’y lançai pêle-mêle mes vêtements et me recouchai sur le lit.
Il était à peine trois heures du matin et je comptais me rendre à la gare dès six heures. Ma décision était prise, j'allais à Yaoundé.
Aux environs de 4 h, j’entendis la porte de la chambre de maman grincer. Elle se levait généralement tôt le matin pour préparer le haricot, la bouillie et la pâte des beignets qu’elle aurait frits en matinée.
J’espérais du fond du cœur que les gars ne se pointeraient pas chez moi dans le but de m'intimider. À 6 h tapantes, je me levai du lit, saisis ma valise, pris l'enveloppe que maman m'avait remise il y a quelques semaines et sortis de la chambre.
J’entendis soudainement le bruit des ustensiles à la cuisine, signe que maman s’y trouvait encore.
- Maman, je vais à Yaoundé aujourd’hui même, lançai-je d'un ton résolu.
- Dieu merci, s'était écriée maman en joignant les mains en signe de prière. Attend une minute que je me change pour t'accompagner à la station de bus.
- Mais maman ! Et tes beignets ?
- Ça peut attendre.
J'étais sorti de la maison et n'avais pu m'empêcher de lorgner à gauche et à droite, de crainte de voir les gars apparaitre. Je surpris à plusieurs reprises le regard méfiant de maman sur moi.
On arriva à la gare des bus vers 7 heures et j'achetai immédiatement mon ticket.
- Fais un bon voyage, mon fils, et surtout, sois sage. Je ne sais pas ce qui t'a poussé à enfin partir pour Yaoundé, mais je remercie le ciel pour cela. Prends tes études au sérieux, et tu ne le regretteras pas.
- Promis maman, répondis-je d'un ton solennel.
Fin du flach-back
Je sortis lentement de mes pensées et reportai mon regard sur Beverly et son frère. Beverly me regardait comme si elle me voyait pour la première fois dans sa vie.
- Voilà la raison de mon départ précipité de Douala et mon installation à Yaoundé, dis-je en regardant Beverly dans les yeux.
Un lourd silence chargé de tension s'installa à notre table. Elle avait essayé à plusieurs reprises de comprendre le motif de mon installation à Yaoundé, vu que Douala regorgeait de nombreuses universités. J'avais toujours préféré rester évasif, même si, au fond de moi, j'avais simplement peur que son regard envers moi ne change, comme c'était le cas maintenant.
La dégoûtais-je ? Je me dégoûtais déjà moi-même pour mes actes du passé. J'avais tout pour moi : un grand frère aimant et responsable, prêt à tout pour que je m'assagisse et que je réussisse. Quand je regardais la vie de Beverly, j'étais encore plus conscient des sacrifices de Gérard.
J'avais profité de la confession de Beverly par rapport à son frère pour lui raconter mon passé. Je ne sais pas si j'aurais vraiment eu le courage de le faire dans d'autres circonstances. J'espérais sa clémence et surtout, qu'elle me verrait à travers l'expérience de son petit frère comme une personne qui avait commis des erreurs, mais avait finalement trouvé son chemin.
Je tournai ensuite le regard vers Arnaud.
- Tu sais, Arnaud, je viens d'une famille pauvre, comme la vôtre. Il est parfois facile d'envier les autres parce que nous n'avons pas certaines choses qu'ils ont. Nous ne savons pas toujours ce qu'ils font pour les obtenir. Certains aussi ont des choses parce qu'ils proviennent d'une famille aisée. Tu sais, nous n'avons pas tous le même destin. Nous n'avons pas tous les mêmes chances. Il faut accepter ce que nous sommes et apprécier ce que nous avons. Je remercie encore le ciel aujourd'hui de ne pas être entré dans ce bar à leur suite ce fameux jour.
Roman écrit par Justine Laure (page Facebook Plume de Justine Laure)
Je pris mon souffle un bref moment.
- Sais-tu ce que sont devenus mes amis aujourd'hui ? demandai-je d'une voix grave. Ils sont tous en prison. Ils avaient braqué un autre bar après celui de Monsieur Fotso, un voisin au quartier, et, malheureusement, un client avait perdu la vie. Les enquêtes avaient commencé, et la police était très rapidement remontée à eux. Elle avait fait une descente dans le quartier et les avait appréhendés. Un seul avait réussi à s'échapper, mais il a, lui aussi, été pris. Veux-tu une telle vie ? Tu sais, ce chemin-là n'a pas d'issue. Il n'apporte rien de bon à toi et juste du désespoir à vos victimes. Tu es encore jeune. Tu as une grande sœur qui est prête à tous les sacrifices pour vous. Concentre-toi sur tes études. Remercie-la en ramenant de bonnes notes.
- J'ai compris. Merci beaucoup.
Un autre long silence s'imposa. Je cherchai à plusieurs reprises Beverly du regard, mais elle évitait soigneusement mes yeux. Je sentis une morsure au niveau de ma poitrine.
- Euh... euh... on doit y aller. De toute façon, tu devrais commencer le travail d'un moment à l'autre, dit-elle, toujours en évitant mon regard.
- Merci Arthur, et à la prochaine, lança Arnaud.
Ils sortirent du local, me laissant seul face à mon désespoir. La boisson que nous avions commandée était encore là, intacte...
Je posai avec accablement ma tête sur la table du bar et sentis tout à coup mes yeux picoter. Sans surprise, je vis une goutte d'eau tomber à même le sol. Je ne tins pas longtemps et éclatai en sanglots.
Je pris un mouchoir de ma poche et essayai mes larmes de manière discrète. Je me levai ensuite et me rendis au bar pour régler la note. Nous n'avions certes rien consommé, mais les boissons avaient été ouvertes.
Je sortis du bar et me rendis à la boulangerie pour commencer mon tour de service. Je travaillai comme une âme en peine, et lorsque la fin de mon service arriva, je pus enfin rentrer chez moi pour exprimer mon désespoir sans la moindre réserve.
Je me couchai sur mon lit et mes pensées me portèrent immédiatement vers les expressions que Beverly avait eues aujourd'hui. Elle était une personne pure, droite, intègre et j'avais peur qu'elle ne soit en mesure de m'accepter moi, avec mon passé.
Je sentis une espèce de déchirure dans ma poitrine. Comment pourrais-je vivre sans elle ? Elle représentait tellement pour moi. Elle était comme une sorte de modèle pour son sens du devoir, des responsabilités, son amour du travail. J'avais décidé de chercher un boulot pour me sentir à sa hauteur. Me connaissant, je me serais bien contenté des pauvres sous que m'envoyait mon frère chaque mois.
J'espérais qu'elle se soit rendue compte que je n'étais plus cet homme, grâce à elle...
Je ne pus résister plus longtemps et décidai de lui envoyer un message. J'avais besoin d'être situé.
" Es-tu déçue ?"
Mon cœur se mit à battre très vite quand je me rendis compte qu'elle était en ligne. Cela mit quelques secondes et sa réponse tomba, comme un couperet.
"Oui"
Mon Dieu, quelle réponse sèche et tranchante.
Je restai un long moment à fixer le téléphone et me décidai enfin à lui dire ce que j'ai sur le cœur.
" Chérie, je ne sais pas si mettre tout sur le compte de la jeunesse est une excuse. Je te comprends parfaitement, mais sache que je suis encore plus déçu de moi-même. Je regrette tellement mes actes du passé et je remercie le ciel de m'être ressaisi à temps. Pas que je sous-estime l'ampleur de mes actes, loin de là, mais je sais que ça aurait pu être pire. Je suis venu à Yaoundé dans le but de prendre un nouveau départ et je remercie le ciel de t'avoir mise sur mon chemin. Tu es ma lumière. Tu m'as éclairé du monde des ténèbres dans lequel je me trouvais, jusqu'à ce que je me retrouve sur le droit chemin. J'espère que cette confidence de ma part ne nous éloignera pas, mais plutôt qu'elle resserrera les liens qui nous unissent. Tu es toute ma vie et je ne supporterai pas de te perdre, surtout pour des erreurs que j'ai commises dans le passé et pour lesquelles, j'ai finalement pris conscience. I love you from the moon and back. Je t'aime bébé."
" On en parle demain en fac." répondit-elle simplement.
Je sentis une fois de plus mes yeux picoter quand je vis sa réponse.
Beverly
Les révélations d’Arthur m’avaient plongée dans un état second. J’étais sortie du bar, suivie par Arnaud. Nous n’avions échangé la moindre parole. Chacun semblait perdu dans ses pensées. Je ne savais rien du passé d’Arthur. J'avais néanmoins noté qu'il évitait de parler des raisons de son déménagement à Yaoundé. J’étais loin de me douter que, dans un passé pas si lointain que ça, il avait été un brigand.
Quand il m'avait demandé avoir envie de rencontrer mon frère, j'avais pensé qu'il voulait simplement lui prodiguer des conseils en tant qu'aîné. Je ne m'attendais pas du tout à une telle révélation.
Je me demandais maintenant ce qu'Arnaud pensait de lui. Nous nous rapprochions de la maison et je ne savais comment me comporter. Arnaud accepterait-il d'entrer avec moi ? Les autres trouveront étrange de nous voir arriver ensemble. À l'aller, pour lui éviter de l'embarras, j'avais proposé que l'on se retrouve à quelques pâtés de la maison.
- Tu sais, essaie de penser à tout ce qu'Arthur t'a dit. Je ne veux pas savoir ce que tu fais avec ces gars, mais il faut que tu rejoignes le droit chemin. Nous ne sommes certes pas riches, mais nous avançons comme nous pouvons dans la vie. Je suis là, si tu as besoin de parler, n'hésite pas.
- Merci Beverly, répondit Arnaud.
- Vas-y d'abord, toi, dis-je.
Il hocha simplement la tête et s’élança vers la maison. J'attendis une dizaine de minutes avant d'entrer moi aussi.
- Bonsoir tout le monde, dis-je en entrant.
Maman et Virginie répondirent du bout des lèvres. Seuls les plus petits se levèrent et vinrent en courant se jeter dans mes bras. Ces gamins étaient les seuls pour lesquels je ressentais encore un peu de joie en rentrant à la maison.
- Beverly, Beverly, tu nous as gardé quoi ? demanda Kylian.
- Haha, rien du tout, tu n'as pas été sage.
Roman écrit par Justine Laure (page Facebook Plume de Justine Laure)
- Mais ce n'est pas vrai, répondit-il en voulant pleurer.
- Non, mon bébé, je plaisantais, tiens, dis-je en lui donnant un bonbon.
- Et nous ? s’écrièrent les autres en venant vers moi.
- Haha, un petit bonbon pour vous aussi.
Je me rendis dans notre chambre avec eux dans les jambes. Le reste de la soirée se déroula sans encombre. J'étais maintenant installée dans mon lit, perdue dans mes pensées sombres, quand le message d'Arthur arriva.
J'avais préféré être sincère avec lui. Oui, j'étais déçue. Je ne m'y attendais pas. J'aurais préféré le savoir avant qu'il ne décide à en parler devant mon frère, surtout qu'ils ne se connaissaient pas et ce dernier pouvait avoir une mauvaise opinion de lui.
Je devais admettre que son dernier message m’avait énormément touché. On en parlera plus posément demain en fac.